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Équilibre dans la société : La question du matriarcat en Afrique noire
Publié le jeudi 27 decembre 2012  |  L'express de Bamako




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Il s’agit en fait à l’origine d’une réponse à la question d’un membre que je vous soumets ici : «Tu prétends que l’Afrique noire, d’une manière générale, est Matriarcale. Pourquoi alors est-ce qu’on trouve des peuples patriarcat en Afrique noire ?» La réponse a été tellement longue que j’ai décidé de la mettre sous forme de publication. Alors excusez le ton qui n’est pas impersonnel.
«Alors pour en revenir à la question du matriarcat. Je vais vous parler de la manière la plus honnête possible, quitte à prendre quelques distances avec mon maître à penser Cheikh Anta Diop. Je tiens aussi à préciser que ceci n’est que mon avis et que je suis ouvert au débat. C’est vrai que ce terme «matriarcat» lui-même fait débat. Parce que qu’il est difficile de trouver une société où les femmes détiennent toute l’autorité au détriment des hommes. Le terme matriarcat devra donc lui-même être redéfini à mon avis. Moi je le définirais comme l’équilibre dans la société et dans la famille entre l’homme et la femme. Pour bien comprendre cet équilibre on va comparer avec les peuples indo-européens et sémitiques.
Pour les peuples indo-européens ce qu’on sait de la Grèce antique nous indique clairement qu’il y’avait une domination sans partage de l’homme. Seuls les hommes avaient le droit de prendre part aux discussions publiques. La femme ne pouvait même pas avoir le statut de citoyenne. Il fut un temps même en Grèce antique où les femmes étaient enfermées et surveillées par leur père ou leur mari pour éviter qu’elles ne commettent l’adultère. Toute la mythologie grecque est même là pour te le démontrer.
Les choses ne sont pas mieux dans le monde sémitique. Je te cite l’ancien testament dans Timothée : « Que la femme écoute l`instruction en silence, avec une entière soumission.». «Je ne permets pas à la femme d`enseigner, ni de prendre de l`autorité sur l`homme; mais elle doit demeurer dans le silence. Car Adam a été formé le premier, Eve ensuite». Remarque jusque-là qu’on insiste beaucoup sur la soumission de la femme dans l’ancien testament. Et le nouveau testament ne va rien améliorer à la situation de la femme. Je te cite Saint Paul dans son épitre aux corinthiens: «Comme cela se fait dans toutes les églises des saints, que les femmes se taisent dans les assemblées : elles n’ont pas la permission de parler ; elles doivent rester soumises, comme dit aussi la loi. Si elles désirent s’instruire sur quelque détail, qu’elles interrogent leur mari à la maison. Il n’est pas convenable qu’une femme parle dans les assemblées.» Notons quand même que tout ça à ces époques aussi reculés, n’étaient pas que des textes religieux. C’étaient aussi des lois. Et tout ca reflète la culture des peuples qui les ont écrits.
Si on fouille même dans la cosmogonie biblique il se trouve qu’Adam est apparu avant Eve. Eve la mère de l’humanité selon la bible a été tirée de la cote de l’homme. Dans le coran aussi la Eve (hawa’a) a été crée à partir de la côte d’Adam (Alayhi Salam). Je peux te citer aussi un passage du coran qui parle du statut de la femme dans la société Arabe: «les hommes ont autorité sur les femmes en raison des faveurs qu’Allah accorde à ceux là sur celles-ci et aussi à cause des dépenses qu’ils font pour assurer leur subsistances. Les femmes vertueuses sont obéissantes à leurs maris et protègent ce qui doit être protégé, pendant l’absence de leurs époux avec la protection d’ Allah » sourate 4 verset 34».
Donc jusque-là je t’ai donné des exemples de sociétés réellement patriarcales. Il faut savoir que patriarcat veut dire « autorité détenue par les hommes», le type même par excellence des sociétés indo-européennes et sémitiques. Est-ce qu’on peut trouver le même genre de traditions dans monde negro africain ? Je doute fort. C’est pour ça que je te demandais : « sur quoi te bases-tu pour dire que certains peuples Négro-africains sont patriarcaux ?». Si tu réussis à trouver des traditions pareilles alors on pourra vraiment parler de patriarcat.
