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Mme Sy Kadiatou Sow, présidente de la coordination de la plateforme “AN Tè A BANA” : «Nous sommes prêts au dialogue ou à des concertations pour exprimer et défendre notre point de vue»
Publié le samedi 24 juin 2017  |  Aujourd`hui
Assemblée
© aBamako.com par A.S
Assemblée générale ordinaire de l’ADEMA-Association
Bamako, le 04 juin 2016 l`ADEMA-Association a tenu son Assemblée générale ordinaire a la pyramide
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Dans un entretien à bâtons rompus, la présidente de la Coordination de la plateforme “An tè A Bana. Touche pas à ma Constitution”, Mme Sy Kadiatou Sow, précise : «Nous sommes prêts au dialogue ou à des concertations pour exprimer et défendre notre point de vue afin de faire des propositions concrètes. Nous attendons cela volontiers».

AUJOURD’HUI : Mme Sy, vous êtes un des leaders du mouvement “An tè A Bana. Touche pas à ma constitution” qui a fait une grande démonstration de force le samedi dernier. D’abord pourquoi cette plateforme ?



Mme Sy Kadiatou Sow : Je suis Mme Sy Kadiatou Sow, la présidente de la Coordination de la plateforme “An tè A Bana. Touche pas à ma Constitution”. Cette plateforme s’est constituée autour d’un seul objectif, c’est de dire Non à cette révision constitutionnelle dans le contexte actuel dans lequel notre pays vit. Nous disons Non au référendum !

Il faut préciser que nous nous sommes retrouvés de façon spontanée parce que nous nous sommes rendu compte qu’il y a une centaine d’associations et une quarantaine de partis politiques qui avaient déjà exprimé leur position sur la question. Raison pour laquelle, nous avons décidé que tous les acteurs se retrouvent ensemble. Il s’agit donc de fédérer toutes nos énergies, nos intelligences, afin de mener ensemble des actions communes et faire le maximum de pression sur les autorités. Cela afin que ce projet de la révision constitutionnelle soit retiré. Et qu’on renonce au référendum en ce moment. Je pense que c’est clair pour tout le monde que le contexte n’est pas favorable à la tenue du référendum.

Que pensez-vous de la marche de protestation que vous avez organisée le samedi dernier ?

Je pense que de l’avis général cette marche a été un franc succès. Elle a mobilisé des centaines de milliers de personnes. C’est du jamais vu à Bamako ! C’était vraiment unique de mobiliser autant de monde. Elle a comblé nos attentes. Ce qui est très important, c’est que cette marche s’est déroulée sans aucun incident. Nous l’avons souhaité pacifique et elle l’a été vraiment. Nous avons vu beaucoup de jeunes qui se sont joints à cette marche. Et nous espérons que le message sera entendu. Mais, ce n’est qu’un début par rapport aux activités que nous envisageons.

Pensez-vous que le pouvoir va vous entendre pour tenir compte de vos préoccupations ?

Mais, nous l’espérons ! En tout cas, si le pouvoir est là pour les Maliens, ceux qui sont sortis le samedi dernier et qui continuent de s’exprimer à travers les réseaux sociaux, les radios étant à l’intérieur ou l’extérieur du pays, constituent aujourd’hui de notre point de vue la majorité. Si le pouvoir est censé être à l’écoute de tous les Maliens, majorité comme minorité, il est possible que notre message soit entendu et que les autorités en tiendront compte pour la suite.

Quels sont les principaux arguments qui motivent de votre part le rejet du projet de révision constitutionnelle ?

C’est très simple parce que nous ne sommes pas dans une situation normale. Le pays est en guerre. Il y a plusieurs dizaines de localités qui sont sous occupation où il n’y a pas d’écoles, où l’administration malienne est absente où les forces armées ne sont pas là. Pour nous, ces localités sont sous occupation. On ne peut pas dire aujourd’hui que notre intégrité territoriale est assurée. En réalité, quand il n’y a pas possibilité des populations de bénéficier des services sociaux de base, de l’administration et d’être sécurisées elles-mêmes et leurs biens, cela veut dire que nous ne sommes pas dans une situation normale.

L’insécurité contrairement à ce que la Cour constitutionnelle a dit, n’est pas résiduelle. C’est une insécurité chronique et généralisée. Chaque jour qui passe, nous en donne la preuve. Nous pensons que ce n’est pas le moment d’organiser un référendum. Il faut s’assurer d’abord parce que c’est une fois pour toute. On ne fait pas un référendum chaque année ou cinq ans. L’actuelle Constitution date de 1992. C’est très important de tenir tout cet aspect. Et c’est un paquet qui va être soumis au référendum. On ne va pas dire aux Maliens de voter Oui pour ceux qui sont d’accord avec le Sénat. C’est un paquet qu’on va donner. C’est-à-dire à prendre ou à laisser. Il s’agit de Oui ou Non.

