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Insécurité grandissante au Mali : Après le nord, le centre bascule dans l’horreur et le sud gagné par la psychose
Publié le mercredi 15 septembre 2021  |  Le Matin
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© Autre presse par DR
Les déplacés du centre qui sont réfugiés dans un campement à Senou
Les déplacés qui ont fui les violences du centre pour se réfugier dans un campement à Senou.
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Malgré la présence déterminée des Forces armées et de sécurité, les groupes armés continuent de terroriser les populations en faisant de nombreux morts et des déplacés. C’est ainsi que le cercle de Niono vit dans une grande insécurité depuis presque deux ans. Tueries, enlèvements de personnes, vols de bétail, braquages sont devenus le quotidien des paisibles populations. Des groupes armés, auteurs de ces crimes, empêchent surtout les paysans de certaines localités comme Farabougou d’accéder à leurs champs. Et selon des ONG comme Médecins sans frontières (MSF), la situation humanitaire est de plus en plus catastrophique à cause du déplacement forcé des populations.
«L’année dernière, on n’a pas pu faire de récoltes à cause des groupes armés qui avaient assiégé notre village pendant des mois. Et cette année, il n’est pas évident que nous puissions cultiver à plus forte raison moissonner les champs. Et cela malgré la présence des militaires qui ont du mal à sillonner la zone comme ils l’espèrent» ! C’est le cri de cœur d’un paysan de la zone de Niono joint au téléphone, il y a quelques semaines. «L’objectif des groupes armés est de nous affamer jusqu’à ce qu’on se plie à leurs exigences», résume-t-il.



Ces réseaux de terreur circulant à motos profitent du fait que l’armée n’est pas très à l’aise dans ces déplacements dans cette zone marécageuse. Et pour échapper à la terreur, les populations n’ont de plus en plus qu’un seul choix : partir ! C’est ainsi que, selon les autorités communales, plus de 1.170 ménages déplacés ont été enregistrés à Diabaly, dans le cercle de Niono, ces dernières semaines.

«La situation sécuritaire dans le cercle de Niono, au centre du pays situé dans la région de Ségou s’est fortement dégradée ces derniers jours malgré un accord de cessez-le-feu conclu entre les différentes parties en conflit en mars dernier. Cette recrudescence de violences a provoqué une série de déplacements de populations dans plusieurs localités», assure M. Kouadio Dominique, coordinateur terrain de MSF à Niono dans un entretien qu’il nous a accordé.

A cause de la menace des intégristes, de nombreux paysans du cercle de Niono ont abandonné villages et champs pour se réfugier dans les ce​ntres ​urbains où ils manquent souvent de presque tout. Ainsi dans la nuit du 15 août 2021, indique-t-il, les habitants de plusieurs villages et hameaux de la commune de Mariko (située à une dizaine de Kilomètre de Niono) sont arrivés dans la ville de Niono après avoir fui les violences. Ils sont en tout 91 ménages déplacés sur Niono parmi lesquels des enfants, des femmes enceintes et des personnes âgées. Sans abris, ils sont logés dans les cours des espaces publics (écoles et mairie). D’autres ont préféré continuer sur Ségou pour raisons de sécurité, de conditions d’hygiène déplorables sur les sites ou encore par peur d’être inondés en cas de forte pluie.

«Lorsqu’une population fuit les violences, elle devient démunie et plus vulnérable», dixit Kouadio Dominique

«Ces nouveaux déplacés s’ajoutent à plusieurs autres déplacés de la zone victimes des agissements des groupes armés», explique le coordinateur. Et pour lui, les conséquences sociales et économiques d’un tel flux de déplacés sont nombreuses. «Les conflits, en général, ont des répercussions socio-économiques et les populations civiles en sont les premières victimes. Lorsqu’une population fuit les violences, elle devient démunie et plus vulnérable, elle perd ou laisse tous ses biens derrière elle pour trouver refuge quelque part là où elle doit reprendre la vie à zéro», rappelle M. Kouadio Dominique.

Sans compter que, ajoute-t-il, «certaines personnes peuvent se trouver séparées de leurs proches ou même les perdre dans les conflits, sans oublier les conséquences psychologiques qu’elles peuvent subir. D’autres peuvent être privées ou n’auront pas un accès facile aux services sociaux de base incluant la santé. Et pour les familles d’accueil de ces réfugiés aux moyens limités, cela représente des charges supplémentaires à supporter…».

En tout cas, les besoins exprimés par les déplacés sont nombreux et urgents. «A l’issue de notre évaluation sur les différents sites, les besoins prioritaires et les plus urgents sont les abris, les vivres, le cash, l’accès aux soins, l’assainissement et les soutiens psychosociaux», précise le coordinateur terrain de MSF à Niono. «Sur place, MSF a dépêché une équipe pour évaluer les besoins et apporter une assistance humanitaire d’urgence», assure-t-il.

Les équipes de MSF ont rapidement distribué des produits essentiels et non alimentaires à 72 ménages parmi les déplacés. Et en collaboration avec le district sanitaire concerné, «nous avons vacciné 116 enfants déplacés âgés de 6 mois à 15 ans contre la rougeole à la suite de 4 cas suspects constatés avec des lésions cutanées afin d’éviter la propagation de l’épidémie parmi les déplacés. Les prélèvements ont été envoyés à Bamako pour analyse et confirmation de résultats», rappelle Kouadio Dominique. L’ONG MSF a également conduit des séances de sensibilisation et de promotion de la santé sur l’hygiène et le paludisme parmi les populations déplacées. Elle apporte aussi un soutien psychosocial auprès de ces déplacés notamment aux femmes, enfants et personnes âgées qui sont les plus vulnérables.

A Niono, MSF apporte principalement une assistance médico-nutritionnelle et des soins de santé mentale aux victimes de violences, aux femmes enceintes et aux enfants de moins de 15 ans dans le district sanitaire concerné. L’ONG répond également aux urgences et assure le référencement des centres de santé communautaires vers le centre de santé de référence à Niono et vers l’hôpital de Ségou.

«La situation humanitaire dans la zone de Niono se détériore à cause de la crise sécuritaire qui affecte non seulement les populations civiles mais également le travail des humanitaires. Une grande partie de la population n’a pas accès aux services de base y compris la santé du fait des conflits occasionnant une longue série de déplacements depuis novembre dernier. En décembre 2020, plus de 8 000 personnes ont quitté leurs villages pour se réfugier dans plusieurs localités, dont le village de Sokolo», rappelle M. Kouadio Dominique, coordinateur terrain de MSF à Niono.

Et malheureusement, déplore-t-il, «les quelques rares acteurs humanitaires qui existent dans la zone n’ont pas accès aux populations les plus touchées et éloignées. La plupart des acteurs ont limité leurs interventions dans les endroits moins sécurisés laissant les populations à leur sort». Pour les acteurs humanitaires, il est plus que jamais temps que le gouvernement prenne le taureau par les cornes en changeant d’approche stratégique pour endiguer ce phénomène d’insécurité qui est en train de faire basculer les régions du centre dans l’horreur après le septentrion.

Et la psychose s’installe déjà d​ans​ les régions du sud comme Bougouni, Koutiala… Et en matière de réaction attendue des autorités de la transition, les déplacés sont très déçus de la visite du Premier ministre Dr Choguel Kokalla Maïga dans le centre. Et cela d’autant plus que, comme l’ont témoigné certains d’entre eux, ils n’ont pas besoin de l’aumône (distribution de produits alimentaires), mais de sécurité pour retourner chez eux et vivre à la sueur de leur front !

Naby
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