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Rébellion, pourparlers inter maliens: Croustillantes histoires d’espions-otages français
Publié le dimanche 21 decembre 2014  |  rapideinfo.net
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© aBamako.com par mouhamar
Visite de la mission de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL) à Kidal
Kidal, le 08 Août 2014. La délégation de la mission de l’Union Africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL) conduite par son Excellence monsieur Pierre Buyoya, Haut Représentant de l`Union Africaine s`est rendue ce vendredi à Kidal, pour s`enquérir de conditions de vie des populations.




Nous avons réunis ici la série de 16 articles publiés par Le Soir d’Algérie et reproduits par Mondialisation.ca dont voici la deuxième partie. Nos lecteurs pourront s’amuser à dénicher quelques erreurs mineures ou constater que M. Ali El Hadj Tahar considère comme établi ce qui n’est pour le moment que des hypothèses fortes. Tel qu’il est ce texte est une source précieuse d’informations et nous en recommandons la (longue) lecture à tous. (Fruits rouges) NB : Le titre est de la Rédaction.

Croustillantes histoires d’espions-otages français
(Sixième partie)

Pour pénétrer dans le Sahel, une faction prétendument indépendantiste et des groupes prétendument «djihadistes» ont été recrutés. Entre rébellion ethnique et revendications islamistes, certains groupes touareg maliens ne cherchent que l’intérêt personnel et ne font que noircir l’image de leur communauté qui continue cependant à jouir d’un immense respect dans tout le Sahel et le Sahara. Les manipulateurs se sont permis de découper un morceau de Sahara, au nord du Mali, et l’appeler Azawad.

Entre-temps, l’impatience française monte. Alger irrite en essayant de faire capoter le plan, en essayant d’isoler Ansar Dine et le MNLA de ses tuteurs. Combien d’otages lui faut-il encore pour qu’Alger se décide à rentrer dans les rangs des supplétifs de l’armée néocoloniale ? Combien d’attentats lui faut-il après ceux de Tamanrasset et de Ouargla ? Évidemment, il faut encore continuer à chauffer le bendir, comme on dit en Algérie, dans une dramatisation qui rendrait inévitable l’ingérence d’une puissance atlantique d’autant que certains donnaient l’impression d’avoir peur. Pour cela, ne disait-on pas que risquer l’entreprise serait s’embourber dans le désert ? Que les terroristes avaient l’avantage de la connaissance du terrain et qu’une armée classique ne pouvait gagner dans une guerre contre des forces volatiles… ?

Or, l’intervention de plusieurs puissances contre 2 000 ou même 6 000 terroristes est une supercherie. L’armée malienne est capable de résoudre son problème toute seule, à condition que les conditions d’exercice du pouvoir soient réunies. Mais cela on le lui avait enlevé en fomentant un coup d’Etat. De l’argent pour acheter des munitions, des armes et recruter des soldats : c’est aussi simple que cela. Puis, il faut de nouveaux arguments pour intervenir, du moins aux yeux de son opinion publique… Comme par hasard, des ressortissants français sont pris en otages. Voici l’histoire d’espions otages, une histoire bien française. Déjà en septembre 2010, Aqmi a kidnappé cinq Français employés des sociétés Areva et Vinci à Arlit, un village nigérien, mais avec une complicité avérée, selon le responsable sécurité du site (lire 6e partie).

Prendre des Français en otages permet de légitimer l’intervention non pas africaine mais française. Puis il y a eu la prise d’otages des 7 employés du consulat enlevés au Mali. Certaines sources font le lien avec les services français qui, en mettant l’Algérie dans une situation identique, voulaient l’amener à l’option militaire au Mali, afin d’ouvrir le champ à une présence prolongée, ou un bourbier pour l’ennemi. Puis, il y a les deux otages français enlevés par Aqmi depuis novembre 2011 : même la presse française a fini par admettre la thèse du journal malien, le Combat, disant qu’ils seraient plutôt des agents secrets. Il s’agit de Philippe Verdon, Serge Lazarevic, identifiés par une personnalité religieuse influente de la région du nord du Mali comme responsables de la formation et de l’encadrement d’une milice qui était en formation dans la région où ils furent kidnappés par Aqmi à Doumbia, Hombori. Selon la source, ils étaient probablement en train de former une des milices (MNLA ou Mujao) qui allait prendre le pays deux mois plus tard, le 17 janvier 2012. «Les hommes ne sont pas des inconnus des services secrets français», selon le site de la radio : «En 1999, Serge Lazarevic apparaît ainsi dans une procédure judiciaire en Serbie, visant un réseau clandestin financé par le contre-espionnage français : il était chargé d’assassiner le président Slobodan Milosevic.»

Espions et guerres cognitives par procuration

D’origine hongroise, Lazarevic aurait également participé au recrutement de mercenaires yougoslaves envoyés combattre au Zaïre, dans le cadre d’une opération, «là encore», suivie de près par le renseignement français. Concernant l’autre Français enlevé au Mali, Europe 1 écrit qu’il avait été arrêté «en septembre 2003 aux Comores pour avoir voulu renverser le pouvoir du colonel Azali Assoumani dans une tentative de coup d’Etat rocambolesque». Bob Denard, le célèbre mercenaire, a reconnu connaître ce personnage et c’est apparemment en tant que formateur d’une milice adverse qu’il aurait été kidnappé par Aqmi. Des témoins maliens l’ont reconnu comme étant l’un des encadreurs d’une milice au Nord-Mali, avant son kidnapping.

En outre, Radio France International a diffusé la photo prise à Gao, Mali, de deux ressortissants français à qui elle attribue la qualité de «djihadistes». Les deux hommes, des Français de souche, armés de kalachnikovs, sont assis à l’arrière d’un pick-up à côté d’un membre d’un des groupes armés qui sévissent à Gao où les sept diplomates algériens sont détenus. Selon une source informée du site Algeriepatriotique, les deux Français appartiendraient aux services du renseignement extérieur français et auraient été dépêchés au Mali, par la caserne Mortier, siège de la DGSE, pour prêter main-forte aux terroristes et justifier ainsi la nécessité d’une intervention étrangère dans ce pays. Cette thèse est d’autant plus plausible que les «djihadistes» français ont tous des origines maghrébines ou africaines. En outre, il y a un autre ressortissant français, un certain Abdel Jelil, de son vrai nom Gilles Le Guen, qui était un membre depuis plusieurs mois d’Aqmi dans le nord du Mali et qui a été arrêté et emprisonné en novembre 2012 par ce groupe qui le suspecte d’être un espion français. Risque professionnel oblige. Pour aggraver la situation, un autre Français, âgé de 61 ans, M. Rodriguez Léal, est enlevé à Nioro, à la frontière mauritanienne le mercredi 21 novembre 2012, alors qu’il se trouvait au Burkina Faso et a mystérieusement décidé de se rendre dans une région infestée de terroristes dans son camping-car.

