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Déclaration des biens du Président : Quand une règle constitutionnelle se mure dans la clandestinité !
Publié le lundi 10 septembre 2018  |  L’aube
Prestation
© aBamako.com par A S
Prestation de serment à la Cour suprême
Bamako, le 20 octobre 2017 L’audience solennelle de leur installation et la prestation de serment a été présidée par le président de la République Ibrahim Boubacar Kéita,
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Plutôt que d’informer l’opinion de la tenue de l’audience de déclaration publique des biens du Président qu’elle reçoit comme exigé par l’article 37 de la Constitution, la Cour suprême a préféré violer la Constitution en portant à la connaissance du public la déclaration clandestine et non publique des biens du Président de la République.

Après les viols répétés inqualifiables de la Constitution et des lois de la République à travers les actes de forfaiture des membres de la Cour constitutionnelle y compris sa Présidente à la compétence approximative et à l’éthique quelque peu douteuse, un soi-disant communiqué du Président de la Cour suprême vient d’attester encore une fois de plus, comment les personnes qui animent les plus hautes institutions de la République sont d’abord et avant tout les premiers à leur manquer de respect par leurs attitudes anti-républicaines à fouler au pied les règles qui les régissent . Oui, le respect des institutions de la République, c’est d’abord la preuve évidente et indiscutable du comportement éthique de ceux qui animent ces institutions, de leur engagement républicain et de leur souci unique et constant d’appliquer dans toute leur rigueur les Lois de la République à la fois dans leur lettre et leur esprit. « Dura lex, sed lex », comme dirait l’autre. C’est indiscutable, la Cour suprême à travers le Communiqué du 7 septembre 2018 de son Président, vient de faillir à cette noble mission républicaine. Ce Communiqué est ainsi pondu : « Le président de la Cour suprême du Mali a l’honneur de porter à la connaissance du public qu’en application de l’article 37 de la constitution du 25 février 1992, Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA, Président de la République, a procédé à la mise à jour annuelle de sa déclaration de biens au titre de l’année 2018 le lundi 03 septembre 2018. En outre, le jeudi 06 septembre 2018 à 10 heures, il a procédé à la déclaration de ses biens, en sa qualité de Président nouvellement élu ».

Rien qu’à travers la formulation de ce Communiqué qui amalgame la déclaration écrite des biens du Président nouvellement investi et la mise à jour annuelle dont cette déclaration fait l’objet, au mépris de la lettre et de l’esprit de l’article 37 de la Constitution, on mesure bien la légèreté qui saute aux yeux. En aucun cas, de manière ainsi laconique, le même communiqué ne devrait rendre compte de ces deux situations. En agissant ainsi, la Cour suprême donne nettement l’impression de ne sacrifier en fait qu’au détail d’un simple rituel n’ayant rien à voir avec une quelconque obligation de transparence dans la gouvernance du pays.

Violation de l’article 37 de la Constitution !

Ce message anti-républicain paraît encore plus évident lorsqu’on scrute de plus près l’article 37 de la Constitution dont le dernier alinéa dispose : « Après la cérémonie d’investiture et dans un délai de 48 heures, le Président de la Cour Suprême reçoit publiquement la déclaration écrite des biens du Président de la République. Cette déclaration fait l’objet d’une mise à jour annuelle ». Même sans être un juriste, le simple bon sens commande de comprendre ici que « recevoir publiquement », signifie recevoir ouvertement, solennellement et non en cachette, c’est-à-dire prendre acte en public au vu et au su de de tous. Tous les Maliens devraient pouvoir témoigner sur place de cette déclaration des biens du Président investi. Dans la lettre et l’esprit de la Constitution, le terme « recevoir publiquement » ne signifie pas autre chose que la déclaration écrite des biens du Président doit être reçue en audience publique, c’est-à-dire une audience qui doit respecter les règles de la publicité qui supposent l’information officielle préalable du public malien de cette cérémonie à laquelle toute personne est habilitée à prendre part. Pourtant, en d’autres occasions comme la cérémonie d’investiture du Président de la République, on a vu la Cour suprême faire preuve de zèle en matière d’information du public sans même que l’article 37 de la Constitution ne soit explicite à ce sujet. Il est regrettable que ce même zèle ne soit pas de mise, au mépris de la volonté explicite du constituant de 1992 engageant la Cour Suprême à « recevoir publiquement la déclaration écrite des biens du Président de la République ». Le Communiqué du 7 septembre 2018 est la meilleure preuve que la Cour suprême, en violation de l’article 37 de la Constitution, vient de murer dans la clandestinité l’obligation de transparence de la déclaration des biens du Président de la République. Le Communiqué folklorise le dernier alinéa de l’article 37 de la Constitution en substituant à la transparence exigée par le Constituant, l’opacité décidée par la Cour suprême. Plutôt que d’informer l’opinion de la tenue de l’audience de déclaration publique des biens du Président qu’elle reçoit comme exigé par l’article 37 de la Constitution, la Cour suprême a préféré violer la Constitution en portant à la connaissance du public la déclaration clandestine et non publique des biens du Président de la République. La Cour suprême n’en est d‘ailleurs pas à son premier tour de magie, si l’on se rappelle qu’elle a l’habitude de faire ressusciter dans l’arsenal juridique du Mali, une loi électorale expressément abrogée par le législateur.

L’article 37 de la Constitution du 25 février 1992 n’a nullement demandé au Président de la Cour suprême d’informer par communiqué l’opinion publique de la réception d’une déclaration (clandestine) des biens du Président de la République. Au contraire l’article 37 impose à la Cour Suprême de « recevoir publiquement la déclaration écrite des biens du Président de la République ». Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un acte de forfaiture. C’est semble-t-il malheureusement la mode au cœur des institutions de la République désormais plus que jamais bananière du Mali où l’on a pris la vilaine habitude de toujours s’asseoir sur les textes de droit.

Dr Brahima FOMBA, Université des Sciences

Juridiques et Politiques de Bamako (USJP)
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