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Le maire de Diéma à propos de la situation sécuritaire : «L’enlèvement du Français Gilberto à Diéma est une mise en scène»
Publié le jeudi 21 fevrier 2013  |  Le Prétoire




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Dans cette interview exclusive, le maire de la commune rurale de Diéma, Sadio Tounkara, fait le point sur la situation sécuritaire de sa commune projetée sous les feux des projecteurs depuis l’enlèvement du Français d’origine portugaise, Gilberto Rodriguez Léal, pris en otage en novembre dernier par le Mujao, un groupe terroriste qui occupait la ville de Gao. Mais selon le Maire, cette affaire relève d’une simple mise en scène et l’élu sait bien de quoi il parle. Lisez plutôt.

Le Prétoire: Quelle appréciation faites-vous de la situation sécuritaire de la commune rurale de Diéma?

Sadio Tounkara: Diéma, comme les autres communes du Mali en général et de la région de Kayes en particulier, déplore la situation sécuritaire du pays. Certes la localité de Diéma est concernée par le problème du nord, mais il faut savoir que nous avons aussi des problèmes internes. C’est notamment la délinquance, avec l’implication des habitants, dans la mesure où nous sommes débordés par des formes de violence comme des vols de bétail, cambriolages et attaques à main armée. En effet, les commerçants qui vont de marché en marché sont souvent victimes de braquage. Les paisibles voyageurs ne sont pas aussi épargnés. Tout ceci explique pourquoi nous sommes inquiets, d’autant plus que les solutions ne sont pas là. Effectivement, il y a que non seulement l’effectif des forces de l’ordre est insuffisant, mais aussi nous ne disposons pas de moyens adéquats pour faire face à la situation. En réalité, c’est déplorable de voir, aujourd’hui, que le cercle de Diéma n’a que 35 éléments de la gendarmerie avec 5 postes. Il faut savoir aussi que la brigade de la gendarmerie ne dispose même pas d’une seule moto en bon état. Compte tenu de la grandeur de notre cercle, il y a des villages qui peuvent faire deux ou trois ans sans pour autant voir un seul gendarme ou garde de passage. Aussi, il faut signaler que nous sommes en permanence menacés de tous les côtés par de petits bandits. A la prison de Diéma, il n’y a que de jeunes délinquants, généralement inculpés pour vol de bétails, braquage et attaque à main armée. Du jour au lendemain, ce sont les jeunes de la localité qui se convertissent en bandits pour se livrer à des actes criminels. En 2012, nous avons recensé, dans le seul village de Tinkaré, plus de 120 bovins volés.

Au vu de la situation géographique de Diéma, pensez-vous que vous êtes à l’abri de l’insécurité, en pensant aux islamistes du nord ?

Il faut reconnaitre que certains responsables du pays minimisent la position géographique de Diéma. Alors que du Baoulé à Nouakchott, on peut faire le trajet sans passer par un hameau, à plus forte raison un village. Donc c’est la brousse et rien ne nous prouve que nous sommes à l’abri de ces islamistes.

Quelles sont les dispositions prises par les autorités locales depuis le début cette crise?
Oui, nous avons pris des dispositions locales avec les autorités administratives et la population. Nous avons été obligés de réquisitionner les véhicules des services de développement, notamment les services de l’Agriculture, la Santé, l’Elevage et autres, pour les mettre à la disposition des forces de sécurité afin qu’ils puissent assurer le minimum de service, notamment pour organiser des patrouilles. Mais pour assurer le carburant des deux ou trois véhicules réquisitionnés, les collectivités ont été obligées de cotiser. Ensuite, il a été mis en place des brigades de vigilance pour fournir de façon régulière les informations à qui de droit. Et ces brigades de vigilance ont été redéployées dans presque tous les villages du cercle de Diéma et sont toujours fonctionnelles. Nous avons toujours déploré le manque de moyens, d’où nos requêtes auprès des autorités centrales. Mais il s’est avéré que ces requêtes n’ont jamais eu des échos favorables.

Quelle lecture faites-vous de la prise d’otage du Français, Gilberto Rodriguez Léal, enlevé dans le cercle de Diéma?

Ce n’est pas ma première fois de déplorer cette situation. J’ai eu à manifester mon mécontentement à plus d’un titre auprès de quelques journalistes de la presse internationale. Dès le lendemain de l’acte, au nom de ma commune, j’ai eu à déposer une plainte devant la juridiction compétente. Nous avons subi trop de pertes avec cet évènement malheureux. D’abord cela a joué sur l’économie, dans la mesure où la ville recevait beaucoup de touristes. Et depuis lors, je n’ai pas vu un seul étranger dans ma commune. C’est d’ailleurs avec la sensibilisation des uns et des autres que nous avons pu retenir les Ong humanitaires qui aussi étaient sur le point de partir. La raison de ma plainte va aussi à l’encontre de la protection de ma population. Un facteur très important qu’il ne faut pas négliger. Lors de l’enlèvement, les bandits sont venus avec des armes pour réaliser cette opération. Et si les habitants sans défense avaient tenté de les en empêcher, il y aurait certainement eu beaucoup de morts. Ce cas est une première dans notre localité.

Après analyse approfondie de cette prise d’otage, je peux dire que l’action ressemble à une mise en scène parfaite du Français et ces islamistes. En effet, la manière dont cette action s’est déroulée laisse à réfléchir. Je n’ai pas besoin de vous renseigner sur le contenu du rapport d’enquête déposé au niveau de l’ambassade de France, mais il faut dire que Gilberto s’attendait vraiment à cela, autrement dit à être capturé. Et c’est un coup monté pour venir salir le nom de notre localité. Gilberto Rodriguez Léal savait pertinemment qu’on le suivait, parce qu’il a eu à contacter ces gens quand il était en Mauritanie. Ce qui veut dire qu’il connaissait bien ses ravisseurs. Et si cette personne vient jusqu’à l’intérieur de la ville sans se présenter à la brigade de la gendarmerie ou à la douane, cela signifie en clair qu’il a cherché à être enlevé. En plus, il ne s’est aucunement manifesté devant les autorités compétentes de la ville de Diéma à son arrivée. Et quand il est rentré dans la ville, il a pris le temps d’aller à la radio pour communiquer avec sa famille résidant en France par internet. En outre, ce qui me paraît obscure dans cette histoire, c’est qu’il échangeait avec sa famille en arabe. En conclusion, dans son journal, il disait qu’il a beaucoup appris avec ces gens sur le Mali. Donc à vous d’apprécier la situation à votre tour.

Quel est votre message à l’encontre des autorités du Mali ?

Comme dernier mot, je demande aux autorités du Mali de venir en aide à la population de Diéma qui est dans toutes les difficultés imaginables. Les forces de l’ordre qui sont sur place ne peuvent pas assurer le minimum de service dont nous avons besoin. Cela s’explique en grande partie par non seulement le manque de moyens adéquats, mais aussi par la carence de personnel.
Propos recueillis par Ibrahim M.GUEYE
envoyé spécial à Diéma

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