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Lutte anti-terroriste: les zones d’ombre
Publié le lundi 15 fevrier 2016  |  Info Matin
Serval
© Autre presse par DR
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Avec un effectif de 9 142 soldats et 1 178 policiers, de la MINUSMA ; 3 000 militaires de l’Opération Barkhane, soit une force de 13 320 hommes, face aux islamistes de Ansar Eddine (800 combattants), AQMI (200), Al Mourabitoune (300-600), Front de libération du Macine (170) soit 1 770 hommes, le rapport de force devrait pencher en faveur des Forces internationales qui disposent en plus de redoutables moyens de surveillance et d’une puissance de feu incomparable. Pourquoi alors Iyad Ag Ghaly continue-t-il à rester insaisissable et se payer la tête des gens ?

La prolifération des attaques terroristes sonne comme une bravade des Forces internationales, mais aussi des Forces armées et de sécurité du Mali (FAMAs). N’oublions jamais ce slogan de l’ère GMT : « l’aide la plus noble et la plus utile est et sera toujours celle qui viendra de nous-mêmes ». Pour les Forces internationales, il s’agit de Barkhane qui est une opération menée au Sahel par l’armée française, qui vise à lutter contre les groupes armés djihadistes salafistes dans toute la région du Sahel. Lancée le 1er août 2014, elle prend la suite des opérations Serval et Épervier. Elle s’inscrit dans le cadre d’une stratégie de forces prépositionnées dans la région, en partenariat avec les États de la zone. Elle mobilise quelques milliers de soldats contre plusieurs centaines de djihadistes. L’opération mobilise près de « 3 000 militaires en tout ».

Supériorité numérique
Il y a aussi la MINUSMA dont déploiement maximal autorisé par l’ONU est de 12 640 personnels, dont 11 200 soldats. 1 440 policiers ; 1 619 civils. Mais les éléments effectivement déployés sont : 9142 militaires ; 1178. Ce qui représente 10 320 éléments armés.
En faisant la somme des deux effectifs, à savoir celui de Barkhane et de la MINUSMA, l’on obtient 13 320 éléments.
Du côté des djihadistes, Mélanie Matarese, journaliste pour « ’Le Figaro »’ écrit, début août 2014, que selon « un proche des mouvements islamistes », Ansar Dine compte encore 800 hommes au Mali et AQMI, 700. En novembre et décembre 2015, Mathieu Olivier et Rémi Carayol, journalistes de « ’Jeune-Afrique »’, écrivent que selon la DGSE malienne, AQMI, en perte d’influence, ne compterait plus dans le Sahara que 200 combattants divisés en trois katiba.
Quant à Al-Mourabitoune, il compte 300 hommes au moment de sa création. Cependant, le mouvement subit ensuite des pertes et d’après les services français de renseignements, il ne comptait plus qu’une centaine d’hommes en mai 2014. Mais pour le journaliste mauritanien, Lemine Ould Mohamed Salem, le groupe compte encore 500 à 600 hommes en mars 2015.
Le Front de libération du Macina de Amadou Kouffa, lui, compterait 170 hommes.
Dans le meilleur des cas, tous les groupes djihadistes réunis ne devraient pas peser plus de 1 170 combattants.
En excluant la MINUSMA qui refuse obstinément de combattre les terroristes dont elle est une cible privilégie, l’on se retrouve avec Barkhane qui a au moins 3 000 hommes aguerris et qui bénéficie de la collaboration de 5 pays de la zone Sahélo-Saharienne : Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad pour la lutte antiterroriste. Ce qui veut dire qu’en termes d’effectif, les djihadistes ne devraient pas faire le poids. Pour ce qui est de la puissance de feu, ce serait une insulte à Barkhane que de faire une comparaison avec ces groupes djihadistes quand bien même ils pourraient détenir des armes obtenues en Libye.

