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Mali : Le développement en panne de vision
Publié le jeudi 12 mai 2016  |  Le Matin
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© Autre presse par DR
Distribution en eau potable




Aujourd’hui, le vrai handicap du Mali et de l’Afrique dans leur quête de développement, c’est le manque de vision ! La preuve de ce manque de vision, c’est que les mêmes crises reviennent de façon cyclique. Ce qui prouve surtout que nous avons des dirigeants, mais pas de vrais leaders politiques qui ont la vision de nos besoins et attentes.

Le dirigeant agit en sapeur-pompier, navigue toujours à vue ! Quant au leader, il relève le défi sur long terme en se fixant des perspectives claires et précises dans le temps et l’espace.



Comment par exemple expliquer que depuis des décennies, que la capitale d’un pays comme le Mali ne soit pas correctement approvisionnée en eau et électricité ?

Que les populations soient exposées aux mêmes calvaires pour accéder aux mêmes services (eau et électricité) qui ne sont aucunement un luxe, mais plutôt le minimum vital que des dirigeants qui se respectent doivent à leurs citoyens ? C’est parce que ceux qui nous gouvernement n’ont pas la vision d’anticipation.

Au lieu de résoudre les problèmes, ils les colmatent pour calmer les tensions. Une fois cette période passée, ils se tournent vers un autre front avec la même stratégie.

La vision représente les phares du processus de développement durable. Dans la gouvernance, la vision renvoie aussi au leadership. Est-ce un dirigeant est forcement un vrai leader comme le furent les Modibo Kéita, Lumumba, Sékou Touré, Kwame Nkrumah, Thomas Sankara, et surtout Nelson Mandela ?

Pour le jeune président de Youth for change (YFC), Cheick Oumar Doumbia Le mot «Leader» se traduit en bambara par «Gnè-maa». Une appellation qui induit bon nombre de personne en erreur car lorsque l’on comprend «Gnè-maa» comme celui qui est au devant, «nous perdons automatiquement toute chance de comprendre le concept du leadership établit chez nous», avertit-il.

Ainsi, en faisant une traduction littérale du français au bambara, celui qui est au devant devient «Gnèfai maa» ou «Kountigui» voire «Massakè» (roi)…

Mais, celui qui a la vision est «Gnè-maa», avec «Gnè» (Yeux) comme vision et «Maa» comme personne. Gnè-maa signifie donc une personne qui a de la vision, un visionnaire.

Pour Cheick Oumar, «l’importance de cette distinction peut sauver notre génération, surtout nos jeunes leaders».

Et cela d’autant plus que, de nos jours, «bon nombre de jeunes leaders conduisent leurs équipes sur le chemin de la répétition que nous embellissons avec éloquence en l’appelant : continuité».

La continuité est un atout quand l’expérience est une réussite et mérite d’être pérennisée afin de consolider ses résultats et atteindre les objectifs visés. «Les challenges de notre temps ne sont pas ceux du passé. Le constat est qu’au lieu de s’inspirer du passé pour construire le futur, nous avons choisi de vivre dans le passé…», déplore le jeune leader.

Autrement dit, la jeunesse doit refuser de suivre nos dirigeants comme des moutons. D’autant plus que c’est leur attentisme et leur manque de vision qui nous en empêchent d’aller de l’avant, de prendre notre destin en main.

Le drame de l’Afrique, c’est que nos dirigeants ne sont pas de vrais leaders. Ils perpétuent ce fatalisme hérité de la colonisation qui fait que nous ne sommes rien sans l’Occident.

Nous ne sommes pas «civilisés» tant que nous ne nous habillons pas comme les occidentaux, tant qu’on ne mange pas comme eux. Nous sommes colonisés mêmes dans l’expression de nos émotions sentimentales.

Ce n’est donc pas surprenant que nous refusons de réfléchir pour tracer notre destin pas des bases solides. Nous attendons plutôt que nos «Amis», précisément les anciennes puissances coloniales, nous montrent la voie de notre propre développement.

Autrement, nous attendons qu’ils renoncent à leurs intérêts pour nous conduire au développement conduisant à leur perte.

L’éveil de l’Afrique signera le déclin de certaines puissances économiques

Il faut en effet être naïf pour croire que ces Etats ont intérêt à ce que l’Afrique se hisse à un niveau respectable de développement économique et technologique.

Plus que la montée en puissance de la Chine, l’émergence de l’Afrique est aujourd’hui la plus sérieuse des menaces auxquelles sont exposées les puissances économiques du monde.

Le FMI, la Banque mondiale sont là pour réguler nos économies pour que nos Etats ne soient jamais en mesure de rivaliser avec les puissances occidentales.

La preuve, c’est que depuis quelques années, le FMI met la pression sur le gouvernement malien pour augmenter le coût de l’électricité alors que la cherté de l’énergie est évoquée comme l’un des sérieux obstacles au développement industriel de notre pays. C’est pourquoi nous avons honte quand certains de nos dirigeants se vantent dans les journaux d’avoir reçu les «félicitations» du FMI.

