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Le Républicain N° 4584 du 22/3/2013

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Chronique du vendredi : Un martyr : Daou, une victime : le Mali
Publié le vendredi 22 mars 2013  |  Le Républicain




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Puisque Boukary Daou est en train de boucler sa deuxième semaine de privation de liberté, l’article qui lui vaut cette infortune aura été jugé plus mauvais pour le moral des troupes que les propos du Colonel Dako qui dans une interview-pamphlet est allé jusqu’à constater « la putréfaction de l’armée » et que les propos du procureur Tessougué qui dénonçait sur les antennes de télé que les troupes à Gao n’avaient rien à manger.
Le parallélisme des formes a suscité la colère de notre confrère La nouvelle République d’hier qui en a déduit que la presse est injustement le souffre-douleur du pouvoir. Nicolas Sarkozy doit sans doute penser la même chose lui qui s’est demandé publiquement, sans être convoqué par sa « SE » ou entendu par un juge, ce que l’armée française cherchait « dans la galère » malienne, avec 4000 hommes dans un territoire plus vaste que la France ! La France est-elle pourtant plus laxiste que le Mali ? Ces propos ne sont-ils pas un rien séditieux ? En tout cas, ce n’est pas pour booster le moral des troupes et c’est là que l’affaire Boukary Daou, dans la dimension qui lui est donnée, devient intrigante. Oui, certains confrères qui ont reçu une copie de la lettre ouverte ont jugée prudent de ne pas la publier. Oui, nous sommes en guerre et en état d’urgence et cela requiert plus de précautions pour la presse. Les questions sur l’identité réelle du fameux Capitaine Touré et de ses intentions véritables ne sont pas inintéressantes. Et si les enquêtes officielles avaient établi que cet officier n’existait pas, nous aurions été dans un cas pratique de partenariat entre les forces de défense et la presse qui aurait été bien plus utile et pédagogique que le traitement fait de l’affaire jusque-là. Il faut en plus dire qu’avant d’être publié par le Républicain, l’article en question avait été posté sur des sitewebs, donc vus à Gao, Kidal, Tombouctou, Mopti, Nouakchott et Buenos Aires en même temps. Nul doute, de toutes manières, que l’affaire relance le débat sur les instruments de régulation et d’autorégulation de la presse locale Là-dessus, les journalistes doivent éviter d’accepter le procès facile qu’ils sont les seules plaies de notre processus démocratique. Il y a des journalistes-bidon comme des juges bidon, des officiers bidon, des enseignants bidon, des médecins bidon et des ministres bidon. Et le problème n’est pas que les journalistes ne sont pas formés. Il est souvent qu’ils sont déformés. Gaoussou Drabo, en son temps, avait superbement tranché la question, se détachant de nombre de ses confrères du public qui cherchaient à accréditer l’idée que la verrue c’était dans la presse privée et les grains de beauté dans les médias publics. En somme, l’hommage du vice à la vertu. La vérité est qu’aucun secteur ne sort la tête de l’eau dans ce pays dont nous savons tous que le fléau est la qualité de ses ressources humaines, à tous les échelons. Revenant pour conclure, à l’affaire Daou, constatons les dégâts. Pas sur le journaliste lui-même. Il souffre dans sa chair et il aurait tout donné pour être avec son adorable fillette Adame qui ne le quitte pas. Mais il est désormais ce qui n’était prévu pas qu’il fût : un martyr soutenu par tous ses confrères de l’intérieur comme de l’extérieur, de même que par l’Exécutif des grandes démocraties Seules victimes : le Mali, un pays appuyé par le monde entier et où des soldats étrangers ont accepté de venir mourir pendant que ses enfants s’étripent.
Adam Thiam

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