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Le 26 Mars N° 724 du

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Conflits au Nord : Gagnons la bataille de la communication
Publié le mercredi 3 avril 2013  |  Le 26 Mars




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La communication, depuis plus d’un an, a été l’arme la plus redoutable des ennemis de notre pays. Elle a fait plus de dégâts au Mali que les hordes de combattants fanatisés et criminels avec leur armada de pick-up surmontés de mitrailleuses lourdes. C’est à elle que notre pays doit son image d’Etat brimant une partie de sa population, martyrisant ses propres enfants et montant une partie de son peuple contre une autre. C’est à elle que nous devons notre réputation de marginalisation de la minorité des kel tamasheq et d’abandon du nord de notre pays.

Cette communication distillée intelligemment, depuis plusieurs années et de manière systématique depuis un an, à travers la presse internationale, a abîmé l’image du Mali, de son Etat et de sa société. Elle a été tellement efficace qu’elle a sans doute impacté l’état d’esprit de nombreux compatriotes, ulcérés par l’opinion des autres à notre endroit, frustrés par autant d’antipathies injustifiées à notre égard qu’ils ont fini par basculer dans le racisme et le rejet de l’autre, donnant du coup des arguments supplémentaires à ceux qui soufflent sur les braises des déchirures sociales pour faire valoir leur position. C’est ainsi que s’enclenche une spirale autodestructrice dont nous devons urgemment sortir pour restaurer nos équilibres sociaux et recoudre notre tissu social, fondement du Mali et terreau de la refondation de l’état malien.

L’Etat malien et la société malienne doivent faire face à cette offensive d’un autre genre, plus redoutable et plus destructrice pour restaurer durablement notre image et créer les conditions d’une véritable réconciliation entre les maliens qui brisera les murs de suspicions entre les communautés. Nous devons y faire face, non pas avec nos forces armées et de sécurité (bien mal en point par ailleurs), mais avec toutes nos imaginations en matière de communication, en utilisant mieux et de manière véridique, les mêmes armes utilisées par nos ennemis. C’est ainsi qu’après les avoir défaits militairement, nous arriverons à les réduire définitivement au silence, battant en brèche leurs arguments, discréditant leurs fausses informations pour finir par les décrédibiliser. Cela permettra d’engager dans la sérénité le chantier de la réconciliation. La dimension communication qui n’a jamais vraiment été privilégiée par l’Etat malien, doit être au cœur de l’action publique pendant cette phase délicate de la vie nationale. Surtout au moment où une véritable offensive est menée de manière coordonnée par ceux qui n’ont pas intérêt à ce que le Mali devienne un pays stable.

La mise en œuvre efficace de l’action de communication du Mali nécessitera l’exécution concomitante de plusieurs catégories d’activités.

La phase actuelle de l’offensive de communication contre notre pays repose essentiellement sur le ternissement de la réputation de nos forces armées et de sécurité, dépeintes comme des hordes de soldats sans foi ni loi, remontés contre les populations blanches (kel tamasheqs et arabes) contre lesquelles elles exerceraient les pires exactions possibles. Derrière ce message, il faut toujours comprendre le même cliché d’un sud vindicatif, raciste et violent contre des populations aux aspirations légitimes. Il nous faut stopper ce venin qui intoxique nos relations avec le monde et surtout les relations entre les communautés du pays.

La première attitude à adopter est d’éviter de s’installer dans la dénégation systématique confinant à l’autisme. Il est évident que des actes répréhensibles ont été commis. Les autorités militaires et civiles ont d’ailleurs commencé à rappeler des auteurs présumés d’exactions pour les sanctionner. Nous devons savoir reconnaître les exactions, nous organiser pour mener des enquêtes approfondies, identifier et sanctionner les responsables avec la dernière rigueur. Au moment où notre pays est assisté par ses amis, il ne peut se permettre de laisser ne serait ce qu’un seul de ses militaires s’adonner à des actes condamnables. Nous devons mettre en place un système d’alerte et de veille, réactif, qui n’attendra pas que les voies s’élèvent pour dénoncer des actes, pour engager les actions d’enquête et de sanction et surtout des actions de communication autour du dispositif. Un système qui n’hésitera pas à reconnaître la réalité mais qui apportera rapidement la contradiction et la vérité face aux mensonges.

La réactivité de notre dispositif de communication nécessitera une collaboration de tous les instants avec les acteurs de la société civile, notamment ceux en charge de la défense des droits humains et des questions humanitaires. Ces structures sont quelques fois des réseaux très influents à l’extérieur et peuvent porter le message souvent plus loin et de manière plus crédible que nos autorités. Il faut les associer à l’action publique de communication, faciliter leurs déploiements sur le terrain, permettre qu’elles mènent des enquêtes et des recoupements, travailler avec leurs conclusions pour identifier et sanctionner des responsables. Cette collaboration accroîtra la transparence de notre dispositif, validera la bonne foi des autorités nationales et rendra donc plus convaincants nos messages relatifs aux accusations dont nous sommes l’objet.

Dans le même ordre d’idée, nous devons mieux collaborer avec les autorités traditionnelles et les responsables locaux pour rapprocher davantage les forces armées avec leurs populations, briser la méfiance réciproque, créer les conditions d’un retour à la normale mue par une restauration de la confiance. Le redéploiement effectif et total de l’administration d’ici la mi avril sera d’un apport significatif dans ce processus. Le renouveau de la collaboration avec les élus locaux dont les maires est souhaitable pour que ces relais utiles et acceptés par les populations puissent jouer leur rôle.

