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Sur le livre “le mali sous Moussa Traoré” : Une œuvre de repentir pour ses auteurs ? L’honorable Yaya Sangaré s’interroge
Publié le vendredi 25 mars 2016  |  L’Indicateur Renouveau
Moussa
© AFP par FRANCOIS ROJON
Moussa Traoré




Dans un document intitulé “Au Mali : il est temps de parler“, l’honorable Yaya Sangaré député à l’Assemblée nationale, acteur du Mouvement démocratie, apporte sa contribution au débat qui enfle désormais entre les acteurs du régime de GMT et ses tombeurs de 1991. Et cela fait suite à la parution d’un livre qui retrace les gloires du règne de GMT écrit par un collège dirigé par Djibril Diallo, dernier secrétaire politique du BEC de l’UDPM.
Un livre vient de paraître qui retrace les réalisations du régime du général Moussa Traoré alias GMT, du Comité militaire de libération nationale (CMLN) et de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM). Il fait polémique et verserait par endroits dans la provocation. A la seule idée d’un livre sur Moussa Traoré, je me suis interrogé : est-ce un livre-brosse à reluire du régime GMT ? Une œuvre de repentir pour ses auteurs ? Un ouvrage de contribution à l’Histoire du Mali ?

A y réfléchir, il y a un peu de tout cela dans ce livre. Acteur du Mouvement démocratique, me taire sur le pied-de-nez fait à la dynamique du 26 mars 1991 serait très facile et, de surcroît, s’apparenterait à de la lâcheté. Croiser les doigts aussi et rester dans des débats de “grin” avec des propos laudatifs sans contradicteurs avisés sur le Mouvement démocratique serait encore pire.
Au regard de tout cela, j’ai décidé de prendre ma plume, pour tirer la sonnette d’alarme et interpeller mes aînés du Mouvement démocratique plus outillés afin d’instaurer le débat démocratique contradictoire public. Contre ceux-là mêmes qui tentent de nier les vertus de la démocratie quand bien même ils en sont les principaux et les meilleurs bénéficiaires.
Ce sont certes de grands diplômés, peut-être même de grands commis de l’Etat, mais ils oublient que les faits sont têtus, les plaies béantes ouvertes par GMT ne sont pas encore cicatrisées. Notre silence ne doit jamais être confondue à l’ignorance, notre calme à l’acceptation ou notre gentillesse à de la faiblesse. Nous avons encore suffisamment de crédit sur notre compte pour répondre aux coups de griffes ou de gueule des suppôts.
Le 19 novembre 1968 est de sinistre mémoire, une date dans l’Histoire du Mali qui ne méritait pas d’être rappelée. Cette date a plongé notre pays dans un gouffre sans fond, dans sa crise identitaire la plus grave de sa jeune existence. Une crise identitaire doublée d’une crise politique grave, ayant entrainé l’effondrement de l’Etat malien et de ses institutions. Si le coup d’Etat du 19 novembre 1968 se justifiait par le fait que Modibo Kéita amenait le pays au bord du précipice, les putschistes ont réussi la prouesse de faire un grand pas pour nous précipiter dans le gouffre abyssal.
D’autre part, le Mali a été victime de la main mise d’individus incompétents et apatrides opposés aux lumières nationalistes.
La plus grande imposture militaro-fasciste s’est installée avec l’effondrement de toutes les valeurs positives incarnées par le digne et fier peuple malien. Cela a eu pour conséquences, l’instauration d’un cycle de mauvaise gouvernance, de non-gestion et de montage institutionnel, le tout basé sur une corruption à ciel ouvert, faite de détournements de fonds publics, de détournements des aides au développement et d’enrichissement illicite.
