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La filière ferraille de récupération : Un filon qui promet
Publié le jeudi 18 aout 2016  |  L’Essor




Le royaume de la ferraille se trouve au pied de la colline du Point G, au marché Sougouninkoura, en Commune II du District de Bamako. Ici, plus de cinq cent personnes travaillent dans la collecte, la transformation et l’exportation de métaux à base de fer.

Le fer joue depuis la nuit des temps un rôle essentiel dans le progrès de l’humanité. Infrastructures routières, industrie automobile, aéronautique, électroménager, tous les pays industrialisés du monde doivent une partie de leur puissance à la maitrise de la transformation du fer. Dans les pays en voie de développement comme le notre, l’activité liée au fer n’a pas encore atteint un niveau industriel satisfaisant. Du coup, plus que le fer à l’état brut, c’est la ferraille qui constitue un filon pour nombres de nos artisans. Ainsi la collecte, le transport, la vente et la transformation de la ferraille sont des activités qui attirent des centaines de bras valides et drainent une manne financière importante. La ferraille désigne les déchets d’acier extraits d’objets hors d’usage mis à la casse.

A Bamako, le royaume de la ferraille se trouve au pied de la colline du Point G, au marché Sougouninkoura, en Commune II. Sur une superficie de plus d’un hectare, le dépôt de ferraille forme un véritable cimetière de métaux. Difficile de se croire en plein cœur de Bamako. De la ferraille de tout genre, de tout calibre et à perte de vue : épaves d’automobiles, vieilles usines démontées, boîtes métalliques et bien d’autres objets en fer usagés ou abandonnés. Dans cette ambiance, combinée avec le bruit incessant de marteaux, le crépitement de meules et broches de soudure, il faut crier fort pour se faire entendre. Plus de cinq cent personnes travaillent sur le site, dans la collecte, la transformation et l’exportation de métaux à base de fer.

Sur place, le spectacle est saisissant, le destin de la ferraille ne connaît que deux issues possibles : la réutilisation comme pièces de rechange et le recyclage. Le gros du travail est fait à la main. La première des choses est le découpage de la ferraille pour donner au métal une forme qui facilite son transport et son utilisation. Sous un des multiples hangars qui lui sert en même temps de bureau et d’aire de repos, Bouna Fané, le patron des lieux, est allongé dans un vieux fauteuil tandis que ses apprentis, visiblement épuisés s’accoudent sur un banc de fortune enfoui dans le sol. Ce sont des artisans aux gros muscles qui laissent apparaître les traces accumulées sous le poids de plusieurs années d’exercice. A coté du hangar, sous un arbre, deux autres jeunes sont à l’œuvre pour séparer le cuivre, l’aluminium et le fer contenus dans un moteur de voiture. Tout le pourtour de l’atelier est parsemé d’objets métalliques. A peine si on peut se frayer un chemin. Ici on parle, on respire et on réfléchit fer.

« Ce moteur que vous voyez vient d’un camion-benne que j’ai acheté à 350 000 Fcfa. Comme il ne peut plus rouler, il faut le dépiécer pour essayer d’en tirer le maximum de profit », explique Bouna. Le travail de Bouna consiste à revendre la ferraille mais au préalable, il faut trier les différents métaux. « Ici, il y a des garages de réparation de véhicules qui achètent les pièces qui peuvent encore servir, le reste est vendu au kilogramme. Si le kilo de fer varie entre 70 et 90 Fcfa, l’aluminium se situe entre 500 et 600 Fcfa, le cuivre atteint 2000 Fcfa et le bronze est à 100 Fcfa.

EXPORTATION CONTRE DEMANDE INTERIEURE. Selon Bouna, économiquement, le métier nourrissait son homme mais il regrette que, pour eux les revendeurs, la belle époque de la ferraille soit révolue. Et pour cause ! Depuis l’installation des usines de fonderie au Mali la donne a changé. « A l’époque, nous avions pensé que l’installation des usines nous était bénéfique mais c’est le contraire qui s’est produit », dit-il.
L’explication que donnent les exportateurs est que depuis que l’usine a ouvert, « les autorités maliennes ne veulent plus que nous exportions la ferraille. Elles nous obligent à satisfaire la demande d’IMAFER avant d’exporter. Le hic est que l’usine n’achète que le fer léger et à bas prix en plus ». Selon lui, le prix à l’exportation est plus intéressant que celui proposé par IMAFER. « A l’exportation, on pouvait vendre jusqu’à 150 Fcfa le kilo de ferraille alors que l’usine ne le prend qu’à 85 f CFA. Même si on applique le coup du transport l’exportation est plus rentable », estime notre interlocuteur

Pour Seydou Diallo l’argument des autorités, selon lequel l’usine fait travailler beaucoup de personnes et payent des taxes, ne tient pas car, avant l’usine, la ferraille faisait vivre des milliers de personnes au Mali. « L’usine achète le fer moins cher avec les collecteurs mais le produit qu’elle met sur le marché, après transformation, coûte très cher », dit Diallo.

En outre, estiment les ferrailleurs, le fer lourd, comme les ponts de voiture et autres, ne peut pas être fondu au Mali. Son exportation vers le Sénégal ou la Côte d’Ivoire est tout aussi pénible vu le coût élevé du transport. « Nous enregistrons beaucoup de pertes à ce niveau également », dit Bouna, notre autre interlocuteur.

La ferraille à Bamako, c’est aussi une transformation artisanale dont les origines remontent à très longtemps. Même si le volume destiné à cette activité est moins important, ils sont des centaines d’artisans-forgerons, au dépôt de ferraille de Sougouninkoura, à donner une seconde vie à des quantités industrielles de ferraille. Avec ces métaux ferreux, ils fabriquent des charrues, des fourneaux, des brouettes, des portes métalliques, des cuves et beaucoup d’autres objets qui sont mis sur le marché.

Les frères jumeaux Samassékou fabriquent des équipements agricoles et autres outils destinés aux travaux champêtres. Sourire constant aux lèvres, Housseyni, un des jumeaux, nous montre les outils rudimentaires qu’ils utilisent pour modeler la ferraille. Comme ses aïeux, il y a des siècles, mais avec un peu mieux en terme de modernité des outils, tout se passe entre marteaux et enclumes, soufflet, tenailles, burins, ciseaux et autres instruments de forge qui servent d’instruments de travail. Toute la production est faite à partir de la ferraille de récupération. Par exemple pour la fabrication des charrues, ils utilisent d’anciens ponts de voiture sur lequel est posée une benne fabriquée aussi à l’aide de vieilles tôles bien travaillés. Le tout est prolongé par deux barres qui seront posées sur le dos des animaux de trait.

Pour nos deux forgerons, la difficulté dans ce métier est le manque de matériel moderne et performant. Ce qui fait que la production des outils prend énormément de temps. « Il s’y ajoute que la vente au prix actuel ne rapporte pas gros, cela ne permet pas de faire des profits mais juste le nécessaire pour nourrir sa famille », disent, en chœur, ferrailleurs-exportateurs et artisans.
L. ALMOULOUD
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