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A l‘écoute de Mahmoud Dicko, Président du Haut Conseil Islamique : «Nous rejetons sans ambigüité la vision des Islamistes armées»
Publié le mercredi 16 janvier 2013  |  Le Progres


Audience
© aBamako.com par a
Audience accordée par le Chef de l`Etat par intérim au Président du haut Conseil Islamique du Mali El Hadj Mahmoud Dicko.
Bamako,le 13 janvier 2013 à la résidence du Chef de l`Etat. Le Pr Dioncounda Traoré a reçu El Hadj Mahmoud Dicko.


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…C’est parce que tout simplement, ils ont pensé que le Mali était à leur portée et pouvaient en faire ce qu’ils veulent. Ce n’est pas une bonne chose. Au Mali, ce n’est pas aujourd’hui qu’on a connu la religion. C’est en substance ce qui ressort de l’interview que le Président du Haut Conseil Islamique nous a accordée. Il salue les efforts du Président de la République, passant par les 10 millions F.CFA d’Ançar Dine International de Chérif Madani et invite chaque Malien et chaque malienne à rester mobilisés derrière notre Armée. Lisez plutôt.

Mahmoud-Dicko- président HCI

Bonjour Imam Mahmoud Dicko, depuis bientôt un an le Mali vit une crise sans précédent. En votre qualité de Président du Haut Conseil Islamique, quel rôle doivent jouer les Leaders religieux que vous êtes ?

Mahmoud Dicko: Aujourd’hui, nous n’avons pas d’autres choix que de nous mobiliser totalement et entièrement derrière l’Etat malien et derrière l’Armée malienne.
C’est ça en réalité notre devoir et c’est ce que nous devons faire sans réserves. Vous savez, depuis que cette affaire là a commencé, le Haut Conseil Islamique s’est investi, on avait beaucoup d’espoirs que cette affaire pouvait se régler autrement que par les armes. Malheureusement, ce qui s’est passé l’autre jour à Konna nous a mis dans une situation où nous pensons qu’aujourd’hui, il n’y a pas de calculs à faire, il faut que tous se mettent derrière l’armée malienne et derrière les autorités et que tous ensemble, nous puissions aller et regarder vers la même direction.

Depuis le déclenchement des hostilités la semaine derrière, le groupement des Leaders Religieux et le Haut Conseil Islamique ont demandé aux musulmans de dire des prières dans toutes les mosquées et zawia afin d’aider notre armée à se tirer d’affaires. Quelles autres actions avez-vous mené et/ou comptez-vous mener dans les prochains jours ?
M. Dicko: Nous sommes entrain de nous préparer inchallah avec l’aide de Dieu demain (NDLR: dimanche13 janvier 2013) on va rencontrer le Président de la République pour une remise d’une somme de 20 millions de F. CFA; dix (10) millions du don de Ançar Dine International dirigé par Cheick Cherif Ousmane Madani Haidara et 10 autres millions donnés par le Haut Conseil Islamique. C’est une façon de dire à tous les musulmans du Mali, à tous enfants du Mali qu’il faut vraiment faire quelque chose. Non seulement nous devons prier dans les mosquées, dans les zawia et autres; mais nous devons aussi mobiliser des fonds pour soutenir moralement et matériellement notre armée nationale. Il s’agit maintenant de défendre notre patrie. Moi je l’ai dit, nous, nous avions beaucoup d’espoirs parce qu’il y’avait deux groupes dans cette affaire. Un premier groupe qui parlait de l’indépendance, de sécession de notre pays, l’autre groupe qui parle seulement de la religion mais pas des velléités indépendantistes… On avait vraiment beaucoup d’espoirs. S’il s’agit de la religion, nous sommes un pays à 95% voire 98% de musulmans. Nous n’avons pas de problèmes, nous pouvions trouver un compromis entre nous et faire éviter à notre pays une guerre. Mais la reprise des hostilités, la façon dont ces gens là nous ont agressés nous a fait mal, très mal. Ça fait mal à tout le peuple malien, parce que nous pensons que c’est devenu un affront. C’est parce que tout simplement, ils ont pensé que le Mali était à leur portée et pouvaient en faire ce qu’ils veulent. Ce n’est pas une bonne chose. Au Mali, ce n’est pas aujourd’hui qu’on a connu la religion. Il y’a plus de 1000 ans que la religion est introduite au Mali, plus de 1000 ans. Nous sommes à 98 % de musulmans sans qu’on soit forcé. Si aujourd’hui des gens prennent les armes pour dire qu’ils vont nous imposer leur vision de la religion de cette façon, ça c’est des pratiques que nous rejetons carrément avec force et sans ambigüité.

