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Chronique satirique: le procureur qui déteste la barbe
Publié le mardi 8 decembre 2015  |  Le Procès Verbal
Ouverture
© aBamako.com par A.S
Ouverture de la Cour d’assises de Bamako
Bamako, le 05 octobre 2015 la Cour d’assises de Bamako a ouvert sa séance contre les crimes et délits




Daniel Amagouin Tessougué est un magistrat spécial. Très spécial. Loué pour ses compétences juridiques et son intégrité, il n'en trouve pas moins le moyen de défrayer souvent la chronique. Ainsi, c'est sur sa plainte qu'en 2011, un personnage aussi puissant que le Vérificateur Général Sidi Sosso Diarra, arrière-petit fils du roi Da Monzon (!), est embastillé par le juge d'instruction de la commune 4 de Bamako. C'est vrai que le chef de l'Etat de l'époque, le "Vieux Commando", désirait donner une bonne leçon à Sidi Sosso Diarra qui avait une trop forte tendance à interpréter à la lettre la loi qui déclare le Bureau du Vérificateur indépendant du gouvernement.
Le haut fait d'armes réussi contre Diarra n'est peut-être pas étranger à la nomination, en 2012, de Daniel Tessougué au poste de Procureur Général (PG) près la Cour d'appel de Bamako. Pour ceux qui l'ignoreraient, le PG de Bamako a entière autorité sur tous les procureurs, commissaires de police et commandants de gendarmerie de Bamako ainsi des régions de Sikasso, de Koulikoro et de Ségou. Il ne lui reste à commander que dans l'Azawad mais ça, c'est une autre histoire puisqu'à Kidal, capitale de ce cher territoire, c'est Iyad Ag Ghali qui fait la loi et non point l'Etat malien... C'est donc de son piédestal tout neuf que Tessougué rédige l'acte d'accusation du "Vieux Commando" pour haute trahison. A en croire ce texte d'une dizaine de pages, le "Vieux Commando" aurait trahi la nation en ne tenant pas son serment de préserver l'intégrité territoriale du Mali, en n'écoutant ni la "grogne" des troupes, ni les "avertissements" de la presse, et patati et patata! Transmis au gouvernement qui en saisit sans tarder l'Assemblée Nationale, le document finit cependant sa course au fond d'un placard car, depuis avril 2012, le "Vieux Commando" a trouvé refuge chez nos amis sénégalais où il s'est rendu...à dos d'homme. D'ailleurs, entre-temps, Ladji Bourama a eu bien d'autres chats à fouetter, notamment les affaires d'avion, d'armements et de Tomi Michel. Sans oublier que Ladji lui-même n'arrive pas à restaurer l'autorité de l'Etat dans l'Azawad dont son Premier Ministre, Moussa Mara, a été chassé à coups de canon et de gourdin en mai 2014.
La tête du "Vieux Commando" lui ayant échappé de justesse, Tessougué se rabat à une vitesse record sur celle du maire du District, Adama Sangaré. L'intéressé se retrouve, sans sommation, jeté au gnouf avant que l'on se rende compte qu'il est maire en titre et que son incarcération exige une procédure spéciale devant la Cour Suprême. Qu'à cela ne tienne ! La procédure est rafistolée en cours de chemin et Adama Sangaré atterrit à la prison de Koulikoro. L'histoire ne dit pas si les spéculations foncières ont diminué pour autant dans le District, mais à tout le moins, Sangaré saura désormais qui est monsieur le Procureur Général. C'est pourquoi nul n'arrive à comprendre pourquoi Tessougué ira jusqu'à croiser publiquement le fer avec Mohamed Aly Bathily, son ministre de tutelle, pour avoir refusé de conduire à nouveau en taule le même Sangaré. On l'aura compris: dans l'univers de Tessougué, la terre n'est jamais aussi ronde ni le soleil aussi brillant qu'on le croirait à première vue...Pour avoir pensé le contraire, le député de Ouelessébougou, Bourama Traoré, se retrouve entre quatre murs.Après avoir joué les Mike Tyson dans le bureau d'un juge, il est placé sous mandat de dépôt sur instructions personnelles de Tessougué.Il apprendra à ses dépens que la voix du peuple ne pèse pas lourd face à la voix du parquet.
Tessougué refait parler de lui en cette fin d'année. Lors de la session d'ouverture de la Cour d'Assises de Bamako, le 30 novembre 2015, le magistrat met de côté le discours qu'il avait préparé pour laisser parler son coeur. Ainsi, il révèle sa recette-miracle contre le terrorisme: il faut, à ses dires, obliger les citoyens à se raser la barbe ! Bien entendu, lui-même donne l'exemple: constamment rasé de près, on ne lui voit ni moustaches, ni barbe, ni favoris. Problème: de paisibles musulmans portent, depuis notre père Abraham (paix sur lui), une barbe fournie sans être affiliés à Al-Qaida, alors que de dangereux terroristes, comme ceux qui ont attaqué l'hôtel RADISSON, n'arborent ni barbe, ni moustaches, ni poils de nez. Et puis, quel sort réserve Tessougué à la recommandation faite par le Prophète (paix et salut sur lui) de garder la barbe ? Enfin, raser la barbe des 15 millions de Maliens posera de sérieux problèmes de logistique auxquels Tessougué n'a pas songé: comment, Seigneur Allah, les mairies, qui peinent déjà à ramasser les ordures domestiques, transporteront-elles 4000 tonnes de barbe et de moustaches hebdomadaires? Car il ne s'agira pas de transporter le bagage poilu une fois pour toutes, mais au moins chaque semaine! Ces objections n'altèrent pas, bien sûr, l'élan anti-terroriste de Tessougué. Il se plaint aussi que des mosquées sortent un peu partout de terre sans que l'on sache d'où elles tirent leurs financements.
En fait, le Procureur Général se trompe à la fois de cible et de thérapie. Barbe, moustaches, foulard, mosquées, chapelet... Tout cela n'est rien à côté de l'attitude des hommes politiques qui ont décidé d'ignorer le principe constitutionnel de laïcité de l'Etat pour faire une cour assidue aux leaders religieux. Ladji Bourama lui-même débute ses discours officiels, non par des extraits de la Constitution, mais par des versets du Coran. Parmi les amis qui lui ont apporté des voix, on compte le Chérif de Nioro et l'imam Mahmoud Dicko. Pendant la campagne électorale, Ladji, à l'instar d'autres candidats, a répondu à la convocation de l'association islamique "SABATI 2012" et s'est engagé à mettre en oeuvre les doléances de ladite association. Résultat des courses: le Haut Conseil Islamique est beaucoup plus puissant que le gouvernement malien. Il a, par exemple, suffi qu'il gronde pour que la loi portant Code de la famille soit révisée. C'est sans doute parce qu'il mesure tout le poids du Haut Conseil Islamique que Tessougué se garde de décerner un mandat de dépôt contre l'imam Mahmoud Dicko en lequel il voit pourtant un chantre du terrorisme depuis que l'imam a déclaré que le Mali payait au nord le prix de l'injustice qui sévit dans le pays. Dans ces conditions, Tessougué a tort de s'en prendre à nos malheureuses barbes. Barbes et mosquées ne figurent-elles pas en bonne place dans le programme présidentiel "Mali d'abord, Inch Allah"?


Tiékorobani
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