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L’influence geostrategique de la France sur l’Afrique neocolonoliale: Les raisons françaises de la déstabilisation du Mali
Publié le jeudi 28 juillet 2016  |  Le Prétoire
Gao:
© AFP par JEAN-FRANCOIS
Gao: Le ministre Jean-Yves Le Drian confirme le maintien d’un millier de soldats français au Mali
Dimanche 22 septembre 2013.Gao




La France se prépare à déstabiliser le Mali. Et pour cause. Il y en a trois qui relèvent principalement des
raisons classiques: les intérêts «français» et «individuels». Des intérêts français, la découverte du pétrole
au Mali en est le fait déclencheur des hostilités.

Bamako, 12 mai 2002, aussitôt élu Président de la République avec 64,35% des voix au deuxième tour, Amadou Toumani Touré (ATT pour
les intimes) fait un rêve,
celui de faire du Mali un
pays producteur de pé-
trole. Mais le rêve ne dit
pas que l’or noir est un or
du diable, qui insère son
producteur au rang de la
malédiction où d’autres
anciennes colonies fran-
çaises comme le Congo
Brazzaville, le Gabon...
sont, depuis, tenus en
laisse par Paris. Le Mali
peut toujours jouer le jeu
de la démocratie en organisant
des élections crédibles
et en assurant des
alternances dans la paix
tant qu’une goutte de pé-
trole ne coule pas encore
du bassin de Taoudéni
dans le nord du pays.
Taoudéni ? C’est à la fois
une cuvette dont le dépôt
centre atteint plus de
5000 m d’épaisseur et
une superficie d’environ
1.500.000 km², soit le
plus vaste bassin sédimentaire
on-shore d’Afrique
occidentale, qui s’étend
hors du Mali au Niger, en
Mauritanie, au Burkina
Faso et en Algérie. Cette
précision est d’une importante
capitale à noter
pour la suite de l’analyse.
Il est de bon augure pour
ATT de créer, dès 2004,
l’Autorité pour la promotion
de la recherche pétrolière
au Mali (Aurep). Des
conventions de partage
de production et de
concession pour 29 blocs
répartis sur cinq bassins
sédimentaires sont signées
entre le gouvernement
malien (9 blocs) et les sociétés
de recherche pétrolière
pour les 20 autres
blocs. Parmi ces sociétés,
il y a la Compagnie italienne
d’hydrocarbure
ENI (50%), l’australienne
Baraka Petroleum (25%)
et l’Algérienne Sipex
(25%), dont les opérations
de sondage sismique
des blocs 1, 2, 3, 4 et 9
sont assurées par l’Entreprise
nationale algérienne
de géophysique (Enageo),
une filiale de Sonatrach
qui est la
première des douze socié-
tés pétrolières d’Afrique.
Sans oublier l’apport de
46 milliards de FCFA par
PetroPlus Angola, destinés
à la promotion de la recherche
pétrolière, à l’exploitation,
au transport,
au raffinage des hydrocarbures
liquides et gazeux,
et à la formation du
personnel technique malien.
Très bien tout cela ! Sauf
que dans l’Eden du pé-
trole d’un pays tenu en
laisse par la France, citer
ou ne pas citer le nom de
Total/Elf est synonyme de
consommation d’un fruit
qui rend ivre et provoque
de grands changements
aux consommateurs. Car,
présent ou non auprès
d’eux, Total/Elf est un serpent
toujours présent dans
l’Eden du pétrole et dont
on ne peut qu’être péné-
tré de son influence.
L’ivraie s’introduit parmi le
bon grain; d’où le péché
originel qui expose d’ores
et déjà, pour de nombreuses
décennies, des
générations maliennes entières
à en payer le prix.
Deuxième raison de la dé-
stabilisation amorcée du
Mali, l’influence géostratégique
de la France sur
l’Afrique néocoloniale.
Sans pétrole, les Maliens
sont aujourd’hui fort diffé-
rents de ce que, hélas, ils
deviendront dans un
proche avenir. Leur paisible
existence n’est pas le
fait de la pauvreté du
pays qui les épargnerait
du vampirisme de l’ancien
colonisateur. Un ancien
colonisateur qui, pour
poursuivre le pillage de
ses anciennes colonies, a
toujours utilisé le principe
de «diviser pour mieux ré-
gner». Le Mali n’est pas
en effet ce pays que l’on
présente comme dé-
pourvu des matières premières
censées susciter la
convoitise des requins occidentaux.
Ce n’est pas
rien que d’être, comme le
Mali, le troisième producteur
d’or d’Afrique derrière
l’Afrique du sud et le
Ghana. Son bétail, son
coton, son fer, voire son
arachide sont autant de
produits d’exportation à
forte demande mondiale.
Avec le pétrole, les Maliens
recevront bientôt un
devenir formel et temporel.
Tout ce qui en eux de
spirituel actuellement se
muera en chair, matière,
instrumentalité et réceptivité…
exactement comme
au Congo Brazzaville !