Les renseignements et les forces spéciales sont le moteur des guerres par procuration pour conquérir de nouveaux territoires, qu’ils ne voient plus comme pays souverains mais comme terres de conquête, comme au temps des empires coloniaux. Ils s’exécutent même par le biais de mercenaires et de supplétifs et d’agences militaires privées qui se chargent parfois de recruter ceux qui tuent, ceux qui se font tuer, et ceux qui entraînent les deux à s’entretuer. Blackwater compte parmi les plus célèbres de ces sociétés de la mort qui a commencé à travailler pour le Pentagone en Afghanistan et en Irak pour des budgets de plusieurs millions de dollars/an. Pour préparer la grande mission de sauvetage, des otages français et d’un Nord-Mali pris en otage, la France et ses alliés occidentaux ont assidûment mis en avant la transformation du Sahel en lieu infesté de terroristes dangereux que l’on croirait capables de traverser la mer pour plastiquer Marseille ou Londres.

Or, malgré tout l’argent qatari et les moyens fantastiques mis en place, l’effectif total des quatre groupes de mercenaires (Ansar Dine, MNLA, Mujao, Aqmi) se situerait entre 2 000 et 5 000 hommes, selon les sources occidentales, alors que les renseignements algériens estimeraient les mercenaires dits djihadistes aguerris à 1 500 ou 2 000 tout au plus. Les mercenaires et les jeunes recrues ne seraient pas prêts à risquer leur vie pour des dollars qataris. Tous les officiels français s’évertuent à dire les compétences techniques et opérationnelles de ceux qu’ils appellent les «islamistes» pour signifier que ce n’est pas la malingre armée malienne qui pourrait en venir à bout. Pour justifier l’intervention, on disait l’armée malienne totalement désorganisée, sans moyens ni logistique, et que ses généraux ne portaient même pas leur tenue militaire. Or, certaines unités ont montré leur courage malgré la faiblesse de leurs moyens. Ce discours ne visait peut-être pas à démobiliser davantage l’armée malienne car une armée n’a jamais peur, mais visait-il à influencer l’opinion européenne, française précisément, à envoyer ses Rambo sauver les pauvres Maliens ?

Les armes maliennes commandées par le président déchu sont toujours bloquées dans des ports africains. Les médias présentent l’armée malienne comme une armée incapable, alors qu’elle est otage d’une conjoncture politique nationale et internationale qui l’a complètement paralysée. Or, en octobre 2012, les djihadistes d’Al-Shabbab qui sévissaient depuis des années dans la ville de Kismaayo ont été délogés en quelques heures seulement par les forces de l’Union africaine en Somalie (Amisom) qui ont également repris d’autres localités. Ce ne sont pas des groupes terroristes, des mercenaires sans conviction et quelques rebelles divisés qui pourraient effrayer des armées régulières africaines ayant le soutien des populations maliennes et sahariennes connues pour leur pacifisme et qu’il ne faut pas assimiler aux trublions sécessionnistes ni aux mercenaires «djihadistes». Une ingérence étrangère peut dégénérer si elle est le fait de forces occidentales ou manipulée, et c’est cette deuxième menace qui se profile dans le cas malien. Il se peut que cette option ait été choisie pour les risques de dérapages qu’elle porte, même de manière involontaire.

Même langage martial que George Bush

Fabius disait que l’engagement militaire français ne durerait que quelques semaines, et comme en réponse à M. Medelci, a tenu à souligner que l’intervention au Mali ne se transformerait pas en «un autre Afghanistan». Par contre, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a dit que l’opération nécessitait des années. Exagérer la puissance terroriste au Mali, c’est nier que l’Algérie a éradiqué des dizaines de milliers de terroristes en quelques années et la Syrie en a éradiqué des milliers au seul mois de décembre 2012. L’armée malienne n’a pas été vaincue par des terroristes mais par l’absence de moyens. Spécialiste shakespearien, David Cameron, le Premier ministre britannique, dira, quant à lui, que la crise pourrait engendrer une bataille décennale. «Cette menace globale requiert une réponse globale.

Elle requiert une action qui se comptera en années si ce n’est en décennies, plutôt qu’en mois. Elle requiert une réponse qui suppose de la patience et de l’endurance, une réponse à la fois dure et intelligente, mais qui est avant tout une décision d’acier ; et c’est ce que nous allons prouver au cours des années à venir (…) Nous faisons face à un groupe terroriste extrémiste islamiste lié à Al-Qaïda», a-t-il précisé. Si ce n’est pas cela un projet pour un nouvel Afghanistan au Mali, alors le Premier ministre britannique dit n’importe quoi. Cameron emploie les mêmes mots, le même ton froid que George Bush, le lendemain du 11 septembre 2001 et des jours de campagne anti-irakienne qui suivirent. Le lancement d’une guerre d’envergure en Irak était décidée, sous un prétexte qui n’a rien à voir avec l’Afghanistan ni avec l’Irak, et qui se répète aujourd’hui à nos frontières. La seule différence est que les deux guerres contre les deux pays n’avaient pas été scénarisées comme celle du Mali. Lors d’une rencontre sur le Mali entre David Cameron et François Hollande, le compte rendu officiel dira que «les deux dirigeants ont convenu que la situation au Mali constitue une menace réelle pour la sécurité internationale, compte tenu de l’activité terroriste là-bas. La coordination franco-anglaise est parfaite.

La répartition des tâches par le chef d’orchestre américain, aujourd’hui à l’ombre pour des questions de politiques intérieure (il n’avait pas encore prêté serment lors de la nouvelle incursion d’Ansar Dine au Mali) et extérieure, car les forces sont engagées en Afghanistan et une nouvelle intervention dans un pays musulman, après la Libye, la Syrie et le Yémen, attiserait trop la haine. Or, il faut juste assez de haine pour recruter des terroristes et faire l’opération. Les politiciens américains, les chefs militaires et les médias ont également pendant des mois fait du Mali une nouvelle «centrale de la terreur» mondiale, laissant entendre que les gouvernements occidentaux devaient agir de façon décisive pour éliminer ce danger. Une «centrale de la terreur» exige «guerre à la terreur» pour être fidèle à Bush, et sauver la civilisation de la barbarie.