GMT-CMLN-UDPM, c’est la disgrâce des intellectuels
Le putsch militaire du 19 novembre 1968, conduit par le Comité militaire de libération nationale (CMLN) avec, à sa tête, le lieutenant Moussa Traoré, a instauré dans notre pays, rien que la dictature avec plus tard son système de parti unique, UDPM. Ce fut la disgrâce pour tous les intellectuels, les patriotes ou simplement tous ceux qui pensaient autrement le Mali, leur patrie. Surtout avec la persécution des intellectuels notamment les enseignants dont beaucoup seront contraints à l’exil : le cas d’Ibrahima Ly est éloquent.
Des fonds importants ont été mis à disposition pour lutter contre la faim, l’analphabétisme et la soif mais qui ne sont jamais parvenus à destination. C’est le cas des millions de F CFA qui ont été́ débloqués pour soulager les populations du Nord suite à la grande sécheresse de 1972-73 et qui n’ont malheureusement pas empêché des populations de mourir de faim et de soif chaque jour au Mali.
L’opinion publique malienne et internationale risque d’être encore trompée par cette tentative de réécriture l’histoire récente du pays pour brouiller les vraies pistes. Alors qu’elle est en droit d’apprendre, de comprendre et d’apprécier en toute sérénité et responsabilité. Surtout sa jeunesse qui n’a pas vécu le régime de la soldatesque de GMT-CMLN-UDPM ni connu les mouvements démocratiques révolutionnaires.
Une lecture simpliste de certains documents et des interventions inappropriées dans certains débats de fond constitueront une prime à la dictature et à la terreur que GMT a instaurées dans notre pays.
Cette tentative de réécrire l’histoire récente du pays est très méchante, égoïste, sans pitié, inhumaine… Un tel acte ne doit pas être toléré, car il porte atteinte à la dignité et à la pudeur du peuple malien, un peuple tolérant. La démagogie de ces “intellectuels” dont le seul mérite aura été de collaborer avec la soldatesque pour étouffer les débats d’idées et asseoir leur toile d’araignée sur le pays afin de mieux le piller au propre comme au figuré.
Il est plus qu’impérieux que ces intellos amnésiques se mettent au pas de l’Histoire du Mali sous peine d’être guillotinés par le vrai détenteur de la réalité, à la fois victimes et contemplateurs.
Nous avons une responsabilité morale envers ce pays. Nous avons une dette morale envers les milliers de Maliens, victimes innocentes de GMT. Nous avons un compte à rendre à ce peuple larmoyant, qui a subi silencieusement les blessures et les meurtrissures du régime GMT avec des longs mois sans salaires, avec des humiliations de chefs de familles, avec des déportations, avec le désespoir comme raison de vivre. Alors, nous nous devons de voler au secours de ces milliers d’anonymes qui ont été marginalisés, volés, violés, bafoués par des apatrides militaire-intello-politiques. Nous devons refuser de laisser notre pays dans les mains de ces dinosaures politiques et intellectuels.
Modibo Kéita, le tout premier président du Mali indépendant devant qui le Géant De Gaulle de la République française était obligé de relever la tête, a été humilié, trimbalé et assassiné. Abdoul Karim Camara dit Cabral, leader estudiantin, a été torturé et froidement assassiné. Son corps n’a jamais été retrouvé et sa tombe jamais identifiée.
Sans jugement, beaucoup de Maliens ont été maintenus au secret pendant de longs mois, humiliés et torturés parce qu’ils ne sont pas d’accord avec le régime GMT-CMLN-UDPM dont Jean-Bosco Konaré, l’un des auteurs du livre. Une bonne partie des gens déportés au nord ont succombé dans les mines de Taoudéni, exploitées à ciel ouvert avec des instruments dignes du Moyen-âge, là où les détenus travaillent, pieds nus, par 40°C et plus. En mars 1971, le capitaine Yoro Diakité, premier chef du gouvernement de l’ère GMT, et le capitaine Malick Diallo sont arrêtés, dégradés et condamnés aux travaux forcés pour tentative de coup d’Etat. Yoro Diakité meurt dans des conditions atroces.
