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Lettre ouverte à Macky Sall : « Vous avez posé un acte qui vous honore… »
Publié le lundi 27 janvier 2014  |  L’aube




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Un Malien résidant à Dakar écrit au Président sénégalais, Macky Sall. La teneur de sa lettre ouverte.

Excellence Monsieur le Président,
Suite à l’interview que vous avez accordée à TV5 Monde, j’ai été agréablement
surpris de la clarification apportée sur les différents leviers de votre politique socio-
économique, notamment la Couverture maladie universelle (CMU) dont je suis
convaincu qu’elle fera école dans beaucoup de pays africains.


J’ai été également frappé par la sincérité et la pertinence de vos propos relatifs à la présence du Président ATT sur cette terre d’asile qu’est le Sénégal.


Vous l’avez si bien dit, que le Mali et le Sénégal sont deux pays frères ; et ce qui se passe au
Mali ne peut laisser le Sénégal indifférent. De ce point de vue, vous êtes en parfaite
communion avec le respecté Feu Amadou Hampâté Ba qui disait, avec son
honnêteté intellectuelle, la sincérité, la franchise et la crudité du langage qu’on lui
connait, au lendemain de l’éclatement de la Fédération du Mali: « Ceci
est passager. Et ce sont deux pays, quand l’un tousse, l’autre éternue ; ils sont les deux postérieurs du même corps qui se frottent à longueur de temps, mais ne se
séparent jamais ».


En homme d’Etat qui a la claire conscience des valeurs de paix et du respect de la dignité
humaine, vous avez accompli un acte de haute portée historique alliant humanisme
et courage. Un acte qui vous honore et grandit votre pays en allant chercher votre frère des
tenailles des égarés prédateurs de la démocratie, surtout quand on sait que le pays
dont vous présidez la destinée est considéré à juste titre comme le fils aîné de la
démocratie en Afrique.



Monsieur le Président,
Au moment où de plus en plus l’Afrique perd ses repères et son identité culturelle ; identité basée sur le respect de la dignité humaine, et où de plus en plus les hommes se transforment en monstres d’ingratitude ; vous avez, semble-t-il, une grande sensibilité pour la charte du Mandé. Cette grande première charte que vous voulez revisiter victorieusement pour les africains, propos de l’éminent Professeur Hamidou Dia, véritable creuset du savoir et de sagesse à qui je voue un profond respect. Et c’est le lieu de souligner que le socle de cette charte est basé sur l’honnêteté, la loyauté, l’honneur et le respect de la dignité humaine.



Monsieur le Président,
Je saisis l’opportunité que m’offre votre interview pour retracer quelques faits
historiques qui ont jalonné la vie de votre hôte et qui, par les caprices dont l’histoire a
le secret, se trouve parmi nous dans une situation inconfortable malgré la convivialité
et l’attention particulière dont il bénéficie.


Afin de lever toute équivoque, en deux magistratures, je n’ai jamais eu l’occasion de serrer la main au Président ATT, encore moins d’avoir eu le privilège d’une audience avec lui. Mais en tant que patriote et fier d’être Malien d’origine et Sénégalais d’adoption, je suis mû par la crainte d’un acte posé qui, quoique souverain, n’en demeure pas moins inquiétant et suscite d’ores et déjà inquiétude et indignation pour un homme qui n’est pas un exilé, encore moins un fugitif.



Monsieur le Président
Le monde se souviendra que pendant vingt trois (23) ans, le Mali vivait une dictature atroce où les pénitenciers de Kidal, Taoudénit et d’autres ne désemplissaient pas entre intellectuels, étudiants et hommes politiques. C’est alors que la jeunesse ardente et vibrante s’offrit en agneau de sacrifice avec comme bouclier, face aux balles meurtrières, son cri de « Vive la Liberté ». Plus de 350 morts. Les artères rougies de sang, avec des mères affolées, hurlant de douleurs, le corps ensanglanté de leurs fils dans les bras. Horreur et terreur se conjuguaient au quotidien.


C’est alors que par un soir du 26 Mars 1991, un homme pétri de vaillance a osé, au risque de sa vie, au moment où tout espoir avait disparu, mettre fin à cette dictature avec la promesse de rendre le pouvoir un an après aux civils, après des élections libres, démocratiques et transparentes.


