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Que sont ils devenus ? Sidi Bekaye Magassa : Double passion : le football et l’arbitrage
Publié le samedi 7 juillet 2018  |  Aujourd`hui
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© aBamako.com par FS
Cérémonie de lancement de la candidature de Moumoutou TOURE dit Bavieux
MAEVA Palace a abrité, le Mardi, le 29 Août 2017, la cérémonie de lancement de la candidature de Moumoutou TOURE dit Bavieux pour la conquête de la présidence de la FEMAFOOT.
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Avec 5 finales de la Coupe du Mali de football (1990-1993-1996-1999-2000), 5 fois lauréat du Challenge “Craven A” de meilleur arbitre du Mali (1995- 1996- 1997- 1998- 1999.), 2 phases finales de CAN (1996- 1998), 58 matches interclubs dont quatre finales, 49 matches d’équipes nationales dont une finale (Ghana-Nigeria à Bamako en finale de la 1ère CAN Cadets en 1995), Sidi Békaye Magassa a été incontestablement l’un des meilleurs arbitres d’Afrique durant sa carrière. Le cran dont il avait le secret a toujours servi d’alibi dans ses désignations par la Fédération malienne de football et la CAF pour officier les grands derbys. Cette rencontre de quart de finale de la CAN en 1996 entre la RDC et le Ghana est la parfaite illustration de ce constat. Ce match a failli dégénérer au point que le commentateur français a suggéré que l’arbitre se rabatte sur les deux capitaines pour éviter le pire. Mais Magassa a mis sa perspicacité en jeu pour diriger la partie avec sept cartons jaunes et un carton rouge en première mi-temps.

Mais sa carrière prendra un coup dur deux ans après. En effet, quelques jours seulement après avoir été désigné meilleur arbitre africain, Sidi Békaye Magassa est retiré de la liste des arbitres de la Coupe du monde de France 1998, pour un carton qu’il n’a pas donné au jeune Benedict Mc Carthy des Bafana Bafana d’Afrique du Sud. Mauvais souvenir ? Oui, l’homme se rappelle encore ce moment où sa carrière a basculé. A cela s’ajoute cette finale de Coupe du Mali de 1993 entre le Djoliba AC et l’Usfas, où des supporters militaires ont failli l’assassiner devant le président de la République Alpha Oumar Konaré. Doté d’un moral de fer, Sidi Békaye a surmonté tous ces obstacles pour l’objectif qu’il s’est fixé : servir le football jusqu’à son dernier souffle. Nous l’avons rencontré dans le cadre de la rubrique “Que sont-ils devenus ?”. L’ancien Professeur d’histoire géo à l’Ecica a bien voulu nous conter son histoire.

Nous étions dans un dilemme et retenus par une force étrangère plus puissante que notre volonté pour aborder avec notre héros du jour cette rencontre de demi-finale de la CAN 1996 entre l’Afrique du Sud et la République Démocratique du Congo, où la carrière de l’excellent arbitre international, Sidi Bekaye Magassa, a pris une douche froide. Le 26 février 1998, la CAF raye son nom de la liste des arbitres de la Coupe du monde de France 1998.

Le verdict du carton oublié

L’affaire avait défrayé la chronique en son temps et constitue logiquement un mauvais souvenir pour lui. Mais Magassa nous a mis à l’aise en affirmant qu’il est disposé à répondre à toutes les questions, pour la simple raison qu’il ne peut pas déformer sa propre histoire. En bon musulman, il dit avoir digéré cet incident, ayant à l’esprit qu’on ne peut rien contre la volonté de Dieu. Autrement dit, il l’a accepté parce que Dieu l’a voulu. Mais, que de millions envolés !

C’est seulement à l’Ecica où il enseignait que Sidi Bekaye Magassa ne parlait pas de football. Sinon, sa passion c’est le football. Au Badialan III Kodabougou-, dans son quartier, des jeunes l’attendaient chaque soir à 22 heures devant la boutique de Hama Yattara, pour parler de l’actualité sportive et des décisions de la CAF.

Dans son grin, entre arbitres et amis, ils ne parlent que de football. A la maison, où ses camarades se retrouvaient le week-end pour déguster les bons plats de son épouse, Ami Diakité, l’ambiance résonne encore football. Bref, la vie de Sidi Békaye Magassa est indissociable du football. Ses amis d’enfance nous ont dit qu’il était un fin technicien, qui avait la rare qualité de marquer des buts sur corner.

