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Violences sexuelles dans le nord : Une victime témoigneViolences sexuelles dans le nord : Une victime témoigne
Publié le lundi 5 mai 2014  |  Le Prétoire




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C’est meurtrie dans l’âme et les larmes aux yeux, qu’elle cache avec un pan de son voile, qu’Agaichatou a accepté de nous confier ses malheurs en langue sonrhaï. A 13 ans révolus, cette fillette à la taille moyenne et à la corpulence svelte a été violée et maintenue comme esclave sexuelle pendant 3 mois par les bandits armés qui écumaient le nord de notre pays.

«C’est un après-midi que j’ai été interpellée par des gens en armes, qui m’ont reproché d’être mal habillée. Ils m’ont conduit d’abord dans les locaux de la mairie, où il y avait d’autres femmes prisonnières. La nuit, deux hommes sont venus me chercher pour me conduire dans un endroit que je suis incapable d’identifier à ce jour. Ils s’adressent à moi en tamasheq et en arabe. Ils m’ont obligé avec une arme pointée sur la tempe à me déshabiller. J’ai commencé à pleurer. Un des hommes, m’a giflé sérieusement me faisant signe de me taire. Ils ont abusé de moi tous les deux, je crois, car la douleur était tellement intense que je me suis évanouie. Quand je me suis réveillée, j’avais le feu dans le bas ventre car c’est la première fois que je faisais ça. J’avais très mal, je pleurai, je ne pouvais même pas me lever.

J’étais dans une salle très obscure. Ils m’ont apporté des pâtes alimentaires que je n’ai pas pu manger à cause de la douleur. Le soir, ils sont revenus en me donnant des comprimés que j’ai pris pensant que c’était un médicament. J’ai pris ces cachets et j’ai commencé à avoir la tête qui tournait. J’ai vomi et ensuite je ne me suis plus rappelée de la suite. Certainement que c’était de la drogue. Le lendemain matin, je me suis réveillée avec un mal de tête très intense et des douleurs vives toujours dans le bas ventre. Ils m’ont redonné des comprimés et la douleur est partie, mais j’étais dans un état bizarre. La douleur s’est évaporée.

Pour aller aux toilettes on me bandait les yeux. C’est comme ça jusqu’un jour, ils ne sont plus revenus et ensuite l’après-midi, un homme est venu ouvrir la porte et m’a trouvée dans l’obscurité. Il m’a libérée. Je suis rentrée en famille où mes parents me croyaient partie avec les refugiés. J’avais honte que les gens apprennent ça dans le quartier, ma famille m’a aidée à garder le secret. Un jour, j’ai appris par une connaissance qu’il y a une association (cri de cœur) qui aide les gens dans mon cas. J’ai hésité d’abord ensuite ma mère m’a convaincue. Donc, je suis venue, ils m’ont fait des analyses et m’ont donné des médicaments, des habits et un peu d’argent. Je continue à fréquenter leur centre pour recevoir des dons et autres choses.

Ils m’ont conseillé de ne pas me cacher, car ce qui est arrivé n’était pas de ma faute et que je suis une victime et rien d’autre. Aujourd’hui, ça va, même si j’y pense de temps à autre. »

Aigachatou est l’une de ces victimes de la crise, qui meurent dans le silence dans cette partie du pays. Aujourd’hui elles sont quelques 140 que l’association cri de cœur a enregistrées et essaie d’aider à ne pas tomber dans la prostitution ou autre chose, en leur proposant une aide sociale.

Vivement la justice pour les victimes du nord.

Harber MAIGA, Envoyé spécial à Gao

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