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Révision constitutionnelle : la charrue avant les bœufs !
Publié le mercredi 14 juin 2017  |  Le Canard Déchaîné
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Le pouvoir se comporte comme si la nouvelle constitution passera au référendum. Comme une lettre à la poste. Or, bien d’étapes restent, encore, à franchir. Avant qu’elle ne soit soumise au vote de nos concitoyens.

Première étape, visiblement, ignorée par le pouvoir : la soumission de la nouvelle constitution à la Cour constitutionnelle pour avis. Conformément, à la loi organique n°97-010 du 11 février 1997 sur la Cour constitutionnelle, de son règlement intérieur, qui disposent que : « La Cour constitutionnelle veille à la régularité des opérations de référendum et en proclame les résultats. A ce titre, elle est consultée par le gouvernement pour l’organisation des opérations de référendum. Elle porte toutes observations qu’elle juge utiles ».

Le pouvoir craint-il l’avis de la Cour constitutionnelle ?

Cette procédure est, selon les experts, obligatoire. Les présidents Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré ont, tous deux, respecté cette procédure. Le premier avait saisi la Cour constitutionnelle le 2 octobre 2001 de la loi constitutionnelle n°00-54/AN-RM, votée le 21 juillet 2000 ; tandis que le second, l’avait fait le 20 février 2012, après l’adoption le 2 août 2011 de la loi constitutionnelle n°11-056/AN-RM. Mieux, les avis rendus, par la Cour constitutionnelle, suite à ces deux consultations, ont été rendus publics. Et publiés dans le journal officiel. « Cet avis est destiné à l’information du public par sa publication au journal officiel, avant la convocation du collège électoral ».
En effet, l’avis de la Cour constitutionnelle porte sur la régularité de la procédure de révision constitutionnelle ; mais aussi, sur les nouvelles dispositions de cette nouvelle constitution. En clair, il s’agira pour la Cour constitutionnelle de savoir si elle (la nouvelle constitution) constitue un progrès ou une régression dans la promotion et la protection des droits de la personne humaine. Comme on le voit, le pouvoir semble vouloir brûler cette étape, jugée cruciale dans cette procédure.
Vient, ensuite, la violation de l’article 118, alinéa 3 qui dispose que « aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il porté atteinte à l’intégrité du territoire ».
Au jour d’aujourd’hui, l’Etat malien ne contrôle que 30 % du territoire national. Les 70 % seraient occupés par les djihadistes et alliés narcotrafiquants. Ou par des forces étrangères, dont la complaisance vis à vis de certains Groupes armés est un secret de polichinelle.

Les Maliens dubitatifs, face au référendum

Autre incongruité de cette nouvelle constitution : l’article 61 qui stipule que « les sénateurs sont élus pour deux tiers au suffrage universel indirect. Un tiers des sénateurs est désigné par le président de la République ».
Question : les sénateurs élus au suffrage universel indirect et ceux désignés par le président de la République sont-ils régis par la même loi ? Disposent-ils des mêmes mandats ? Aucune réponse à ces questions dans la nouvelle constitution, que le pouvoir s’apprête à soumettre au référendum le 9 juillet prochain.
Plus grave encore : selon la nouvelle constitution, en cas de vacance du pouvoir, l’intérim est assuré par le président de l’Assemblée nationale. Or, dans tous les pays du monde où il existe deux chambres (l’Assemblée nationale appelée la chambre basse et le Sénat désigné sous le nom de chambre haute), c’est le président du Sénat. Qui assure l’intérim, en attendant l’organisation de l’élection présidentielle.
Pour l’opposition politique, cette révision constitutionnelle est inopportune.
« La vitalité de notre démocratie est tributaire de la séparation des pouvoirs, du renforcement des contre-pouvoirs, de l’efficacité des organes de contrôle et de l’indépendance de la justice », indique Mr Mody N’Diaye, président du Groupe parlementaire « VRD ». C’était le 8 juin dernier, à la faveur d’un point de presse.
Pour le député, élu à Barouéli, le président de la Commission des Lois de l’Assemblée nationale a présenté 75 amendements après des conciliabules avec le gouvernement sur les 80 amendements, qui accompagnaient son rapport, lu devant la plénière. Après les modifications, apportées à ces 80 amendements, ceux-ci ont été, purement et simplement, retirés et les délibérations ont porté sur les 75 amendements substitués. Pire, ajoute-t-il, la révision de la constitution a entrainé la modification de 17 articles de la constitution en vigueur.
Malgré tout, le pouvoir tente de convaincre l’opinion que nous nous ne sommes pas dans une autre République, la quatrième du genre.
Selon le député de l’opposition, toutes les nouvelles dispositions, relatives aux collectivités territoriales, ont été supprimées par l’Assemblée nationale. Bien plus, assure-t-il, « la nouvelle constitution ne fixe pas la date de l’investiture du président de la République ». Une omission qui vaut son pesant de cacahuètes.
S’y ajoutent la modification d’autres dispositions de la constitution, dénoncées par l’opposition politique. Notamment, l’abandon de l’âge minimum de 35 ans pour être candidat à la présidence de la République, la nomination du président de la Cour constitutionnelle par le président de la République, alors que celui-ci était élu par ses pairs…… Autant de raisons qui ont poussé l’opposition politique à rejeter, par 35 voix, le projet de nouvelle constitution.
Et Mr N’Diaye de conclure : « La procédure de révision de la constitution, à travers une demande du président de la République approuvée par le Parlement, sans passer par la consultation du peuple, constitue des dérives inacceptables pour notre démocratie ».
Pour Tiébilé Dramé, président du Parena, la révision de la constitution ne s’impose pas. Surtout, dit-il, dans le contexte actuel. « La nouvelle constitution divise les Maliens », a-t-il ajouté, à l’issue de sa conférence de presse, organisée samedi dernier.
C’est pour toutes ces raisons, et bien d’autres encore, que les Maliens sont dubitatifs face à ce référendum, prévu pour le 9 juillet prochain.
La campagne pour le référendum s’ouvre le 23 juin prochain.
Oumar Babi

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