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Corruption et népotisme dans l’armée et dans l’administration : Après l’échec d’ATT pour manque de volonté politique, IBK va-t-il réussir contre ses fléaux ?
Publié le lundi 25 avril 2016  |  l'intelligent Mali
Amadou
© Autre presse
Amadou Toumani Toure
Le président déchu du mali




C’est le massacre d’une centaine de nos militaires à Aguelhoc, le 24 janvier 2012, qui a ouvert les yeux des Maliens sur l’état de déliquescence de nos forces armées. Avec un budget annuel de plus de 100 milliards FCFA, l’armée malienne n’avait ni la formation ni l’équipement encore moins la discipline indispensables pour toute victoire sur le terrain. Tirant les leçons de la tragédie d’Aguelhoc et des effets funestes de la mauvaise gestion sur l’existence même de l’Etat, le président IBK a opté pour un changement de comportement et de cap. Il reste maintenant de voir comment cela va-t-il se matérialiser.



Contrairement à son prédécesseur ATT qui a publiquement déclaré qu’il n’allait « pas humilier un chef de famille » même si celui-ci se rendait coupable de détournement de deniers publics, le président IBK, dès son accession au pouvoir a dit « décréter l’année 2014 celle de la lutte contre la corruption et la délinquance financière ». C’est vrai que celui-ci avait hérité, en 2013, d’un Etat exsangue, presqu’en lambeau avec une bonne partie du nord du pays sous le joug des groupes narcoterroristes.



Une occupation territoriale progressive qui est intervenue après la tragédie d’Aguelhoc quand, le 24 janvier 2012, à la suite d’intenses combats nos soldats à court de munitions se sont rendus à l’ennemi espérant ainsi échapper à une mort certaine. Mais ils sont massacrés le même jour. Certains sont tués d’une balle dans la tête, d’autres égorgés et des élèves-maîtres sont pris comme boucliers humains par des éléments sanguinaires du MNLA.

Pour le grand public, cette tragédie a sonné le tocsin de la corruption et la mal gouvernance qui régnaient au sein de nos forces de défense et de sécurité sous l’ancien président ATT. Malgré les difficultés d’ordre matériel rencontrées par nos militaires à Aguelhoc, le chef suprême des armées continuait à faire croire – peut-être naïvement – que nos « militaires ne manquaient de rien » pour faire face à leur mission régalienne de défense de l’intégrité territoriale du pays.

Au cours de ce crime perpétré par des éléments du MNLA et selon l’Association malienne des droits de l’Homme (AMDH) : « il y a eu des exécutions sommaires sur 153 militaires du camp d’Aguelhoc ». Ce qui avait suscité un réel émoi et une consternation sans pareille dans le pays et sur les réseaux sociaux, occasionnant un sentiment de frustration, de révolte et de haine vis-à-vis du régime d’alors.

Les épouses des militaires de Kati, dont certains des époux faisaient partie des victimes d’Aguelhoc avaient eu des propos peu amènes, peut-être même discourtois à l’endroit d’un chef d’Etat presqu’aux abois, embarrassé voire humilié qui les avait reçues par deux fois au palais présidentiel. Elles avaient alors demandé au chef suprême des armées des munitions pour leurs maris, avant de le qualifier – quel crime de lèse majesté – d’être de mèche avec les rebelles du MNLA qui venaient de commettre les tueries les plus atroces sur nos militaires basés à Aguelhoc.

Le budget de l’armée détourné à la pelle

C’est à cette triste occasion que la corruption et la mauvaise gestion au sein de nos forces armées ont été mises à nu. Avec une dotation budgétaire annuelle qui dépasse les 100 milliards FCFA, l’armée malienne n’avait ni suffisamment de fusils – 1 arme pour trois militaires, selon un ancien ministre de la Défense d’IBK – ni matériels roulants en nombre à fortiori des hélicoptères ou des avions de chasse. Rien que du matériel obsolète datant parfois de l’indépendance pour une armée qui doit défendre un territoire vaste de 1 240 192 km2 et frontalier avec sept pays.

Le hic étant que les autorités au plus haut niveau de l’Etat semblaient (ou faisaient semblant) d’ignorer cette triste et lamentable réalité au moment où des villas appartenant généralement à des fonctionnaires civils et militaires poussaient de terre comme des champignons dans les quartiers les plus huppés de la capitale. De grosses sommes d’argent détournées à la pelle pour construire des châteaux, acheter de belles voitures, des vergers et des champs.

Au même moment, la troupe, qui a la lourde responsabilité de défendre la patrie en cas de menace grave, est laissée pour compte. C’est suite à la tragédie d’Aguelhoc que les Maliens ont su l’état lamentable et le manque criard de moyens qui sont le lot de notre armée nationale. Une armée qui, pourtant, dans un passé pas assez lointain, faisait la fierté de la nation toute entière et suscitait peur et respect chez nos voisins.

