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« AZAWAD »: le piège de la banalisation
Publié le dimanche 13 decembre 2015  |  Info Matin
Kidal:
© aBamako.com par mouhamar
Kidal: M. Pierre Buyoya a rendu une visite de courtoisie à Intalla Ag ATTAHER, patriarche des touareg
Kidal, le 08 Août 2014. La délégation de la mission de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL) conduite par son Excellence monsieur Pierre Buyoya, Haut Représentant de l`Union Africaine a rendu une visite de courtoisie au patriarche des touareg, Intalla Ag ATTAHER.




La fixation qui tourne à l’obsession sur l’appellation ‘’Azawad’’, par une partie de la crise (la Coordination des mouvements armés (CMA)), pose nécessairement la question de la nécessité d’une compréhension commune de ce terme, mais également de l’importance donnée aux balises que sont l’unité nationale et l’intégrité territoriale telles que le prévoit l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.

La signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali n’y a rien fait : le terme ‘’Azawad’’, au cœur d’une polémique de longue date, s’invite de façon récurrente et inexorablement au cœur de tous les débats sur le Nord du Mali. Récemment, c’est le porte-parole de la Coordination des mouvements armés, Almou Ag Mohamed, qui revenait à la charge avec ce terme qui est tout aussi provocateur que chargé d’un projet séparatiste à peine dissimulé. Il déclarait dans la mouvance de l’attentat du 20 novembre dernier, à l’hôtel Radisson Blu : « Résolument engagée pour le rétablissement de la paix dans l’Azawad en particulier et dans tout le Mali en général, la CMA ne saurait être déviée de cette voie par de tels actes d’une violence inouïe ». Cet homme qui multiplie les sorties médiatiques, ces derniers temps, était-il dans la lune pour expliquer une distinction aussi hilarante entre le Mali et l’Azawad ? Assurément non. Il est juste dans une logique, dans un agenda qui lui permet de surfer allègrement sur la notion de minorité pour transformer son rêve en réalité.

Le tollé général
Un passage des notes d’alerte, « Nam : je t’écoute, en langue bamanankan » de CRI 2002, de mai dernier, est assez édifiant sur la notion de minorité dans la République. Il y est dit en effet : « en 1978, quand l’Encyclopédie soviétique, comme elle l’avait toujours fait, distingua dans la population française les minorités nationales estimées à 10% du total et comprenant Alsaciens-Lorrains, Corses, Bretons, Flamands, Catalans et Basques, les rédacteurs du Journal « l’Humanité », qui n’avaient plus l’habitude de lire l’Encyclopédie soviétique, protestèrent en ces termes le 8 mars 1978 : « on reste confondu devant une pareille absurdité, née dans l’esprit d’auteurs qui croient sans doute devoir transposer de façon mécanique et scolastique à d’autres pays la réalité de l’Union soviétique, qui est effectivement un État multinational. Cette appréciation n’est pas seulement fantaisiste, elle constitue une inadmissible mise en cause de l’unité nationale du peuple français ».
Le gouvernement français, loin de toutes velléités d’autodétermination des minorités nationales, était tout à fait à l’unisson avec l’ensemble de la classe politique française qui n’estjamais arrivée à concevoir qu’un groupe ethnique quelconque puisse ambitionner autre chose que d’être intégré à l’ensemble français ».