Larmes et sang couleront
bientôt dans la miséricorde
d’une France, elle
aussi en larmes de crocodile,
qui se dira totalement
effondrée par la
pitié pour ce peuple africain
dont elle n’aurait toujours
voulu que du bien,
mais qui aurait préféré
vivre dans des souffrances
volontaires. Cette pauvre
France qui sera encore
obligée d’intervenir au
Mali comme elle l’a fait
en Côte d’Ivoire et en
Libye, où le peuple savoure
désormais le fruit
de la démocratie comme
jamais il n’en était aussi
savoureux dans aucune
autre grande démocratie
du monde.
Comme en Côte d’Ivoire
ou en Libye, le principe de
«diviser pour mieux ré-
gner» est parfaitement
sous orbite au Mali. Objectif:
commencer par diviser
le Mali en zones nord
et sud avec, au milieu des
deux zones, des armées
étrangères d’interposition
(genre Licorne, Casques
blancs, Casques bleus…)
qui, au nom de la réunification
du pays, les occuperont
progressivement
pour s’y implanter quasidéfinitivement,
le temps
que la France installe durablement
ses larbins et
s’assure de la mainmise
sur l’or noir annoncé afin
de procéder au pillage
avec autant de cruauté
que d’avidité. Ficelle de la
scission tirée dans la clandestinité
depuis Paris et
bien d’autres capitales occidentales,
les rebelles se
sont déjà constitués dans
le nord du Mali en un
mouvement tribal appelé
Azawad. Équipés par les
maîtres occidentaux d’une
quantité impressionnante
d’armes, de munitions et
autres matériels de guerre
en provenance d’Europe
et de la Libye, ils ont lancé
les attaques contre les
garnisons militaires de la
région et occupe actuellement
toute la partie nord
du pays. Pour affiner la
stratégie de la déstabilisation
du Mali, le Quai
d’Orsay peut sans gêne
recevoir à visage ouvert
les membres voilés de
cette rébellion d’autant
que toute forme d’aide
qui leur est due ne peut
que relever du bon sens,
le prétexte étant tout
trouvé: le combat contre
Al-Qaïda au Maghreb islamique.
La troisième raison de la
déstabilisation du Mali
par la France, enfin, relève
de la mesquinerie
d’un homme: Nicolas Sarkozy.
De Dominique de
Villepin à Mouammar Kadhafi
en passant par Laurent
Gbagbo, chacun
d’eux (du moins pour les
survivants) a ce souvenir
que Sarko n’oublie ni ne
rate quiconque l’aurait
éclaboussé sur le chemin
de ses abus du pouvoir au
point de réduire en affaire
personnelle toute affaire
d’État qui oserait contrarier
sa vision des choses.
Mieux que tout citoyen
malien, Nicolas Sarkozy
savait parfaitement
qu’Amadou Toumani
Touré était à un mois de
sa retraite politique et ne
se présenterait plus à
l’élection présidentielle
annoncée pour fin avril
2012. Malgré tout, lui laisser
partir sans l’humilier
passerait Sarko pour
vaincu; d’où le putsch qui
n’aura eu ni sens ni fondement.
En incitant une partie
de l’armée malienne à
destituer un président en
fin de mandat, Sarko a
voulu tout simplement se
faire plaisir, montrer qu’il
reste le chef et pousser ses
obligés (Cedeao, larbins
des palais, etc.) à s’occuper,
à se rendre indispensables
et à finir par
décliner leur impuissance
pour les obliger de faire
appel à l’éternel sauveur,
la France.
Parvenue à ses fins, la
France dirait qu’elle n’aurait
rien fait en soi qui ne
fût un ordre venu des Africains
eux-mêmes ou de
l’ONU. Vis-à-vis de Nicolas
Sarkozy, ATT aura
ainsi payé un temps ses
doutes dans la manière
d’instaurer la démocratie
en Côte d’Ivoire et son opposition
à l’assassinat de
Kadhafi par Nicolas Sarkozy,
au nom de la démocratie
alors qu’en réalité,
les raisons de la haine
sont strictement personnelles.
ATT humilié, le
putsch n’a plus de raison
d’être; les abrutis à l’ordre
et au service du maî-
tre n’ont plus qu’à rétablir
les institutions déclarées
caduques il y a seulement
quelques semaines et rentrer
dans les casernes
pour attendre, disciplinés,
que l’armée véritable dé-
barque de Paris pour
venir tracer les limites de
la division du Mali.
En entendant que les larbins
d’Abidjan et de Ouagadougou,
courroie de
transmission via la Cedeao,
transmettent l’ordre
venu de l’Élysée pour annexer
le Mali au concert
des nations non plus de la
démocratie initiée par
ATT, mais de celle de la
Françafrique, si chère aux
valeurs de la République
française. Et ce, pour de
longs siècles encore, tant
que la « mère patrie »
trouvera sur le sol africain
des répondants qui sont
toujours prêts à passer
pour de braves soldats…
en fait de piètres serviteurs.
Calixte BANIAFOUNA
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