L’association des chefs de fraction nomade, des chefs de tribus et autres leaders sur le terrain donnera une assise plus populaire à l’Etat et des moyens certains pour répliquer aux médisants. A ce titre, l’exemple donné dans le reportage de Moussa Hari Maiga, pendant la semaine dernière, à la télévision est illustratif. Dans ce reportage, le chef de fraction Issameidan de Doro et ses concitoyens dans la commune rurale de N’tilit du cercle de Gao dans le gourma Est, informent ne pas avoir vu d’exactions sur leurs parents. Ces actes de communication sont à multiplier, reposant sur une collaboration réelle entre les populations et les forces armées et de sécurité.

Le partenariat avec la presse nationale dans toutes ses dimensions doit faire écho à la collaboration avec la société civile. La presse malienne est très diverse et très dynamique même si elle manque quelques fois de professionnalisme. Cette diversité permet de toucher l’ensemble de la population à travers les différents canaux (audiovisuelle, écrite, internet…) y compris la diaspora malienne. En partie, elle est connectée à la presse internationale et pourra donc alimenter cette dernière en informations qui relayeront les positions officielles et leur donneront une audience difficilement imaginable à l’origine. Le partenariat avec la presse permettra de doter notre pays d’une plateforme de communication qui, sur l’essentiel, défendra le Mali et battra efficacement en brèche les arguments de nos ennemies. Nos pouvoirs publics doivent se donner cet objectif et engager les actions devant permettre à court terme de l’atteindre. Pour ce faire, il est indispensable d’installer la meilleure collaboration possible avec les acteurs de la presse et d’apaiser considérablement le climat dans lequel évoluent les rapports entre l’Etat et la presse nationale. Il est par exemple indispensable qu’on règle le problème posé par l’incarcération du journaliste du Républicain en le libérant compte tenu du contexte. Nous avons nettement plus à gagner à avoir les meilleurs rapports avec la presse nationale et internationale, pour l’image du pays fort entamé en ce moment qu’en maintenant en prison un acteur de la presse quelque soit les faits qui lui sont reprochés. Il s’agit ainsi pour nos autorités d’apprécier leur action d’aujourd’hui à l’aune de son impact sur le pays à moyen et long terme et de s’engager dans des voies pouvant paraître difficiles mais porteuses de progrès pour le Mali à terme. C’est à cela que les meilleurs rapports avec la presse sont nettement plus avantageux pour le Mali dans un processus où la communication doit être au cœur de l’action publique.

Le renforcement des outils de communication de l’Etat constitue l’autre axe sur lequel nous devons nous appuyer dans la mise en œuvre de notre stratégie de communication. Le département en charge de la communication, la direction des relations publiques des armées (DIRPA), notre réseau diplomatique doivent entamer une mue très rapide pour intégrer la communication comme un axe majeur de leurs actions, en ces moments sensibles pour notre pays.

Nous devons laisser de côté l’improvisation, les hésitations et les approximations qui sèment le doute dans l’esprit de nos interlocuteurs avec un effet contraire de ce qui est recherché.

Sous l’égide du Ministre en charge de la communication, une stratégie doit être conçue, impliquant tous les services publics dans ce secteur et qui sera déployée dans ses différentes dimensions par les acteurs publics. Le département ne doit pas hésiter à recourir aux services d’agences de communication pouvant conseiller dans les activités à mener, les canaux à utiliser, les messages à diffuser, l’organisation et les moyens à engager mais aussi et surtout pouvant nous permettre d’accéder en temps réel aux grands réseaux d’information et de communication ayant un impact sur la formation de l’opinion nationale et internationale afin d’y fournir les informations appropriées et de contrer immédiatement les offensive de ceux qui passent leur temps à noircir l’image du Mali à l’intérieur comme à l’extérieur. Cette stratégie doit pouvoir compter sur des hommes compétents, maitrisant leur sujet et pouvant se mettre en synergie pour porter de manière cohérente les informations appropriées. Face à la crise, l’Etat malien a largement les moyens de concevoir et de mettre en œuvre une stratégie publique d’information et de communication de cette ampleur.

L’accélération du déploiement des troupes étrangères (MISMA et ONU) et leur implication dans les travaux de sécurisation du territoire sont de nature à limiter les exactions et donc à freiner la campagne de communication négative contre notre pays. Nos autorités doivent engager toute leur énergie, mobiliser la diplomatie régionale et internationale et faciliter le déploiement de ces troupes dans le pays. Une fois sur notre sol, employons-nous à ce qu’elles investissent le terrain, s’engagent fortement dans la sécurisation, notamment au Nord. Leur présence, la qualité des forces employées, la présence des organisations internationales que cela entrainera sans parler de la médiatisation de ce dispositif sont de nature à limiter fortement les éventuelles exactions contre les populations civiles ou encore les conflits latents entre communautés. Cette présence internationale sera stabilisatrice sur ce front et créera les conditions à la lente reconstruction du tissu social dans un cadre serein. Nous devons la favoriser et l’accompagner du mieux que nous pouvons. Nous devons aussi communiquer autour de ces initiatives pour qu’elle soit acceptée et soutenue par les populations même si elle devait s’inscrire dans la durée.

La communication est une arme, nous l’avons malheureusement appris à nos dépens. Elle peut être un formidable outil de restauration de l’image du Mali si nous l’employons habilement. Un outil moins couteux que les armes mais avec un impact est plus durable et plus productif. Sachons nous en convaincre et donnons-nous les moyens de nous en servir !



Moussa MARA

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