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Que sont-ils devenus : Abdoulaye Traoré : Tel frère, tel autre !
Publié le samedi 3 mars 2018  |  Aujourd`hui
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A l’instar de beaucoup d’anciens joueurs maliens, Abdoulaye Traoré dit Ablo ou Abloni, ex sociétaire et capitaine du Djoliba AC et du Stade malien de Bamako, a préféré l’aventure après sa carrière de footballeur pour se forger un avenir. Il vit aux Etats-Unis d’Amérique. Actuellement au bercail pour se ressourcer à la faveur de quelques mois de vacances, nous l’avons rencontré dans le cadre de votre rubrique préférée ” Que sont-ils devenus ? “. L’enfant de Sikasso (il a commencé sa carrière dans cette ville), parle de son parcours, et surtout, des raisons qui ont motivé son exil dans le pays de l’oncle Sam.

Abdoulaye Traoré dit Ablo et son frère ainé, Idrissa Traoré dit Poker, ont en commun d’avoir porté le maillot national avec honneur et dignité, le plus longtemps possible. L’ainé n’est-il pas le joueur le plus capé du football malien ? Poker et son cadet partagent aussi les qualités de joueurs teigneux et très rigoureux sur l’homme.

Ablo-Platini : les duels de rêve !

Plus particulièrement, notre héros du jour, Abdoulaye Traoré, ne se laissait pas faire. Un cumul de qualités qui ont poussé son entraineur de l’époque, Karounga Keïta dit Kéké, à lui confier des missions commando spécifiques. Dans quelles circonstances?

Pour répondre à cette question, nous révélons une anecdote qu’un ancien arbitre international nous a racontée. Notre interlocuteur nous dit qu’il avait toujours des soucis, à chaque fois qu’il devait officier un match Djoliba-Stade. La raison ? Les deux entraineurs se livraient à un jeu de ping-pong par rapport au remplissage de la feuille de match.

Seydou Diarra dit Platini était le goulot d’étranglement de Karounga Keïta dit Kéké. Platini, qui alternait études et football, n’était pas parfois titularisé. Souvent, de l’Ena (où il étudiait), il rejoignait le banc de touche des Blancs pour prendre part à la rencontre. Donc, Kéké faisait son classement en fonction de la position de Seydou Diarra sur la feuille de match.

Que sont-ils devenus : Abdoulaye Traoré : Tel frère, tel autre !
Abdoulaye Traoré et son frère Idrissa Traoré dit Poker
De son côté, l’entraineur stadiste refusait sciemment de remplir la feuille de match pour perturber son vis-à-vis dans sa logique. Voilà l’explication des soucis de l’arbitre du match. En réalité Karounga Keïta avait deux joueurs qu’il aimait le plus : Ousmane Traoré dit Ousmane barbare et Abdoulaye Traoré. La différence entre ces deux joueurs dans les missions commando de Kéké résidait dans leurs qualités. Ousmane échouait sur Platini par sa brutalité, parce que l’attaquant Stadiste était très intelligent et savait là où se placer pour hériter des balles distillées par Yaba ou Kaloga. Or, Abdoulaye Traoré posait plus de problèmes à Platini par sa rigueur et surtout sa ténacité. Donc si Platini joue, Ablo est spécialement détaché sur lui. Dans le cas contraire, le joueur est déployé ailleurs.

Nous avons fait ce petit rappel des années 1980 de notre football pour démontrer à quel degré notre héros du jour, Abdoulaye Traoré, était dur sur l’homme.

Autre anecdote sur Abloni, qui avait entre temps rejoint le club rival, le Stade malien de Bamako, c’est la relation de beau-frère qui le lie à un autre joueur, Aboubacar Traoré dit Vieux Djan, un autre monument du Stade malien de Bamako. A l’époque, l’axe stadiste était tenu par les deux. De nature, Vieux Djan ne parle pas et Ablo se gênait beaucoup avec lui pour la simple raison qu’il est le grand frère de sa femme. Et le manque de communication entre un stoppeur et un libéro peut conduire à la catastrophe. Feu Dramane Diakité, qui n’avait pas sa langue dans la poche, chahutait les deux beaux-frères pour créer l’ambiance à l’internat parce que, en tant que milieu défensif, il lui revenait tout le temps d’intervenir pour corriger les conséquences de cette cohabitation sociale.

