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Colonel Calvez :« Le Mali est plus difficile que l’Afghanistan »
Publié le jeudi 2 janvier 2014  |  journaldumali.com




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Le Lieutenant-colonel Jean François Calvez nous explique des choses jamais dites sur les réalités du terrain. Cet ancien de l’Afghanistan estime que le nord du Mali est complexe et compliqué.

Journaldumali.com: Mon colonel, vous êtes le commandant du Groupement Tactique Inter Armes/ Désert dans le nord du Mali. Les forces Serval ont fait une découverte il y a moins de quinze jours. Pouvez-vous revenir dessus ?

Colonel Calvez : Effectivement, il y a une dizaine de jours, nous avons découvert un camp récemment occupé par des groupes terroristes. C’était au nord de Tombouctou, ils y avaient planqué un stock de 400 tonnes de médicaments, plus de 400 tonnes de carburant, des réservoirs d’eau, un champ de tir et des pièces détachées pour des véhicules de terrain. Ce camp situé au milieu du désert avait été utilisé au moins trois jours auparavant. C’est vous dire que nous devons en permanence être sur le terrain. A preuve, hier lundi (l’interview a été réalisée le 31 décembre), nos équipes ont découvert une cache de cinq tonnes d’explosif artisanal. Les terroristes s’entraînent, ils n’ont pas lâché le morceau mais ils évitent les confrontations. Ils sont difficiles à identifier et c’est pourquoi nous travaillons avec des maliens intégrés pour la recherche d’informations. Nous ciblons des chefs de réseau et nous en avons pris quatre vendredi dernier vers Bourem. Nous les avons remis aux autorités maliennes.

C’est quoi le profil de ces chefs de réseau ?

Ils sont presque tous maliens et ont entre 40 et 80 ans mais nous ne tenons pas compte de l’âge puisqu’ils ne mangent pas bien dans ces zones arides et disent tous être nés le 31 décembre 1979. Les groupes se forment sur la base d’opportunisme ethnique, tribal et parfois économique. Les gros mouvements qu’on voyait au début de la crise disparaissent au profit de groupes de 30 personnes environ. Nous savons par exemple que Gao est le fief du MUJAO mais il est difficile d’en dire autant pour les autres groupes.

Face à cette multitude de groupes terroristes, comment faites-vous pour contrôler la situation sur le terrain ?

Ces bandes armées utilisent un type de téléphone que nous connaissons et dont nous pouvons capter les communications pour des besoins de localisation des groupes mais cela ne suffit pas. Il nous faut toujours aller sur le terrain. Les drones, la cartographie et les capteurs ne peuvent pas tout prendre. Il nous faut des contrôles de zones comme c’est le cas à l’instant où nous parlons avec près de 300 de nos hommes qui sont en mission sur le terrain. Nos renseignements doivent être recoupés, confirmés et rafraîchis tout le temps. C’est dans cette optique que la collaboration des populations est utile. Par exemple, à Gao, les populations collaborent bien à l’opposé des populations nomades. Plus on monte dans le nord, moins il y a de collaboration. Néanmoins, l’Afghanistan nous ayant beaucoup appris, nous savons quoi faire. Nous avons une centaine de points renseignements qui nous sont très utiles.

Justement, vous parlez de l’Afghanistan, les spécialistes assimilent le Mali à ce pays ?

Non, les deux situations ne se ressemblent pas. En Afghanistan, c’est un mouchoir de poche, or au Mali les échelles ne permettent pas d’avoir des repoussoirs. Ici, le centre de gravité fait 800 kilomètres fois 800 kilomètres, c’est large. Gao est notre escadre, nous sommes dans un océan et tout autour les groupes terroristes agissent en miroir. Vous savez au Mali, nous recherchons l’effet direct et l’effet indirect. L’effet indirect c’est de récupérer par exemple 400 kilogrammes de médicaments voire de nourriture ou de carburant et d’empêcher la reconstitution de ce stock par les groupes armés. Ces captures plombent les velléités de réaction et de mobilité des groupes terroristes. A cette étape de notre mission, il faut une approche globale pour contrôler les flux dans le désert d’où la nécessité d’en appeler à la collaboration de tous les pays de la sous-région.

Vous parlez de collaboration or Serval s’apprête à quitter le Mali, n’est-ce pas contradictoire ?

Nous ne partons pas, c’est simplement que Serval 4 comptera 1000 hommes donc cinq cent en moins. Notre mode d’action va évoluer avec cette réduction d’effectifs. Les échanges avec l’armée malienne sont corrects. Nous nous rencontrons une fois par semaine pour faire le point. Les FAMA et la gendarmerie malienne nous appuient beaucoup. Nous sommes encore là parce que reconstruire une armée ne se fait pas en six mois. Serval réadapte ses capacités au Mali et ceci n’affectera pas l’armée malienne. C’est un travail de patience. Serval n’abandonne pas le Mali. Aucune armée ne se ressemble. Le soutien de Serval sera là. Le soutien français sera là. Vous pouvez mettre en avant autant d’hommes sur une superficie deux fois plus grande que la France mais si le renseignement et la collaboration des populations ne sont pas là, rien n’ira.

Vous flattez l’armée malienne ou vous la surestimez ?

L’armée malienne est sur la bonne voie. La réappropriation du territoire devient de plus en plus effective. C’est un malade qui guérit peu à peu seulement il a besoin de conseils, de confiance en ses capacités et la dernière intervention des gendarmes maliens qui ont tué une vingtaine de terroristes en est un bon exemple. Cette guerre est compliquée. Il faut éviter cette vision cartésienne qui compartimente les uns et les autres.

Pourquoi les forces Serval n’ont pas fait grand-chose dans l’affaire de nos confrères de RFI à savoir Ghislaine Dupont et Claude Verlon ?

Bien sûr que nous avons fait quelque chose. Nous sommes intervenus dès que nous avons reçu l’information. Nous avons mobilisé 80 hommes en quatre heures pour traquer les assassins. De présumés coupables ont été arrêtés et remis aux autorités maliennes. La traque a duré deux semaines. Nous avons outre ces présumés assassins de Ghislaine et Claude remis aux autorités maliennes une quinzaine de personnes depuis septembre. C’est aux autorités maliennes de gérer les personnes arrêtées et surtout les bandits de droit commun.

Mon colonel, le cas de Kidal est préoccupant. L’on reproche à la France de protéger Kidal et certains terroristes, c’est exact ?

Kidal est un bouillon de culture, c’est la concentration de toutes les problématiques. Kidal est un problème endémique et pathologique. C’est une zone explosive où la tension est palpable. Les GAT (groupes armés terroristes) y pullulent. Il faut que le Mali trouve un compromis pour le cas de Kidal, ce n’est pas Serval qui va régler ce problème. La stabilisation de la nation malienne passe par la pacification ou la résolution du cas Kidal. Cette vision angélique faisant des populations de zone de Kidal des terroristes est fausse. On y trouve plus de trafiquants que de terroristes. Nous connaissons les Moktar Bel Moktar dit Mister Marlboro et tous les autres ténors mais à y voir de plus près ce sont des gens qui s’allient aux groupes terroristes armés pour maquiller leur trafic. La paix au Mali passera par la résolution du cas de Kidal.

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