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Discours de Younoussi Touré lors de l’ouverture de la session d’octobre: L’Assemblée nationale sur la défensive
Publié le jeudi 4 octobre 2012  |  Le 22 Septembre


Assemblée
© aBamako.com par S.A
Assemblée nationale : Ouverture de la session budgétaire d’octobre 2012
Lundi 1 octobre 2012. Bamako. La session budgétaire d’octobre 2012 de l’Assemblée nationale a ouvert ses portes sous la présence du Premier ministre et de membres du gouvernement


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Le président de l’Assemblée nationale par intérim, Younoussi Touré, a présidé lundi dernier l’ouverture de la session ordinaire d’octobre, dite session budgétaire. C’était en présence du Premier ministre, des membres du gouvernement, des ambassadeurs, des officiers supérieurs de l’armée, de la société civile, des partis politiques et d’une foule nombreuse. Devant ce beau monde, l’Honorable Touré a expliqué que le Parlement malien avait joué toute sa partition avant et pendant la crise politico-sécuritaire qui a secoué le pays. Il a laissé entendre qu’il en faisait de même aujourd’hui pour la paix et la réconciliation entre les fils du pays, en nous invitant à parler d’une même voix pour libérer le Nord du Mali. Nous vous proposons en intégralité son discours, à la fois rassembleur et sur la défensive.

Monsieur le Premier ministre, Chef du gouvernement; Messieurs les Présidents des Institutions de la République; Mesdames et Messieurs les Ministres; Honorables membres du Bureau de l’Assemblée Nationale; Honorables députés; Monsieur le Maire du District de Bamako; Monsieur le Gouverneur du District de Bamako; Monsieur le Chef d’Etat major Général des armées; Excellences, Mesdames et Messieurs les membres du Corps diplomatique et des représentations consulaires accréditées en République du Mali; Mesdames et Messieurs les Représentants des organisations internationales; Monsieur le Médiateur de la République; Monsieur le Vérificateur Général; Mesdames et Messieurs les Présidents des Partis politiques; Mesdames, Messieurs les Représentants des Ordres professionnels; Madame la Présidente de la Coordination des Associations et ONG féminines (CAFO); Messieurs les Chefs traditionnels, notables et représentants des Chefs de familles fondatrices de Bamako; Messieurs les Chefs ou représentants des cultes religieux; Distingués invités; Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi de rendre grâce à ALLAH Le Tout Puissant qui nous a permis de nous retrouver aujourd’hui.

Je voudrais au nom de l’ensemble des Députés de cette auguste Assemblée et en mon nom propre vous remercier, pour nous avoir fait l’honneur d’être là aujourd’hui, à l’ouverture de la première session ordinaire de notre parlement pour l’année 2012-2013.

En raison de la crise institutionnelle et sécuritaire que connaît notre pays, le mandat des députés de la quatrième législature a été prorogé jusqu’à la fin de la période de Transition.

En cet instant solennel, mes pensées vont vers les victimes civiles et militaires de cette crise et vers nos compatriotes qui souffrent dans leur chair et dans leur âme de l’occupation par la force d’une partie de notre territoire par des groupes armés.

Je voudrais exprimer ma gratitude aux pays membres de la CEDEAO, à l’Union Africaine, à l’Union Européenne, aux Nations Unies et à tous les pays amis du Mali qui œuvrent à nos côtés pour juguler cette grave crise.

Cette session dite budgétaire, sera principalement dédiée au vote de la loi de finance pour l’année à venir, sans faire abstraction de l’examen d’un certain nombre de projets et propositions de lois.

L’agression de notre pays depuis Janvier 2012 par des groupes armés, indépendantistes et djihadistes, a entraîné un coup d’Etat militaire une profonde crise institutionnelle et sécuritaire, qui a engendré à son tour une crise humanitaire et économique.

Aujourd’hui, grâce à la médiation entreprise par la CEDEO appuyée par la Communauté Internationale, de réels progrès ont été accomplis dans le sens du retour à la normalisation de la situation politique. Suite à l’Accord Cadre conclu le 6 Avril entre la junte militaire et le Médiateur de la CEDEAO, les décisions suivantes ont été mises en œuvre: Rétablissement des Institutions de la République qui avaient été dissoutes; Investiture d’un Président de la République par intérim; Nomination d’un Premier ministre et formation d’un Gouvernement d’union nationale.

Je voudrais profiter de cette occasion pour exprimer mes félicitations et mes encouragements à vous-même Mr Le Premier Ministre, ainsi qu’aux membres du Gouvernement.

Monsieur Le Premier Ministre, Honorables invités, l’occasion m’est ainsi offerte aujourd’hui pour rappeler le rôle déterminant qu’a joué l’Assemblée Nationale du Mali dans la prévention et la résolution de la crise que traverse notre pays.

Bien avant la survenue des évènements actuels, l’Assemblée Nationale, préoccupée par la dégradation de la situation sécuritaire, avait organisé des séances d’interpellation du Gouvernement, suivies de résolutions.

