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Élection présidentielle au Mali : Attention, la comédie et la tragédie sont des sœurs
Publié le dimanche 14 juillet 2013  |  Le Reporter


© aBamako.com par MOUSNABI
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Le Mali s’apprête à élire dans trois semaines celui qui devra parler en son nom sur la scène internationale et incarner son être collectif. C’est que pour faire Président, il faut avoir subi l’épreuve du feu, trimer, consulter les oracles des devins, des charlatans, des marabouts et s’acquitter des offrandes conseillées par les féticheurs. Aux prières de la mosquée vient s’ajouter la guirlande de la métaphysique des voies du mystère que la Culture et l’endogénie de la croyance populaire auront produite.

Le Pouvoir a ses secrets et il est dit que les voies du Seigneur-Maître des maîtres- sont insondables. La démocratie libérale procède d’une économie de la légitimation dont la microphysique du pouvoir au sens foucaldien peut anéantir la portée et fausser ce qu’il est convenu de nommer le Choix souverain (Peuple). La biopolitique n’opère pas seulement sur le champ de l’ingénierie du contrôle des corps et des esprits. Aussi la conquête des âmes et l’assaut sur l’opinion ne lui suffisent pas pour réussir l’architecture de son efficacité visée. Il lui faut également la comptabilité des noms, des âges et la géo-identification pour mieux réussir la préemption des résultats. C’est que le fichier électoral se pose ici comme physique d’où part la manipulation des résultats sur lesquels l’on peut peser avant « l’opérationnalité » de l’acte de vote du citoyen.

Les régimes fascistes d’antan et les dictatures de jadis non trop éloignés de nous d’ailleurs, ne s’encombraient guère d’une « subtilité » de la maîtrise et du contrôle anticipé du choix dit souverain, en réalité souvent manipulé et influencé par mille et une méthodes. Les Présidents d’hier avaient la main lourde, aidés par le fer et l’infrastructure sécuritaire (la police elle-même souvent militarisée), pour fixer le taux qu’ils voulaient au nom de la légitimité particulière entendue de leur façon, leur entendement de dithyrambes.

Aujourd’hui, la pluralité des partis, les armées électorales déployées sur le champ de bataille pour le pouvoir ont appris à maîtriser les stratégies guerrières du vol, du bourrage, de la manipulation des résultats, du tripatouillage du scrutin pour se laisser faire. Sous le feu des alternances sans alternative, il arrive que les anciens tricheurs de scrutins soient dans l’opposition et que les opposants d’hier apprennent vite l’art sorcier de faire dire au choix des peuples abusés ce qu’ils n’ont pas voulu dire. L’Occident, en dépit des tares mortelles de sa démocratie, du désamour électoral, de l’affaiblissement du militantisme partisan a souvent le mérite d’élections libres et transparentes. Sous les Tropiques, on en a aussi connues jusqu’à voir des Présidents reconnaître leurs défaites et donner la clé du palais au gagnant. Mais l’arbre ne sachant pas cacher la forêt, l’économie des élections en Afrique n’a pas fini avec sa déclinaison de la compatibilité manipulée. D’où l’enjeu porté par les fichiers électoraux et les querelles et autres bisbilles pérennes pour sa clarté, sa transparence et surtout sa maîtrise. Qui a la haute main sur le fichier pourra préempter une victoire malpropre au prix des exclusions, des privations au vote mais paradoxe des morts qui votent quand les vivants en sont privés.

Le Mali connaît une sorte de fracture interprétative en termes de pertinence temporelle du vote. Logique de guéguerres entre deux institutions, le ministère de l’Administration territoriale qui rassure quand la CENI prône la prudence voire le report. Au cœur de ce débat, transparaissent clairement les questions majeures de scrutin transparent ou tripatouillé, d’une crise postélectorale dont le pays pourra faire l’économie. Les cartes NINA servant de numéro d’identification nationale sont des boursouflures (positives ou négatives) d’une biopolitique qui ne dit pas son nom. De la dichotomie institutionnelle à l’urgence de la mise en place d’un pouvoir plus légitime, de la crainte de voir le MNLA se renforcer au moment où Koulouba est devenu l’enjeu essentiel aux sirènes avisant de l’imminence d’une crise postélectorale, le bal des ambitions tue et confisque la teneur pertinente des attentes populaires. Les démocraties de la misère ont le secret des rituels cycliques. L’élection est comme l’amour, toujours dangereusement savoureux. Elle peut tourner à la comédie comme à la tragédie bien qu’il est souhaité qu’elle soit une grande fête de bonheur où le vaincu envoie un bouquet de félicitations à l’heureux élu.

Allah a toujours fait sa part, aux hommes de savoir éviter les dangers dont l’intuition les informe car la Providence aime trop les hommes pour les maudire. Elle ne les maudit jamais. Seuls les bipèdes ont l’art et le génie de se maudire par leur refus de la Vérité jusqu’à ce qu’elle devienne inévitable et hélas mortelle. Après la tragi-comédie de 2012 au Nord, il faut préserver ce pays fatigué, trahi, trompé (par ses propres enfants) d’une nouvelle crise volcanique au sud dont les flux et reflux ne seront pas sans incidence sur le pays entier, ce géant très malade qui attend un vrai médecin au Cœur taillé dans la pierre du Patriotisme et de l’Amour pour la multitude gouvernée, jamais innocente dans ce qui lui est arrivé comme destin conjoncturel.

La Politique, n’est-ce pas l’art de répondre à la conjoncture sans y rester prisonnière ? Aux prétendants voulant faire l’amour au Mali, sachez que l’amour est toujours dangereux. Il lui arrive de tuer même ses propres maîtres. Vive le Mali dans une Afrique unie.

YAYA TRAORE
Politologue Communicant, Consultant
DIRECTEUR OXYGENIE S.S.E.E.C.C.O.

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