Une religion veille de plus de 1000 ans vous dites. Le Mali est aussi un pays laïc, et malgré cette laïcité, des islamistes armées y sont entrés et imposent la charia. En tant qu’imam, quelle est votre conception de la charia, que dit l’Islam à ce propos ?
M. Dicko: Comme je l’ai dit, l’Islam est au Mali depuis plus de 1000 ans à tel point que la religion est devenue pour nous un patrimoine. Ça fait partie de notre identité, ça fait partie de notre culture.
Il y’a une partie de la religion dans tout ce que nous faisons. Mais cette pratique est connue depuis les empires jusqu’à aujourd’hui, le Mali a su trouver un mécanisme pour que les gens puissent vivre ensemble sans problème. Depuis au temps des empires, il y’a ceux qui croient en la religion musulmane, il y’a d’autres croyances avant même l’avènement du christianisme au Mali. Le christianisme est venu, d’autres ont embrassé aussi cette religion. Il y en a qui restent encore sans les deux religions, mais il n’y a pas eu de problèmes entre les Maliens
Le Mali d’essence est un pays laïc c’est-à-dire que notre laïcité n’est pas une laïcité qui est venue seulement pendant ou après la colonisation. Nous avons connu la laïcité bien avant parce que nos royaumes et nos empires ont cohabité. Il y a eu des empires ici de types musulmans comme Askia Mohamed, Almamy Samory, le Roi Sékou Ahmadou de Macina qui ont embrassé cette religion, qui ont travaillé avec cette religion et qui ont toujours accepté aussi d’autres sans problèmes. De tout le temps nous avons vécu ensemble avec toutes les religions, avec tous les croyances sans problèmes. Il n’y a jamais eu de guerre de religion au Mali.

Effectivement, il n’y a jamais eu de guerre de religion au Mali et l’on sait que l’Islam est une religion de tolérance selon les prédicateurs que vous êtes. Mais est-il que même les non musulmans ne sont pas épargnés par ces terroristes qui prétendent appliquer la charia dans les trois régions du Nord du Mali. Que dit concrètement l’Islam à ce sujet ?
M. Dicko: Il faut faire la part des choses. Il n’y a pas de nouveau: l’Islam est l’Islam depuis le temps du Prophète. L’Islam a été donné pour que nous puissions vivre sur cette terre dans la paix et nous préparer pour l’eau -delà. C’est ça l’Islam. L’Islam n’est pas venu pour imposer aux hommes des règles qui ne sont pas vivables. Non ! La religion musulmane est une religion de tolérance ; tolérance ne signifie pas que moi je dois abandonner ma conviction pour suivre l’autre. Mais nous sommes dans un pays où moi je n’ai pas à tolérer l’autre non ! C’est son droit d’être là. C’est un droit pour le non musulman d’être là, de vivre sa foi comme il l’entend. Ça veut dire aussi que je dois faire attention pour ne pas déranger l’autre. L’Islam donne droit à quelqu’un de vivre ce qu’on appelle «Alzima» c’est des gens qui vivent en réalité dans des pays où la charia existe. Même ceux qui sont sous tutelle de la charia et qui ne sont pas musulmans vivent leur religion. Ici au Mali, ils sont dans leurs droits c’est une république laïque.
Quand le Prophète Mohammed (PSL) est parti à Médine, il a fait une coalition où il y avait toutes les croyances pour défendre ensemble Madina et que chacun garde sa religion, mais il y avait une convention entre eux. C’est le genre de République que nous avons aujourd’hui. C’est ça le système républicain. Mais dans cette vie, chacun fait attention à l’autre et c’est valable dans une famille, comme dans une ville. On doit se tolérer entre nous.
Trois jours après la reprise des hostilités à Konna le Président de la République, le Pr. Dioncounda Traoré, dans un discours à la Nation a décrété l’Etat d’urgence. Quelle lecture faites-vous à cette décision du Président ?
M. Dicko: Il a fait son devoir de Chef de l’Etat. Aujourd’hui, c’est lui le garant de la stabilité de la Nation. Bien sûr que oui, il ne peut pas faire autrement. Mais nous sommes en Etat de guerre, donc si nous sommes en Etat de guerre, la moindre des choses, c’est de décréter d’abord l’Etat d’urgence et que tous les citoyens se mobilisent pour défendre la patrie. Il a fait son devoir et c’est le devoir de tout citoyen de se mettre dans cet état d’esprit.

