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La dernière bataille de GMT
Publié le lundi 21 septembre 2020  |  L’aube
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© Autre presse par AS
Des obsèques nationales pour l`ex-président Moussa Traoré
Bamako, le 18 Septembre 2020, la place d`armes du génie militaire a abrité les obsèques de l`ancien président du Mali, le Gal Moussa Traoré.
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L’ancien président, le général Moussa Traoré, est décédé, le mardi 15 septembre 2020, à Bamako, à l’âge de 83 ans. Né le 25 septembre 1936, il avait pris le pouvoir en 1968 avant d’être renversé en mars 1991. Condamné à mort, il avait été gracié en 2002 par l’ancien président Alpha Oumar Konaré. Il était, ces dernières années, très écouté de la classe politique malienne. La mort de Moussa Traore suscite des sentiments contradictoires, en effet, partagés entre le passé putschiste de l’ancien président et le statut de « sage » acquis ces dernières années. Les années du tombeur de Modibo Keïta, le « père de l’indépendance », à la tête du pays sont marquées par les arrestations d’opposants, la répression des manifestations, élimination systématiquement de ses rivaux ou encore les décès suspects comme celui de l’ancien président Modibo Keïta en détention, ainsi que les accusations de détournement de l’aide internationale…
Issu d’une famille malinké, Moussa Traoré est le fils d’un ancien soldat de l’armée française. Il s’y engage en 1954. Il fait ses études à l’École des enfants de troupe de Kati (qui deviendra le Prytanée militaire de Kati) puis rejoint l’école d’officiers de Fréjus en France en 1960. Il en sort major de sa promotion2.

Moussa Traoré est nommé sous-lieutenant en 1961, puis lieutenant en 1963. Il part au Tanganyika (l’actuelle Tanzanie) en qualité d’instructeur auprès des combattants des mouvements de libération. Il est ensuite nommé instructeur à l’École militaire interarmes de Kati.

Le 19 novembre 1968, Moussa Traoré participe au coup d’Etat qui renverse le président socialiste Modibo Keïta. Il devient président du Comité militaire de libération nationale, puis président de la République le 19 septembre 1969.

Toutes les activités politiques sont alors interdites. Un régime policier est mis en place sous la direction du colonel Tiécoro Bagayoko. Des agents de renseignements vont dans les écoles pour écouter les cours des professeurs (le milieu scolaire et universitaire est en majorité hostile au régime militaire). Le socialisme économique de l’ancien président Modibo Keïta est abandonné.

En 1971, il accuse son Premier ministre, le capitaine Yoro Diakité, de tentative de coup d’Etat et le fait incarcérer à la prison de Taoudénit où il meurt deux ans plus tard de mauvais traitements.

En 1972-1973, une sécheresse importante s’abat sur le Mali. L’aide internationale arrive mais l’argent est détourné.

Le 2 juin 1974, il fait adopter par référendum (99 % des voix) une constitution qui fonde la Seconde République, imposant un parti unique, une Assemblée nationale et un président élu tous les 5 ans au suffrage universel. En 1976, il fonde l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), parti unique4, ainsi que l’Union nationale des femmes du Mali et l’Union nationale des jeunes du Mali, organisations auxquelles respectivement toutes les femmes et tous les jeunes doivent alors adhérer.

Le 16 mai 1977, l’ancien président Modibo Keïta meurt de façon suspecte en détention à l’âge de 62 ans, entraînant une forte mobilisation populaire : des milliers de personnes se rendent à ses obsèques, auxquelles participent également des délégations officielles de pays voisins (notamment Guinée et Côte d’Ivoire). Le régime militaire réagit violemment en procédant à de nombreuses arrestations, mais Moussa Traoré est obligé d’expliquer à Radio-Mali les raisons de la mort de Modibo Keita due, selon lui, à « un œdème aigu des poumons », mais ces explications ne convainquent personne.

Le 28 février 1978, Moussa Traoré fait arrêter les lieutenants- colonels Tiécoro Bagayoko, Kissima Doukara et Karim Dembélé, respectivement directeur de la Sûreté nationale ; ministre de la Défense et ministre des transports, qu’il accuse de préparer un complot.