Puissants moyens de renseignement
Outre l’effectif et la puissance de feu, Barkhane a une bonne longueur d’avance sur ceux qu’ils traquent à travers son dispositif de renseignement. Laurent LARCHER, écrivait en février 2015 : « Drones et Mirage 2000 de la force Barkhane sont déployés dans la capitale du Niger. Leur mission, renseigner, surveiller et accompagner les opérations militaires conduites au Sahel. Les drones, il y en a quatre à Niamey, tous achetés à l’armée américaine. Deux Harfang et deux Reaper. Ces avions sans pilote embarqué, silencieux et quasiment indétectables, sont capables d’observer une cible à plus de 3 000 mètres d’altitude (Harfing), voire 10 000 mètres pour le Reaper. Volant près de 24 heures en continu, ces outils de la guerre moderne ne sont pas armés, mais ils sont capables de faire mal, très mal ». À en croire ce reporteur qui a échangé avec des officiers à Niamey, la Force Barkhane dispose de redoutables engins.
Il ne se limite pas à ce constat, puisqu’il précise : « Non seulement ils protègent les troupes au sol, mais ils peuvent détecter une colonne ennemie, reconnaître un chef djihadiste et ne plus le lâcher, le temps de monter une opération pour le “neutraliser” comme ce fut le cas pour Ahmed el Tilemsi, émir du groupe djihadiste al Mourabitoun, tué par les forces françaises lors d’une opération à Tabankort, dans la région de Gao (nord du Mali), en décembre 2014 ».
Au regard de ces révélations, l’on est forcément interloqué. Et pour cause, il y a un ennemi qui est connu. Il s’appelle Iyad Ag Ghaly. Il a promis, depuis la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, de tout mettre en œuvre pour qu’il ne soit pas appliqué. Il est en train de réussir son pari en lançant des raids qui ont toujours un effet retentissant du moins au point de vue médiatique et qui pourraient installer progressivement la peur et la paranoïa chez les soldats, parce que Iyad peut frapper à tout moment et n’importe où. Comme pour narguer les puissances, il revendique toujours ses actes. C’était encore le cas, vendredi dernier, quand il a attaqué le camp de la MINUSMA, faisant 6 morts et 30 blessés parmi les soldats de la paix (Source MINUSMA).

L’ambiguïté
Comment la Force Barkhane, avec ses impressionnants moyens capables de localiser et de suivre à la trace d’une cible ne neutralise toujours pas le chef terroriste Iyad Ag Galy, alors qu’elle l’a fait avec Ahmed El Tilemsi, émir du groupe djihadiste Al Mourabitoune ? André BOURGEOT, Directeur de recherche émérite au CNRS, tente d’y apporter une réponse qui n’est rien d’autre que ce que tout le monde pense tout bas au Mali, dans une interview accordée à un confrère : « Je m’excuse ! Je réponds par un sourire, voire un rire, parce qu’effectivement, c’est une question que tout le monde se pose et moi-même, je me la pose. Comment des autorités telles que l’Algérie, le Mali, la France, la MINUSMA, etc. ne sont pas en mesure de localiser et de suivre les mouvements d’Iyad Ag Ghali ? Si elles n’arrivent pas à ça, à quoi servent-elles ? Il y a, à peu près un peu plus de dix mille militaires sur le territoire malien, ils n’arrivent pas à le saisir, ils n’arrivent pas à savoir où il est, qu’est-ce qu’il fait. EST-CE un fantôme ? Ils ont quand même les moyens de savoir, donc, la question que je me pose : pourquoi il n’y a pas une possibilité d’intervention même brutale sur ce monsieur ? DE SURCROÎT SA TETE EST MISE À PRIX PAR LES AMÉRICAINS. La comparaison que je vais faire est très significative : avant, il y a eu Ibrahim Ag Bahanga qui a été victime d’un accident de voiture dans le Sahara. Tout le monde sait que dans le Sahara, il y a toujours des embouteillages, des accidents mortels de voitures, donc, Ibrahim Ag Bahanga a été victime d’accident. Personne n’est dupe, mais quand on a voulu le supprimer ça a été possible. Pourquoi dans le cas d’Iyad, c’est tellement compliqué ? Donc, si c’est tellement compliqué, on est en droit de se demander : est-ce qu’il ne sert pas d’une certaine manière des intérêts “inintentionnels” de certaines puissances environnementales y compris les puissances politiques et militaires qui sont parties prenantes des réalités maliennes.
Il y a des non-dits dans cette lutte antiterroriste qui devraient obliger le Mali à jouer les premiers rôles, parce qu’avant tout il s’agit de notre pays. Un rappeur malien dit dans sa chanson : “soldats maliens, le sang que vous n’aurez pas versé pour nous, personne d’autre ne viendra verser ces larmes pour nous” (en bambara : Aw ma joli min bon anw yé, mogo were te na o nyèji bon an yé).

Par Bertin DAKOUO
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