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Université malienne : Un corps malade !
Publié le jeudi 30 novembre 2017  |  L’aube
Inauguration
© aBamako.com par A S
Inauguration de la Cité universitaire de Kabala
Bamako, le 28 février 2017 le Président de la République, Ibrahim Boubacar KÉÏTA a Inauguré le Complexe Universitaire de Kabala
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Au Mali, l’enseignement supérieur est devenu source d’inquiétudes. Violence, corruption, années académiques tronquées, grèves interminables…sont autant de réalités qui caractérisent les universités au Mali. Il urge de trouver des solutions pérennes à ces problèmes.
Les facultés maliennes sont devenues, au fil des ans, des espaces où la violence, l’indiscipline et la corruption ont pris racine. Faisant ainsi d’elles et autres grandes écoles du pays des machines de fabrique des médiocres. En atteste le niveau « désastreux » de la grande majorité des diplômés issus de ces écoles supérieures.
Cependant, l’insuffisance des infrastructures et les conditions précaires d’étude au sein des universités constituent de réels handicaps. Aujourd’hui, l’enseignement supérieur compte plus de 100 000 étudiants. Résultat : les amphis sont pleins à craquer et les professeurs sont débordés. A cela vient s’ajouter le problème de logements des étudiants.
Noël Guindo, originaire de Bandiagara, région de Mopti, est un étudiant qui loue une chambre dans le quartier Daoudabougou à Bamako. Il se plaint surtout des retards accusés dans le virement des bourses. «Cela aggrave la situation précaire des étudiants. Faute d’argent, les étudiants qui louent sont mis à la porte par les locataires. Certains sont obligés d’arrêter leurs études pour travailler», témoigne-t-il.
D’autres étudiants souffrent du manque de livres aussi, explique un étudiant. En effet, il n’y a pas de bibliothèques universitaires dignes de ce nom dans les facultés, ni de plannings de cours.
Les conditions de travail y sont on ne peut plus sinistres, le découragement guette les quelques « rares » résistants qui ne veulent pas abandonner pour prendre, comme beaucoup l’ont fait, le chemin dangereux de l’immigration. Aujourd’hui, la situation est telle que l’on ne peut souvent s’empêcher de se demander si les pouvoirs publics ne se moquent pas du savoir. Dans certains amphithéâtres, les étudiants cotisent pour acheter un mégaphone pour le professeur ! Tout cela pour dire que l’enseignement supérieur va mal.
La violence au quotidien
Et l’un des maux qui minent singulièrement l’université malienne est la violence, quasi permanente sur les campus. Le phénomène a pris de l’ampleur au fil des ans et intervient presque à chaque renouvellement du bureau de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM). On y assiste à des scènes de violence occasionnant parfois mort d’homme.
En 2017, des affrontements entre étudiants ont eu lieu à la Faculté de droit privé (FDPRI), à la Faculté des sciences économiques et de gestion (FSEG), à la Faculté des lettres, des langues et des sciences du langage (FLLSL) ex-FLASH, à l’Institut universitaire de gestion (IUG) et à l’Ecole centrale pour l’industrie et le commerce de l’administration (ECICA). On se souvient également de l’agression du doyen de la Faculté des sciences et techniques (FST), Fana Tangara, il y a quelques années.
La violence dans l’espace scolaire et universitaire s’explique par plusieurs facteurs : l’effritement de la société et de l’éducation familiale et surtout la gestion calamiteuse de l’AEEM. En effet, l’élection du secrétaire général de l’AEEM, la gestion des fonds, des cantines, des chambres, des parkings du campus universitaire de Badalabougou par les membres de l’AEEM, l’attribution illégale des allocations financières (trousseaux et des bourses) à certains étudiants sont sources de rixes dans nos grandes écoles. Le nombre élevé des étudiants dans les facultés, la mauvaise répartition des salles de classe entre les différentes universités, le trafic de drogue, la détention d’armes par les élèves et étudiants font également partie des causes de cette violence.
La crise de l’enseignement supérieur se traduit aussi par des grèves récurrentes des enseignants, chercheurs et étudiants. Les revendications qui sous-tendent ces grèves dont la manifestation est parfois violente, portent généralement sur le paiement (à temps) des heures supplémentaires, l’attribution des bourses et le respect des échéances de paiement
Les enseignants, objets de menaces incessantes

Les enseignants ne sont pas aussi épargnés. A titre d’illustration, Dr Boureima Touré, Secrétaire général du syndicat, de l’enseignement supérieur du comité de l’USLHB signale que le 12 mai 2016, un affrontement entre des clans rivaux d’étudiants de la faculté des lettres et des sciences et langues, s’est soldé par la destruction de la voiture personnelle du Dr Boubacar S. Coulibaly, enseignant au département Anglais.