Boniface Diarra, responsable de l’ENA, est arrêté en février 1977, parce qu’il avait organisé les étudiants à protester contre un décret gouvernemental modifiant les conditions d’accès des étudiants aux écoles supérieures en instituant le concours direct pour tous les étudiants.

Mali sous GMT : le fascisme sous son visage le plus hideux
C’est sous le régime GMT-CMLN-UDPM que tous les établissements secondaires et supérieurs du pays sont fermés pour la première fois et occupés par l’armée, la police et la gendarmerie nationales. C’est le parti UDPM “de type fasciste” qui a décidé de la dissolution de l’Uneem.
C’est ce régime qui, à la suite de la guerre contre le Burkina Faso, à travers le général Moussa Traoré, a accusé les enseignants maliens d’être soutenus et financés par le Burkina pour mener des activités subversives sur le territoire national. Et pourtant Pr. Singaré, Konaré et Kanouté sont des enseignants. Solidarité de corps, qu’en faisons-nous ?
Pendant les vingt-trois ans du régime GMT-CMLN-UDPM, la répression n’a pas été seulement physique au Mali, elle a été aussi morale par les licenciements collectifs et individuels (la fermeture de la Compagnie Air-Mali, de la Somiex, des sociétés et entreprises d’Etat, les compressions successives de personnels, les départs “forcés” à la retraite, etc.), par les mutations arbitraires et le non-paiement des salaires, les impositions de toutes sortes pour les paysans et commerçants.
Ce sont là des faits que personne ne peut et ne doit gommer. Le 26 mars 1991 ne saurait se résumer à un “pour” ou “contre”, il n’est pas un accident de parcours; c’est l’aboutissement de luttes silencieuses et ouvertes contre l’injustice, l’arrogance, la violence comme méthodes de gouvernance.
C’est la dénonciation des traitements dégradants et inhumains administrés aux Maliens dont le seul tort était de vouloir s’exprimer autrement sur la gouvernance de leur pays. Non, l’ex-général Moussa Traoré ne peut pas être un grand républicain. Il a été et demeure le boucher des Maliens, l’assassin de Modibo Kéita, de Cabral, de Dibi Silas Diarra (il a été livré à ceux qu’il a combattu farouchement pour l’intégrité, l’unité, l’unicité et l’honneur du Mali).
Ça été un lapsus qui doit vite être oublié. Quand le Comité militaire de libération nationale (CMLN) appelle les Maliens à se prononcer le 2 juin 1974 par référendum pour légaliser “sa” Constitution inique, taillée sur mesure, le Regroupement des patriotes maliens appelle le peuple souverain du Mali indépendant à voter “non” à travers un tract largement diffusé sur le territoire.
Par la suite, Ibrahim Ly, professeur à l’EN Sup, père de Oumar Tatam Ly (1er PM d’IBK), Adama Samassékou (linguiste), Mouhamédou Dicko (professeur au lycée Askia Mohamed), Samba Sidibé (ingénieur TP), Cyr Mathieu Samaké (directeur général du Liptako-Gourma), Bakary Koniba Traoré (économiste), entre autres, tous proches collaborateurs d’IBK sont arrêtés, déportés et torturés avec des séquelles souvent irréversibles.
On peut pardonner mais on n’oubliera jamais. Même si le “gars” n’a jamais regretté ces actes inhumains susmentionnés, car il n’a pas encore demandé pardon au peuple malien encore moins aux parents et collatéraux de ses victimes. Le débat est ouvert et je n’ai aucune honte à avoir participé au Mouvement démocratique révolutionnaire de mars 1991. Car le Mali ne méritait pas Moussa Traoré même si on doit admettre qu’il a été un Géant Monstre Tentaculaire.
“Nos vies commencent à décliner le jour où l’on devient silencieux à propos des choses qui importent”, avait dit Martin Luther King.
Rassemblés par Oumar B. Sidibé
B. : Le titre et le chapeau sont de la rédaction
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