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IBK : "Il faut fonder une démocratie véritable" au Mali
Publié le dimanche 28 juillet 2013  |  Le nouvel observateur


© Partis Politiques par DR
Présidentielle 2013 : Meeting du parti ASMA et alliés en soutien au candidat Ibrahim Boubacar Keita (IBK)
Juillet 2013. Mali, Palais de la Culture Amadou Hampaté Bâ


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Ibrahim Boubacar Keïta est donné favori de l’élection présidentielle dont le premier tour a lieu ce dimanche. Sarah Halifa-Legrand l'a rencontré à Bamako. Interview.

Ancien Premier ministre et ex-président de l’Assemblée nationale, Ibrahim Boubacar Keïta est donné favori de l’élection présidentielle dont le premier tour a lieu ce dimanche. C’est aussi, dit-on, le candidat que la France verrait d’un bon œil accéder au pouvoir.

Vous faites partie du paysage politique du Mali depuis des décennies, certains de vos détracteurs disent même que vous faites partie du "système". Comment comptez-vous apporter le changement à ce Mali qui en a tant besoin ?

- Je ne sais pas de quel système vous parlez. Je suis Ibrahim Boubacar Keita, candidat à la présidentielle du Mali, dont le parcours est connu de tous. Le changement, je l’ai toujours proposé. J’ai été le premier homme politique malien à dire que nous étions à la dérive, qu’il nous fallait fonder une démocratie véritable. Cette question est une obsession chez moi. Et la crise que nous venons de traverser n’a pas démenti mon analyse. Les Maliens savent quel homme je suis, quelle est ma vision. Demain, ils sauront également que je suis un homme qui allie les gestes à la parole. Quand je dis, je fais. Ils l’ont déjà su : par le passé ils m’ont pratiqué. A l’avenir ils le sauront encore mieux, Inch’Allah.

Tous les candidats parlent de la même chose : réconciliation nationale, lutte contre la pauvreté, lutte contre la corruption… Qu’est-ce qui vous différencie des autres ?

- Ce qui nous différencie, ce sont nos êtres profonds, nos personnalités. Chacun fait l’inventaire de ce qu’il a à vendre ; l’acheteur, lui, sait à quoi s’en tenir pour chaque objet qu’il convoite. Telle est l’élection : il est normal que chacun se présente avec ses meilleurs atouts. Mais dans le parcours du Mali, au moment précis où nous nous trouvons, cela n’a plus beaucoup d’importance : l’enjeu est tellement crucial aujourd’hui que les faux-fuyants qui ont peut-être pu en abuser certains jusqu’à présent n’abuseront plus personne. Chaque Malien est devant un choix très clair. Quel type de président choisir pour demain ? Qui sera capable de prendre les grandes décisions dont le pays a besoin ? Qui est crédible ? Qui ne traine pas de casseroles ? Qui sera à même de gérer les sommes d’argent importantes que la communauté internationale, sous l’égide de la France, a pu réunir pour le Mali ? Allons-nous confier cet argent-là à des mains impropres ou allons-nous, pour une fois, en rupture avec notre histoire, répondre aux attentes et retrouver du crédit aux yeux de tous par une gestion simple, intègre, compétente, dont le crédo sera : corruption, tolérance zéro.

Si vous êtes élu, quel sera votre premier acte ?

- La première chose qui me hante, qui m’obsède, c’est la réconciliation des Maliens. Il faut que dans ce pays nous nous retrouvions frères sur ce territoire que Dieu nous a donné en partage. C’est la chose la plus importante pour moi : que les fils et les filles du Mali se parlent. C’est crucial. Nous ne pourrons rien bâtir si nous n’avons pas conforté le socle de la réconciliation nationale. Notre tissu s’est déchiré, il faut le recoudre, il faut que le Mali reparte d’un bon pied. Nous avons vécu en communion, en fraternité, en convivialité, ce Mali doit se retrouver aujourd’hui. La communauté internationale nous a fabuleusement aidés. A nous de poursuivre au mieux le travail.