Si des unités industrielles émergent au Mali, cela va réduire l’exportation des ressources brutes, donc créera de la valeur ajoutée pour soutenir cette croissance… Avec cette nouvelle concurrence, où est-ce que des Etats comme la France vont déverser leurs produits manufacturés ?

Comme le déplorait une amie activiste française, la colonisation a fait des pays comme le Mali un «vivier gratuit» qui a fait et fait la grandeur et la puissance de nombreux Etats comme la France. Et ils en profitent encore car nos dirigeants continuent à recevoir des dessous de table de leurs multinationales pour pouvoir poursuivre l’exploitation de nos richesses.

Aliénation mentale, cécité politique

«L’argent est le moteur d’une économie qui ne profite qu’aux plus riches et c’est encore bien plus exacte au Mali, malheureusement», conclut notre amie, très pessimiste par rapport à une inversion rapide de cette tendance qui traduit le manque de volonté et de vision de nos dirigeants politiques.

Comme le disait Henri Barbusse (Asnières 1873-Moscou 1935), à «l’ulcère du monde, il y a une grande cause générale : c’est l’asservissement au passé, le préjugé séculaire qui empêche de tout refaire proprement selon la raison et la morale».

C’est sans doute l’une des raisons de l’aliénation de ceux qui ont la destinée de ce pays entre leurs mains depuis le 19 novembre 1968.

«Le seul jour que j’attends au Mali est celui au cours duquel des Hommes politiques reconnaitront publiquement et honnêtement leurs erreurs», écrivait un intervenant dans un récent débat sur le «Kénédougou-forum».

C’est sans doute trop attendre de politiciens atteints d’aliénation mentale et de cécité intellectuelle. Mais, le jour où nous comprendrons réellement que nous sommes les boulangers de notre bien-être et de notre développement, le soleil, le vent… seront des atouts et non des handicaps.

Aujourd’hui, avec le temps d’ensoleillement, l’électricité, la climatisation… ne doivent pas être un luxe dans un pays comme le Mali au point que des vieilles personnes et des enfants tombent comme des mouches.

Le Rwanda vient de montrer la voie à suivre à toute l’Afrique avec une centrale solaire de 8,5 mégawats dont la construction a créé 350 emplois locaux et a augmenté la capacité de production de 6 % en alimentant en énergie plus de 15 000 foyers.

C’est une avancée particulièrement importante pour une économie qui, 21 ans après le génocide, s’est libéré des complexes politiques, économiques et culturels de l’Occident pour se développer rapidement à partir de son propre modèle, de ses propres valeurs.

En se dotant d’une telle centrale, construite en moins d’un an, le Rwanda est bien parti pour fournir de l’électricité à la moitié de sa population d’ici 2017. C’est ce qu’on appelle avoir de la vision pour se fixer des perspectives.

C’est en cela que Paul Kagamé est un vrai leader. Et c’est pour cela qu’il est détesté (comme avant lui Modibo Kéita, Lumumba, Sékou Touré, Kwame Nkrumah, Thomas Sankara…) par les dirigeants occidentaux avec leurs ONG qu’ils alimentent afin de mieux asseoir leur pouvoir en Afrique.

Pour Fousseyni Camara, un intellectuel et bloggeur malien au sein de notre diaspora en France, le mode de gestion que «le président Kagamé a expérimenté dans son pays et qui marche apporte les vraies réponses aux besoins de développement de notre continent, particulièrement du Mali».

«C’est d’une simplicité inouïe quand on aime son pays», rappelle-t-il. La bonne gestion, un train de vie très austère de ses ministres et de lui même, le choix des priorités qui profitent à tous les Rwandais et qui exclu toutes dépenses de prestige… font que le Rwanda fait partie des 5 pays les moins corrompus au monde.

Copier-coller comme perspectives

Mais, déplore M. Camara, «quand des responsables politiques se lancent dans le business avec des prête-noms, on est en droit de se demander à quel moment ils font leur job».

Et de s’interroger, «comparaison n’est pas raison, mais de grâce pourquoi les dirigeants africains ne vont pas voir ce que fait M Kagamé et essayer ce modèle d’un genre nouveau» ? Manque de volonté et de vision, répondons-nous !

Ce qui fait qu’ils continuent de penser que «revivifier ce qui n’a jamais marché est la meilleure des perspectives». Nos hommes politiques ne raisonnent que sur le court terme car plus préoccupés par le renouvellement de leurs mandats que par le bien-être des populations à travers le développement humain durable du pays. Ce qui n’est pas d’ailleurs surprenant car c’est dans nos pays que «n’importe qui devient hommes politiques…». Sinon, ailleurs, «c’est la crème de la crème».

Sinon, le soleil, nous offre des solutions moins onéreuses aux changements climatiques, au développement agricole, à l’essor industriel… pour nous hisser sur une ère de modernité.

Ces rayons de soleils qui nous font tant mal, à cause de la canicule, nous offrent pourtant une chance inouïe de booster le développement.

Mais, c’est la vision politique qui donne cette capacité de transformer les handicaps en atouts. Et nos dirigeants, hélas, n’ont pas cette lucidité, cette clairvoyance !

Moussa Bolly
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