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Joseph Kéita n’est plus : L’Albatros plie définitivement ses ailes
Publié le vendredi 30 mai 2014  |  Le Tjikan




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Peint d’une peau blanche et imbue d’une tradition noire, Joseph Kéita n’était pas meilleur dans son domaine mais atypique dans son savoir-faire. Jusqu’à son dernier souffle il est resté égale à lui-même. Fin communicateur et journaliste hors-pair. Ses enfants peuvent se glorifier d’avoir eu un père qui n’a pas vécu pour rien. Témoignage d’un disciple.

O mort ! tu t’es encore trompé de sujet. Connais-tu celui que tu as arraché à notre affection. C’est lui qui a écrit le prestigieux livre : « Connais-tu mon beau pays, le Mali ? ».

Je ne suis pas parmi ceux qui ont connu, Joseph Kéita, à ses premières heures de jeune journaliste dans le quotidien national du Niger, quand nos pays n’étaient pas indépendants encore. Ni ceux qu’il encadrait à l’AMAP et à la Radio-Mali, RTM, puis ORTM. Mais, je remercie Dieu d’avoir mené mon chemin de jeune rédacteur vers celui de ce beau vieux journaliste. C’était un matin de jeudi de l’an 2010. Il était vieux, très vieux, la tête tombée sur les rides rouges d’un cou qui ne la supportait plus. Le regard vif, des cils tout noirs protégeant des beaux yeux comme celui d’un présentateur de JT.

Il n’avait rien perdu de la vigueur de sa belle voix d’ancien homme de radio. Joseph, ce jour avait raison de ne pas croire à ma capacité d’assumer le rôle de rédacteur en chef d’un journal que ses amis ont créé, pour lui assurer une bonne retraite. Car, avant moi d’autres, avec des cv noircis d’expériences professionnelles n’avaient réussi à lui donner satisfaction. Méticuleux, professionnel et très regardant sur l’avis du lectorat, Joseph après avoir été convaincu par le résultat de mon test, me recruta avec un seul conseil : « Diawara, je ne veux pas que ‘’l’Albatros’’ tombe dans la mouvance des autres journaux maliens ». Pour lui, on peut faire le journalisme sans tirer à boulets rouges sur des gens. « A chaque fois quand tu écris sur quelqu’un, il faut faire l’effort de le mettre à la place de ton parent. De la même manière que tu n’oseras pas dénigrer ce dernier, tu épargneras le parent d’un autre », ce propos était un principe sacrosaint pour Joseph. Ce grand journaliste, malgré l’âge, écrivait toujours au passé simple. Il n’a jamais touché à un clavier d’ordinateur, car prenait du plaisir à glisser le stylo sur du papier blanc comme un scribe et n’a jamais porté de lunettes pour voir clair.

Au sein de ‘’l’Albatros’’ de Joseph, mieux que dans tous les ‘’canards’’ de la place tout le personnel avait un salaire. Le rédacteur en chef avait un bureau climatisé, un ordinateur de bureau, un ordinateur portable, un cahier de bord, un appareil photo numérique, un dictaphone…Le journaliste n’avait aucune raison de se prostituer, le commercial disposait d’un carnet d’adresses d’annonceurs, connus de ‘’Jo’’ et les lecteurs sentaient un changement dans le paysage médiatique malien.

Cultivé et très ouvert, la rédaction se réjouissait des belles histoires d’ancien journaliste chevronnée qu’était ‘’Jo’’. Où quand il récitait à cœur joie certains passages du ‘’Rescapé de l’éthylos’’ de Mamadou Gologo. Bon vivant, il croquait la vie comme son morceau de colas rouge, qu’il avait souvent de la peine à effacer les traces sur ses lèvres. Terrassé une première fois par une maudite maladie de cœur, ‘’Jo’’ sur son lit de la salle de réanimation de l’hôpital ‘’Luxembourg’’, n’aimait pas déranger les gens à rester sur son chevet. Sortit indemne, ‘’Jo’’ me confia une confidence : « Faire un bon article sur Dr Diarra de Luxembourg ». Plutôt une enquête, car de nombreux maliens ne savaient pas que ce cardiologue pouvait ressusciter, ou presque un mourant. Qu’il prenait en charge les frais des indigents, qu’il accompagnait des vielles personnes jusqu’au taxi. Mission accomplie. Le succès remporté par cette parution a été pour moi le fruit d’une promesse tenue à un maître, un père, une référence. ..

Celui qui par ses écrits a sorti de l’ornière la Régie de Chemin de fer (dans les années 70), révélé l’affaire des coupeurs de tête (début des années 80), offrir au ministère de la défense une autre visibilité (années 90) et rayonné les institutions des nations unies au Burundi (années 2000)…
Joseph Kéita n’était pas un saint, ni un bandit. Comme bien des hommes, il réunissait en lui à la fois qualités et défauts, avec peut être plus d’intensités que d’autres. Car, il savait jouir de son intelligence. Qu’il mettait à la disposition de la communauté et n’hésitait point à l’arracher quand la confiance fait défaut.

Bon père de famille, Joseph aimait ses nombreuses filles et son seul garçon, comme son « secteur privé ». Sa dernière revue, dont le dernier numéro parlait de l’élection d’IBK.
Intérieurement, ‘’Jo’’ était bon, son fond était noble, c’est ce qui lui permettait à rire de la vie, à faire rire des vivants et à donner de la voie à d’autres de vivre.

Joseph, mon père, là ou tu es je sais que tu es heureux de savoir que ton disciple, par ce témoignage a pu ajouter un article aux centaines de pages que nous avons écrit ensemble dans ‘’l’ALBATROS’’. Dors en paix ‘’Jo’’ le malien.

Moustapha Diawara

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