A l’énoncée d’une telle décision, beaucoup riaient sous cape et disaient « il est venu nettoyer la maison et certainement s’y installer confortablement une fois qu’elle sera propre ». Ce ne fut pas le cas, car à la survenue de l’échéance, ATT, partit anonyme, humble après avoir mis son Moi au service du pays afin que naisse la démocratie, la vraie. Un tel acte nécessitait beaucoup de détermination, de conviction, d’amour pour son pays et du don de soi.
Revenu démocratiquement au pouvoir, il impulsa au pays une croissance soutenue, des infrastructures de toutes sortes, une électrification tous azimuts qui firent du Mali un havre de paix, de tolérance et de pardon. A preuve, l’homme de 23 ans de dictature vit aujourd’hui libre dévisageant parfois au hasard des rencontres avec quelques rescapés handicapés à vie de ses geôles.


Monsieur le Président,
Après sa brillante élection, j’ai eu à faire parvenir, sous forme de contributions, des messages au nouveau Président Ibrahim Boubacar Keïta parues dans le journal « L’Aube » de Bamako et sur le site malien Maliweb. Notamment celle qui concerne le rôle des vieux, où je disais ceci: « Nous les vieux, où que nous nous trouvons au crépuscule de notre vie, nous devons mener ce qui peut être considéré comme notre dernière bataille: un pays réconcilié, apaisé avec la confiance restaurée entre nos fils et petits-fils, par nos conseils avisés, basés sur la vérité ; la vérité qui n’a ni frontière, ni culture. Parce qu’elle est la culture. Et offrir ainsi un cadre propice aux nouveaux dirigeants pour entreprendre avec la célérité et la sérénité requises leurs tâches de développement au profit des générations futures ».
Je l’invitais à envoyer chercher son frère cadet et à remercier les autorités
sénégalaises pour l’avoir accueilli avec l’attention et les égards dus à son rang. Et enfin j’ajoutais que l’homme du 26 Mars, l’émissaire de maintes missions des Nations Unies pour la paix en Afrique et l’homme primé par la Fondation Kéba M’Baye aurait répondu sans hésiter à toute convocation ou tout appel de son frère aîné pour quelle que raison que ce soit.


Monsieur le Président,
En évoquant la porosité des frontières et le malheureux coup d’état qui ont été deux
éléments ayant précipité l’invasion du Nord du Mali, vous faites encore preuve
d’objectivité et d’un sens élevé de l’analyse. A cet argumentaire, j’ajouterai que la
débâcle de l’armée libyenne a permis à des débiles et illuminés qui, dans leur fuite
avec une partie d’armes sophistiquées qui avaient permis au défunt Kadhafi de tenir
tête aux forces coalisées pendant de longs mois, avaient scellé le sort du Nord du Mali.


Monsieur le Président,
Une crise longue, profonde et récurrente secoue toujours le Nord du Mali, mais l’espoir
demeure pour une solution définitive. La situation y a été gérée de différentes façons
avec des fortunes diverses par ceux-là qui ont dirigé le pays depuis l’Indépendance.
Néanmoins, force est de constater que la situation était bien sous contrôle sur tout le
territoire national et que le Président ATT préparait activement les futures élections
présidentielles et législatives dont la campagne devait commencer sous quinzaine. Et ATT serait parti, après avoir accompli son mandat et servi la nation, n’eût été le coup d’Etat qui a porté un coup d’arrêt au processus qui était en cours…


La situation au Nord Mali est si complexe que malgré une impressionnante présence
militaire jamais égalée, des incursions sporadiques continuent et l’Etat tarde à
instaurer définitivement son autorité pleine et entière sur cette partie du territoire national. .
Monsieur le Président,
Votre aura sans cesse grandissante, voire présence sur tous les fronts au nom de
l’Afrique (G8, NEPAD) et bientôt la Francophonie, vous prédispose à jouer un rôle
prestigieux pour le devenir de notre chère Afrique.


L’éminent Professeur Hamidou Dia dit que vous « fermez une longue séquence
historique et que vous en ouvrez une nouvelle », parce que premier chef d’Etat à être né après les Indépendances.


Je formule le vœu que vous mettiez cette nouvelle séquence à la recherche de la paix entre les peuples et la réconciliation au sein des peuples pour que triomphent la justice et le respect de la dignité humaine.
Que Dieu vous protège et vous bénisse!


Fousseyni DIARRA
Pilote Commandant de bord
Air Sénégal à la retraite.
SICA Mbao Dakar
Cell: 77 165.27.44
Tél: 33 853.00 4

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