Comme je le disais pour moi le matriarcat loin d’être le contraire du patriarcat, c’est-à-dire de «l’autorité détenue par les femmes» serait plutôt «l’autorité répartie avec équilibre entre l’homme et la femme». Le problème en Afrique est que ce pouvoir n’est pas toujours équitablement réparti. Souvent il l’est au profit de la femme ou au profit de l’homme. C’est le cas par exemple chez les mandingues où la femme avait vraiment baucoup de pouvoir : c’était elle qui donnait son nom à l’enfant. Et l’enfant appartenait à la famille de sa mère. Maintenant tu peux trouver des peuples en Afrique où c’est le père qui donne le nom à l’enfant. Je sais par exemple que dans le royaume de Danhomé c’était le roi qui décidait seul de son héritier. C’est comme ça que Gbéhanzin sera désigné roi par son père le roi Glèlè. Ca contraste par exemple avec le matriarcat des yoruba où le roi tire sa légitimité de sa mère ( comme en Egypte ). Mais cela ne veut pas dire que dans le royaume de Danhomé la femme n’avait aucun pouvoir. Voilà ce que j’ai retrouvé sur un site sérieux: «Dans la royauté/chefferie, les femmes n’ont jamais été reléguées au second rang en ce qui concerne la gestion du pouvoir royal. Certaines femmes du palais figurent en bonne place parmi les personnes susceptibles d’affronter avec succès le roi et avaient par conséquent droit de vie et de mort sur lui.»…« Dans le royaume d’Abomey (Danhomey), et dans le domaine de la sphère publique du marché du travail, même si les femmes ne jouaient pas une fonction à dominance productive, marchande, les femmes du palais étaient tenues au courant de toutes les affaires. Elles rendaient compte au roi de tous les évènements et contrôlaient la gestion des ministres mâles. Il s’agissait des corps des amazones, du corps religieux (les prêtresses), le corps médical (doctoresses), les hauts fonctionnaires représentés par les Nae (elles remplaçaient les femmes dignitaires.» Remarque au passage que les femmes peuvent être prêtresse dans le royaume de Danhomey. Ce qui est inimaginable dans les sociétés sémitiques et indo-européennes.
Et puis il y’a un fait capital, très important qui aide à déterminer le statut de la femme dans la société africaine : la cosmogonie : tout est dans la cosmogonie. Alors que dans le coran et dans la bible la femme a été créée à partir de la côte de l’homme, dans aucune cosmogonie africaine tu auras le même schéma. Dans les cosmogonies négro-africaines tu as toujours une apparition simultanée des deux sexes ou un ancêtre primordiale de l’homme et de la femme androgyne. Dieux même est souvent androgyne, les créatures aussi sont androgynes. Tout ça pour expliquer qu’il n’y a aucune suprématie de l’homme sur la femme dans les cosmogonies négro africaines.
Un autre fait qui marque vraiment la différence entre le monde négro africain et le monde sémitique et indo européen c’est la dot. Comme le disait aussi bien Cheikh Anta Diop celui qui paye la dot c’est celui-là qui a le moins de pouvoir. Dans la Grèce et la Rome Antique c’était le père de la future mariée qui payait la dot.
En Afrique ca a toujours été le marié ou la famille du marié. Jamais la femme ou la famille de la femme, peu importe la société negro africaine dans laquelle tu te trouves. C’est ce qui fait que certains disent que nous sommes dans un système matriarcat. Au passage c’est le lieu de souligner que la dot ne sert pas à acheter la femme. Non, loin de là. Il s’agit simplement pour le futur marié de donner une garantie. Et s’il se comporte mal le mariage sera rompu sans qu’il ne puisse être remboursé. Certains objecteront en disant que dans l’Islam aussi l’homme paye la dot. Mais dans l’Islam il paye la dot pour que la femme se soumette à son autorité. Je vais encore citer la sourate 4 verset 24 : « Les hommes ont autorité sur les femmes, en raison des faveurs qu’Allah accorde à ceux-là sur celles-ci, et aussi à cause des dépenses qu’ils font de leurs biens.»
J’aimerai aussi rajouter un autre fait marquant souligné par Cheikh Anta Diop : la transmission de la sorcellerie. Partout en Afrique ou l’on croit à la sorcellerie, on pense généralement que c’est la mère qui transmet le pouvoir à son enfant de se transformer en des créatures animales ou de s’envoler la nuit. Partout en Afrique on pense c’est seulement la mère qui a le pouvoir de transmettre un tel pouvoir. La preuve que instinctivement, pour les africains, c’est la mère qui transmet.

Hotep !

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