Là ce n’est pas un «Etat voyou» qui sème la pagaille dans le monde comme en Syrie, ni un dictateur qui agresse son peuple comme en Libye, ni un sanguinaire comme Saddam qui brandit des armes de destruction massive, mais des groupes barbares qui agressent un Etat et un peuple. Le scénario idéal pour une mission de conquête déguisée en mission humanitaire. Or, la disponibilité de moyens et l’effacement de la dette auraient permis au Mali de gérer cette crise comme un simple problème sécuritaire, et non pas comme une guerre avec des conséquences qui ont engendré 800 000 déplacés. Aucun pays n’a aidé le Mali lorsque les quatre groupes rebelles l’ont de concert attaqué. Cent militaires, dont des Touareg, ont été sauvagement assassinés par la horde des quatre groupes menés par le prétendu MNLA touareg : l’Occident n’interviendra que lorsque le décor sera fin prêt pour une «mission humanitaire» au profit d’un peuple violenté par des islamistes.
E. T.
18 février 2013
Saper le nationalisme des Touaregs, un vieux plan de De Gaulle
(Septième partie)
En juin 2012, le président nigérien Mahamadou Issoufou a affirmé que des mercenaires «afghans et pakistanais» étaient présents dans des camps d’entraînement du septentrion malien : «On a des informations sur la présence d’Afghans et de Pakistanais dans le nord du Mali, (…) de djihadistes venus de pays non africains. Ils serviraient de formateurs. Ce sont eux qui entraînent ceux qui sont recrutés dans les différents pays d’Afrique de l’Ouest.»
Il a ajouté : «Tout cela est coordonné : cela va du Sahara jusqu’en Somalie (…) Je crois que toutes ces organisations coopèrent entre elles, que ce soit les Shebab en Somalie, Boko Haram au Nigeria, AQMI en Algérie et au Sahel en général, jusqu’en Afghanistan.» Le président nigérien a terminé : «Notre préoccupation, c’est que le Sahel ne se transforme pas en un nouvel Afghanistan», précisant que «ces groupes armés du Nord continuent à s’approvisionner en armes dans le sud-ouest de la Libye». Contrairement à Sellal, il ne mâche pas ses mots, estimant que cette zone du Sud libyen «constitue une base d’appui pour les factions armées présentes sur le territoire malien». Tout est résumé. Toutes les armes que l’OTAN a déversées en Libye en 2011 n’étaient pas uniquement destinées à déboulonner Kadhafi, mais à d’autres «agendas». William Engdahl, un économiste américain spécialiste en géopolitique et énergie depuis plus de trois décennies, pense que «l’intervention au Mali est un autre avatar du rôle de la France dans la déstabilisation que nous avons vue, spécifiquement en Libye l’an dernier et le renversement du régime de Kadhafi. Dans un sens, cela représente le néo-colonialisme français en action». Il ajoute : «Mais, curieusement, je pense que derrière l’intervention française il y a la main très forte du Pentagone américain qui cherche la préparation de la partition du Mali.» Engdahl va plus loin : «Je pense que l’AQMI est une organisation très suspecte et le calendrier de ses activités laisse supposer que certains pays de l’OTAN l’aideraient à obtenir des armes et créer le casus belli qui justifierait l’intervention de l’OTAN.» Pour lui, l’afghanistanisation du conflit est en cours, du fait même de l’intervention armée : «Le conflit est appelé à traverser les frontières vers les pays voisins et pourrait engloutir la totalité de l’Afrique de l’Ouest.» Mireille Fanon-Mendes-France, fille de Frantz Fanon et experte aux Nations unies, écrit : «Se pose, à l’heure actuelle, la question des alliances pour mener cette guerre dont les premières victimes seront les Maliens eux-mêmes, mais aussi les Mauritaniens, les Nigériens, les Burkinabais, les Algériens avec des conséquences évidentes pour les Guinéens, les Ivoiriens et les Sénégalais. Autant dire que toute l’Afrique sahélienne et de l’Ouest pourrait s’embraser et s’enfoncer dans une guerre sans fin à l’instar de celles menées en Irak et en Afghanistan.» Beaucoup d’autres auteurs pensent que la crise malienne s’inscrit dans un «agenda», pour utiliser le terme employé par notre ministre des A.E., M. Medelci, et ceux qui parlent d’une volonté de transformer le Sahel en Sahelistan où pulluleraient des terroristes. D’abord, définissons ce qui est entendu par Sahelistan, un terme consacré par un président (le Tunisien M. Marzougui) et une situation à laquelle ont fait clairement allusion le président nigérien Mahamadou Issoufou et le chef du gouvernement algérien, M. Sellal. C’est d’abord un conflit où des forces internationales sont impliquées pour soi-disant lutter contre le terrorisme. En vérité, il s’agit d’un conflit où des forces internationales sont impliquées pour les propres intérêts économiques, géostratégiques et militaires en développant le terrorisme et le nourrissant par des moyens directs (opérations secrètes, financement et soutien par le biais d’Etats-valets) ou indirects par leur seule présence du fait des «dommages collatéraux» qu’ils causent : des missiles tombés sur des écoles ou des marchés, des soldats «fous» qui brûlent le Coran, des drones qui ciblent des bus, développement exponentiel de la culture et du trafic de la drogue, développement de la corruption, pillage des ressources et autres Abou Ghraïb de ce genre. Ces phénomènes induisent parfois des réactions saines d’autodéfense des peuples mais qui sont récupérées par des agents travaillant pour l’ennemi et dont ces innombrables Al-Qardaoui font partie.
Une résolution comme un blanc-seing