Sur ces deux faits introductifs de notre article, Abdoulaye Traoré nous donne ici plus de précisions : “ Effectivement, Kéké me confiait le marquage à la culotte de Platini. Mais le revers de la médaille est que d’autres joueurs très dangereux, en l’occurrence Yaba et Djilla, étaient toujours là pour faire la différence. Notre entraineur axait son système de jeu plus sur les forces du Stade que sur les qualités du Djoliba. Or, en la matière, on pouvait exploiter les faiblesses de l’adversaire.

Pour ce qui est de mes relations avec Vieux Djan Traoré, il n’en est pour rien en ce qui concerne le manque de communication entre nous. Le fait même de ne pas communiquer est une façon de communiquer. Nul n’est sans savoir que Vieux Djan était un joueur très sérieux sur le terrain. Donc, je n’avais pas besoin de lui dire quoi que ce soit. D’ailleurs, on se parlait. Les joueurs faisaient ces allégations, parfois pour taquiner Vieux Djan à l’internat, parce qu’il est moins bavard”.

Du Tata de Sikasso aux bords du Djoliba

C’est en pleine promenade dans les rues de Sikasso qu’un jeune vient lui dire qu’il est convoqué au Gouvernorat par le directeur de Cabinet pour affaire urgente. Abdoulaye Traoré recherche vainement dans ses souvenirs ce qu’il pouvait commettre comme erreur pour qu’on demande sa présence au Gouvernorat. Il prend son courage à deux mains et répond à la convocation. Sur place, Mamadou Saïdou Traoré dit Babou, le directeur de Cabinet du gouverneur, l’informe que tout travail cessant, il doit immédiatement se rendre à Bamako pour jouer au Djoliba. Il lui remet les frais de sa mise en route de la part de Kéké. Ablo a juste le temps de briefer ses parents et il débarque à Bamako pour s’adresser au baobab de Hèrèmakono.

Karounga Keïta le met en confiance et lui propose le voyage que le Djoliba doit effectuer sur Abidjan pour rencontrer l’Asec dans le cadre d’un match amical. En homme intelligent, Kéké trouve ainsi l’occasion de tester Ablo, pour se faire une idée sur le joueur qui l’avait impressionné lors d’un match de championnat entre le Tata de Sikasso et le Djoliba.

Après cette rencontre amicale internationale de clubs où Ablo a dû convaincre les dirigeants des Rouges, le même soir à l’hôtel, on lui fait remplir les formalités de sa démission du Tata national. Il ne pose qu’une seule condition : son inscription dans une école privée. Cette doléance est d’emblée acceptée et les dispositions sont prises dans ce sens.

Ablo, très frais, avait des qualités et Kéké comptait sur lui pour reconstruire une nouvelle génération du Djoliba parce qu’apparemment, il ne parvenait à résoudre l’équation posée par le départ de ses trois joueurs clés pour le Gabon, après la finale de la Coupe du Mali 1983 remporté par le Djoliba : Sory Kourouma, Seyba Sangaré “Durulé” (décédé fin février dernier) et Abdoulaye Koumaré dit Muller. Mieux, le Stade malien venait de réaliser le premier doublé de l’histoire du football malien. Donc, il fallait stopper ou tout au moins ralentir cette montée en puissance de la génération dorée des Blancs de Bamako.

Une fois au Djoliba, Abdoulaye Traoré se fraie un chemin pour s’imposer comme titulaire incontestable, auprès de son frère Idrissa Traoré dit Poker. Il passa quatre ans chez les Rouges de Bamako, avec à la clef deux titres de champion, en 1985 et 1988. Il perdit deux finales de coupes du Mali et disputa toutes les rencontres des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe et de clubs champions.

Divorce sur fond de déficit de confiance

Au bout de la quatrième année, les choses commencent à se gâter entre certains dirigeants et supporters rouges et Abdoulaye Traoré. Autrement dit, une crise de confiance s’installe entre eux et il est accusé de collusion avec un club malien. Ablo nous dit avoir demandé des preuves irréfutables et personne n’a pu apporter des faits pour démontrer qu’il était corrompu. Dès lors, il décide de claquer la porte pour transférer au Stade malien de Bamako. Cette décision prise sous l’empire de la colère est en quelque sorte le déclic pour sa carrière. Capitaine d’équipe, il dirige de main de fer l’axe défensif stadiste. Son passage au Djoliba l’a endurci pour l’avoir doté d’expériences de grand joueur.