Paradoxalement, il n’a pas fait long feu en tant que footballeur, parce que son père, un vieux conservateur, ne badinait pas avec la prière du crépuscule. Et rarement, des vieux du quartier acceptaient de plaider la cause du jeune Sidi Békaye et ses frères quand ils se retrouvaient dans les rues à certaines heures. Le vieux Magassa avait des principes basés sur la prière et les études. Face à une telle dictature, Békaye se contentait de quelques minutes de jeu, pour rentrer à la maison. C’est par le pur hasard qu’il se retrouva dans le giron de l’arbitrage. Sa génération a certainement eu la mauvaise chance de vivre des moments où on ne manquait pas d’occasion dans la rue pour tenter de régler les comptes des arbitres accusés de partialité.

le football et l'arbitrage
Sidi Bekaye Magassa avec le Premier ministre IBK lors de la finale de la coupe du Mali de 1999
En 1984, des supporters du Djoliba ont profité d’une réunion de la Commission centrale des arbitres (CCA) au stade Mamadou Konaté (siège de la CCA et terrain d’entrainement du Djoliba) pour prendre en otage les arbitres Moussa Kanouté, Sidi Békaye Magassa et Cheick Keïta. Bloqués dans les bureaux de la CCA, il a fallu l’intervention de la police pour sauver les hommes en noir. Ce jour, ça a chauffé.

L’arbitrage et l’argent : inséparables mais antagonistes

Interviewer Sidi Békaye Magassa ne devrait pas être un exercice difficile, seulement, il arrive parfois d’abandonner son questionnaire. L’homme est un bon orateur et qui a une connaissance large du football et des règles de l’arbitrage. Face à lui, nous posons une problématique:l’arbitrage et la corruption. Sa réponse sur ce fléau est sans équivoque. Sidi Békaye Magassa dit que les deux vont ensemble, mais antagonistes. Dès l’instant que les intérêts sont en jeu, il y aura toujours des gens qui choisiront des raccourcis pour gagner. Et s’ils tombent sur des esprits faibles, ils n’hésitent pas à s’engouffrer. Ce qui peut réussir, mais ne prospère pas. Tôt ou tard, le risque d’être rattrapé est là, réel.

A leur temps, soutient-il, la corruption n’était pas trop visible et s’appuyait plutôt sur des rumeurs que des réalités. A l’heure actuelle, avec le développement des nouvelles technologies, le risque de se faire prendre ou d’être radié est grand.

A-t-il été approché durant sa carrière ? L’ancien arbitre international se souvient : “Que ça soit au Mali ou à l’étranger, j’ai été approché par des dirigeants ou responsables de clubs. J’ai toujours trouvé des moyens pour les éviter. Les collègues avec qui j’ai l’habitude de voyager peuvent le témoigner. En réalité, ils ne venaient pas avec des valises d’argent, mais ils sont d’ailleurs plus psychologues. C’est-à-dire que ces responsables de clubs utilisent même les chauffeurs pour savoir ce que les arbitres ont payé ou n’ont pas pu acheter faute de moyens. Een retour, ils vous font ces gestes. Or, la déontologie de la Fifa est très claire : tout objet de valeur pris par un arbitre est une corruption. La Fifa paie bien ses arbitres et avec l’introduction de la vidéo, aucun arbitre ne prendra le risque de tricher, au motif qu’il a pris des dessous de table. Au risque d’être radié, il est évident que les arbitres se méfient et évitent d’entrer dans certains jeux. Dans la plupart des cas, on vient dans l’arbitrage pour avoir de l’argent à travers les sorties sur le continent ou même les phases finales de CAN et de Coupe du monde”.