Un conflit type Afghanistan ne sera pas ruineux pour le seul Mali. Il détruira toute une région, avec un prolongement de la guerre dans les pays frontaliers. La première guerre d’Afghanistan (1979-1996) a eu des répercussions économiques et sécuritaires graves sur le Pakistan, qui a voulu servir de base aux Afghans-Arabes pour détruire son voisin sous prétexte qu’un régime socialiste était en place à Kaboul. La deuxième guerre d’Afghanistan (depuis 2001) a mis le Pakistan à plat : la désolation et la misère sont pires qu’en Afghanistan, notamment la région frontalière avec le pays où les Américains ont prétendu vouloir éliminer Ben Laden, Al-Qaïda et les talibans. Sous ce fallacieux prétexte, les Etats- Uniens ont mené des milliers d’opérations au Pakistan, et les seules attaques au drone Predator ont causé près de 687 morts dans ce pays entre 2008 et 2010, avec une attaque qui a tué treize villageois pakistanais d’un seul coup. Les morts parmi les civils, les déplacés et tous les autres facteurs induits par la guerre et par la présence étrangère ont généré au Pakistan et en Afghanistan de la sympathie populaire pour les terroristes qui se sont transformés en insurgés et dont la cause incite des recrues d’origines diverses. Apparemment, c’est ce que souhaite l’impérialisme américain qui ne perd rien, dans la mesure où il a réduit le seuil des morts durant les guerres à un niveau plus qu’acceptable. Treize années de guerre au Vietnam (1960-1973) ont causé la mort de 52 000 Américains alors qu’en douze années, la guerre d’Afghanistan n’en a causé que 2.000, du fait des progrès technologiques. La France, ancienne puissance coloniale, aujourd’hui soucieuse des «droits de l’homme» au Mali et en Syrie, mais pas en Palestine, dit qu’elle ne participerait qu’en soutien logistique à une intervention entérinée par le Conseil de sécurité. Nul doute que les Etats-Unis cachent aussi leur jeu mais ils voteront pour une résolution d’intervention, attendue comme un blanc-seing pour des enjeux à la fois complémentaires et concurrents de ceux de la France. Des plans s’élaborent et se mettent sur le terrain mais leurs desseins n’apparaissent que lorsqu’ils sont sur le point d’avaler leur proie. Sur le terrain, les acteurs exogènes ont joué leur rôle. Les services des renseignements étrangers n’ont commis aucune erreur. Des élites maliennes et celles de certains pays africains ont trahi. Les traîtres arabes ont fourni armes et argent. Les peuples ne tarderont pas à avaler la pilule d’une «ingérence humanitaire», la première à passer comme une lettre à la poste, sans grosses contestations populaires. L’opinion occidentale est conquise par la «bonté» de la France et, partant, de l’OTAN. Les partis en France sont unanimes pour une intervention. Quant aux acteurs du terrain, ils ont fait le sale boulot : tué, coupé des mains, détruit des mausolées pour donner une piètre image de l’Islam. Le scénario étant fin prêt, le Rambo français pouvait entrer en scène. Juste quelques détails, une visite de Hollande à Alger, suivie de celle de Hamad bin-Khalifa Al-Thani également à Alger, pour que des avions français se mettent à siffler au-dessus du ciel, qui fut paisible, des Algériens. Si au moins le conflit ne concernait pas directement notre pays comme l’a dramatiquement montré l’attentat d’In Amenas… La visite de Hamad à Ghaza n’a-t-elle pas été suivie de la mort du chef militaire du Hamas, Ahmad Jaabari, puis d’un déluge de feu israélien ? Sa mission de bonne volonté au Soudan n’a-t-elle pas été suivie par la partition du pays ?
Faction fantoche à la solde du néocolonialisme
Comme par hasard, le terrorisme islamiste sahélien qui justifiera l’ingérence française se trouve sur les routes du pétrole, du gaz et de l’uranium. Et comme par hasard, l’intervention coïncide avec un basculement des équilibres géostratégiques, géopolitiques et géoéconomiques vers l’Est, un basculement que l’Alliance atlantique veut empêcher coûte que coûte. Au Mali comme en Syrie, il s’agit d’empêcher la Russie et la Chine de jouer dans la cour traditionnelle d’une France qui reste fidèle aux principes du colonialisme et d’une Amérique qui s’estime partout chez elle. Comme par hasard, le Mali figure parmi les quatre pays les plus déshérités du monde, avant le Burkina Faso, le Niger et la Sierra Leone qui sont d’ailleurs voisins ou très proches l’un de l’autre. Les revendications indépendantistes du MNLA sont de l’indécence dans une situation de désespoir du peuple malien qui souffre de faim, d’analphabétisme, de problèmes de santé, de manque d’eau et d’hygiène. Le Qatar, qui détient 4% de la dette malienne, aurait pu l’effacer et aider ce pays au lieu de lui ajouter une misère sécuritaire à une misère économique, et de causer l’une des crises humanitaires les plus graves du XXIe siècle. Le Qatar veut des wahhabites à Bamako, des puits de pétrole pour Total où il est actionnaire, plus d’uranium pour Areva où il l’est également, sans oublier une base américaine pour les Etats-Unis et une autre pour la France, tout en enfonçant l’Algérie et en obligeant les pays de la région à grossir leur facture d’armement pour enrichir tous les marchands de canons. Comme par hasard, le MNLA revendique une terre qui ne lui appartient pas et qui correspond à la zone que la France coloniale voulait concrétiser par la loi n°57-27 du 10 janvier 1957 et qui porte création d’une «Organisation commune des régions sahariennes» (OCRS) afin de n’accorder que des indépendances incomplètes aux pays de l’Afrique occidentale française (AOF) et de l’Afrique équatoriale française (AEF), comme l’a prouvé le rêve gaullien d’amputer l’Algérie de son Sahara. C’est une même promesse qu’on fait miroiter aujourd’hui dans le cadre des politiques impérialistes et néocolonialistes. Joli scénario pour les futurs James Bond franco-américano-qataris… D’ailleurs, même si le MNLA représentait vraiment les Touareg (une population de 250 000 habitants sur 14 millions de Maliens !), au nom de quelle logique oserait-il revendiquer plus que la moitié du territoire malien ? En vérité, les Touareg maliens n’ont aucune velléité indépendantiste, tout comme les Touareg d’Algérie et des autres pays ou comme les Kabyles, les Chaouis ou les Chleuhs marocains. Chacune de ces ethnies est intimement liée à son pays, et il n’y a aucune différence entre les hommes bleus maliens et nigériens des Touareg libyens, algériens ou burkinabés. Les problèmes essentiels des Touareg sont liés au pastoralisme qui connaît des difficultés du fait de la sécheresse, même en Algérie. La manipulation étrangère d’une détresse humaine a aggravé le cas malien.
E.-T.
19 février 2013
Croustillantes histoires d’espions-otages français
(Partie
Pour pénétrer dans le Sahel, une faction prétendument indépendantiste et des groupes prétendument «djihadistes» ont été recrutés. Entre rébellion ethnique et revendications islamistes, certains groupes touareg maliens ne cherchent que l’intérêt personnel et ne font que noircir l’image de leur communauté qui continue cependant à jouir d’un immense respect dans tout le Sahel et le Sahara. Les manipulateurs se sont permis de découper un morceau de Sahara, au nord du Mali, et l’appeler Azawad.