Ensuite en novembre 2011, notre Assemblée a mis en place une cellule de crise qui s’est rendue sur le terrain dans les Régions de Gao, Tombouctou et Kidal pour rencontrer d’une part les populations, et d’autre part les groupes lourdement armés venus de Libye, ainsi que le MNLA.

Au terme de cette mission de la cellule de crise, un rapport faisant ressortir l’extrême gravité de la situation sécuritaire dans les régions du nord du Mali a été adopté par l’Assemblée Nationale et remis au Président de la République de l’époque. Ce rapport concluait sur l’impérieuse nécessité d’une action rapide du gouvernement pour tuer la révolte dans l’œuf avant qu’il ne soit trop tard.

Quand la crise a éclaté, l’Assemblée Nationale a pleinement joué son rôle d’Institution démocratique à travers les actes suivants: Adoption d’une Résolution appelant à « l’union sacrée de toutes les forces vives de la Nation, au-delà des considérations partisanes, pour faire face à la rébellion»; Condamnation du coup d’état militaire du 22 Mars dans une déclaration le 24 mars; Adoption d’une Résolution condamnant la Déclaration de la soi-disant indépendance de l’Azawad; Condamnation ferme de l’agression physique du chef d’Etat par intérim par des groupes de manifestants.

Agissant toujours dans le sens de la normalisation, l’Assemblée a mis en œuvre une diplomatie parlementaire active en direction des institutions parlementaires interafricaines, européennes et internationales, pour attirer leur attention sur les graves violations des droits humains commis par les fondamentalistes et les terroristes. Et pour contrecarrer les déclarations mensongères du MNLA sur la situation au Mali.

Monsieur Le Premier Ministre, l’Assemblée a conçu sa propre feuille de route de sortie de crise venant en appui aux dispositions de l’Accord Cadre du 6 Avril 2012. L’Assemblée Nationale a également envoyé une délégation parlementaire à la Cour Pénale Internationale pour l’informer des exactions commises par les rebelles sur l’armée malienne à Aguelhock.

Auparavant, les députés avaient procédé à l’adoption des lois prévues dans l’accord cadre pour la sortie de crise, notamment: Loi portant amnistie générale au profit des membres du CNRDRE et de leurs associés; Loi portant indemnisation des victimes de la guerre, et du mouvement insurrectionnel du 22 mars 2012; Loi portant création du Comité Militaire de Suivi de la Réforme des Forces de Défense et de Sécurité; Loi portant prorogation du mandat des Députés.

Monsieur Le Premier Ministre, Honorables invités, il ne fait aucun doute que l’adoption de ces lois a permis de favoriser la réconciliation nationale, d’apaiser le climat social, d’amorcer le retour au fonctionnement normal des Institutions à l’exception du Haut Conseil des Collectivités.

Faut-il le rappeler, deux missions fondamentales sont assignées au Gouvernement d’Union Nationale: la reconquête des régions de notre pays, qui vivent sous l’occupation des assaillants et l’organisation d’élections générales libres transparentes et crédibles. Si on peut constater aujourd’hui qu’une étape décisive a été franchie dans la résolution de la crise institutionnelle, aucun progrès significatif n’a été fait dans celle de la crise sécuritaire et la restauration de l’intégrité territoriale du pays.

Les groupes armés règnent par la terreur dans les territoires sous occupation. Après les massacres de soldats maliens à Aghelhock ils font maintenant subir aux populations l’application de la Charia : amputations de membres, lapidations, tortures…etc. Ils ont procédé à la destruction de mausolées et de manuscrits de Tombouctou et de Gao, les plus importants du monde noir, dont certains sont inscrits au patrimoine culturel de l’humanité. Détruire un tel héritage reviendrait à nous priver de notre passé, donc nous priver de notre avenir.

M le Premier Ministre, Honorables invités, Honorables députés, l’Assemblée nationale du Mali considère que tous les groupes armées qui ont agressé et occupé notre pays sont des terroristes qui doivent être traités comme tels par tous.

Restaurer l’intégrité territoriale de notre pays doit être la priorité des priorités. Les autorités maliennes, avec l’aide de la Communauté Internationale devront tout mettre en œuvre pour ne pas faire de cette zone occupée un sanctuaire à partir duquel les intégristes disposeraient d’une base sûre pour lancer des opérations contre les pays voisins et le reste du monde.

L’Assemblée Nationale du Mali pour sa part estime: qu’il y a urgence à libérer notre pays occupé aux 2/3, qu’il y a urgence à libérer notre peuple de l’asservissement en plein 21ème siècle!

Monsieur le Premier Ministre, outre la crise sécuritaire et institutionnelle, l’économie nationale est gravement affectée: le budget de l’Etat a été fortement réduit du fait de la baisse des recettes intérieures et de la suspension de certains concours extérieurs. Les secteurs du tourisme, des transports et des BTP sont les plus affectés. Les prix à la consommation sont en hausse et le chômage augmente.