Le sens de la citoyenneté
Pour le Cercle de réflexion et d’information pour la consolidation de la démocratie au Mali (CRI-2002) cette réaction, à bien d’égards, doit exhorter, une fois de plus, nos frères et sœurs de la Coordination des Mouvements armés de l’Azawad (CMA) à regagner la République, l’État de droit, pour assurer, et assumer entièrement, et pleinement leur citoyenneté sur le chantier de la reconstruction de l’État du Mali post-crise.
La citoyenneté entière, et pleine, faut-il le rappeler, est définie comme la capacité à exercer ses droits et devoirs de citoyens, c’est-à-dire l’ensemble des droits et devoirs reconnus à toute personne appartenant à la communauté nationale. Et, il ne saurait avoir de citoyenneté sans cadre, sans espace approprié pour assurer sa compréhension mutuelle, partagée, acceptée, et disséminée, sans possibilité effective, et efficiente d’assurer son exercice.
CRI-2002 précise que l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale offre l’opportunité et la capacité à toutes les parties d’exercer leurs droits et devoirs de citoyens ; trace le cadre et l’espace, voire les espaces, appropriés pour assurer leur compréhension mutuelle, partagée, acceptée, et disséminée ; et, donne la possibilité, voire les possibilités, effectives et efficientes d’assurer leur exercice.
Concrètement, des dispositions de l’Accord devraient inciter les séides d’une prétendue cause de l’’’Azawad’’ à revoir à la baisse leurs ambitions, en tout cas à les mettre entre parenthèses le temps que sonne l’heure de la clarification.
L’article 5 de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali stipule en effet : « l’appellation AZAWAD recouvre une réalité socio-culturelle, mémorielle et symbolique partagée par différentes populations du nord Mali, constituant des composantes de la communauté nationale. Une compréhension commune de cette appellation qui reflète également une réalité humaine devra constituer la base du consensus nécessaire, dans le respect du caractère unitaire de l’État malien et de son intégrité territoriale ».
Deux notions fortes émergent de cet article, à savoir le respect du caractère unitaire de l’État et de son intégrité territoriale sur la base d’un consensus. Par conséquent, l’on ne devrait en aucun cas parler distinctement du Mali et de l’’’Azawad’’.

Les artifices
Le porte-parole de la CMA devrait intégrer, une fois pour toute, que l’’’Azawad’’ qui pourrait exister, au terme de l’Accord pour la paix et la réconciliation, jusqu’à preuve du contraire fait partie intégrante de la communauté nationale et que les personnes qui y vivent ne peuvent exercer leur citoyenneté que dans le cadre de la République du Mali. C’est dire que la définition que recouvre cette appellation ne saurait porter atteinte ni au caractère unitaire de l’État malien, ni à son intégrité territoriale.
Ce qu’il convient également de rappeler aux sectateurs est que dans tous les cas, dans le cadre des mesures destinées à instaurer la paix et la réconciliation nationale de l’article 5 de l’Accord, il est stipulé :« la dimension sociopolitique des crises cycliques qui ont jalonné le septentrion malien nécessite un traitement politique. À cet égard, une Conférence d’entente nationale sera organisée durant la période intérimaire, avec le soutien du Comité de Suivi et sur la base d’une représentation équitable des parties, en vue de permettre un débat approfondi entre les composantes de la Nation malienne sur les causes profondes du conflit. Ce débat aura à prendre en charge, entre autre, la problématique de l’Azawad ».
Point besoin dès lors de vouloir danser plus vite que la musique comme s’y attellent les membres de la Coordination des mouvements armés.
La problématique de l’’’Azawad sera bel et bien prise en compte, tel que prévu par l’Accord pour la paix et la réconciliation au cours de la Conférence d’entente nationale.
Mais, en attendant, sachons raison garder. Parce qu’un changement de dénomination, même si de nombreux compatriotes y portent un regard soupçonneux, n’implique pas nécessairement une remise en cause de la donne fondamentale qu’est le caractère unitaire de l’État malien (il est important de préciser de quel Etat s’agit-il) et de son intégrité territoriale.
À s’y méprendre, ce que les négociateurs de la CMA ont lâché de la main gauche, à Alger, en renonçant à l’autodétermination et au fédéralisme, ils veulent gaillardement le récupérer par la main droite après la signature de l’Accord en usant de toutes sortes de subterfuges. Or cela ne marchera pas cette fois-ci qu’un accord est signé sous les auspices de l’ensemble de la communauté internationale qui en est l’une des principales garantes.

Par Bertin DAKOUO
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