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Art et Culture

MALI FESTI REGGAE: Une excellente tribune pour continuer la lutte des «freedom fighters»
Publié le vendredi 1 mars 2019  |  Le Matin
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Les rideaux sont maintenant tombés sur la 14e édition de «Mali Festi Reggae» (Festival international de reggae) qui a eu lieu du 21 au 23 février 2019 au Musée national, à Bamako. Ce festival fait la promotion d’une musique de combat et d’un mouvement (Rastafari) qui souffrent de beaucoup de préjugés. N’empêche que le reggae est désormais (depuis 2018) classé au «Patrimoine culturel immatériel de l’humanité» par l’Organisation des Nations unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO).

En 2018, la célébration des 50 ans du reggae s’est achevée en apothéose avec l’inscription du reggae de Jamaïque au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Une décision prise par un comité spécialisé de l’Unesco réuni à Port-Louis, en Île Maurice.
L’Unesco a tenu ainsi à reconnaître «la contribution» de cette musique engagée à la prise de conscience internationale «sur les questions d’injustice, de résistance, d’amour et d’humanité». Sans oublier sa dimension à la fois «cérébrale, sociopolitique, sensuelle et spirituelle» propagée dans le monde grâce à des artistes comme Bob Marley.
Le reggae rejoint ainsi une liste de quelque 400 traditions culturelles (chants, danses, spécialités gastronomiques ou célébrations) allant de la pizza napolitaine au zaouli, à la musique et danse des communautés gouro de Côte d’Ivoire.
A cette occasion, la ministre de la Culture jamaïcaine a emporté l’adhésion des membres du comité en reconnaissant «la contribution de cette musique à la prise de conscience internationale sur les questions d’injustice, de résistance, d’amour et d’humanité». Le vrai terrain, reconnaissent les historiens et les chroniqueurs culturels, sur lequel se situe et s’illustre le reggae où qu’il soit joué.
Le reggae a longtemps été revendiqué comme la musique des opprimés, abordant des questions sociales et politiques, la prison et les inégalités. En 1968, la chanson «Do the Reggay» de «Toots and the Maytals» a été la première a utiliser le nom de reggae (alors orthographié différemment) qui a connu un grand succès mondial grâce à des classiques de Bob Marley et son groupe «The Wailers» comme «No Woman, No Cry», «Stir It Up»…
Reggae woman et présidente de la commission d’organisation de Mali Festi Reggae (Festival international de reggae au Mali, Aminata Sangaré dite Queen Mamy, lie la reconnaissance de l’UNESCO «au combat des hommes et des femmes dans l’arène musicale hermétiquement fermée à cette époque aux Noirs et leurs messages anti-Babyloniens (contre l’oppression)».
Des convictions articulées autour de «la liberté, la fierté, l’égalité et les droits pour tous, de l’Africanité». Et Robert Nesta Marley alias Bob Marley, est certainement l’un des plus connus et des plus célèbres de ces «Freedom Fighters» (combattants de la liberté) pour avoir révolutionné le monde par sa musique.
«Ne laissez jamais un politicien vous faire une faveur. Sinon il voudra vous contrôler pour toujours», prônait par exemple le Pape du reggae, Bob Marley, dans sa célèbre chanson «Revolution». Entre prudence et méfiance, sa position traduisait l’état d’esprit qui animait le reggae et ceux qui s’en étaient emparés comme d’une arme de libération. Libérer et se libérer avec une farouche volonté de privilégier une forme d’indépendance vis-à-vis de tout pouvoir, toute autorité, d’échapper à ces contraintes créées par les hommes.
S’affranchir du joug d’un «système articulé» de la relation entre dominés et oppresseurs comme ce fut le cas pendant les quatre siècles d’esclavage et de colonisation britannique dont la Jamaïque ne s’est défaite qu’en 1962.
A noter «Mali Festi Reggae» a été initié à l’occasion de la célébration de Robert Nesta Marley dit Bob Marley en février 2005. Et depuis Mariam Sangaré dite Sista Mam a réussi à imposer cet événement dans l’agenda culturel au Mali. Une tradition perpétuée au prix de la passion et d’énormes sacrifices. «Il est difficile de donner un budget réel. Mais, nous devons débourser 3 millions de F Cfa rien que pour la sonorisation», a précisé Sharaph Coulibaly. «Et en 13 éditions, nous avons toujours organisé à perte, sauf en 2017», a indiqué le directeur artistique, Sharaph Coulibaly.
Aujourd’hui, le reggae est chanté sur tous les continents et dans presque toutes les langues. Musique de libération et d’émancipation, le reggae a «permis une prise de conscience et la compréhension du monde spirituel et de la place de Jah (Dieu) dans ce qui se passe dans le monde et dans la vie d’une personne» !
Moussa Bolly

UN MOUVEMENT, UNE MUSIQUE ET UNE PHILOSOPHIE : L’amour au service de la paix pour l’humanité

Le reggae est indissociable du rastafarisme (rastafari), mouvement spirituel qui sacralise l’empereur éthiopien Hailé Sélassié. C’est donc une musique intimement liée au mouvement rastafari qui est une organisation sociale, culturelle et spirituelle développée à partir de la Jamaïque dans les années 1930. Le nom du mouvement vient de Ras Tafari Mekonnen couronné en 1930 Negusse Negest d’Éthiopie, lion conquérant de la tribu de Juda sous le nom d’Hailé Sélassié Premier.
«Il faut expliquer le mouvement rastafari, parce que c’est très mal compris. Un rasta, c’est une attitude, une philosophie», nous disait Sista Mam (Mariam Sangaré), reggae woman et l’initiatrice de Mali Festi Reggae, lors d’un entretien.
A l’origine, le mouvement naît en Jamaïque au sein des populations noires, des descendants d’esclaves déportés sur l’île. Et dès ses débuts, il est résolument tourné vers l’Afrique où un événement particulier va contribuer à son éclosion. Il s’agit du couronnement de Hailé Sélassié en 1930 à Addis-Abeba en Éthiopie. Un roi noir qui devient empereur à l’époque où le continent africain est dominé par les puissances coloniales.
L’événement connaît un retentissement planétaire et fait la «Une» du Time aux États-Unis et du Daily Gleaner sur l’île de la Jamaïque où une poignée de prêcheurs noirs se mettent à élever Hailé Sélassié au rang de divinité. Ils répandent l’idée que Hailé Sélassié est la réincarnation de Dieu sur Terre, venu au monde pour mettre un terme à la domination de l’Homme blanc sur l’Homme noir.
Cette idée est aux fondements du mouvement rastafari qui va également se nourrir, tout au long de son histoire, de la pensée du Jamaïcain Marcus Garvey, figure emblématique du nationalisme noir. Cet intellectuel engagé défend «l’affirmation d’une fierté noire, la réappropriation d’un héritage africain et prône le rapatriement des diasporas africaines en Afrique».
Ce n’est qu’à partir des années 1940 que le mouvement rastafari s’impose comme une culture et un mode de vie alternatif en Jamaïque. Mais, il faut attendre les années 1970, période d’explosion de la musique reggae, pour que la pensée rastafari s’impose à l’échelle planétaire, notamment grâce à des artistes comme Bob Marley qui véhiculent le message rastafari dans leurs chansons.
Moussa Bolly LE MATIN
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