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Gouvernance : Le Mali, de mal en pis
Publié le lundi 2 mai 2016  |  L’aube
Rentrée
© aBamako.com par Momo
Rentrée politique du PARENA
Bamako, le 20 février 2016 le PARENA a tenu sa rentrée politique 2016 au Palais de la culture




Le Président est malade, nos oreilles entendent chaque jour des nouvelles qui affligent et nos yeux sont forcés d’admirer sans que nos tripes blessées puissent réagir d’insoutenables spectacles, signe de faillite de notre nationale. Nos pieds s’enfoncent chaque jour, dans la fange de la crise. Comme si nos dirigeants actuels, nous préparent à une inéluctable potence. Bref, le soleil du Mali n’en finit de s’incliner, de s’abaisser, de se rabaisser… Analyse.

Notre pays se meurt en silence. En apnée et gravement malade, au sens propre comme au figuré, le Mali s’égare dans les brumes et les incertitudes d’une gouvernance familiale. Plus rien ne semble consoler les populations, plus rien ne sourit au pays, plus rien ne nous renvoie à la beauté et à l’espoir que suscitent notre emblème et notre devise : le Vert (l’espoir d’un avenir radieux), l’Or (la prospérité, le développement) et le Rouge (le courage jadis d’une nation soudée). Notre devise, « Un Peuple, Un But, Une Foi » complètement anéantie par un accord dont les premières mesures d’application sonnent le glas de l’unité nationale et la cohésion sociale.



Que faire et que dire ? Comment protester contre une telle décadence ? Et d’ailleurs à qui se plaindre ?

Quand on sait qu’au Mali, sous IBK on est vite passé du pouvoir personnel à l’immobilisme institutionnel. Cet immobilisme est, avions-nous déjà souligné dans cette chronique, le résultat du fait que le pouvoir est incarné par des hommes et non par des institutions. Ainsi la séparation des pouvoirs dans un système de gestion familiale et clanique est un vœu pieux.

Le danger du pouvoir familial, ainsi qu’il se déroule sous nos yeux, se révèle à l’asservissement du personnel qu’il place à la tête des institutions. Par exemple le président du pouvoir législatif dépendant et inféodé à la famille ne peut être qu’un auxiliaire. Dès lors, la mission parlementaire est neutralisée et manipulée telle que nous le voyons dans l’affaire du rapport de la commission ad hoc sur l’accusation portée par le Gouvernement contre le Président ATT. De report en report, cette affaire a fini de décrédibiliser l’Assemblée nationale et son Président au service de l’ordre familial.

Le pouvoir juridictionnel qui a ôté à la nation tout espoir de neutralité et d’efficacité à l’occasion des élections législatives partielles du cercle d’Ansongo, est de nouveau attendu sur la requête aux fins de contrôle de constitutionnalité de la loi n°2016-11/ AN-RM portant modification de la loi n°2012-007 du 07 février 2012, modifiée par la loi n°2014-052 du 14 octobre 2014, portant code des collectivités territoriales.

La suite réservée à la requête de l’opposition républicaine auprès de la Cour Constitutionnelle pour déclarer l’inconstitutionnalité de la loi portant sur les autorités intérimaires, nous édifiera davantage sur le degré d’inféodation de l’institution juridictionnelle dans les semaines à venir.

Il y va du confort et de la « consolidation de l’Etat de droit », pour reprendre le thème du colloque international en vue dans notre pays.

La gestion patrimoniale des institutions fait aujourd’hui que les prédateurs tirent puissance de l’immobilisme de nos institutions. Assurément, le clan et les parrains se complaisent d’une telle situation qui leur donne des ailes, mais détruit lentement le pays.

Mais, quand on croit avoir la main mise sur la Cour Constitutionnelle, le ministère de l’Administration Territoriale et celui de la Décentralisation, etc., point d’inquiétude.

