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Mali : Il faut créer une cellule d’enquête spéciale sur les crimes de guerre
Publié le mercredi 25 juin 2014  |  HRW.ORG




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(Nairobi, le 25 juin 2014) – Le gouvernement du Mali devrait créer une cellule d’enquête spéciale qui serait chargée d’effectuer des investigations sur les graves crimes commis durant le conflit armé de 2012-2103, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui dans une lettre adressée au ministre malien de la Justice, Mohamed Ali Bathily. Cette cellule devrait être composée de procureurs, de juges d’instruction et d’autres personnels nécessaires à son bon fonctionnement.

Le retour récent dans le nord du Mali de membres du personnel judiciaire qui avaient été contraints de fuir pendant le conflit est une évolution positive. Cependant, charger les tribunaux locaux d’enquêter sur des crimes de guerre et sur d’autres graves violations des droits humains commis lors du conflit armé de 2012-2013 poserait de grosses difficultés en termes de sécurité et de ressources, a déclaré Human Rights Watch. Le temps requis pour que ces institutions judiciaires du Nord deviennent pleinement opérationnelles créerait inévitablement des retards.

« La création d’une cellule d’enquête spéciale dans la capitale du Mali, Bamako, serait le meilleur et le plus sûr moyen d’assurer que les atrocités commises pendant le conflit fassent l’objet d’enquêtes équitables et crédibles », a déclaré Corinne Dufka, chercheuse senior sur l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch. « Cette cellule spéciale permettrait au Mali de continuer sur sa lancée afin de renforcer l’État de droit et de rompre le cycle des violences et des représailles à travers le pays. »

Human Rights Watch et d’autres organisations internationales et nationales ont abondamment documenté des crimes de guerre et d’autres graves violations des droits humains commis par toutes les parties lors du conflit. Des groupes armés islamistes ont exécuté sommairement des militaires maliens, recruté et utilisé au combat des enfants soldats, amputé des membres de personnes soupçonnées d’actes criminels et détruit des mausolées. Le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), un groupe armé touareg, a commis des violences sexuelles et des pillages à grande échelle. Certains militaires de l’armée nationale malienne ont été impliqués dans des actes de torture, des disparitions forcées et des exécutions extrajudiciaires.

Le gouvernement a pris l’engagement d’assurer que justice soit rendue pour les crimes graves commis par toutes les parties. Mais très peu d’enquêtes ont été ouvertes et personne n’a encore été poursuivi.

Il y a une demande croissante de justice au Mali, comme le montre le fait que de nombreuses victimes ou leurs familles, affiliées à toutes les parties au conflit, ont porté plainte auprès des autorités, a souligné Human Rights Watch. La mise en place d’une cellule d’enquête spéciale permettrait de bénéficier de l’élan créé par cette attente croissante de justice, par les progrès effectués dans « l’affaire des Bérets rouges » (une enquête sur des cas de disparitions forcées et de tortures subies en 2012 par au moins 21 militaires), ainsi que par l’existence d’un niveau considérable de soutien, à la fois financier et institutionnel, pour une réforme du système judiciaire et pour le renforcement de l’État de droit au Mali.

Human Rights Watch a détaillé plusieurs raisons pour lesquelles une cellule basée à Bamako serait préférable à l’ouverture d’enquêtes par les tribunaux du Nord, dont les suivantes:

Une telle structure permettrait de centraliser les compétences dans des domaines clés, comme les enquêtes sur certains crimes qui ne sont pas souvent traités par des tribunaux maliens, ou de démontrer, à partir d’éléments de preuve, l’existence d’un lien entre des auteurs de crimes de rang subalterne et des responsables de haut rang impliqués dans de multiples crimes internationaux;

La création de la cellule pourrait aider à pallier la pénurie d’avocats de la défense dans le Nord, qui rend particulièrement difficile de garantir le droit des accusés à bénéficier d’une assistance juridique compétente;

Baser les juges d’instruction, les procureurs et les autres membres du système judiciaire chargés d’enquêter sur des dossiers très sensibles dans le Nord, en particulier dans les juridictions les plus petites, les exposerait à des risques d’attentats et d’actes d’intimidation. Les éléments de preuve recueillis, ainsi que l’infrastructure judiciaire, seraient également exposés à des risques ; et
Il est plus facile de mettre sur pied un système efficace de protection des témoins au service d’une seule unité spécialisée, centralisée en un lieu unique.

« La conduite diligente d’enquêtes crédibles et impartiales sur les crimes graves commis lors du conflit de 2012-2013 aurait pour effet de redonner espoir aux victimes, et constituerait un progrès important dans les efforts pour rompre avec le passé, lorsque les auteurs de ces crimes jouissaient d’une totale impunité », a affirmé Corinne Dufka. « La création d’une cellule d’enquête spéciale à Bamako contribuerait grandement à ce que justice soit rendue pour les crimes commis lors du conflit de 2012-2013. »

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