Entre-temps, l’impatience française monte. Alger irrite en essayant de faire capoter le plan, en essayant d’isoler Ansar Dine et le MNLA de ses tuteurs. Combien d’otages lui faut-il encore pour qu’Alger se décide à rentrer dans les rangs des supplétifs de l’armée néocoloniale ? Combien d’attentats lui faut-il après ceux de Tamanrasset et de Ouargla ? Évidemment, il faut encore continuer à chauffer le bendir, comme on dit en Algérie, dans une dramatisation qui rendrait inévitable l’ingérence d’une puissance atlantique d’autant que certains donnaient l’impression d’avoir peur. Pour cela, ne disait-on pas que risquer l’entreprise serait s’embourber dans le désert ? Que les terroristes avaient l’avantage de la connaissance du terrain et qu’une armée classique ne pouvait gagner dans une guerre contre des forces volatiles… ? Or, l’intervention de plusieurs puissances contre 2 000 ou même 6 000 terroristes est une supercherie. L’armée malienne est capable de résoudre son problème toute seule, à condition que les conditions d’exercice du pouvoir soient réunies. Mais cela on le lui avait enlevé en fomentant un coup d’Etat. De l’argent pour acheter des munitions, des armes et recruter des soldats : c’est aussi simple que cela. Puis, il faut de nouveaux arguments pour intervenir, du moins aux yeux de son opinion publique… Comme par hasard, des ressortissants français sont pris en otages. Voici l’histoire d’espions otages, une histoire bien française. Déjà en septembre 2010, Aqmi a kidnappé cinq Français employés des sociétés Areva et Vinci à Arlit, un village nigérien, mais avec une complicité avérée, selon le responsable sécurité du site (lire 6e partie). Prendre des Français en otages permet de légitimer l’intervention non pas africaine mais française. Puis il y a eu la prise d’otages des 7 employés du consulat enlevés au Mali. Certaines sources font le lien avec les services français qui, en mettant l’Algérie dans une situation identique, voulaient l’amener à l’option militaire au Mali, afin d’ouvrir le champ à une présence prolongée, ou un bourbier pour l’ennemi. Puis, il y a les deux otages français enlevés par Aqmi depuis novembre 2011 : même la presse française a fini par admettre la thèse du journal malien, le Combat, disant qu’ils seraient plutôt des agents secrets. Il s’agit de Philippe Verdon, Serge Lazarevic, identifiés par une personnalité religieuse influente de la région du nord du Mali comme responsables de la formation et de l’encadrement d’une milice qui était en formation dans la région où ils furent kidnappés par Aqmi à Doumbia, Hombori. Selon la source, ils étaient probablement en train de former une des milices (MNLA ou Mujao) qui allait prendre le pays deux mois plus tard, le 17 janvier 2012. «Les hommes ne sont pas des inconnus des services secrets français», selon le site de la radio : «En 1999, Serge Lazarevic apparaît ainsi dans une procédure judiciaire en Serbie, visant un réseau clandestin financé par le contre-espionnage français : il était chargé d’assassiner le président Slobodan Milosevic.»
Espions et guerres cognitives par procuration
D’origine hongroise, Lazarevic aurait également participé au recrutement de mercenaires yougoslaves envoyés combattre au Zaïre, dans le cadre d’une opération, «là encore», suivie de près par le renseignement français. Concernant l’autre Français enlevé au Mali, Europe 1 écrit qu’il avait été arrêté «en septembre 2003 aux Comores pour avoir voulu renverser le pouvoir du colonel Azali Assoumani dans une tentative de coup d’Etat rocambolesque». Bob Denard, le célèbre mercenaire, a reconnu connaître ce personnage et c’est apparemment en tant que formateur d’une milice adverse qu’il aurait été kidnappé par Aqmi. Des témoins maliens l’ont reconnu comme étant l’un des encadreurs d’une milice au Nord-Mali, avant son kidnapping. En outre, Radio France International a diffusé la photo prise à Gao, Mali, de deux ressortissants français à qui elle attribue la qualité de «djihadistes». Les deux hommes, des Français de souche, armés de kalachnikovs, sont assis à l’arrière d’un pick-up à côté d’un membre d’un des groupes armés qui sévissent à Gao où les sept diplomates algériens sont détenus. Selon une source informée du site Algeriepatriotique, les deux Français appartiendraient aux services du renseignement extérieur français et auraient été dépêchés au Mali, par la caserne Mortier, siège de la DGSE, pour prêter main-forte aux terroristes et justifier ainsi la nécessité d’une intervention étrangère dans ce pays. Cette thèse est d’autant plus plausible que les «djihadistes» français ont tous des origines maghrébines ou africaines. En outre, il y a un autre ressortissant français, un certain Abdel Jelil, de son vrai nom Gilles Le Guen, qui était un membre depuis plusieurs mois d’Aqmi dans le nord du Mali et qui a été arrêté et emprisonné en novembre 2012 par ce groupe qui le suspecte d’être un espion français. Risque professionnel oblige. Pour aggraver la situation, un autre Français, âgé de 61 ans, M. Rodriguez Léal, est enlevé à Nioro, à la frontière mauritanienne le mercredi 21 novembre 2012, alors qu’il se trouvait au Burkina Faso et a mystérieusement décidé de se rendre dans une région infestée de terroristes dans son camping-car. Les renseignements et les forces spéciales sont le moteur des guerres par procuration pour conquérir de nouveaux territoires, qu’ils ne voient plus comme pays souverains mais comme terres de conquête, comme au temps des empires coloniaux. Ils s’exécutent même par le biais de mercenaires et de supplétifs et d’agences militaires privées qui se chargent parfois de recruter ceux qui tuent, ceux qui se font tuer, et ceux qui entraînent les deux à s’entretuer. Blackwater compte parmi les plus célèbres de ces sociétés de la mort qui a commencé à travailler pour le Pentagone en Afghanistan et en Irak pour des budgets de plusieurs millions de dollars/an. Pour préparer la grande mission de sauvetage, des otages français et d’un Nord-Mali pris en otage, la France et ses alliés occidentaux ont assidûment mis en avant la transformation du Sahel en lieu infesté de terroristes dangereux que l’on croirait capables de traverser la mer pour plastiquer Marseille ou Londres. Or, malgré tout l’argent qatari et les moyens fantastiques mis en place, l’effectif total des quatre groupes de mercenaires (Ansar Dine, MNLA, Mujao, Aqmi) se situerait entre 2 000 et 5 000 hommes, selon les sources occidentales, alors que les renseignements algériens estimeraient les