Ces entités pourraient le cas échéant constituer le palais sur lequel atterrissent avec certitude tous les forcings, et toutes les tricheries seront alors validées. C’est le sens des propos de tel député du RPM qui ne se gêne point de dire publiquement « nous sommes au pouvoir ; tous les gouverneurs et préfets sont avec nous : nous allons gagner ! » sic !

C’est nanti de cette certitude que se prépare au hold-up politique sur les élections et la révision de la constitution.

Où va le Mali ?

Voilà, le Mali au point mort, le moteur de la nation se grippe. Le moral à plat, le cœur à sec, le bras mou et la conscience somatisée par le système « la famille d’abord» qui pense avoir normalisé une jeunesse dont elle croit pouvoir assurer la tutelle, lui qui ne pense qu’à ses bedaines et pas à ce dont la jeunesse a besoin.

Une jeunesse distraite par un succédané pathogène de fausses promesses, d’affaires douteuses, de mensonges, sur fond d’organisation ethnique et communautaire de la nation. Qu’importe le crime ou le méfait de ce système, pourvu que le Mali soit dépouillé, mis à sac, vandalisé, pillé en permanence. Le comble est la stratégie mise en place et destinée à rendre les Maliens plus dociles et soumis : l’appauvrissement collectif du pays.

Mais, on oublie que personne ne peut être dans le cerveau des masses du Mali d’en bas, du Mali profond, sauf elles-mêmes. Elles seules se connaissent de l’intérieur. Voilà le péril qui guette nos responsables, lesquels par naïveté ou par calcul malsain, croient encore que tout est permis dans le royaume de l’anarchie qu’ils ont créée. Or l’onde de choc ne prévient jamais quand elle arrive. C’est ce que nous apprend l’Histoire des hommes de ce pays.

Habitués à la culture du mystère qu’ils ont fini eux-mêmes par adopter comme réflexe de survie, les Maliens pourtant prisonniers des machinations du pouvoir, ont les ressorts nécessaires pour rebondir.

A ce titre, toutes les contestations qui s’agrègent ces jours-ci ne peuvent-elles pas former un mélange détonant ?

La rue bout de colère, les banquiers, les syndicats, les juges et mêmes les élus(es) en particulier ceux des régions nord du Mali, les autres localités érigées en régions, mais oubliées dans l’exercice… Le Mali qui va de mal en pis, se révolte, il crie son ras-le- bol.

Où va le Mali à ce rythme ?

La Gouvernance actuelle a mis le pays au bord de la crise de nerf, après un trimestre de l’année 2016, l’état d’esprit des Maliens se résume en deux mots : la lassitude et l’indignation. Le régime qui dirige le pays depuis le coup d’Etat fomenté contre la nation et la république, a maintenu le Mali dans l’immobilisme, en livrant le pays et la nation aux aventuriers et aux mafieux de tous acabits. C’est pourquoi, un vent de colère continue de monter en silence.

Mais, le Gouvernement continue à croire à un Mali normal, mieux à un pays qui se développe, les rapports du FMI sont à présent devenus la bible d’un progrès avéré quand hier seulement s’égosillait sur l’ingérence de cette même institution dans les affaires de notre pays pour avoir épinglé le vol organisé.

Les Maliens dans leur grande majorité, ne comprennent rien à ce cirque. Ils attendent des réponses à leurs questionnements et leurs préoccupations légitimes. Ils veulent que leur Etat existe et que celui-ci leur donne des garanties sur la transparence et la crédibilité de ses institutions actuellement éclaboussées par des scandales dont les échos dépassent les frontières du territoire national.

Nous reviendrons sur les implications politiques d’une telle attitude, mais pour l’instant, tirant les leçons de ces trois dernières années, nous devrions nous opposer de toutes nos forces à un système qui voudrait nous donner le Mali de la « famille d’abord » comme seul possible. Il n’en est rien !

Alors faut-il rappeler qu’il est impératif de continuer à battre pour conquérir un autre Mali, le Mali que nous voulons, pour pouvoir, le cas échéant, l’aimer davantage et le défendre de tous les tenants de la désintégration.

Souleymane Koné

Ancien Ambassadeur
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