S’il y a des dispositions dans la nouvelle Constitution proposée qui peuvent satisfaire certaines catégories socio-professionnelles de notre pays ou couches, il y a aussi d’autres dispositions qui ne vont pas dans le sens de l’intérêt du pays. Il vaut mieux ne pas faire le référendum plutôt que d’aller vers un référendum juste pour dire que nous l’avons fait. Ou on va dire que nous avons le Oui, qui est majoritaire, alors qu’on a pu consulter que le tiers de la population malienne. Il y a beaucoup de Maliens qui se trouvent dans les zones sous occupation, que ce soient les régions dites du Nord (Tombouctou, Gao, Kidal et toutes les nouvelles régions créées) et une bonne partie de la région de Mopti. Même à Ségou, il y a l’insécurité. Sans oublier les réfugiés et les déplacés qui ne peuvent pas voter parce qu’ils sont absents de leur localité. C’est important qu’on prenne en compte l’avis de tous ces Maliens. C’est comme si nous acceptons de faire la partition du pays et la division des Maliens. Une partie des Maliens vote tandis qu’on refuse que l’autre se prononce sur la loi fondamentale qui doit régir la vie, le présent et l’avenir de toute une nation. Nous nous référons à l’article 118 alinéa 2 de l’actuelle constitution. La réalité sur le terrain, c’est que l’Etat est absent dans ces zones. Et l’Etat est absent, cela veut dire que d’autres sont là-bas, c’est-à-dire les groupes armés ou des djihadistes. Nous préférons qu’on s’en tienne à la réalité du terrain.

Nous pensons qu’il n’est pas possible d’organiser un référendum digne de ce nom dans ce contexte actuel. C’est pourquoi, nous rejetons ce référendum. Nous voulons que l’Etat laisse tomber ce projet de révision jusqu’à ce que toutes les conditions soient réunies. Et on verra après. Mais, il faut que toutes les couches de la nation participent à cette réflexion, au dialogue et à la concertation qui va se faire autour de ce projet, qui est très important. Il s’agit de réviser la constitution. Ce n’est pas n’importe quoi.

Et si le pouvoir s’entêtait dans sa logique d’organiser le référendum ?

Nous pensons que l’Etat ne va pas s’entêter. Puisque ce n’est dans l’intérêt ni du pouvoir ni des Maliens en général. Nous ne voulons pas envisager même cette éventualité que l’Etat organise le référendum après toutes ces manifestations et protestations. Nous ne pensons pas au niveau de la plateforme que les autorités vont réagir en disant que, bon, nous avons décidé, nous allons le faire malgré une très forte opposition d’une bonne partie de la population.

Mais si le pouvoir s’entêtait, nous apprécierons. Pour le moment, nous n’avons donné aucune consigne. Nous apprécierons le moment venu de la consigne qu’il faudra donner au niveau de la plateforme. Nous préférons vraiment parier de façon positive sur le fait que ce projet soit retiré.

Irez-vous en campagne électorale pour tenter de faire gagner le “Non” ou adopterez-vous une position de boycott ?

En réalité, au niveau de la plateforme nous n’avons pas décidé de cela. Nous sommes convaincus qu’il n’y aura pas de référendum. Nous sommes prêts au dialogue ou à des concertations pour exprimer et défendre notre point de vue afin de faire des propositions concrètes. Nous attendons cela volontiers. Peut-être à l’issue de ces concertations, on se mettra d’accord sur quelque chose. Mais pour l’instant, nous ne sommes pas dans ce schéma de boycott ou de voter.

Ne pensez-vous pas que ce projet de référendum est aussi un détonateur de la manifestation d’un profond malaise quant à la gestion du pays ?

Ah oui. C’est très clair ! Il n’y a pas que la question du référendum. La plateforme a mobilisé autour de cela, mais au-delà, il y a beaucoup d’autres préoccupations qui s’y greffent, notamment la mal gouvernance. Sans compter beaucoup de frustrations au sein de la population. Lorsqu’il y a un mouvement comme celui que nous avons enclenché, il faut s’attendre effectivement à ce qu’il y ait une jonction avec tous ceux qui ont besoin d’exprimer leurs frustrations. Tout le monde sait que le front social reste en ébullition. Il y a énormément de problèmes aujourd’hui dans le pays, à commencer par la sécurité. Donc, il est normal que lorsqu’un espace d’expression comme celui est offert, que d’autres viennent s’ajouter.

C’est pour vous dire que cela va au de-là de la question de la révision constitutionnelle. C’est pour cela que nous pensons que les autorités doivent être vraiment à l’écoute et prendre la juste mesure de ce qui est en train de se passer aujourd’hui.

Quel message lancez-vous à la population malienne ?

Il faut que les Maliens gardent leur capacité d’indignation. Quand ils ne sont pas d’accord, il faut qu’ils disent qu’ils ne sont pas d’accord. Au niveau de la plateforme, c’est vraiment ce que nous disons. Quand nous ne sommes pas d’accord, nous disons cela. Mais ce n’est pas une opposition systématique pour s’opposer. On ne s’oppose pas pour le plaisir de s’opposer. Nous faisons également des propositions. Nous disons aux Maliens de se mobiliser. Ce qui se passe aujourd’hui concerne votre présent et votre avenir, surtout les jeunes. C’est pourquoi, nous sommes très satisfaits de la mobilisation des associations de jeunes qui constituent la principale force de la plateforme. C’est vraiment eux qui constituent la cheville ouvrière.

Nous demandons aux jeunes de toutes les couches sociales de se mobiliser pour freiner ce processus de référendum parce qu’il consacre la division du pays. Cette révision constitutionnelle va constituer un recul pour notre démocratie. Mobilisons-nous pour dire Non et préparons-nous pour mener ce combat dans le respect strict de ce que notre constitution prévoit, la liberté d’expression et de manifester.

Nous sommes des républicains, des démocrates. Et nous allons rester dans le cadre de ces lois républicaines et nous allons continuer à agir. Nous demandons aux populations maliennes de se mobiliser. Nous sommes en contact avec des Maliens de l’intérieur et de l’extérieur. Et nous sommes en train de mettre des coordinations régionales, locales et même de la diaspora. Nous en appelons au sens du patriotisme de tous. Les Maliens ont aujourd’hui d’autres chats à fouetter que d’aller dans une campagne référendaire.

Réalisé par A.B. HAÏDARA

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