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Rapport sur les événements de kidal: les non-dits d’un massacre organisé
Publié le samedi 24 octobre 2015  |  Info Matin
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© AFP par FABIEN OFFNER
Visite de Moussa Mara à Kidal




Par le rapport de la Minusma, nous savons désormais beaucoup sur les douloureux événements de Kidal, survenus les 16 17 et 21 mai 2014, lors de la visite de l’ancien Premier ministre, Moussa Mara, dans cette ville. Mais pas tout : si les enquêteurs retiennent que des administrateurs et autres civils, retranchés au gouvernorat, ont été « délibérément et sommairement tués », on n’en sait rien des commanditaires de ce massacre organisé. Étrange oubli quand on sait que des pyromanes du Mnla sont passés par là. Retour sur un crime de masse…

Selon le rapport de la Minusma, qui circule sous les manteaux, les mouvements regroupés au sein de la CMA ont commis de graves violations des droits de l’homme, lors de ces événements. « Parmi les violations et abus commis conjointement ou isolement par le Mnla, le HCUA et le MAA figurent les exécutions sommaires de huit civils, dont six membres de l’administration malienne, le recrutement et l’utilisation d’enfants, des arrestations et détentions illégales, des traitements cruels, inhumains ou dégradants et de vols et destruction de biens », indique le rapport.
Par ailleurs, l’armée malienne est également accusée d’avoir usé d’armes lourdes de façon disproportionnée et indiscriminée dans la ville de Kidal en direction de zones habitées par les civils. « En utilisant des armes, qui dans une zone urbaine, sont de nature à frapper indistinctement des objectifs militaires et des civils, ainsi que leurs biens, les FAMA ont commis une attaque sans discrimination, contraire au principe de distinction », note le même rapport.
Une chose est certaine : à partir de ce rapport de la Minusma, on sait désormais que des crimes effroyables ont été commis dans cette ville, à travers des indices probants, pouvant être imputés à des individus ; collectivement ou individuellement, dont les responsabilités seront clairement établies dans la commission de ces faits. S’agissant par exemple du cas exécutions sommaires de civils, des arrestations et détentions illégales, des traitements cruels, inhumains et dégradants, tels qu’ils ont été révélés dans le rapport, de nombreux témoignages, après la survenance de ces douloureux évènements, ont pu corroborer d’autres types d’implications dans ces faits criminels, dont on ne retrouve pas forcément dans ledit rapport.
Omission ? Ou absence d’indices ? Il est parait quand même étonnant que les enquêteurs de la Minusma, concernant l’enchainement de certains faits, tels qu’ils sont rapportés dans leur détail, puissent être aussi précis et pointus, et en même temps, totalement ignorants pour d’autres, plus ou moins évoqués par certains rescapés, lesquels sont carrément inexistants dans le rapport en question. L’un de ces faits se rapporte à la présence de responsables du Mnla dans la ville de Kidal, lors de ces tragiques événements, qui, d’après plusieurs témoignages recueillis, ont participé à ces faits. Mieux, ils en étaient les planificateurs et les concepteurs ; ceux par qui les ordres et consignes étaient dispensés et véhiculés entre les différentes composantes de ces mouvements armés.
Illustration ? Selon plusieurs témoins, ayant survécu à la tragédie de Kidal, et qui ont fait des révélations sur leur calvaire, parmi les responsables du Mnla, à l’époque des faits, ayant rencontré les civils, illégalement détenus, il y avait bel et bien un certain Moussa Ag Assarid, ce pyromane, longtemps porte-parole du Mnla. Il a été repéré par plusieurs civils en captivité en compagnie de nombreux autres responsables des mouvements armés.
Identifiable par le turban bleu qu’il arborait, ce jour, ce chef rebelle, déguisé représentant de l’Amnesty International, en poste à Kidal (c’est ce qu’il a déclaré lui-même aux civils en captivité), a reçu, tôt le matin, un groupe de civils, pris en otage par les ravisseurs, pendant plusieurs heures. À en croire aux témoignages cinglants, rapportés à ce sujet, après avoir été détenus par les éléments des mouvements armés, et transportés en différents endroits, avec les yeux bandés, les civils en détention ont reçu la visite de cet homme qui leur a assuré qu’ils seront remis aux autorités de la Minusma et qu’ils n’ont rien à craindre de leur vie. Plusieurs témoignages concordants sur ce triste épisode de détention illégale de civils indiquent clairement qu’après cet entretien avec ce chef rebelle, il a été rapporté aux otages de la nourriture et des couvertures.
De nombreux récits se rapportant à cette rencontre secrète par le chef rebelle, Moussa Ag Assarid, porte-parole du Mnla, déguisé en représentant d’Amnesty International, ont été rapportés dans la presse locale, par diverses sources. Il est aujourd’hui étonnant que le rapport de la Minusma, sur les événements des 16, 17 et 21 mai à Kidal, soit rendu public, croustillant sur d’autres anecdotes troublants vécus dans cette ville, et qu’il soit totalement muet sur la présence des responsables du Mnla, en particulier ce pyromane Moussa Ag assarid, qui ont même rencontré, sous un faux sobriquet de représentant d’Amnesty International, des civils détenus illégalement par des combattants des mouvements armés.
Si les enquêteurs de la Minusma soutiennent, à l’appui de leurs missions d’investigation, qu’ils ont reçu des civiles, en détention, ils auraient dû normalement être en connaissance de ces faits de torture de traitement inhumain et dégradant dont les civils ont été victimes pour ensuite les répertorier dans le rapport, dans des détails bien explicites. Cela n’est pas fait : le rapport de la Minusma, aussi riche en détails concernant certains faits, est étonnement muet sur la présence des chefs rebelles, parmi lesquels le fameux Moussa Ag Assarid, qui, selon plusieurs témoignages recueillis, a semblé participé à cette machine répressive et criminelle des mouvements rebelles qui a écrasé, torturé et maintenu en captivité de nombreux civils, lesquels ne portaient aucune arme sur eux pour se défendre.
Pour la crédibilité de son rapport sur ces douloureux événements vécus à Kidal, la Minusma a toute la latitude de s’intéresser sérieusement à ces faits pour en faire la lumière. C’est en cela qu’elle aidera dans ce dossier à l’établissement des responsabilités individuelles et collectives dans la commission de ces faits.

PAR SÉKOUBA SAMAKÉ
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