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Junte de Kati : Chronique d’une descente aux enfers
Publié le jeudi 27 mars 2014  |  L’aube




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Il y a deux ans, la soldatesque de Kati, sous la conduite du capitaine Amadou Haya Sanogo, s’empara du pouvoir à la suite d’une mutinerie. Le pays, qui était attaqué au nord par des terroristes, est précité par les putschistes dans un gouffre sans précédent. Les séquelles sont encore là. Après avoir fait la « pluie et le beau temps » à Kati, la bande à Sanogo a connu une véritable descente aux enfers. Les putschistes de Kati sont actuellement poursuivis pour répondre de nombreux crimes, dont l’exécution d’une trentaine de soldats de la compagnie des parachutistes.

Les membres de la junte de Kati qui ont renversé ATT en mars 2012 (photo archives)
L’avènement de la junte de Kati n’est qu’une sombre page de l’histoire du Mali. Et le sort de ceux là (les putschistes) qui ont précipité le pays dans le chaos et l’anarchie est en passe d’être scellé pour de bon, au grand plaisir des Républicains et des défenseurs des droits humains. « Assurément, on serait déjà loin dans le développement du pays, n’eût été l’incursion de cette bande sur la scène politique », commente-on au sein de la population.

Le règne de la bande à Sanogo s’est résumé en une série d’actes crapuleux :
enrichissement illicite, arrestations arbitraires, pillages, séquestrations… bref rien que des abus (dont les plus inimaginables) commis à Bamako et à travers le pays. Cependant, il existe bien une justice divine plus forte et plus juste que la justice des hommes. Deux petites années ont suffit, pour que les mutins se fassent rattraper par les nombreux crimes qu’ils ont commis. L’élément déclencheur de cette descente aux enfers fut la mutinerie du 30 septembre 2013. Une partie du camp de Kati se soulève pour exiger de la hiérarchie militaire des galons, après la promotion du chef de bande au grade de général par Dioncounda Traoré, président intérimaire. Ceux qui n’avaient pas bénéficié des mêmes avantages, ont choisi la méthode forte, le langage des armes, pour se faire entendre.

Le siège du Comité militaire de suivi de la reforme des forces de défense et de sécurité (CMSRFDS) est pris d’assaut par des militaires contestataires lourdement armés. Première victime, le colonel Mohamed Elhabib Diallo (un proche de Sanogo), accusé d’être à l’origine de « l’annulation » de leur promotion. Toutes les tentatives entreprises par la hiérarchie en vue de faire revenir les mutins à la raison sont restées vaines. La gravité de la situation avait contraint le président IBK à interrompre son séjour à Paris, où il était en visite. Finalement, des éléments de la force spéciale, conduite par le lieutenant colonel Elisée Daou, débarquent à Kati pour y restaurer l’ordre. Les mutins (une trentaine) sont mis hors d’Etat de nuire.

Le 4 octobre 2013, le ministre de la défense, Soumeylou Boubèye Maïga, annonce que l’armée contrôle le camp de Kati, que toutes les armes avaient été saisies. Précision : une vingtaine d’anciens responsables de la junte sont arrêtés.
A la suite de la mutinerie, le général Sanogo, pour des raisons sécuritaires disait-on, quitte Kati pour s’installer à l’ex-base aérienne. Dans la foulée, le fameux comité militaire de reforme, qu’il présidait, est dissoute sur décision du chef de l’Etat. Et, depuis, tout semble aller de mal en pis pour les putschistes de mars 2012.

En effet, le 7 mai 2012, une procédure judiciaire, relative à la disparition de soldats, avait été lancée au tribunal de première instance de la commune III pour enlèvement et complicité d’enlèvement. Le 6 août 2012, les résultats de l’enquête préliminaire diligentée par le procureur général de Bamako étaient versés au dossier d’instruction. Après, le juge d’instruction procédait à de nombreuses auditions de témoins qui lui permettaient, le 1er octobre 2013, de délivrer 15 mandats d’amener contre des militaires membres de la junte, dont Amadou Haya. Ils sont tous soupçonnés d’être mêlés à des disparitions de soldats bérets rouges, arrêtés à Kati, lors des affrontements du 30 avril 2012.

Les 23 et 30 octobre, trois des 15 mandats d’arrêts ont été mis à exécution : le capitaine Amassango Dolo, le lieutenant Issa Tangara et l’adjudant Oumarou Sananfo ont été arrêtés et inculpés.

Le 1er novembre 2013, le juge d’instruction a officiellement saisi le ministre de la justice afin qu’une demande de mise à disposition concernant le général Sanogo et d’autres militaires soit adressée au ministre de la défense.

L’accord du ministre de la défense interviendra le 6 novembre 2013.
Le 27 novembre 2013, le chef de bande, Amadou Haya Sanogo, est appréhendé à son domicile par une unité mixte des forces armées, conduite par le commandant Abbas Dembélé (fils du colonel Koké Dembélé). Il est conduit manu militari auprès du juge. Ensuite, Sanogo est entendu, inculpé, et incarcéré à l’école de gendarmerie de Faladié, avant d’être transféré la semaine dernière à Sélingué, localité située à 130 Km de Bamako.
Le 29 novembre, le juge Karembé met à exécution trois autres mandats d’amener, visant le capitaine Christophe Dembélé, l’adjudant chef Fousseini Diarra et l’adjudant Mamadou Koné. Ils sont aussi inculpés et placés sous mandat de dépôt.

Toujours courant novembre 2013, le juge a procédé à de nouvelles inculpations : le colonel Blonkoro Samaké, ex-conseiller à la sécurité du Sanogo, et le sous-lieutenant Seyba Diarra, chef des opérations du CNDRE, ont été arrêtés et placés sous mandat de dépôt.

Début décembre 2013, les choses se corsent davantage pour la bande, avec l’exhumation, dans la nuit du 3 au 4 décembre, de 21 corps à Diago (non loin de Kati).

Le 3 janvier, le sous-lieutenant Lassine Singaré (sous le coup d’un avis de recherche depuis le 17 décembre 2013) s’est finalement rendu. Il a été inculpé et placé sous mandat de dépôt.
Les derniers développements intervenus dans l’instruction datent des 13 et 14 février 2014, lorsque quatre hauts responsables de l’ex-junte, le général Yamoussa Camara, ancien ministre de la défense et ex-chef d’état-major particulier de la présidence ; le général Sidi Touré, ancien directeur de la sécurité d’Etat ; le capitaine Amadou Konaré, ancien porte-parole de la junte et le lieutenant Tahirou Mariko, ancien aide de camp d’Amadou Haya Sanogo ont été inculpés d’assassinat et complicité d’assassinat.

Ensuite, le 14 mars dernier, le juge a placé sous mandat de dépôt, l’ancien chef d’état-major général des armés, le général Ibrahima Dahirou Dembélé. Tous ces membres influents de la junte sont inculpés par le juge d’instruction.

En outre, d’autres militaires, membres ou non de l’ex-junte, dont le général Abdoulaye Koumaré, ministre de l’équipement, seront bientôt entendus dans le cadre des enquêtes. Cet officier, qui était directeur de cabinet de Sanogo, serait attendu de pied ferme. Son témoignage pourrait être édifiant sur beaucoup de crimes à Kati…

Il faut dire qu’à Bamako, les mutins ont bénéficié du soutien de certains politiciens véreux, conscients que leur salue ou leur accès au pouvoir ne peut venir que d’un coup d’Etat. Dans les jours à venir, il est probable qu’il leur soit demandé des comptes.

Issa B Dembélé

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