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L’Essor N° 17405 du 4/4/2013

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Lutte contre l’enrichissement illicite : Une nouvelle loi en gestation
Publié le vendredi 5 avril 2013  |  L’Essor


© aBamako.com par A S
Justice: atelier d`échanges sur l`avant-projet de loi sur la lutte contre l`enrichissement illicite au Mali.
Bamako, le 04 avril 2013 à l`hôtel de l`amitié. Le garde des sceaux, ministre de la justice, Mr Malick Coulibaly a présidé l`ouverture de l`atelier de la lutte contre l`enrichissement illicite au Mali.


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Le nouveau texte propose un renversement de la charge de la preuve. La personne accusée devra justifier la légitimité de ses richesses

Le ministre de la Justice Malick Coulibaly a présidé hier à l’hôtel de l’Amitié, une rencontre d’échange sur l’avant-projet de loi sur la lutte contre l’enrichissement illicite. La rencontre qui avait tout l’air d’un cours magistral de droit, a regroupé tous les directeurs des services centraux du ministère. La loi en avant projet entend donner les moyens aux pouvoirs publics d’extirper de la société malienne des pratiques insidieuses qui paralysent le développement du pays.

Selon le ministre de la Justice, il s’agit de corriger les insuffisances manifestées par les législations antérieures, notamment la loi n°82-39/AN-RM du 26 mars 1982 portant répression du crime d’enrichissement illicite. Malick Coulibaly a jugé pressante la nécessité d’une nouvelle loi, la précédente ayant montré ses limites au regard de l’évolution de modes opératoires de plus en plus diversifiés et complexes. Le texte en cours d’élaboration va également permettre de se conformer aux exigences des conventions internationales ratifiées notamment la Convention de Merida et la Convention de l’UA sur la corruption. « Cet avant projet de loi est enfin la réponse aux recommandations des Etats généraux sur la corruption », a rappelé le ministre.

« La délinquance financière et économique au Mali est une réalité », a souligné Malick Coulibaly. Une réalité qui compromet, de son point de vue, les fondements de notre jeune démocratie. La prolifération d’actes préjudiciables à l’économie du pays commis par des agents peu scrupuleux en vue de s’enrichir rapidement a été et demeure une problématique qui se pose avec une acuité certaine.

L’exposition des biens mal acquis de la part de leurs auteurs et les sentiments de frustration qu’elle implique crée des conditions favorables à une révolte sociale. « L’absence ou l’insuffisance des moyens pour réprimer ce fléau crée un déficit de confiance entre gouvernants et gouvernés », souligne le ministre de la Justice. Cette insuffisance apporte également du crédit aux discours de défiance et de crise de légitimité prononcés par les citoyens à l’encontre des institutions judiciaires. Malick Coulibaly est convaincu qu’une lutte efficace et effective contre l’enrichissement illicite et la délinquance financière constitue un instrument de restauration de la confiance sérieusement érodée entre gouvernants et gouvernés.

Quel est le fonctionnaire malien qui peut investir 67 millions, rien que pour l’ameublement de sa maison ? Combien la maison a alors coûté ? Qu’est ce qui est alors quotidiennement dépensé pour la nourriture ? La santé ? L’éducation des enfants ? Ce sont autant de questions que le ministre n’a pas manqué de poser à l’auditoire.



UN SENTIMENT D’IMPUNITE « Le fonctionnaire étant interdit de commerce, ses revenus réguliers ne permettent pas assurément de faire face à ces dépenses », constate-t-il. Mais ce qui est dramatique, note-t-il, est que le dispositif répressif actuel ne permet pas toujours, si des poursuites sont engagées, d’aboutir à une sanction. « Ainsi voit le jour un sentiment d’impunité », souligne le ministre Coulibaly. Les poursuites judiciaires sont infructueuses, parce que la délinquance financière a évolué. Les prédateurs des fonds publics ne puisent plus dans la caisse de l’Etat, mais ils se servent en amont ou en aval. En amont, a-t-il expliqué, les agents indélicats s’enrichissent illicitement et l’Etat s’appauvrit dans la mesure où ses recettes sont minorées. En aval de la caisse de l’Etat, les délinquants financiers s’enrichissent et l’Etat s’appauvrit car ce qui doit sortir de la caisse est indûment majoré, décrit le ministre.

« C’est en tenant compte de tous ces enjeux que nous avons entrepris de proposer ce projet de loi portant répression de l’enrichissement illicite », a-t-il expliqué. Par quel mécanisme ? Un renversement de la charge de la preuve. Il revient, précise le ministre, à l’agent de justifier la légitimité de ses richesses. Ce faisant, la répression paraît heurter la présomption d’innocence. Malick Coulibaly a rappelé à ce propos la définition de la présomption d’innocence telle que prônée par la Cour suprême du Canada : « la présomption d’innocence traduit notre foi en l’humanité. Elle signifie que jusqu’à preuve irréfutable du contraire, les hommes sont bons et respectueux des lois ». C’est dire que la présomption d’innocence vise la justice répressive. La justice répressive, elle même, vise la justice sociale. Et celle-ci trouve dans la répression de l’enrichissement illicite, son illustration la plus parfaite.

Par ailleurs, précise Malick Coulibaly, le combat contre l’impunité et la délinquance financière n’est pas l’exclusivité de son ministère. Il est celui de tous les Maliens choqués dans leur quotidien par une inégalité sociale criarde, induite par les signes extérieurs d’une richesse mal acquise. C’est donc une œuvre de salubrité publique qui requiert le concours de tous.

Fatoumata NAFO

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