Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

L’insurrection gagne le centre du Mali où l’Etat n’est plus crédible
Publié le mardi 13 septembre 2016  |  ouest-france.fr
Carte
© Autre presse
Carte du mali
Le pays fait partie de la Communauté économique des États de l`Afrique de l`Ouest (CEDEAO) et de l`Union africaine
Comment


L'International Crisis Group a publié en juillet un rapport intitulé "Mali central: la fabrique d’une insurrection ?" (Rapport 238/Afrique, 6 juillet 2016, à lire ici en français).

François Rihouay, notre correspondant à Bamako, a interviewé Jean-Hervé Jézéquel, directeur adjoint du projet Afrique de l’Ouest de l'International Crisis Group. Le chercheur revient sur la montée inquiétante des violences armées.

jezequel-jean-herve.jpgUne série d’attaques a frappé les régions de Mopti et Ségou, au centre du pays, ces derniers jours. Comment expliquer cette extension de la violence du nord vers le sud du Mali ?
La plupart des incidents armés se déroulent dans des zones rurales négligées par l’Etat, agitées par de fortes tensions locales autour de la gestion des ressources naturelles. Les populations du centre ont vu dans l'accès aux armes de guerre un moyen de se protéger et parfois de contester les hiérarchies en place. Sur ce terreau fertile, des groupes jihadistes se sont ré-implantés. Ces derniers viennent combler un vide sécuritaire et l’absence de l’Etat auprès des populations, nomades notamment, qui sont régulièrement menacées ou volées.

Y a-t-il là un glissement de l’opinion populaire en faveur des islamistes radicaux ?
Il y a en tout cas un passif de relations tumultueuses entre les populations du centre du pays et l’Etat. Pendant la crise malienne de 2012, de vastes territoires ont été laissés à l’abandon. En 2013, l’opération militaire française Serval a permis de chasser les groupes armés de la région mais le retour de l’Etat s’est, par la suite, opéré essentiellement à travers le redéploiement de l’armée Celle-ci s’est rendue coupable d’exactions, notamment à l’égard de populations peul suspectées de collaborer avec des groupes djihadistes. Ces abus ont renforcé le sentiment de défiance d’une partie des populations à l’égard d’autorités trop longtemps absentes et souvent corrompues. Par ailleurs, l’accord de paix et de réconciliation signé en juin 2015 par les groupes armés rebelles a largement négligé l’importance de cette zone charnière entre le sud et le nord. Dans ce contexte, les groupes djihadistes constituent une forme de réponse à une demande locale de justice, de sécurité et plus largement de moralisation du politique. Ils sont encore minoritaires mais leur influence grandit face à un Etat en manque de crédit

La MINUSMA prévoit de passer de 11 à 13500 le nombre de casques bleus déployés au Mali. Les renforts prévus au centre du pays endigueront-ils cette menace ?
Le risque est que ce déploiement ne fasse que de nouvelles cibles aux assaillants. Si l’on s’en tient à ce qui se passe dans les principales villes du nord, comme à Gao ou à Kidal, la force onusienne utilise l’essentiel de ses moyens à sa propre protection, et ne peut assurer une réelle sécurisation des populations locales. Il ne faut pourtant pas lui jeter la pierre. C’est surtout aux autorités maliennes de régler le problème en reprenant pied dans les régions du centre. La communauté internationale, en particulier la MINUSMA, devrait moins compter sur le déploiement d’un contingent de casques bleus supplémentaire et soutenir plus les efforts pour créer des forces de sécurité légitimes et adaptées aux conditions locales. De même, au vue de l’extension des violences armées, les deux missions européennes de soutien aux forces de défense et de sécurité malienne, EUTM Mali depuis 2013 et EUCAP Sahel-Mali depuis 2015, devraient tirer les leçons de leurs premières années d’action. Elles restent trop repliées sur Bamako formulant des plans de formation ambitieux mais parfois déconnectés des réalités de terrain. Elles gagneraient à se porter aussi au contact des forces maliennes à l’intérieur du pays.
Commentaires