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Gabriel Touré : Un hôpital de référence qui se meurt…
Publié le lundi 15 fevrier 2016  |  Le Repère
Grève
© aBamako.com par A.S
Grève du personnel du CHU Gabriel Toure
Bamako, le 17 aout 2015 les personnels du CHU Gabriel Toure ont entamés une grève




Le système sanitaire malien est battu sur une structure à trois niveaux sous forme de pyramide: à la base se trouvent les Centres de Santé Communautaires (CSCOM) et les mutuelles de santé, ensuite les Centres de Santé de Référence (Csréf), et à l’échelon supérieur, c’est-à-dire au sommet de la pyramide, se trouvent enfin les hôpitaux. Et de tous les hôpitaux du Mali, Gabriel Touré, de par sa position stratégique, est sans conteste le plus sollicité. Pourquoi? Quel rôle spécifique joue-t-il dans la distribution de la santé au Mali? Les usagers s’y plaisent-ils ? Reportage.

Il ne s’agit pas de faire un procès à cet hôpital, mais plutôt de comprendre jusqu’à quel degré l’Etat du Mali est engagé pour faciliter l’accès des citoyens maliens à la santé. L’Hôpital Gabriel Touré est un Etablissement Public Hospitalier (EPH), un statut qui lui confère une personnalité morale et une autonomie de gestion administrative et financière.

La tutelle qu’est le ministère de la Santé et de l’Hygiène Publique lui délègue des prérogatives dans la gestion administrative (faire des contrats, contracter des prêts à la banque…), et toutes les recettes générées en son sein sont directement réutilisées en fonction des besoins, et selon une planification mise en œuvre par la Direction. Dans la pratique, nous dira un responsable de la Direction, l’hôpital Gabriel Touré se trouve au sommet de la pyramide sanitaire au Mali en tant que structure de 3ème référence mais qui, du fait même de sa position, se trouve obliger de jouer sur tous les trois bords de la pyramide: les soins de base dispensés au niveau des CSCOM, les soins qu’on trouve généralement au niveau des Csréf…

Des paramètres qui confèrent également à l’hôpital Gabriel Touré la qualité de structure sanitaire de “3ème référence générale”, parce qu’il y aussi des structures de 3ème référence spécialisées, comme l’IOTA, par exemple! Mais c’est aussi là des facteurs qui constituent un autre problème à gérer pour l’hôpital, compte-tenu du flux dû à cette situation. “Malgré tout, on gère”, dira notre interlocuteur de la Direction. Et depuis quelques années, sur la base des accords établis avec l’Université du Mali, notamment la Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odonto Stomatologie (FMPOS), l’hôpital Gabriel Touré est érigé en Centre Hospitalier Universitaire (CHU), une vocation qui lui confère un statut de formation et de recherche.

La renommée de Gabriel Touré, l’hôpital la doit au fait qu’il dispose du plus grand nombre de Professeurs spécialisés dans différentes spécialités, du plus grand service d’urgence du Mali, du plus grand service de réanimation, du plus grand service de pédiatrie, et aussi parce qu’il détient le record de consultation en gynéco-obstétrique. En termes de consultation, l’hôpital Gabriel Touré en enregistre cent milles en moyenne chaque année.

Ces vérités qui fâchent…

Le Centre Hospitalier Universitaire Gabriel Touré, même avec ce tableau flatteur, et malgré ses 700 travailleurs, rencontre des difficultés dans l’accomplissement de ses missions. Le CHU Gabriel Touré reste confronté à des difficultés de plusieurs ordres: exigüité des locaux, tension de trésorerie (due en partie à la non maitrise des recouvrements, l’irrégularité dans l’octroi des subventions de l’Etat), déficit en personnel (les infirmiers surtout), gestion du flux des malades et accompagnants…

Comble de tout, l’hôpital Gabriel Touré ne dispose que d’un seul scanner, une seule table télécommandée à la radiologie, et seulement un peu plus d’une centaine de lits d’hospitalisation… En tout cas, il n’est pas acceptable que le CHU Gabriel Touré soit soumis à un tel régime de déficit ou de manque de matériels des plus élémentaires pour son fonctionnement régulier. On comprend là aussi aisément pourquoi même pour un petit mal de rien, les plus fortunés préfèrent aller se faire soigner à l’extérieur. C’est dire que l’Etat reste alors fortement interpellé face aux défis à relever à l’hôpital Gabriel Touré.

