Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aBamako.com NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Regards croisés de deux magistrats sur la situation de la justice au Mali : Christian Idrissa Diassana : « Il y a un déphasage entre la réalité et les textes de loi » , Mohamed S. Dicko : « Le bilan est très mauvais »
Publié le mardi 8 mars 2016  |  Le challenger




Christian Idrissa Diassana, Directeur National des Affaires Judiciaires et du Sceau et Mohamed S. Dicko de l’Institut National de Formation Judiciaire Me Demba Diallo, étaient les invités de la conférence-débat mensuelle du Centre d’Etudes et de Réflexion au Mali (CERM). C’était le 5 mars 2016 à la Maison du Partenariat sur le thème : « Comment reformer/refonder la justice au Mali pour construire un Etat de droit ».
Après les mots de bienvenue de Naffet Kéita au nom du CERM, ces deux magistrats se sont entretenus largement avec le public sur plusieurs aspects concernant la justice au Mali. En rappelant la réforme de la carte judiciaire de notre pays, Christian I. Diassana a laissé entendre qu’il y a un déphasage entre la réalité et les textes de loi. Selon lui, les textes du Mali sont calqués sur le système colonial et ne répondent pas forcément aux réalités sociales actuelles du pays. « Les normes doivent être en rapport avec les cultures et les réalités sociales de notre pays », a-t-il ajouté.
En ce qui concerne l’accès à la justice par les justiciables, M. Diassana a estimé qu’il doit y avoir des bureaux d’assistance judiciaire partout au Mali. Selon lui, ces bureaux doivent être composés de notables, de personnalités distinctes des villages et villes et d’un membre du Gouvernement. Cela, pour que les justiciables puissent avoir facilement accès à la justice, même sans les moyens financiers. « A travers ces bureaux, le Gouvernement pourra payer la caution judiciaire pour des justiciables démunis, car tout le monde n’a pas les moyens de payer un procès », a-t-il précisé.
Christian I. Diassana a également sollicité la création de bureaux d’orientation et la mise en place des médiations pénales pour le confort des justiciables. « La médiation pénale est une procédure qui permet de régler une affaire sans passer devant un juge. Mais à condition que les parties soient d’accord. De toutes les façons le procès verbal qui sort de cette audience est considéré comme une décision judiciaire afin d’éviter aux parties de revenir un autre jour se plaindre pour le même problème », a-t-il enseigné.
Dans sa conclusion, M. Diassana a tout simplement confié au public que la justice est un dénouement complet et il faut une volonté politique pour faire avancer les choses.
La justice, un instrument de terreur
Partant de la remarque de son confrère, Mohamed S. Dicko a ajouté qu’il ne s’agit pas seulement d’une volonté politique, mais de l’application stricte des décisions prises. « Aujourd’hui, le bilan est très mauvais. Dans l’ensemble, la justice est synonyme de lenteur. La corruption et l’impunité diminuent sa valeur et sa crédibilité. Les gens sont arrêtés et libérés sans suite. Ainsi, la justice devient un instrument de détournement ou de terreur », a-t-il déploré.
Pour M. Dicko, ce qui est dangereux aujourd’hui, c’est la politisation de l’administration à tous les niveaux. Ce qui fait que la justice est devenue une lutte coûteuse. « Il faut aujourd’hui une justice crédible et proche des citoyens. Mais, cela ne peut être une réalité sans une bonne formation et une excellente communication pour faire comprendre aux citoyens que la justice ne consiste pas seulement à condamner, mais plutôt démontrer que les magistrats, dans la prise de leurs décisions, n’appliquent que la loi », a-t-il souligné. Pour gagner ce pari, Mohamed S. Dicko pense que la justice doit être une vraie institution.
S’agissant de la lutte contre la corruption et l’impunité, M. Dicko a expliqué qu’il ne faut pas seulement jeter la responsabilité sur une seule personne ou un seul service, mais il faut plutôt un changement de mentalité et l’instauration d’une justice efficace et responsable. « Au lieu que cela soit de simples déclarations de lutte contre la corruption et l’impunité, il faut avoir aussi la pédagogie, la communication et le bon comportement. Car, le premier ennemi de la corruption, c’est la transparence », a-t-il déclaré. Mohamed S. Dicko a enfin ajouté que la priorité doit être aujourd’hui la réconciliation nationale, la sécurité et la stabilité sur tout le territoire national.
Ousmane Ballo
Commentaires