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Moussa Mara: «Il n’y a pas de solution militaire dans le nord du Mali»
Publié le vendredi 27 juin 2014  |  liberation.fr


© aBamako.com par mouhamar
Cour Suprême: Moussa MARA a rendu visite à Nouhoum TAPILY
Bamako, le 10 juin 2014. Cour Suprême. Le premier ministre malien Moussa MARA, Chef du gouvernement a rendu une visite de courtoisie et de fraternité à Nouhoum Tapily, président de la Cour Suprême.


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Le Premier ministre Moussa Mara veut accélérer les négociations sur Kidal avec, comme préalable, le désarmement des groupes armés séparatistes touaregs.

Nommé chef du gouvernement en avril dernier, Moussa Mara, 39 ans, a voulu se rendre très rapidement à Kidal, le fief des séparatistes touaregs situé au nord-est du Mali, pour marquer l’autorité de Bamako sur cette partie du territoire national. Mais son déplacement, à la mi-mai, a mis le feu aux poudres. Les affrontements qui ont éclaté entre l’armée malienne et les groupes armés locaux se sont soldés par une défaite cinglante pour Bamako, dont les forces ont reflué de la moitié nord du pays. Sous la pression internationale, un cessez-le-feu a certes été signé. Mais les négociations n’ont toujours pas commencé entre les deux parties, au grand dam de la France qui maintient 1 600 hommes sur place et redoute une reprise des combats dont les groupes jihadistes toujours présents dans la région ne manqueraient pas de tirer parti.

Moins d’un an après l’élection du président Ibrahim Boubacar Keïta, dit «IBK», on ressent une certaine désillusion au Mali. Comment l’expliquez-vous?

Je n’ai pas cette impression. Mais ce qui est indéniable, c’est qu’une élection suscite toujours beaucoup d’espoir. Surtout une élection de sortie de crise. Nous avons affronté la crise la plus noire de toute notre existence, et les gens ont envie de tourner la page le plus rapidement possible. Souvent en ne faisant par leur introspection, ni leur part du travail, et en s’en remettant totalement au dirigeant qui vient d’être élu. Mais tout ne va pas se régler comme par enchantement. Toutefois, je crois que le peuple malien a mûri lors de cette crise. Tout le monde sait qu’il n’y a pas de solution militaire dans le Nord, et que le dialogue est la seule solution.
Ne se polarise-t-on pas trop à Bamako sur la situation au Nord au détriment des problèmes socio-économiques qui sont majeurs au Sud?

Pour le Malien, certains sujets sont épidermiques. Ils touchent le cœur et pas la raison. Le Nord en fait partie, parce que c’est d’abord l’idée que nous nous faisons de notre pays. Nous avons une carte du Mali à l’esprit. Penser qu’une partie du pays soit coupée du reste nous est insupportable. C’est de l’émotion. Deuxièmement, le Nord cristallise une grosse déception vis-à-vis de l’armée. Les Maliens ont grandi avec l’idée d’une armée comme colonne vertébrale de l’Etat, une armée infaillible, qui participe à des missions de maintien de la paix à l’étranger (avec des policiers déployés en Haïti ou au Congo-RDC, ndlr). D’habitude, c’est nous qui allons secourir les autres, pas l’inverse… Le Nord est une meurtrissure à notre fierté. Mais ne nous y trompons pas: la préoccupation principale de nos compatriotes, c’est le chômage des jeunes, le pouvoir d’achat, le coût de la vie…Notre gouvernement doit s’occuper de l’un et de l’autre en même temps.
La décision du FMI de bloquer jusqu’à nouvel ordre les prêts en raison de dépenses extra-budgétaires (achat d’un avion présidentiel, contrat d’équipement de la Défense) ne risque-t-elle pas d’entraîner de graves problèmes sociaux?

En 2012, après le coup d’Etat à Bamako et les sanctions internationales qui ont suivi, nous avons fonctionné sans aucun concours extérieur. L’Etat s’est mis en mode survie. Cette situation a eu un impact en terme de croissance, mais pas sur le plan social. Grâce, d’ailleurs, à notre bonne collaboration avec le FMI depuis trente ans, nos fondamentaux sont bons. Notre taux d’endettement ne dépasse pas 33% de notre PIB. Notre déficit budgétaire atteint 1,7% du PIB… En revanche, l’Etat va devoir se recroqueviller sur lui-même pour assurer les dépenses courantes avec nos ressources internes.
L’ONU a récemment critiqué la lenteur des négociations entre Bamako et les groupes du Nord. Comment réagissez-vous?