Quid des conditions de travail du personnel?

Selon le syndicaliste Djimé Kanté, la responsabilité de l’Etat dans la situation mi-figue, mi-raisin que vit l’hôpital Gabriel Touré est tout aussi entière que la Direction ne cesse de s’illustrer par des scandales sur fond de mauvaise gouvernance des ressources. “On ne peut pas dire que l’hôpital est aujourd’hui en mesure d’apporter de soins appropriés et de qualité à un être humain, tant les conditions d’accueil, les conditions d’hygiène, les conditions de soins et d’hospitalisation sont en deçà des normes, voire même à la limite humiliantes.

En effet, il y a des choses qui ne sont pas faisables à Gabriel Touré mais qu’un petit CSCOM peut faire, ce qui n’est pas acceptable. Bref pour être clair, je vous dis tout simplement que le Malien n’a pas accès à un soin de qualité. A Gabriel Touré il y a un manque criard de personnel, que ce soit au niveau des services d’urgence et de pédiatrie, ou encore à la néonatologie.

Dans ce dernier service, pour plus de 150, voire 200 enfants hospitalisés, vous trouverez seulement 2 infirmières pour s’occuper de tout cela. Ce même cliché est valable pour le service des urgences, où souvent 2 personnes sont contraintes de faire un travail pour 30 personnes… C’est d’ailleurs pourquoi les gens se plaignent au niveau de ce service“, affirme le syndicaliste.

Il faut aussi dire que c’est souvent tous ces travers qui justifient les mouvements des syndicalistes de l’hôpital. Effectivement, c’est inimaginable qu’un hôpital de cette envergure puisse constamment être à défaut de scanner ou de simples seringues.

Des maux corroborés par certains usagers de l’hôpital

Selon certains malades et accompagnateurs, la prestation est loin d’être satisfaisante à l’hôpital Gabriel Touré. Ils déplorent surtout le fait que les ordonnances tombent en longueur de journée, souvent avec pour obligation pour les patients ou pour leurs parents de se voir obliger de sortir de l’hôpital pour aller chercher certains médicaments ailleurs. Le traitement et le suivi des malades constituent aussi souvent un véritable parcours de combattants.

“Nous sommes là depuis des heures, suspendus à nos peines parce que les médecins sont en réunion, il n’y a personne pour s’occuper de nous, on attend donc“, se plaignent des malades croisés dans le pavillon “ORL”.

A la pédiatrie, des parents se plaignent aussi des infirmières, toujours absentes. “Il faut toujours qu’on aille les chercher quand on a besoin d’elles. Souvent elles ne sont même pas pressées, et souvent pour un rien du tout on se fait gronder comme des enfants. Même si parmi elles, certaines sont très dévouées, courtoises et qui sont toujours à l’heure pour faire leur boulot“, indique une maman au chevet de son enfant à la pédiatrie.

Il y a aussi des patients et accompagnateurs qui s’offusquent du fait qu’ils sont tout temps envoyés faire des analyses en dehors de l’hôpital. A leur entendement, on devrait avoir tout ce dont on a besoin dans un EPH.

Un point de vue partagé par la Direction qui, en plus de tous les efforts qu’il fait déjà, demande à l’Etat d’en faire plus encore, compte tenu de la pression démographique qui est celle du CHU Gabriel Touré. En plus de l’Etat, la Direction de l’hôpital Gabriel Touré sollicite le concours des Maliens qui pourraient guider des partenaires vers leur structure.

Adama S. Diallo
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