Alors, son choix est-il lié à un aspect mercantiliste ? Sidi Békaye Magassa affirme qu’il a embrassé la carrière arbitrale à une période où elle ne générait pas autant d’argent. Mais, le fait de côtoyer Drissa Traoré dit Driboss a contribué à faire balancer son cœur vers l’arbitrage. Il s’entrainait avec eux et vu son jeune âge et sa connaissance de l’éducation physique, il leur faisait pratiquer des exercices de musculation. Finalement, Driboss et ses camarades l’encouragent à déposer ses dossiers au niveau de la ligue pour être arbitre. Déjà, il avait des paramètres qui ont guidé ses pas : la fréquentation des arbitres et l’envie de devenir comme eux. Il s’inscrit dans le corps arbitral en novembre 1978, quand il était encore à l’Ecole Normale Supérieure. Pour être assidu et régulier aux entrainements, il mettait toujours des cahiers dans son sac pour tromper la vigilance du vieux Magassa, toujours accroché aux principes conservateurs.

Deux ans après, Sidi Békaye obtient le grade d’arbitre de district et officie son premier match de première division le 8 octobre 1981, ligue en 1983. A ce niveau, il est le seul, avec Driboss, à avoir été arbitre international avant d’être fédéral. C’est-à-dire qu’il n’a pas suivi l’ordre normal de choses relatives à l’échelonnement des différents grades arbitraux. C’est seulement en 1986 qu’il sera fédéral, avec à la clef déjà de nombreux matches internationaux en compagnie de son mentor Driboss, de l’intraitable Modibo N’Diaye et de Cheick Oumar Dia. A l’époque, les arbitres n’étaient pas encore spécialisés pour officier au centre ou être assistant. Donc, ils étaient polyvalents. Il tissa sa toile auprès de ses ainés sur le plan national et international en compagnie des Moussa Kanouté, Sidi Sissoko, Cheick Kéïta, Sidi Békaye Doumbia.

D’autres cadets comme Dramane Danté, Seydou Traoré dit le fils seront plus tard ses complices. Et quand les anciens ont commencé à prendre leur retraite, Sidi Békaye Magassa s’installa incontestablement comme le porte-flambeau de l’arbitrage malien et africain. Et cela durant plus de 15 ans où il officia à travers les différents stades d’Afrique et même en Iran à la faveur des éliminatoires de la Coupe du monde de France 1998, dans le cadre de la coopération entre la CAF et son homologue d’Asie. Atteint par la limite d’âge, il prend sa retraite en 2000.

L’honneur orchestré par les arbitres ce jour constitue un souvenir inoubliable pour l’ancien arbitre international.

Comme évoqué plus haut, la vie de Sidi Békaye Magassa est liée au football. C’est pourquoi, après sa retraite, il enfila le manteau d’administrateur de football et occupa les postes suivants : 1988-2000: secrétaire général de la Commission régionale des arbitres de Bamako ; 1997-2005: Instructeur national des arbitres du Mali ; 1998-2005: membre de la Commission centrale des statuts et règlements de la Fédération malienne de football ; 2000-2002: chargé des compétitions internationales à la Fédération malienne de football ; avril à décembre 2002 : secrétaire général adjoint de la Fédération malienne de football (FMF); 2002-2005: secrétaire administratif de la FMF ; Instructeur d’arbitres de la CAF depuis 2004 ; Inspecteur d’arbitres de la Fifa pour les éliminatoires “Allemagne 2006” ; Commissaire de matches de la CAF en 2006; Instructeur d’arbitres de la Fifa depuis 2007; Juillet 2009 à ce jour : membre du CE de la Fémafoot en qualité de président de la Commission centrale des arbitres, puis président de la Commission centrale d’éthique et Fair-Play.

En plus de ce parcours honorable, Sidi Békaye Magassa a reçu plusieurs diplômes, notamment celui d’Instructeur de la CAF (4ème Stage continental des instructeurs d’arbitres du 05 au 09 Février 2004 à Hammamet en Tunisie), d’Instructeur de la Fifa (Futuro III : Cours pour instructeurs d’arbitres et d’arbitres assistants du 22 au 28 Novembre 2004 à Bamako), d’Instructeur de la Fifa (Futuro III : Cours de recyclage pour instructeurs d’arbitres et arbitres assistants du 06 au 10 Novembre 2006 à Ouagadougou).

Depuis Aout 2008, il est responsable du Développement de l’arbitrage (RDO) pour les pays francophones d’Afrique pour le compte de la Fifa. Sa dernière promotion date du mois de juillet 2017, où il a intégré la Commission des arbitres de la CAF, et désigné responsable de la zone ouest “A”.

O. Roger SISSOKO
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