Imam Dicko vous êtes revenus de l’Arabie Saoudite il y a quelques semaines. Parlez-nous de votre séjour Saoudien. Avez-vous échangé avec les autorités saoudiennes, notamment sur la crise sécuritaire malienne ?
M. Dicko: C’est vrai, nous avons été d’abord pour présenter les condoléances du peuple malien au nom du Gouvernement de la République Mali, puis au nom du Chef de l’Etat par intérim aux autorités saoudiennes à l’occasion du décès du grand Imam de la Mecque Cheick Mohamed Abdala qui était un grand ami du Mali qui a visité le Mali trois fois et qui a été jusque dans le nord du Mali. Il s’était beaucoup impliqué pour la cause du Mali et qui, en un moment donné a fait comprendre aux autorités de la République d’Arabie Saoudite qu’il y avait beaucoup de rumeurs concernant le Mali qui n’étaient pas réels. Les gens qui disent à l’époque que le Mali, c’est un problème de musulmans et de non musulmans, un problème du Sud et du Nord. Mais lui, quand il est venu, on est allé à Kidal et l’Imam qui y officiait était un noir. Il a fait un rapport pour dire que le conflit n’avait rien à voir avec la religion à l’époque.
En Arabie Saoudite, j’ai profité pour rencontrer certaines autorités. Il y a eu des discussions sur le Mali. Mais il y a des choses que je ne suis pas tenu de dire maintenant. Nous avons rendu compte aux autorités compétences qui se chargeront au moment venu, d’informer le peuple malien.

Quel message particulier avez-vous à l’endroit et des Autorités et de l’Armée malienne ?
M. Dicko: Avant même la chute du régime ATT, nous avions commencé à dire aux gens qu’il y a un malaise dans le pays et qu’il faut qu’on se donne la main, qu’on se mette ensemble. Car c’est le peuple uni qui peut faire face aux événements. Malheureuse ç’a été ce que ç’a été. Après les événements, nous avons essayé de faire la même chose, d’appeler les gens au rassemblement, à l’unité. Je pense qu’à partir de ce qui s’est passé l’autre jour, il est grand temps de faire un dépassement de soi, de s’oublier soi même, de faire en sorte que le peuple se redonne la main, que nous puissions nous réarmer moralement et avoir confiance en nous pour dire que nous avons trébuché, c’est réelle. Mais on n’est pas tombé, on peut encore se relever. Le Mali est un grand pays et nous avons beaucoup de ressources. J’ai confiance en ce peuple, si on se met ensemble, tous les défis seront relevés par la grâce de Dieu.

Question: Un dernier mot ?
M. Dicko: Le dernier mot, c’est de prier d’abord pour que le Mali retrouve son unité, son intégrité et la paix, d’autan. Nous ne sommes pas un pays d’hostilités. Mais si on nous impose la guerre, on n’a pas le choix il faut la faire. Je souhaite que notre armée puisse défendre ardemment notre pas, comme elle est entrain de le faire. Que Dieu assiste notre pays, pour qu’il puisse triompher sur les adversaires et les envahisseurs.
Interview réalisée
par Boubacar KANTE

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