mercenaires dits djihadistes aguerris à 1 500 ou 2 000 tout au plus. Les mercenaires et les jeunes recrues ne seraient pas prêts à risquer leur vie pour des dollars qataris. Tous les officiels français s’évertuent à dire les compétences techniques et opérationnelles de ceux qu’ils appellent les «islamistes» pour signifier que ce n’est pas la malingre armée malienne qui pourrait en venir à bout. Pour justifier l’intervention, on disait l’armée malienne totalement désorganisée, sans moyens ni logistique, et que ses généraux ne portaient même pas leur tenue militaire. Or, certaines unités ont montré leur courage malgré la faiblesse de leurs moyens. Ce discours ne visait peut-être pas à démobiliser davantage l’armée malienne car une armée n’a jamais peur, mais visait-il à influencer l’opinion européenne, française précisément, à envoyer ses Rambo sauver les pauvres Maliens ? Les armes maliennes commandées par le président déchu sont toujours bloquées dans des ports africains. Les médias présentent l’armée malienne comme une armée incapable, alors qu’elle est otage d’une conjoncture politique nationale et internationale qui l’a complètement paralysée. Or, en octobre 2012, les djihadistes d’Al-Shabbab qui sévissaient depuis des années dans la ville de Kismaayo ont été délogés en quelques heures seulement par les forces de l’Union africaine en Somalie (Amisom) qui ont également repris d’autres localités. Ce ne sont pas des groupes terroristes, des mercenaires sans conviction et quelques rebelles divisés qui pourraient effrayer des armées régulières africaines ayant le soutien des populations maliennes et sahariennes connues pour leur pacifisme et qu’il ne faut pas assimiler aux trublions sécessionnistes ni aux mercenaires «djihadistes». Une ingérence étrangère peut dégénérer si elle est le fait de forces occidentales ou manipulée, et c’est cette deuxième menace qui se profile dans le cas malien. Il se peut que cette option ait été choisie pour les risques de dérapages qu’elle porte, même de manière involontaire.
Même langage martial que George Bush
Fabius disait que l’engagement militaire français ne durerait que quelques semaines, et comme en réponse à M. Medelci, a tenu à souligner que l’intervention au Mali ne se transformerait pas en «un autre Afghanistan». Par contre, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a dit que l’opération nécessitait des années. Exagérer la puissance terroriste au Mali, c’est nier que l’Algérie a éradiqué des dizaines de milliers de terroristes en quelques années et la Syrie en a éradiqué des milliers au seul mois de décembre 2012. L’armée malienne n’a pas été vaincue par des terroristes mais par l’absence de moyens. Spécialiste shakespearien, David Cameron, le Premier ministre britannique, dira, quant à lui, que la crise pourrait engendrer une bataille décennale. «Cette menace globale requiert une réponse globale. Elle requiert une action qui se comptera en années si ce n’est en décennies, plutôt qu’en mois. Elle requiert une réponse qui suppose de la patience et de l’endurance, une réponse à la fois dure et intelligente, mais qui est avant tout une décision d’acier ; et c’est ce que nous allons prouver au cours des années à venir (…) Nous faisons face à un groupe terroriste extrémiste islamiste lié à Al-Qaïda», a-t-il précisé. Si ce n’est pas cela un projet pour un nouvel Afghanistan au Mali, alors le Premier ministre britannique dit n’importe quoi. Cameron emploie les mêmes mots, le même ton froid que George Bush, le lendemain du 11 septembre 2001 et des jours de campagne anti-irakienne qui suivirent. Le lancement d’une guerre d’envergure en Irak était décidée, sous un prétexte qui n’a rien à voir avec l’Afghanistan ni avec l’Irak, et qui se répète aujourd’hui à nos frontières. La seule différence est que les deux guerres contre les deux pays n’avaient pas été scénarisées comme celle du Mali. Lors d’une rencontre sur le Mali entre David Cameron et François Hollande, le compte rendu officiel dira que «les deux dirigeants ont convenu que la situation au Mali constitue une menace réelle pour la sécurité internationale, compte tenu de l’activité terroriste là-bas. La coordination franco-anglaise est parfaite. La répartition des tâches par le chef d’orchestre américain, aujourd’hui à l’ombre pour des questions de politiques intérieure (il n’avait pas encore prêté serment lors de la nouvelle incursion d’Ansar Dine au Mali) et extérieure, car les forces sont engagées en Afghanistan et une nouvelle intervention dans un pays musulman, après la Libye, la Syrie et le Yémen, attiserait trop la haine. Or, il faut juste assez de haine pour recruter des terroristes et faire l’opération. Les politiciens américains, les chefs militaires et les médias ont également pendant des mois fait du Mali une nouvelle «centrale de la terreur» mondiale, laissant entendre que les gouvernements occidentaux devaient agir de façon décisive pour éliminer ce danger. Une «centrale de la terreur» exige «guerre à la terreur» pour être fidèle à Bush, et sauver la civilisation de la barbarie. Là ce n’est pas un «Etat voyou» qui sème la pagaille dans le monde comme en Syrie, ni un dictateur qui agresse son peuple comme en Libye, ni un sanguinaire comme Saddam qui brandit des armes de destruction massive, mais des groupes barbares qui agressent un Etat et un peuple. Le scénario idéal pour une mission de conquête déguisée en mission humanitaire. Or, la disponibilité de moyens et l’effacement de la dette auraient permis au Mali de gérer cette crise comme un simple problème sécuritaire, et non pas comme une guerre avec des conséquences qui ont engendré 800 000 déplacés. Aucun pays n’a aidé le Mali lorsque les quatre groupes rebelles l’ont de concert attaqué. Cent militaires, dont des Touareg, ont été sauvagement assassinés par la horde des quatre groupes menés par le prétendu MNLA touareg : l’Occident n’interviendra que lorsque le décor sera fin prêt pour une «mission humanitaire» au profit d’un peuple violenté par des islamistes.
E. T.
20 février 2013
Des mensonges flagrants à l’ingérence directe
(Partie 9)
Tous les discours des autorités françaises, anglaises et américaines sur la nécessité d’une intervention à «visage africain» et sur une intervention urgente se sont révélées n’être qu’une couverture cynique pour préparer une action occidentale directe au Mali, le plus tardivement possible, lorsque les mercenaires auront complètement achevé leur mission.