Son palmarès se renforce au Stade malien de Bamako : il remporte deux coupes du Mali, en 1990 et 1992, un titre de champion en 1989, un doublé en 1992, une coupe Ufoa la même année. Et c’est après cette finale que son entraîneur, Mamadou Diakité dit Doudou, l’informe de la présence des dirigeants du Scout Club d’Ile Maurice. Il saute sur l’occasion et passe un an dans ce pays avant de transférer à l’Ile de la Réunion, plus précisément au Saint Pauloise. Là aussi, il ne reste qu’un an. Abdoulaye Traoré pose ses valises en 1994 à l’Aswan d’Egypte. Après trois ans et en fin de contrat le jeune frère de Poker prend sa retraite. Quitter un contrat professionnel et venir rejouer au Mali est pour lui quelque chose de non-sens. C’est cette conviction qui le poussé à mettre un terme à sa carrière en 1998.

Cap sur les Usa !

Pour intégrer l’équipe nationale, Ablo n’a pas attendu trop longtemps. Si à Sikasso, il a évolué d’abord au Stade malien de la ville, puis au Tata National, il n’avait aucune chance d’accéder à l’équipe nationale. Son saut à Bamako et plus précisément au Djoliba, lui a donné l’opportunité de porter le maillot national durant douze ans. C’est-à-dire de 1985 à 1997. C’est Kidian Diallo, en son temps entraineur des Aigles, qui a décelé en lui les qualités d’un joueur athlétique, rigoureux et teigneux. Il finira par hériter du brassard de capitaine. A son actif : cinq tournois Amilcar Cabral (1985-1986 -1987-1988-1989), avec un sacre, celui organisé à Bamako en 1989, où le président Moussa Traoré offrit à l’équipe et à l’encadrement 10 millions de Fcfa et un lot à usage d’habitation pour chacun d’eux.

En plus, Ablo est des différentes campagnes des Aigles, qui se débattront pour signer leur retour sur la scène internationale, après la CAN de Yaoundé 1972. Mais la génération d’Ablo se bute successivement aux Eléphants de la Côte d’Ivoire et aux Lions Indomptables du Cameroun. Les Aigles relèveront finalement ce défi du retour. Tunisie 94 sonne l’alerte pour ce qui est des ambitions des Aigles. Ablo joue sa partition. Le Mali se classe quatrième. Hélas ! Notre héros quitte l’équipe nationale avant la participation des Aigles à une CAN, celle du Mali en 2002. Aujourd’hui, il se dit fier du fait que l’histoire retiendra pour toujours son nom dans des campagnes de l’équipe nationale du Mali.

Après sa retraite, il intègre immédiatement l’encadrement technique du Stade malien de Bamako comme adjoint des différents entraineurs qui se sont succédé. Et ce jusqu’en 2006, date à laquelle il décide de s’aventurer aux Etats Unis pour tenter autre chose.

Pourquoi l’aventure à un moment où il était employé par son équipe et il n’était pas exclu qu’on lui confiât les rênes du Stade ? Abdoulaye Traoré avait une autre vision de la chose : “En un moment donné, le salaire ne suffisait plus. D’ailleurs, il n’était pas régulier, certes les relations me permettaient de joindre les deux bouts. Mais est-ce que cela pouvait continuer ? C’est la question à laquelle je n’ai pu avoir une réponse. Le football m’a beaucoup servi dans ma vie. Et je ne saurai le passer sous silence. Seulement, chaque chose en son temps et il faut savoir quand est-ce qu’il faut aborder une nouvelle ligne ou continuer sur la même ligne. Sinon, mon visa a fait pratiquement deux mois dans ma poche et je n’ai rien dit à personne. Finalement, j’ai informé les dirigeants du Stade malien de Bamako de mes intentions et 48 heures après, j’ai pris l’avion pour les Etats Unis. Tout se passe bien, Dieu merci”

Justement, c’est à quelques heures de son départ que nous l’avons rencontré dans le cadre de cette rubrique. Pour le retrouver, l’exercice nous a été plus facile. D’autant plus que son grand frère, Idrissa Traoré dit Poker, est déjà passé dans la même rubrique. Et au moment de nous accompagner à la porte, il s’arrêta devant l’appartement de son jeune frère Abdoulaye, pour nous présenter sa famille. Comme pour dire qu’entre son frère et lui, tout va bien. C’est cela aussi une des valeurs cardinales de notre société.

O .Roger SISSOKO
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