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Orpaillage : Une nouvelle politique en marche
Publié le mercredi 4 octobre 2017  |  Le Reporter
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Le ministre Tiémoko Sangaré a donné, lundi, le coup d’envoi de la reprise de l’exploitation traditionnelle de l’or dans notre pays et annoncé la fin de l’anarchie qui y régnait


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L’engouement était fort et traduisait à suffisance l’espoir que revêtait cette réouverture des sites d’orpaillage pour les orpailleurs maliens. C’est donc une ville tout vêtue de neuf et bondée d’une marée humaine qui a accueilli le ministre des Mines, Tiémoko Sangaré pour la réouverture des sites d’orpaillages, fermés depuis trois mois, pour des raisons d’hivernage.
Les autorités politiques, administratives, coutumières et religieuses de la zone se sont toutes mobilisées aux côtés des orpailleurs pour donner un cachet spécial à l’évènement. Un tel engouement s’explique par le fait que l’exploitation artisanale, plus connue sous l’appellation «orpaillage», est une activité séculaire à haut risque, mais constituant une réalité économique de taille. Pratiquée surtout en milieu rural, elle attire les jeunes et les femmes du monde rural qui sont pourtant les bras valides pour l’agriculture familiale. Par ailleurs, mal organisée et encadrée, elle entraine d’énormes préjudices environnementaux et humains et un manque à gagner important pour les finances publiques.
Déguerpissements forcés, querelles fratricides, drogue, armes, prostitution et mêmes maladies sexuellement transmissibles y sont légion, plongeant le secteur au cœur d’un malaise social. A cela il faut ajouter l’utilisation de produits chimiques dangereux et l’indiscipline en matière de sécurité des exploitants sans compter la menace à la sécurité nationale.
Réorganisation et rationalisation du secteur Prenant la mesure de ces réalités, le département des Mines, a décidé d’accorder une attention particulière à cette activité à travers l’élaboration d’une politique de réorganisation, d’encadrement et de promotion de l’orpaillage, voire la rationalisation du secteur. C’est l’entrée en phase pratique de cette politique qui mobilise le département autour d’une campagne de sensibilisation des acteurs de l’orpaillage. Ainsi, en se rendant à Kokoyo, hameau d’orpaillage du village de Danga dans la commune rurale de Nouga, situé à 52 km de l’arrondissement de Kangaba et abritant plus de 30.000 âmes, le ministre Sangaré venait surtout présenter la nouvelle politique qui encadrera désormais le travail de l’orpaillage au Mali.
Dans leurs mots de bienvenue, le chef de village, Adama Magassouba et le maire, Yahaya Magassouba ont tous exprimé leur reconnaissance aux plus hautes autorités du pays pour les actions entreprises dans le cadre de la réorganisation de l’orpaillage dans leur zone. « La fermeture des mines pendant les 3 mois d’hivernage a été un grand ouf de soulagement pour les populations de notre commune. En effet, cette année, à l’inverse des autres, nous n’avons enregistré aucun décès provoqué par l’éboulement des mines. Mieux, l’orpaillage se positionnait de nos jours, comme une menace pour l’agriculture familiale du fait de son abandon par les jeunes au profit de l’activité et de la dégradation profonde de l’environnement qu’il occasionne. Cette année, notre zone a renoué avec l’agriculture. Certains ont cultivé plus de 10 hectares… Bref, nous ne pouvons que vous remercier », a laissé entendre l’édile. Le chef de village lui, a souhaité que cette réouverture marque un nouveau tournant pour ce site d’orpaillage.
« Nous souhaitons que l’élan engagé pour la réorganisation et la sécurité de ce site soit durable. Kokoyo est un grand site qui évoluait dans une anarchie absolue. Grâce à vos actions, nous sentons un changement et nous allons vous aider à réorganiser et promouvoir ce site », a t-il ajouté.
Tour à tour, le président du Conseil de cercle de Kangaba, Bakary Bamba Keita, le président des orpailleurs du site, Moussa Keita et le président de la Fédération des orpailleurs du Mali, Seydou Keita ont félicité les orpailleurs pour le respect des consignes données par l’Etat, notamment la fermeture des sites d’orpaillage pendant la période hivernage. Seydou Keita rappellera que l’orpaillage, au Mali, mobilise plus d’un million de mineurs artisanaux, répartis sur 350 sites aurifères. Compte tenu du fait que la production d’or du secteur informel est difficile à quantifier, les évaluations vont de 4 à 10 tonnes sur 70 tonnes d’or exportées par notre pays, le troisième producteur de métal jaune d’Afrique », a t-il précisé. En outre, il a remercié le ministre pour les initiatives de développement en faveur de l’organisation et la rationalisation du secteur et l’a rassuré de son soutien pour la mise en œuvre des réformes qui permettra de sécuriser le secteur.
