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Mali. Le massif des Ifoghas, l’antre des islamistes
Publié le samedi 2 fevrier 2013  |  Autre presse


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© Autre presse par DR
Le groupe islamistes au nord du mali


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C’est dans ce paysage chaotique que se seraient repliés les islamistes, où seraient détenus les otages et où les difficultés pourraient commencer.

En plein désert, c’est là au nord-est du Mali, près de la frontière algérienne, dans un paysage chaotique où se mêlent dunes de sable et massifs rocailleux, que se seraient repliés de nombreux combattants islamistes après leur déroute dans les grandes villes de Diabali, Gao et Tombouctou. Un no man’s land retient particulièrement l’attention, l’Adrar des Ifoghas, qui surplombe Kidal. Ce massif montagneux, granitique et volcanique abriterait, selon des témoignages et des sources de sécurité maliennes, les principaux responsables des groupes islamistes, dont Iyad Ag Ghaly, le chef d’Ansar Dine et Abou Zeid, l’un des émirs d’Aqmi. Là, aussi, où pourraient être retenus les otages français, selon le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Enfin, c’est dans cette zone que les difficultés pourraient commencer pour les forces d’intervention de l’armée française.

Le berceau des mouvements séparatistes

Longtemps aux mains du groupe islamiste touareg Ansar Dine, allié d’Aqmi, Kidal, siège du gouvernorat de la région, venait de passer sous le contrôle des Touaregs du MNLA (Mouvement national de libération de l’Azawad) et du MIA (Mouvement islamique de l’Azawad, dissident d’Ansar Dine) (et qui ont déposé les armes) quand les Français sont arrivés mercredi à l’aube.

La zone est le berceau traditionnel des mouvements séparatistes touaregs contre le gouvernement de Bamako. C’est de Kidal que sont parties toutes les rebellions, celle de 1963-1964, celle de 1990, celle de 2006 et enfin celle de 2012. C’est dans cette région que les terroristes du GIA (groupe islamique armé) algérien ont reflué au début des années 2000 après la guerre civile en Algérie, qu’ils se sont regroupé au sein du GSPC (groupe salafiste pour la prédication et le combat) et qu’ils ont ensuite prêter allégeance à Al-Qaïda, devenant Aqmi.

Des islamistes fondus dans le décor

Pendant une décennie, alors que presque tous les regards étaient tournés vers l’Afghanistan, les hommes d’Aqmi ont constitué un véritable arsenal de guerre grâce au trafic de drogues et d’otages d’abord, puis à la faveur de la guerre en Libye qui a laissé derrière elle de nombreuses armes incontrôlées et qui ont alimenté le marché noir. Ils ont caché des armes légères (kalachnikovs, mitraillettes, roquettes, batteries, grenades, explosifs…), mais aussi du matériel moderne et performant comme des jumelles à vision nocturne.

Ils ont côtoyé les populations locales des villes de Kidal, mais aussi de Tessalit et d’Aguelhok. « A partir de 2008, ils se sanctuarisent, se déplacent en toute liberté et en toute impunité. Certains d’entre eux ont épousé des femmes Maures et Berabiches, d’autres des femmes Touaregs. Ils commencent ainsi à s’insérer dans la nature environnante », précise André Bourgeot, anthropologue, directeur de recherche au CNRS et spécialiste de la région. Bénéficiant d’aides familiales ou de complicités souvent corrompues, des caches, des moyens de transports, de l’essence et de la nourriture leur sont fournis. « Ce n’est vraiment pas un problème pour eux de vivre dans ces montagnes », assure André Bourgeot.

« Il semblerait même qu’ils ont creusé des tunnels. » De nombreuses grottes cachées par des buissons d’épineux parsèment le massif et permettent facilement de survivre caché. « Ils connaissent très bien ce terrain », ajoute André Bourgeot. « Certains d’entre eux ont fait le coup de feu en Afghanistan, puis dans les maquis kabyles ». Très difficile d’accès, c’est un lieu idéal pour cacher des otages.

