ChristianeTaubira ou l’histoire de la dernière résistante

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Publié le mercredi 27 janvier 2016 | RP Medias

© AFP par MARTIN BUREAU
Christiane Taubira

Quand on est disciple du chantre de la négritude qu’est Aimé Césaire, cohabiter avec un gouvernement qui emploi les institutions pour diviser la France en français suspect et en bon français est un supplice.
Quand on est le fruit de l’esclavage et de la déportation des fils d’Afrique vers les plantations occidentales et qu’on est obligé d’accepter d’être comparé aux singes en 2015 par des français, on est meurtri dans sa chair et dans sa mémoire.
Quand on est ministre dans un gouvernement lui-même produit de quatre siècles d’esclavage et qui souhaite mettre en place des lois ségrégationnistes contre lesquelles on se bat, on n’a pas d’autre choix que de s’éloigner des artisans de cette vision. Traitée de tous les noms d’oiseaux et par tous les camps (gauche et droite), Madame Taubira s’est battue avant tout contre elle-même. Ses convictions étant connues, nombreux sont ceux qui se demandaient ce qu’elle faisait dans un gouvernement qui prépare le terrain pour l’extrême droite française. Ses collègues étaient plus souvent en phase avec le FN qu’elle or elle ne faisait que défendre les droits élémentaires du haut de sa fonction de garde des sceaux. Face aux discours racistes décomplexés elle s’est érigée prenant des coups dans son propre camp. Taubira gênait le raciste de base qui voyait une « femme noire » à un poste régalien plutôt qu’une compétence et une ressource. Elle a été au centre de polémiques stériles du fait de sa couleur dans un gouvernement qui veut moins de couleurs. Petit à petit cette immense dame dont les qualités ne souffrent d’aucun nuage a perdu son sourire. On peut faire semblant d’être en phase avec une pratique mais sourire sans y mettre le cœur est impossible sur le long terme à moins d’être acteur.
Le dernier combat pour lequel Taubira s’est illustrée n’est ni plus ni moins que le projet controversé de déchéance de nationalité des français binationaux. En résumé, la France par ses institutions souhaite scinder les français en deux parties. Ceux avec un sursis à vie et donc présumés coupables dès le berceau et les autres blancs bons français. Sans revenir en profondeur sur le sujet, le projet tend à établir l’apartheid juridique dans un pays qui se dit offrir les mêmes droits à tous ses fils. Au-delà de son caractère anti constitutionnel, cette loi créerait des apatrides sans être efficace. L’aboutissement du terroriste est sa propre mort, il ne renoncera donc pas à se faire exploser en bombe humaine pour préserver sa nationalité française. Taubira à exprimer à qui veut l’entendre son opposition à ce projet avec les arguments du bon sens. En plus de la visée raciale de cette loi à portée sectaire, on peut craindre qu’après avoir mis un sursis sur la tête d’une catégorie de français, on en vienne à vouloir faire de même au brave peuple des Antilles dont Taubira elle-même défend la mémoire. Démissionner était devenu inéluctable si bien que le compte à rebours était déclenché au lendemain des attentats du Vendredi 13 et des dérives sécuritaires qui ont suivies. L’état d’urgence est un cadre fertile pour implanter tous les types d’entorse aux libertés individuelles est prolongé sans fondement pour obliger la conscience française à adhérer. Ceux qui s’opposent au projet de déchéance sont peu invités à la télé. Ceux qui sont visibles et qui osent protester sont poussés vers la sortie. L’histoire retiendra que Christiane Taubira fut le porte-drapeau de ceux et celle qui a construit un pont là où le président François Hollande et son premier ministre construisent un mur entre les français. Donner le dos et bâton, voilà ce que le gouvernement attendait de Christiane Taubira.
Elle a fui, elle a tout compris.

Elijah de BLA