Des attentes à la hauteur de la nouvelle vision. De son côté, le ministre Sangaré a expliqué que l’initiative de reformer le secteur de l’orpaillage découle surtout de la volonté du gouvernement d’assumer toute sa responsabilité dans la mise en valeur des richesses du pays au profit de tous, notamment des exploitants, des communautés et de l’économie nationale. « Des ambitions que l’orpaillage ne parvient plus à atteindre à cause non seulement, des tensions socio-sécuritaires qui entourent cette activité, mais aussi de l’insuffisance de l’encadrement dont elle est l’objet. Il faut noter que l’orpaillage a de tout temps suscité beaucoup de tensions parce qu’il est pratiqué presque clandestinement par des milliers de nationaux et surtout d’étrangers en dehors des couloirs délimités par l’administration minière.
La réforme du secteur vise donc à réorganiser ses acteurs à travers un recensement exhaustif, la mise à leur disposition de cartes professionnelles, l’installation de comptoirs d’achats et la sécurisation des sites », a t-il développé. En plus, il rappellera que la nouvelle vision, impulsée par le président Ibrahim Boubacar Kéita et le gouvernement, consiste à faire du secteur minier un moteur du développement socioéconomique du pays en créant des emplois pour réduire la pauvreté.
Ce qui suppose d’engager des actions innovantes, et surtout, urgences visant à extraire ce secteur de l’informel pour le hisser dans le formel. «La pacification de vos sites d’orpaillage passe inexorablement par l’identification de tous ses acteurs (orpailleurs, acheteurs, ainsi que les autres travailleurs connexes). L’installation de véritables comptoirs d’achat vous permettra aussi de mieux bénéficier des fruits de votre labeur et à l’Etat de posséder des statistiques fiables en la matière», a t-il ajouté.
Tiémoko Sangaré insistera également sur le contrôle pour arrêter le travail des enfants sur les sites d’orpaillage, le renforcement de la prévention des maladies, de la prostitution, de l’alcoolisme, de la drogue etc. ainsi que la fixation des sites d’orpaillage autour d’infrastructures socio éducatives de base. « Vous devez adopter de nouvelles pratiques d’orpaillage en bannissant formellement les produits chimiques très dangereux pour votre santé notamment l’utilisation du mercure, du cyanure. Par ailleurs, nous allons désormais interdire formellement la pratique de l’orpaillage pendant la période d’hivernage (entre juin et octobre). Toutes ces mesures visent à vous sécuriser », a t-il souligné.
Outre cela, avec la présente réforme, il ne s’agit plus seulement de faire déguerpir les exploitants. Il s’agit aussi d’aider l’Etat à tirer profit d’une activité fort rentable. «Il faut alors l’intégrer dans notre système économique pour en tirer profit. Selon les statistiques, la rentabilité de l’orpaillage est estimée à une dizaine de tonnes par an. La Banque mondiale, elle, l’évalue à 5 tonnes. Arithmétiquement, cela équivaut à 150 milliards de Fcfa par an, si l’on chiffre le gramme d’or à 24 000 Fcfa. Le manque à gagner est énorme pour les services fiscaux. Mieux cette activité fait vivre des millions de personnes pour près d’un million d’orpailleurs traditionnels. Les sites d’exploitation sont des zones de non droit où règnent la drogue et la prostitution. Et tous y trouvent leur compte : la chefferie traditionnelle perçoit des dividendes auprès de tous les orpailleurs détenteurs de machines de détection ou de broyeurs. Les municipalités perçoivent des taxes. Les petits commerçants écoulent beaucoup de produits de première nécessité comme les céréales, le thé et le carburant. Les femmes de mœurs légères y trouvent un marché à exploiter. D’où la nécessité de rationaliser cette activité. C’est tout l’intérêt de cette réforme», a détaillé le ministre.
Conscient de la difficulté liée à la mise en oeuvre de la réforme en vue du changement, le Pr. Tiémoko Sangaré entend se donner les moyens pédagogiques pour mettre de l’ordre dans une activité trop habituée à l’anarchie. Il a tenu à féliciter les orpailleurs de Kokoyo pour le respect des consignes données, avant de déclarer ouverte la campagne d’orpaillage au Mali.
Envoyée spéciale
Doussou DJIRE
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