Comment cette armée auparavant si puissante et si crainte a-t-elle pu tomber si bas ? Nos compatriotes qui ont, pour certains, connu ces années de gloire de l’armée nationale ne cessent encore de s’interroger sur l’effritement et l’effondrement de l’armée la plus puissante de la sous-région.

La victoire que notre pays a enregistré lors des deux guerres qui nous ont opposé à l’ex-Haute Volta (actuel Burkina Faso) est le témoignage le plus éloquent de cette période où l’armée nationale était bien équipée et les militaires bien formés.

Mais aujourd’hui, la réalité est que des milliers d’éléments de notre armée, qui comprend une soixantaine de généraux, n’ont pas dépassé Sévaré (au centre du pays) et, de ce fait, ne connaissent le terrain ni d’Adam ni d’Eve. Il n’y a que des généraux d’opérette pour la plupart, de salon surtout, et non pas de terrain qui n’ont aucune connaissance de la guerre, encore moins de la guérilla pour faire face à des rebelles expérimentés et féroces.

Népotisme, corruption et laisser-aller

Face à l’étonnement des Maliens qui ont assisté abasourdis à l’inexorable avancée des rebelles, le chef de l’Etat d’alors semblait lui-même surpris du haut degré de dénuement de notre armée qui n’avait aucun aéronef à même de voler ; quand le chef suprême des armées croyait sincèrement qu’elle en possédait au moins trois voire plus. ATT ignorait certainement aussi que nos soldats rejoignaient parfois le nord du pays dans des cars de transport public que l’Etat louait à prix d’or à des compagnies privées. Une bonne partie des rares véhicules de transport de troupes étant alors sur cale pour simple défaut de batterie, de pneus ou tout simplement par manque d’entretien.

Au même moment, certains de nos militaires échangeaient, contre espèces sonnantes et trébuchantes, des moteurs de véhicules 4×4 neufs de l’armée contre ceux amortis des véhicules des rebelles. Durant la même période, à Bamako, des ressources dégagées pour la formation des hommes étaient détournées sans que cela n’émeuve personne. En tout cas, pas les autorités en place à l’époque encore moins la hiérarchie militaire.



D’autre part, personne ne savait le nombre réel de militaires présents sur le terrain. D’énormes sommes d’argent dégagées pour leur entretien et leurs primes sont détournées à la pelle par de hauts gradés plutôt soucieux de la finition de leurs énièmes villas ou châteaux. Sinon comment comprendre que nos militaires soient à court de munitions étant engagés sur un champ de guerre. Et que même les renforts appelés à la rescousse n’aient pu percer le verrou formé par les rebelles autour de la ville assiégée, neutralisée et vidée de toute défense.



Pourtant, c’est un budget de plus de 100 milliards FCFA qui est annuellement alloué pour les dépenses militaires. Où est partie toute cette somme supposée avoir été injectée dans l’armée depuis des années ? Des Maliennes et des Maliens qui n’ont dorénavant que leurs chapelets et leur foi pour implorer Dieu de préserver leur pays ne cessent encore de se lamenter.

Comme on le voit : mauvaise gestion des ressources humaines, matérielles et financières, corruption, délinquance financière et népotisme sont les maux qui ont provoqué la déliquescence de l’Etat malien et la perte de repères que cela a occasionnée.

Compte tenu de tous ces facteurs et malgré les multiples obstacles qui jonchent le chemin de la renaissance de l’armée nationale, IBK, dont la réputation d’ « homme d’acier trempé » commence à prendre quelques rides, tente maintenant de faire de la lutte contre ces fléaux son cheval de bataille. Aura-t-il suffisamment de volonté pour engager ce combat ? Son principal ennemi étant maintenant le temps qui coule toujours et ne s’arrête jamais.

Mamadou FOFANA

Encadré

Le pillage des ressources publiques et la corruption vont crescendo

Pour se rendre compte de l’ampleur de la mauvaise gestion des fonds publics, les chiffres contenus dans les Rapports 2013 et 2014 du BVG parlent d’eux-mêmes. En effet, dans ces rapports du Vérificateur Général, remis en mai 2015 au chef de l’Etat, les détournements de fonds occasionnés à la suite des malversations des agents de l’Etat se chiffrent à 153 milliards FCFA. Soit 80,21 milliards FCFA en 2013 et 72,97 milliards FCFA en ce qui concerne l’année 2014. En 2012, les détournements se chiffrant à quelque 50 milliards F CFA, en trois ans, l’Etat du Mali aura donc perdu plus de 200 milliards FCFA suite à la corruption, à mauvaise gestion. Cela dans un Etat exsangue où une part importante du budget national provient de l’aide des partenaires techniques et financiers.

MF
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