La France disait vouloir seulement jouer «un rôle de facilitateur. Pas question d’envoyer des troupes au sol». Le président François Hollande a même promis aux médias français qu’il y n’aurait «aucune présence française sur le terrain» au Mali. Or, selon certaines sources, des troupes spéciales françaises (environ 200 hommes) étaient sur le terrain malien tout comme celles des États- Unis, déjà présentes au Mali par le biais de l’Africom, avec 400 militaires, et ce, bien avant l’intervention. La diplomatie disait non-ingérence sans l’accord onusien mais les faits attestaient le contraire. Lors de la conférence sur le Sahel, le 27 septembre 2012, l’ex-secrétaire d’Etat étatsunienne, Hillary Clinton, avait estimé que «seul un gouvernement démocratiquement élu aura la légitimité pour parvenir à une résolution négociée au nord du Mali, mettre un terme à la rébellion et restaurer l’Etat de droit». C’est clair, net et précis. Le gouvernement intérimaire de Bamako n’avait aucune légitimité à défendre son pays, et l’ONU n’avait pas à l’aider. C’est le message que décodera Ban Ki-moon ou qui lui sera signifié en clair. Le 11 novembre 2012, les chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont entériné un plan d’action qui définissait les grands axes de l’intervention militaire dans le nord du Mali afin de restaurer «le rétablissement de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire». L’Algérie y a participé en qualité d’observateur et réitéré sa position sur la question, soit le refus de l’intervention tant qu’existaient encore des chances d’aboutir à une solution pacifique. Le plan d’action décide de la création d’une force, appelée Mission internationale de soutien au Mali, sous conduite africaine (Misma), chargée de restaurer la souveraineté de l’Etat malien sur ses territoires. Mais Ban Ki-moon dit vouloir favoriser le dialogue politique tout en estimant qu’une intervention militaire au Mali comportait beaucoup de risques et qu’elle était «nécessaire à un moment donné, en dernier recours». Il reporte l’intervention pour l’automne 2012 ! Une manière de discréditer la Misma, en renvoyant son action aux calendes grecques. Ban Ki-moon est la voix des membres du Conseil de sécurité, dont la France fait partie. En public, elle exigeait une intervention rapide, mais, en coulisses, elle essayait de saborder la Misma pour pouvoir agir selon son propre plan. Le président de l’Union africaine se dit déçu par ce rapport, que les Maliens trouvèrent incompréhensible, car leurs malheurs ne faisaient qu’empirer. «L’ONU n’est pas la mieux placée pour répondre à la menace sécuritaire que créent des groupes terroristes», affirmait Ban Ki-moon. Alger a suspecté la Cédéao d’être un pantin de la France et refusé de marcher avec elle. Or, Paris ne visait pas l’intervention dans un cadre africain mais en solo. Le plus gros perdant dans l’affaire, c’est Alger qui s’est discrédité sur tous les plans, au lieu de jouer le rôle majeur qui était naturellement le sien. Alger espérait amener à la table des négociations le groupe Ansar Dine, un groupe de mercenaires dirigé par un opportuniste, et une autre formation tout aussi versatile, le MNLA, qu’elle croit pouvoir arracher aux tentacules françaises et qataries ou si vous voulez l’isoler d’Aqmi et du Mujao, ce qui revient au même. Mais il se révélera que tous ces groupes avaient un seul et même but : amener le bateau néocolonial à bon port.
Trahison des élites et faillite des régimes
En insistant sur le dialogue sans proposer quelque chose de plus palpable pour les Maliens, Alger a commencé à donner l’impression de ne penser qu’à son pré carré, surtout quand elle a parlé de fermer ses frontières avec un peuple en danger qui suppliait l’envoi d’une force internationale. Jusqu’au jour où son président sera contraint de demander à la France de voler à son secours. Pour imposer leur présence, d’autres pays occidentaux se disent prêts à se charger de la réorganisation et de l’entraînement des forces maliennes, sous mandat de l’Union africaine et de l’ONU. Comme si ses généraux étaient des incapables et que la Cédéao qui est supposée également faite pour une coopération des pays d’Afrique de l’Ouest dans le domaine militaire ne pouvait pas s’en charger : la nullité de l’Afrique est totale. Pas même capable de former des bidasses ! Pour ne pas paraître raciste, leurs médias ne se posent pas la question : «À quoi ont alors servi les indépendances ?» Mais pour arriver à cela, il fallait aussi qu’il y ait de nouveaux otages français pour justifier l’intervention au plan «humanitaire» et au plan devoir-de-l’Etat-envers-des-ressortissants-français-retenus- par-des-terroristes. Comme par hasard, il y eut des prises d’otages, puis une tentative de libérer des otages en Somalie qui se solde par la mort de l’otage français (un agent du SDECE) et de deux éléments des forces françaises d’intervention. Puis il fallait que les terroristes décident de franchir la ligne rouge pour aller vers le sud. Alors comme dans un scénario, Ansar Dine, Mujao et Aqmi appellent même le groupe nigérian Boko Haram en appui et partirent à l’abordage de la ville de Kona, le 10 janvier 2013, obligeant les autorités maliennes à demander l’aide française. Comme pour répondre aux vœux d’une intervention militaire, encore d’un commun accord et de concert, les mercenaires traversent la ligne rouge, comme s’ils savaient que cela serait le déclencheur d’une intervention… française. Ce franchissement est la preuve la plus parlante de leur complicité avec un commanditaire qui avait besoin non pas d’un mais de plusieurs casus belli. Les «djihadistes» prétendaient vouloir créer une Dawla islamiya et ils l’avaient sur un immense territoire qu’il aurait plutôt fallu renforcer, bunkériser, barricader pour pouvoir le préserver. S’ils voulaient un «Azawad», ils avaient le territoire qu’ils voulaient. Pourquoi ont-ils fait le contraire de ce qu’ils ont fait en Libye et ce qu’ils font en Syrie où ils prennent des territoires et les renforcent pour en faire des zones d’exclusion, autrement dit des territoires libérés ? Ils n’avaient donc pas reçu cet ordre. Rien n’explique leur descente vers les villages insignifiants et non stratégiques de Mopti et Kona si ce n’est l’obéissance à un «agenda», pour reprendre le mot utilisé par M. Medelci en novembre