Il en est de même pour l’enseignant Mamadou Coumaré qui a trouvé les vitres et clignotants de sa voiture endommagés pendant qu’il était en cours. Plus révoltant, le 5 mars 2016, un groupe d’étudiants dirigés par le comité AEEM, mécontents du refus des professeurs de procéder à des repêchages, se sont introduits de force dans les salles d’examen pour déchirer les sujets et copies d’examen lors de la session de rattrapage.
Comme si cela ne suffisait pas, des étudiants ont tenté de s’introduire nuitamment au domicile du Chef de DER Sciences de l’Education dans l’intention de s’en prendre physiquement à sa personne.

En bref, les enseignants vivent dans l’insécurité totale. Face à cette situation, le personnel enseignant a observé plusieurs grèves.
Par ailleurs, la politisation de l’école, le laxisme des autorités, l’interférence des députés et le manque de sanction ont été déplorés par les enseignants qui pensent que l’AEEM est devenue une mafia avec la bénédiction de l’Etat.

Pour le secrétaire général du syndicat de l’enseignement supérieur (Synesup), Abdou Mallé, c’est la mauvaise gouvernance de l’université par les autorités de tutelle qui est à la base des tourments actuels. «La mauvaise gouvernance, le mauvais choix des hommes conforte la déliquescence des facultés. A titre d’illustration, l’incapacité du ministre de sanctionner la gestion calamiteuse du doyen de l’IUG est la source du chaos qui règne actuellement sur la colline », s’indigne-t-il.

Il précise que la situation de l’université malienne peut s’améliorer à condition que l’Etat change de méthode. « L’Etat a les moyens, mais il y a une mauvaise gestion, une mauvaise répartition des richesses du pays», affirme le leader syndical. Pour qui, il est temps d’apporter des changements dans la gestion des facultés en choisissant les personnes en fonction de leur compétence et non d’accointance politique ou personnelle. Il souhaite en outre l’éradication totale de la violence dans l’espace universitaire et demande à Etat malien de s’assumer pour un enseignement supérieur de qualité.

Défiance des étudiants à l’endroit des professeurs
Autre écueil de l’université malienne, le manque de confiance des étudiants envers les enseignants à qui ils reprochent le manque de ponctualité aux cours et même lors des examens. Cette situation a été mainte fois dénoncée par les étudiants, mais rien n’a changé. Ibrahim Traoré, étudiant à l’IUG, pointe du doigt le comportement peu orthodoxe de certains professeurs qui bâclent les travaux dirigés, alors qu’ils sont payés pour le faire correctement.
Samuel Diarra, étudiant à la Fast, abonde dans le même sens: «certains enseignants ne respectent pas les horaires des cours et souvent les profs ne maîtrisent pas les sujets ». Autres récriminations récurrentes des étudiants à l’encontre du corps professoral: la propension de certains professeurs à prendre de l’argent aux étudiants contre des notes élevées en complicités avec l’AEEM.

Du coté des professeurs, on réfute ces accusations. Boubacar Sangaré, professeur à la FDPR, se réjouit des récentes réformes entreprises par le gouvernement, mais déplore les conditions difficiles de travails des enseignants. «Souvent ce sont les professeurs eux même qui achètent les outils nécessaires pour dispenser les cours », soutient-il.
Pour l’avenir du pays et des enfants, il urge de trouver des solutions adéquates aux problèmes qui minent l’enseignement supérieur. Il faut nécessairement casser «la spirale de la décadence », et re-«convoquer l’intelligence».
Mémé Sanogo
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