Difficulté militaire

Selon toute vraisemblance, l’objectif militaire français sur le terrain semble se dérouler sur le terrain du harcèlement pour épuiser et dissuader les djihadistes de combattre. L’aviation a procédé ces derniers jours à des frappes aériennes vers Aguelhok, au nord de Kidal. « Les objectifs visés étaient des centres de commandements, des dépôts logistiques, des centres d’entraînement », a détaillé le colonel Thierry Burkhard, le porte-parole de l’état-major.

Cependant, du fait du relief hostile des Ifoghas, les bombardements aériens sur des mouvements, localisés par des satellites ou des drones, seront insuffisants pour reconquérir, tenir et stabiliser le pays. Les troupes au sol, nombreuses, seront sans doute nécéssaire. Au sol, les craintes exprimées résident dans la capacité des combattants djihadistes a mener une guérilla faite d’attentats.

Dans ce contexte, le MNLA veut jouer sa partition. Le mouvement a d’ores-et-déjà proposé son aide pour agir en éclaireur et épauler les forces militaires contre les djihadistes. Et ainsi reprendre la main sur les revendications politiques.

Négociations difficiles

Pour éviter l’enlisement, la France pourrait être prête à jouer les facilitateurs pour des négociations entre les Touaregs et Bamako. Jeudi, Jean-Yves Le Drian a souligné que « nous sommes dans une situation particulière à Kidal et nous faisons en sorte d’avoir des relations de bonnes intelligence avec les Touaregs ». La veille, Paris avait appelé le pouvoir malien à « s’engager sans plus attendre, des discussions avec les représentants légitimes des populations du Nord et les groupes armés non terroristes reconnaissant l’intégrité du Mali ». Le président malien par intérim, Diouncounda Traoré, de son côté, a estimé que « le seul groupe avec lequel nous pouvons envisager des négociations c’est certainement le MNLA, à condition que le MNLA renonce à toutes ses prétentions territoriales ». Pas gagné, même si le mouvement a montré une volonté d’assouplir ses exigences.

Autre souci : le MIA, désormais allié du MNLA, tente depuis quelques jours une percée pour participer aux pourpalers. Une option inenvisageable pour le président malien qui estime faisant allusion à la dissidence que « Ansar Dine s’est disqualifié ». « Il n’est plus éligible au dialogue quel que soit par ailleurs le masque que certains d’entre eux ont décidé de porter ».

Seule solution politique qui se dégage actuellement : négocier avec le seul MNLA. Pour André Bourgeot, cette solution ne conduira pas à la paix et à la justice escomptée. « Le MNLA est ultra-minoritaire, il est autoproclamé et ne peut pas prétendre représenter les populations du nord ». Le nord Mali est en effet composé de Sanghaïs en majorité, puis de Maures, d’Arabes et de Peuls. « Aucune tribu touareg n’a soutenu le MNLA par écrit. Les Français et les Maliens vont donc négocier avec un groupe qui ne représente que lui-même. La France essaie de remettre le pied à l’étrier du MNLA, pour que ce dernier apparaisse comme un groupe avec qui on peut négocier. Mais c’est de l’ingérence. Le MNLA peut participer aux négociations mais pas tout seul. Il faut des représentants de la société civile, des chefs de tribus et de toutes les ethnies. Sinon, on va créer de nouveaux problèmes politiques et mettre de l’huile sur le feu. D’autant que la population malienne est très remontée contre le MNLA et ne pardonne pas aux Touaregs d’avoir initié l’offensive il y neuf mois. »

Aucun calendrier n’a pour l’instant été ébauché pour cette réconciliation nationale. François Hollande est attendu samedi dans le pays, accompagné du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian et du ministre chargé du Développement, Pascal Canfin. La présence de ce dernier pousse à dire que le président français ne fera pas que saluer les soldats français. Paris pourrait consolider son rôle de médiateur. A quelques kilomètres des otages.

Source: nouvelobs.com - 01-02-2013

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