Parce que c’est une élection organisée dans un délai très court, dans la précipitation, parce que beaucoup de gens ne pourront pas aller voter, si vous êtes élu, croyez-vous que vous serez légitime aux yeux de tous les Maliens ?

- Je déplore que cette élection ne soit pas parfaite. Nous ferons mieux la prochaine fois. Mais aujourd’hui, le Mali a besoin d’un président qui sorte des urnes. Et ce président, même s’il est élu par deux voix, ce sera la voix du peuple malien à un instant T. Telle est la démocratie. Ça ne se passe pas autrement aux Etats-Unis. Notre système électoral, notre système démocratique qui subit des conditions exceptionnelles du fait de la crise que nous avons vécue saura se régénérer. Cette élection va se passer sous les regards internationaux – jamais une élection malienne n’aura été autant suivie, autant regardée. La question de la légitimité est sans objet. Les Maliens vont choisir leur président le 28 juillet.

Quel que soit le président qui sera élu, ce sera un président sous tutelle internationale…

- Pas sous tutelle. Je récuse ce terme. Le Mali ne sera jamais sous tutelle, le Mali sera accompagné par la communauté internationale dans des conditions convenues avec le Conseil de Sécurité au terme de la résolution 2100, point barre. Il ne sera jamais question pour le Mali d’être un pays sous tutelle de qui que ce soit. Notre souveraineté n’est pas négociable et ne sera pas négociée par qui que ce soit. Dès l’instant où nous aurons un président légitime, il incarnera la souveraineté du Mali.

Il pourra s’opposer à des demandes de la communauté internationale ?

- Absolument, si elles sont non conformes aux intérêts du Mali.

On vous dit soutenu par les religieux, notamment certains membres du Haut Conseil islamique, la principale institution religieuse du pays. Comment expliquez-vous ce soutien ?

- Je suis un laïc convaincu. Mais le Mali est un pays musulman à plus de 80%. Si les musulmans me soutiennent, pourquoi voudriez-vous que j’en sois marri ? C’est ma religion, j’en suis fier, et c’est celle de mon peuple. Nous ne sommes pas des néophytes en matière religieuse. Les néophytes sont zélés alors que notre islam est très calme, il vient de loin, ce n’est pas l’islam des nouveaux convertis, de conquérants d’un nouveau genre, c’est un islam humain, profondément humaniste.

On vous dit également soutenu par les militaires, notamment les putschistes qui ont renversé le pouvoir en mars 2012…

- Je ne regrette certes pas le président qui est parti, mais j’ai été le premier homme politique malien à condamner le putsch et je ne suis pas réputé avoir la moindre sympathie pour un putsch ni frayer avec des putschistes. Même si je les comprends. Il ne s’agit même pas d’un coup d’Etat classique, mais d’un abandon du pouvoir, d’une fuite de l’autorité ; le vide a été comblé par ceux qui pouvaient le faire, ceux qui étaient organisés, l’armée. De toute façon, mes amis démocrates de par le monde entier savent que je partage les valeurs démocratiques. Il y a eu tellement de dénigrement, de mensonge, de caricature… et ça va continuer. Le devoir d’un homme politique, c’est la conquête du pouvoir et le fait d’assumer ce pouvoir. Quand on y déroge aux fins de s’aménager un avenir ou un confort parlementaire, on trahit le peuple. Je n’ai jamais trahi le peuple du Mali. Contrairement au dernier chef d’Etat en place qui a d’ailleurs conduit à une désaffection réelle des urnes. Parce qu’à la longue les gens se sont dit : à quoi sert-il d’aller voter si c’est couru d’avance ? Cette fois-ci, si je pense que mon tour est venu, ce n’est certainement pas parce qu’on aura dit qu’IBK a la faveur des musulmans, de l’ensemble de l’armée malienne, des touaregs de Kidal.

Propos recueillis à Bamako par Sarah Halifa-Legrand – Le Nouvel Observateur

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