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Cour d’Assises de Sikasso : De blocage en blocage…
Publié le jeudi 8 decembre 2016  |  L’aube
Procès
© Autre presse
Procès de Amadou Haya Sanogo et ses co-accusés à Sikasso
Bamako, le 30 novembre 2016 Ouverture du Procès de Amadou Haya Sanogo et ses co-accusés à Sikasso
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Le dossier dit affaire des bérets rouges sera-t-il finalement jugé ou non par la Cour d’assises de Bamako en transport à Sikasso ? La question est sur toutes les lèvres. Et pour cause : les blocages se succèdent, prolongeant l’angoisse des familles des victimes.

Le lundi 5 décembre, le blocage concernant l’interdiction des téléphones dans la salle d’audience était levé. Mais aussitôt après, un autre goulot d’étranglement s’est révélé, à savoir l’absence des témoins.
Or, la comparution de ces derniers est indispensable dans un procès d’assises. Aucun témoin cité ne s’est, en effet, présenté à la barre. Constat en a été fait par toutes les parties (civile et défense) ainsi que par le parquet. « Nos témoins ne sont pas encore là », a fait remarquer, en premier, l’avocat général, Mohamed Maouloud Najim, qui a estimé que les débats pouvaient commencer en leur absence. « Ils peuvent nous rejoindre en cours », a-t-il indiqué.

Sauf que les avocats de la défense, eux, ne sont pas de cet avis. Pour ces derniers, les témoins peuvent venir discrètement dans la salle et assister aux débats. Me Arouna Toureh et Tiessolo Konaré, tous deux avocats de la défense, ont estimé que c’est au ministère public de « se passer de ses témoins » ou d’appliquer la loi en les « faisant comparaître par la force publique ».
Me Moctar Mariko, un conseil de la partie civile, n’en pense pas moins. Mieux, il affirme constater un amateurisme total dans l’organisation de ce procès. L’avocat ne s’explique pas comment les assesseurs, qui n’ont pas lu le dossier, pourront apprécier les faits et donner leur avis.
« Ils ne peuvent se faire une religion de l’affaire qu’à travers les débats et surtout les témoignages à la barre », a souligné Me Mariko qui, dans la foulée, a exprimé la souffrance de ses clients (la partie civile) qui sont logés dans les hôtels à leurs propres frais.

Le parquet refuse les accusations des avocats. Selon le procureur général, Mamadou Lamine Coulibaly, pratiquement tous les témoins étaient présents à l’ouverture, le 30 novembre.
Après une demi-heure de concertation, la Cour a décidé la 3ème suspension de l’audience.
On en était là, jusqu’à ce mercredi 7 décembre 2016. Et ce deuxième blocage a été levé. Quatorze (14) témoins ont effectué le voyage sur Sikasso, de plein gré, a-t-on appris de source crédible. Ce sont des hauts gradés de l’armée qui ont manqué à l’appel, notamment Didier Dacko, chef d’Etat-major des armées, Oumar Daou, chef d’Etat-major particulier du président de la République, et Diamou Keïta, Ambassadeur du Mali en Angola.
Plusieurs exceptions…

Pour autant, la situation n’était pas totalement débloquée. Les avocats de la défense ont soulevé plusieurs exceptions dans la procédure. Ils sont allés jusqu’à mettre en cause l’expertise des corps retrouvés dans le charnier à Diago, d’une part ; et d’autre part, la compétence de cette Cour à juger des militaires, de surcroit des généraux. Les avocats de la défense sont formels : l’affaire doit purement et simplement être renvoyée.

Au nombre des incohérences relevées par rapport à l’expertise en question, les avocats de la défense ont défendu que ce travail a concerné 25 corps au lieu des 21 retrouvés dans la fausse commune découverte à Diago. D’où, selon les avocats, la nécessité de revenir sur cette expertise, et au besoin faire venir les experts à la barre. Impossible, rétorque le parquet qui rappelle que les avocats de la défense ont été incapables de faire venir les témoins de leurs clients à la barre. Lesquels témoins sont à Bamako, à quelques kilomètres de Sikasso.
« Or les experts dont il est question sont en Europe. Comment pourrait-on les faire venir ?», a lancé l’avocat général.

Autant le parquet est convaincu que cette Cour d’assises est bel et bien compétente pour juger Amadou Haya Sanogo, Ibrahima Dahirou Dembélé et autres. Seul le cas Yamoussa Camara, alors ministre de la République au moment des faits, semble embarrasser le parquet. Ce dernier, à en croire l’avocat général, peut faire l’objet d’une autre procédure. « Sinon, tous les autres sont des justiciables de cette Cour », a martelé Mohamed Maouloud Najim.
« Et pourtant, elle (la cour) ne peut pas, qu’on le veuille ou non », a déclaré Me Arouna Toureh qui, au-delà, trouve incompréhensible qu’aucun magistrat militaire ne figure parmi les membres de la Cour.

L’avocat a ajouté que les témoins, plus précisément les officiers généraux, ne se sont pas présentés parce qu’ils estiment justement que cette « formation en tant que tribunal de droit commun » n’est pas compétente pour trancher une affaire qui implique des militaires.
Il a aussi déclaré que « Yamoussa Camara est arbitrairement détenu. Et qu’il doit être libéré d’office » ; de même que les autres accusés dont les mandats de dépôts n’auraient pas été régulièrement renouvelés. « C’est faux. Tous les mandats étaient renouvelés régulièrement et les notifications existent pour prouver ce fait », a rétorqué l’avocat général. Celui-ci a qualifié les avocats de la défense de « beaux parleurs » qui mettent tout en œuvre pour faire échouer ce procès.

Pour la partie civile, ces exceptions ont été soulevées par les avocats de la défense pour juste sauver « les têtes de leurs clients ». « En réalité, aucune d’entre elles ne tient la route. Tous ce qu’ils ont avancé ont été balayés d’un revers de la main par la chambre d’accusation», a déclaré Me Moctar Mariko.

De son côté, après la suspension de l’audience, Me Arouna Toureh a déploré plutôt l’impréparation du dossier qui « n’est pas en état d’être jugé ». « Les citations sont irrégulières, les expertises ont été faites contrairement à la loi, des témoins n’ont pas comparu, certains actes n’ont pas été régulièrement notifiés à nos clients », a énuméré Me Touré. Et il estime que ces irrégularités doivent avoir pour conséquence le renvoi immédiat de cette affaire. Et si l’affaire n’est pas renvoyée ? « Je ne dis pas qu’on quittera la salle d’audience, mais on va prendre toutes nos responsabilités, quoi qu’il arrive », répond Me Toureh.
L’incertitude plane donc sur la suite du procès qui reprend, aujourd’hui jeudi 8 décembre à 11 heures.

Issa B Dembélé, Envoyé spécial

LISTES AVOCATS
Pour la défense : Arouna Toureh, Tiéssolo Konaré, Alassane Sangaré, Mohamed Diop, Mariam Diawara, Saloum Souaré Tabouré, Boubacar Soumaré, Halimane B Abdrahamane, Bocar Karamonko Coulibaly, Cheik Oumar Konaré…
Pour la partie civile : Me Moctar Mariko, Hamidou Diabaté, Waly Diawara, Yacouba Doumbia, Me Mangara.
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