Lors des premières élections de la seconde république en 1979, Moussa Traoré est l’unique candidat à la présidentielle. Il propose d’aller vers une ouverture politique ce qui lui permet d’acquérir le soutien de certains intellectuels comme Alpha Oumar Konaré qui acceptera le poste de ministre des Arts et de la Culture pendant quelques années.

En 1980, des manifestations étudiantes sont réprimées. Leur chef Abdoul Karim Camara, dit « Cabral », décède sous la torture, le 17 mars 1980.

En 1982, il est promu général d’armée.

En 1990 sont fondés le Congrès national d’initiative démocratique (CNID) par l’avocat Mountaga Tall et l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema) par Abdramane Baba. Ces deux associations vont, avec l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) et l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH), combattre le régime de Moussa Traoré et exiger le multipartisme.

Le 22 mars 1991, une manifestation à Bamako composée de milliers d’étudiants est réprimée par les armes, faisant plus de 200 morts. Le soulèvement se poursuit jusqu’au 24 mars. Le 26 mars 1991, un coup d’État militaire mené par le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré (ATT) renverse Moussa Traoré. Le Comité de transition pour le salut du peuple (Ctsp) est mis en place avec le colonel Touré porté à sa tête…

Moussa Traoré est emprisonné à la prison de Markala. En février 1993, lors d’un procès qualifié de Nuremberg malien, il est condamné à la peine de mort pour crimes de sang commis entre janvier et mars 1991 par un tribunal de Bamako. Il est incarcéré ainsi que tous les membres de sa famille, dont son petit-fils de 6 ans qui a purgé une peine de 14 mois. Il est le premier chef d’État africain à devoir répondre de ses actes devant la justice de son pays. Ayant été condamné à mort, ainsi que son épouse Mariam, Moussa Traoré est déchu de ses droits civiques, et ne peut donc plus voter…

Obsèques nationales

L’ex-dictateur et président du Mali, Moussa Traoré, a été inhumé, le vendredi 18 septembre dernier, à Bamako après des obsèques nationales en présence de responsables de la junte au pouvoir et anciens responsables nationaux, mais boudées par les dirigeants étrangers.

Une fanfare mortuaire a marqué dans la matinée l’arrivée du corps dans un cercueil drapé aux couleurs du Mali dans le camp du génie militaire de Bamako où se sont déroulées les obsèques, en présence de soldats en tenue d’apparat…

L’ancien président Amadou Toumani Touré a salué « un homme de confiance » qu’il a servi, notamment comme chef de la garde présidentielle avant que la « vie, les évènements ne décident autrement » : « Nous avons perdu en lui (Moussa Traoré) un homme de vérité, un homme complet, un réel patriote », a déclaré le colonel Missa Koné, son ancien ministre de la Santé avec qui il a mené le putsch en 1968.

Sur son compte Tweeter, Soumeylou B Maïga réagit : « J’ai appris avec beaucoup de consternation le décès du Général Moussa Traoré, ancien Président de la République du Mali. Je m’associe aux prières pour le repos de son âme et témoigne des relations d’amitié et d’estime que nous avons nouées depuis plusieurs années ».

Aussi, l’ancien ministre malien des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, emprisonné plusieurs fois comme leader estudiantin et syndicaliste sous Moussa Traoré, évoque la mort du premier militaire à avoir fait un coup d’État au Mali et celle, dramatique, de Modibo Keïta, le président chassé du pouvoir en 1968. Un plaidoyer en faveur de la démocratie et de l’État de droit qui est aussi la première prise de parole publique de l’ancien ministre depuis le putsch du 18 août : « Réagissant au décès du président Moussa Traoré, mon ami, l’ancien leader estudiantin Djiguiba Keïta, exilé politique de 1983 à 1991, a déclaré sur RFI : « Pour moi, la mort de Moussa Traoré est un non-événement ».

Mohamed Sylla
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