Ce dialogue ne dépend pas exclusivement de nous. Je vous l’affirme: si les médiateurs (internationaux, ndlr) nous convient à des discussions, demain matin, je serai là! On est prêt. Mais les groupes armés du Nord doivent d’abord trouver une cohérence entre eux. Nous souhaitons simplement que ces négociations aient lieu au Mali. Pas forcément à Bamako. Ce pourrait se faire à Kidal, Gao ou Tombouctou… Mais eu égard au nombre de pays impliqués dans les médiations(Algérie, Burkina Faso, etc.), le Mali est le plus petit dénominateur commun: la tenue de ces discussions sur notre sol éviterait de froisser tel ou tel Etat.
Qu’est-ce que Bamako mettrait sur la table des négociations ?

On fait souvent une fixation sur l’organisation institutionnelle et territoriale du pays. Or la dimension sécuritaire est primordiale pour nous tous: la cessation des hostilités, le cantonnement, le désarmement, la réinsertion des groupes armés… Il faudra aussi s’occuper du retour des réfugiés, et de leur réinsertion. Puis on entre dans une phase plus politique: quelle forme d’organisation politique et administratif mettons-nous en place? Notre raisonnement est simple: les groupes armés disent que cette partie du territoire n’est pas assez développée? Soit. On va donner suffisamment de pouvoirs aux élus pour véritablement la développer, si telle est vraiment leur intention. C’est là qu’on parle de régionalisation ou de décentralisation.
Etes-vous sûr que les groupes du Nord vont accepter de désarmer tout de suite, sans contrepartie politique?

Nous souhaitons un accord qui soit le plus détaillé possible pour en faciliter la supervision. Mais il faut aussi poser un prélable: les groupes armés qui ont des revendications politiques doivent se démarquer des terroristes. Car aujourd’hui certains de ces groupes ne sont que le faux nez d’Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi). Je pense notamment au HCUA (Haut Conseil pour l’unité de l’Azwad), qui est le plus puissant de ces groupes. Et son chef militaire est le bras droit d’Iyad ag-Ghaly (chef du mouvement Ansar-Eddine, allié d’Aqmi, et recherché à ce titre par les Français). Leur collusion avec les terroristes est évidente. Le HCUA pourra participer aux discussions à condition qu’il se détache des thèses terroristes, et qu’il reconnaisse la laïcité de l’Etat malien. Il faut que la France et la communauté internationale œuvrent en ce sens. Dans le cas contraire, nous risquons de confier le pouvoir aux terroristes dans cette partie de notre territoire.
Faut-il une loi d’amnistie ou de concorde nationale pour réintégrer Iyad ag-Ghaly qui exerce toujours une influence prépondérante dans le Nord?

Il a jadis travaillé pour l’Etat malien, comme consul. Mais il veut instaurer un califat islamique sur le territoire du Mali, ce n’est pas compatible avec un Etat moderne, avec le Mali que nous voulons construire. C’est un terroriste. Il ne peut y avoir de possibilité d’amnistie le concernant. Mais les centaines de nos compatriotes qui ont suivi les mouvements terroristes pour des raisons souvent de subsistance peuvent être récupérés et réhabilités. Pas les leaders. Il n’y a pas de différence à nos yeux entre Mokhtar Belmokhtar et Iyad ag-Ghaly.
Malgré les récents évenements de Kidal, diriez-vous qu’il existe une chance historique d’établir une paix durable au Nord?

Les événements de Kidal du mois dernier ont été un électrochoc. Mais j’en profite pour le redire ici: nous ne souhaitions pas reconquérir militairement le Nord. Le gouvernement voulait seulement sécuriser la ville pour favoriser le retour de l’administration. Plus que jamais nous avons besoin d’une solution politique à un problème politique. Depuis des siècles, les Tamasheqs (les Touaregs, ndlr), les Songhaïs, les Arabes, les Bambaras, les Peuls coexistent pacifiquement sur cette terre, il faut tout faire pour que cela continue. Le Mali, c’est l’un des rares pays où la couleur n’a strictement aucune importance.
Vous-mêmes êtes issus d’une famille mixte…

Ma mère est mariée à un Tamasheq qui est le maire de Ménaka (ville importante du Nord-Mali, ndlr). Mon père était chrétien et ma mère est musulmane. Cela ne pose aucun problème. C’est cela qu’on doit préserver. Le Mali, ce n’est pas un Sud noir majoritaire et un Nord blanc minoritaire, comme on a tendance à le croire vu d’Europe. Nous sommes mélangés, et il fait tout faire pour préserver cela.

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