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Kalori Sory n’est plus : Le dernier combat d’un pourfendeur des travers de la société malienne
Publié le samedi 30 janvier 2016  |  Le Reporter
Kalory
© Autre presse par DR
Kalory Sory




Après plus de 30 ans de carrière musicale, notre compatriote Kalori Sory vient de ranger le micro et de quitter la scène. Il vient de perdre son dernier combat de la vie à l’âge de 65 ans. De son vrai nom, Ibrahim Sory Kouyaté, ce griot bon teint est venu tout naturellement à la musique dès l’âge de 12-13 ans. Il nous confiait, il y a quelques années, que son talent de chateur précoce était déjà reconnu à l’école fondamentale de Ké-Macina dans la Région de Ségou. Mais c’est sur un terrain de football qu’il reçut le surnom de Kalori Sory.
Pendant les vacances de l’année scolaire 1968-1969 qu’il passait à Bamako, plus précisément dans le quartier populaire de Bamako-Coura, le jeune Kouyaté fut affublé du sobriquet de Kalori Sory par son entraîneur. Ce dernier avait constaté que le jeune homme était hyperactif et qu’il débordait d’énergie. Plus tard, Kalori Sory abandonnera le Lycée en classe de 11ème Année lettres pour se consacrer à son groupe de musique amateur qu’il venait de créer à Lafiabougou.
Puis, il est recruté en 1980 par l’orchestre national Badéma où il évolue pendant quatre ans aux côtés de feu Amadou Ba Guindo, chef d’orchestre et de Kassé Mady Diabaté. Il participera ainsi à de nombreux enregistrements, représentations et tournées à travers l’intérieur du pays. C’est à Kayes et Ségou que le public apprécia en avant-première son titre fétiche «Pètchèkè». Ce qui l’encouragera plus tard à sortir le morceau.
En 1985, l’administration décide de l’envoyer à l’Institut national des arts (INA) pour qu’il se perfectionne. C’est en 1989 qui trouve enfin un producteur pour son premier album, intitulé «Pètchèkè» ou l’argent dans le jargon populaire. Dans cet album, l’artiste fustige le pouvoir déjà alors grandissant de l’argent dans notre société.
Le titre fut un grand succès. L’artiste reconnaîtra d’ailleurs plus tard que cette première création fut l’une de ses plus grosses ventes. Puis, c’est le casse-tête du transport en commun dans la ville de Bamako qui l’inspire avec son 2ème album en 1994. À l’époque, les véhicules de transport en commun de marque «Peugeot» 404, communément appelés «Dourouni», posaient d’énormes problèmes aux usagers, comme c’est le cas d’ailleurs maintenant avec des minibus «Sotrama».
Le troisième album vint en 2000 avec «Louancé Kalifa» dans lequel, il décrivait avec une grande inspiration les conditions de logement des Bamakois en location que les propriétaires de maison considéraient comme moins que rien. Il y évoquait aussi les difficultés de cohabitation entre locataires.
Lassana Igor Diarra, membre du Mouvement des rastas du Mali (MORASMA), estime que Kalori Sory était une figure importante du reggae et du mouvement du rastafarisme au Mali. Ses créations, comme «Ambè yé Rasta yé» ont beaucoup contribué à faire comprendre le sens du mouvement rastafarisme à nos concitoyens. C’est dans cette œuvre que l’artiste soutient que toutes les grandes figures de la décolonisation et les pères des indépendances africaines sont des rastas.
Pour notre interlocuteur, le reggaeman était aussi un précurseur de l’adaptation de cette musique aux rythmes maliens et africains. Il fut l’un des premiers à parler du Donso-reggae. C’est-à-dire qu’il utilisait le rythme de la musique des chasseurs dans ses arrangements. Le responsable du MORASMA tient à lui rendre un hommage mérité pour tout ce qu’il a fait dans ce domaine.
Un moment, Kalori Sory s’absente de la scène musicale pendant cinq bonnes années. À son retour, il sort N’Ta (ce qui m’appartient en langue nationale bambara) en 2008. Dans cet album, les mélomanes redécouvrent sa sensibilité face aux souffrances des populations et aux maux qui minent notre société. L’artiste dénonce encore une fois l’égocentrisme qui gagne du terrain chez nous. Cet album contient 7 titres que sont : N’tori, Anderezo, Demissenw, Afrique-France, Djogo, Nounia et Bakary Djan. Les remix de Pètchèkè et Walata complètent cet album. Presque tous ces morceaux sont dans un style de reggae à la sauce bambara, une sorte de conte-chanté. Le chanteur estimait que ce «4ème album est celui du mensonge».
Face aux énormes difficultés matérielles qu’il connaissait, le ministère de la Culture, avec alors à sa tête, Cheick Oumar Sissoko, décida de lui donner un coup de main, en prenant en charge les frais de production de «N’ta».
Y.D.
Source : L’Essor
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