dernier. Ils savaient que ce franchissement obligerait Bamako à demander de l’aide à ceux qui se disaient prêts à en découdre avec les méchants loups ! Une semaine auparavant, Ansar Dine avait promis une trêve et l’arrêt des hostilités : le hic c’est que les Algériens n’ont pas négocié avec le chef, l’imprenable renard, Iyad Ag Ghaly, mais avec ses lieutenants, qu’il reniera dès que des ordres lui viendront d’une autre capitale. Il se peut que la décision d’attaquer ne vînt pas de lui mais d’Aqmi et du Mujao et qu’il n’ait fait que suivre, comme dans une meute. Aqmi est lié à Al-Qaïda, et ses manipulateurs sont ceux qui manipulent la nébuleuse à laquelle il appartient. Al-Qaïda, cette création américaine, obéit toujours à ses premiers concepteurs. Comme leurs attaques contre des garnisons à partir du 17 janvier 2012, cette attaque a toutes les caractéristiques d’une obéissance à un ordre venant de forces manipulatrices. L’aide de Bamako est demandée au pays qui faisait le plus de pression pour une intervention, la France, comme lorsqu’en 1986, lorsque le dictateur tchadien, Hissène Habré, avait sollicité Paris pour le défendre des troupes progressistes de Goukouni Ouadaï soutenues par les forces libyennes. L’opération Serval suivra l’opération Epervier… Pourtant, Hillari Clinton, dans la citation donnée plus haut, ne reconnaissait pas aux autorités de Bamako le droit d’agir légalement pour l’intervention de la force africaine, Misma que Ban Ki-moon a alors renvoyée aux calendes grecques. Comment accepte-t-elle qu’elles fassent appel à Paris ? Le Mali, un Etat failli (concept de politique internationale), n’a pas le droit de demander secours à l’Afrique et à l’ONU mais à la France. Le schéma initial en clair destiné à l’opinion publique et aux avaleurs de couleuvres affirmait le contraire de ce qui était écrit dans le schéma codé des puissances atlantiques. Sortant son armada de grande puissance, la France prend brusquement l’initiative de s’engager, seule, pour répondre à une situation «d’urgence» créée de toutes pièces. L’armée malienne n’a toujours pas reçu les cargaisons d’armes russes achetées par le président ATT qui a été déposé en avril 2012, afin que le pays ne puisse se défendre contre un ramassis de bandits de grands chemins recrutés par les services occidentaux et qataris. La France jouera le beau rôle de sauveur pour redorer le blason peu reluisant de son passé colonial.
Intervention planifiée au détail près
Finian Cunningham écrit : «Dans les heures suivant la sollicitation par le gouvernement malien d’un appui militaire pour contrer l’avancée des rebelles du Nord, des avions de combat français ont commencé à effectuer des frappes aériennes vendredi» signifiant par là que les aéronefs étaient prêts et les cibles désignées. Spontanément, les USA et d’autres pays européens apportent leur soutien rapide à Paris bien qu’elle agissait dans un cadre non onusien. La Grande-Bretagne a envoyé des avions cargos RAF CI7 à Paris à partir d’une base dans l’est de l’Angleterre afin d’aider à l’acheminement des troupes, des hélicoptères, des camions et d’autres équipements lourds. Washington fournira de la logistique et des communications. Cette situation n’était-elle pas prévisible du fait que des drones de surveillance américains et français étaient en action depuis des mois au Mali et dans les pays limitrophes, certains disant qu’ils ont même survolé l’Algérie ? Pour Finian Cunningham, la rapidité et l’étendue de l’intervention française attestent de leur inscription dans le cadre d’un «plan bien rodé d’intervention par l’ancienne puissance coloniale». Finian Cunningham ajoute : dans Information Clearing House, 16 janvier 2013 : «Les frappes aériennes par les avions français sur au moins six zones-cibles très dispersées dans le Mali couvrent une distance opérationnelle de près de 2 000 km d’est en ouest. Ce niveau de coordination indique plusieurs semaines de planification et dément l’apparence que le gouvernement français réagissait de façon impromptue à une demande soudaine d’aide des autorités maliennes alignées sur Paris.» Donc les Français savaient-ils qu’Aqmi et Ansar Dine allaient attaquer ? Plus étrange encore : le gouvernement français a affirmé qu’il avait obtenu l’autorisation par l’Algérie du survol de son territoire, sans qu’un président ou un ministre ait été vu à Alger… On obtient l’autorisation de survol d’un pays par téléphone ? Le scénario pour une intervention africaine se mue aussitôt sans mandat de l’ONU en intervention française, apparemment, préparée de longue date, puisque tout était prêt même le détail du survol du ciel algérien, obtenu en dernière minute, ou lors de la visite de Hollande à Alger ou même une semaine avant l’intervention par… Hamad, en contrepartie d’un soutien pour un quatrième mandat. Finian Cunningham conclut dans : Information Clearing House, 16 janvier 2013 : «En effet, telle est la chorégraphie soigneuse de ce développement militaire saillant que l’on pourrait dire que les Français se sont finalement donné eux-mêmes le feu vert pour exécuter un plan qu’ils avaient fait mûrir depuis plusieurs mois. Ce plan n’est rien de moins que la reconquête néocoloniale de son ancienne colonie dans une région de l’Afrique de l’Ouest d’importance stratégique.» «Cette opération durera le temps nécessaire», a précisé François Hollande, ajoutant que la France intervenait «dans le cadre de la légalité internationale». Or, il n’en était rien. La résolution 2085 autorise le déploiement d’une «force africaine» «sous conduite africaine», pas française. Mais les choses se sont passées autrement, justement parce qu’aucune partie n’a voulu agir. Agir était pourtant simple : débloquer les cargaisons d’armes maliennes retenues dans les ports d’Abidjan, de Conakry et de Dakar, sous prétexte que le gouvernement n’était pas légitime. Un sabotage international a eu raison de l’armée malienne qui était elle-même, comme toute armée, capable de faire ce travail, de donner des martyrs en l’honneur du pays. On a préféré l’humilier. Or, les «bienfaiteurs» ne veulent toujours pas effacer la dette malienne, ni même donner des moyens humanitaires au moins aux populations qui se sont réfugiées dans les pays voisins, eux aussi sans ressources : Tchad, Niger et Mauritanie.
A.E.T.
21 février 2013

SOURCE: Le Progrès du 20 déc 2014.

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