La crise a provoqué une détresse humanitaire extrême au Nord. Les assaillants ont détruit la quasi-totalité des infrastructures socio-administratives, poussé au déplacement de centaines de milliers de nos compatriotes à l’intérieur du pays et contraint d’autres à l’exil dans les pays voisins où ils bénéficient de la solidarité nationale et internationale.

C’est le lieu d’exprimer, au nom de l’Assemblée Nationale, toute ma gratitude à tous ceux qui apportent leur soutien à ces personnes qui vivent dans la précarité.

Mesdames et Messieurs; Distingués invités, ce qui se joue dans l’espace Saharo-sahélien en général et dans le Nord du Mali en particulier est aussi la conséquence des luttes d’influences des grandes puissances et de leurs alliés pour le contrôle des ressources potentielles du sol et du sous- sol de cette vaste zone.

Les indépendantistes et les intégristes ne sont probablement que des instruments conscients ou inconscients de cette stratégie de positionnement pour le partage des richesses de cette zone.

L’Assemblée Nationale fait confiance à notre Armée Nationale pour reconquérir les zones occupées. Elle ne pourra le faire avec succès qu’avec le réarmement moral de ses troupes et lorsqu’elle aura retrouvé son unité.

Dans cet esprit, nous devons trouver la force et la sagesse de régler la question des bérets rouges et des bérets verts, comme l’a dit le Président de la République par intérim dans son allocution du 22 Septembre 2012 « et effacer à jamais ce malheureux épisode de notre mémoire».

L’Assemblée Nationale convaincue que la sécurité dans la zone sahélo-saharienne a une dimension à la fois régionale et internationale, se félicite de l’accord intervenu entre le Gouvernement du Mali, la CEDEAO et la Communauté Internationale relatif à l’envoi de troupes dans notre pays pour appuyer notre armée nationale.

L’Assemblée Nationale reste disponible pour apporter, conformément à ses prérogatives constitutionnelles, sa contribution pour surmonter la crise actuelle. Je lance un appel à tous nos compatriotes pour leur dire: gardons le cap, et centrons tous nos efforts sur les missions essentielles de l’heure, c’est à dire recouvrer l’intégrité de notre territoire, et reprendre le chemin du projet démocratique en organisant des élections libres, transparentes et justes au terme de la transition. Restons dans l’axe de notre histoire commune, celui tracé depuis des siècles par nos ancêtres; c’est-à-dire rester une Nation forte et respectée, un peuple digne et fier dans l’adversité.

Notre pays, riche d’un passé glorieux, a toujours su relever la tête après avoir subi les vicissitudes de l’histoire. Aujourd’hui la crise que nous vivons nous conforte dans notre conviction que les principales aspirations de notre peuple demeurent intactes: vivre ensemble et en paix, sans distinction de races, d’ethnie, ni de religion; vivre en harmonie avec nos voisins; construire une société démocratique ouverte sur le monde.

Ceux qui ont agité l’idée chimérique de l’indépendance de l’AZAWAD sont une infime minorité au sein de la communauté touareg qui reste majoritairement attachée à son pays, le Mali. Quant aux Djihadistes, je voudrais simplement leur rappeler que ce pays était ouvert à l’islam depuis les premiers siècles de la révélation de cette religion de tolérance.

Les empereurs manding et songhoy avaient fait leur pèlerinage aux lieux saints et ont favorisé l’épanouissement d’un islam tolérant sur leurs territoires.

Monsieur le Premier Ministre, Périodiquement notre pays est victime de ces velléités de déstabilisation politique depuis l’indépendance. A chaque phase de changement institutionnel dans notre pays, période pendant laquelle le pouvoir central est vulnérable, certaines officines appuient sur deux leviers. Elles réveillent et attisent l’irrédentisme touarègue au Nord du pays et troublent le climat sociopolitique au Sud du pays, pour torpiller l’avenir du Mali.

Monsieur le Premier Ministre, Honorables Invités, la situation actuelle de notre pays exige que tous les acteurs s’accordent sur l’essentiel à savoir un Mali unifié, un Mali pacifié, un Mali démocratique et républicain, un Mali laïc.

Pour réaliser cet essentiel, la classe politique doit taire ses querelles partisanes, mettre de côté ses intérêts particuliers; le sommet de l’Exécutif doit s’efforcer de livrer le même message en direction de l’opinion; l’Armée nationale doit retrouver son unité et être en relation de confiance avec ses frères d’armes de la sous région; l’entente entre l’Armée et son peuple doit être renforcée par chacun; La gestion rigoureuse des affaires publiques est un devoir absolu pour tous, il en est de même de l’obligation de rendre compte.

L’Assemblée Nationale a toujours été aux côtés des aspirations profondes de notre peuple, elle le sera davantage dans l’avenir en s’impliquant résolument dans la recherche de solutions à la crise Institutionnelle et sécuritaire que traverse notre pays.

Vive le Mali, Un, Indivisible et Laïc! Vive la solidarité Africaine et Internationale! Vive l’Assemblée Nationale du Mali! Je vous remercie.

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