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Signature du document d’Alger : Que vaut un accord sans Kidal?
Publié le jeudi 23 avril 2015  |  L’aube
Cérémonie
© aBamako.com par Momo
Cérémonie de restitution de la fin du cinquième round des pourparlers intercalions d` Alger
Bamako, le 02 mars 2015. Hôtel Radisson Blu. Le ministre DIOP a organisé avec Zahabi et ministre KONATE, la cérémonie de restitution de la fin du cinquième round des pourparlers intercalions d` Alger




« L’accord sera signé le 15 mai prochain à Bamako en présence de la médiation et de la communauté internationale, avec ou sans la Coordination des mouvements de l’Azawad qui regroupe les rebelles qui occupent une partie de la région de Kidal. La CMA n’empêchera pas la signature de cet accord », annonçait le lundi 20 avril 2015, au cours d’une conférence de presse, le ministre des affaires étrangères, de l’intégration africaine et de la coopération internationale, Abdoulaye Diop, chef de la délégation gouvernementale dans les pourparlers inter maliens d’Alger. Alors questions : qui appliquera l’Accord dans la région de Kidal ? Qui organisera là, les élections régionales ? Avec quels candidats ? Qui sera le garant de la mise en œuvre de l’Accord dans l’espace de l’Azawad ? Etc. Autant d’interrogations qui resteront en suspens tant que les rebelles n’auront pas intégralement intégré le processus, paraphé et signé l’Accord d’Alger.

Pauvre Mali ! Avec l’échec des pourparlers inclusifs inter maliens d’Alger à cause du refus de la CMA de parapher l’Accord définitif, le pays s’acheminerait-il inexorablement vers un cycle infernal de violences et la recrudescence de la rébellion au nord ? Les grands analystes politiques répondent, sans hésiter, par l’affirmative. Et pour cause : l’on s’achemine vers la signature de l’Accord sans les principaux auteurs de la rébellion, de surcroît acteurs majeurs de la mise en œuvre du document. L’on ne sait comment cela est-il possible et, surtout, quelles peuvent en être les conséquences immédiates puis à moyen et long terme pour le Mali.

Depuis le paraphe manqué de l’Accord du 1er mars par la Coordination des mouvements armés de l’Azawad le 15 avril dernier à Alger, l’opinion a conclu à l’évidence que les rebelles ne signeront pas le document en l’état, comme ils l’avaient si bien dit.

A Alger où ses membres étaient conviés pour apposer leur paraphe au bas de l’Accord, paraphé par le gouvernement et la Plateforme depuis le 1er mars, la CMA y était représentée par des responsables de seconde zone qui n’avaient point qualité à décider ou à agir. La rencontre d’Alger s’est ainsi terminée en queue de poisson, les rebelles ayant campé sur leur position de rouvrir les négociations. Leur principale exigence, c’est la reconnaissance de l’Azawad comme une entité politique et juridique…et non une réalité socioculturelle, mémorielle et symbolique…

De leur côté, le gouvernement malien et la médiation sont restés inflexibles face à cette exigence, consacrant du coup l’échec des pourparlers.

Néanmoins, au sortir de ces journées stériles, la médiation a pris une décision capitale, invitant toutes les parties en conflit à signer l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali lors d’une cérémonie officielle prévue le 15 mai prochain à Bamako.

La médiation souligne que le processus de paix en cours doit se poursuivre de la manière qui puisse consolider les acquis jusqu’ici obtenus. A ce titre, elle « invite et engage tous les mouvements politico-militaires, parties à la déclaration d’Alger du 9 juin 2014 et à la plate-forme d’Alger du 14 juin 2014 et/ou toutes les parties signataires de la feuille de route du 24 juillet 2014 à procéder à la signature de l’accord à l’occasion de la cérémonie qui sera organisée le 15 mai 2015 à Bamako à cette fin».



La signature du 15 mai…

Dans un communiqué publié par le ministère des Affaires étrangères algérien, la Médiation, souligne que la signature de l’accord d’Alger ouvrira la voie à la mise en œuvre des engagements pris. Elle veillera à ce que la mise en œuvre de l’accord soit effective et complète, selon des modalités et un calendrier d’application à convenir conformément aux dispositions de l’Accord. La Médiation menace aussi de saisir les instances internationales au sujet de toute attitude ou action de nature à mettre en péril le processus de paix en cours. En outre, le texte ajoute que les dispositions nécessaires seront prises pour permettre et faciliter à toute personne et entité désireuse de marquer leur contribution à la réalisation des objectifs de l’accord d’apporter leur soutien direct et formel à l’accord. Enfin, la médiation conclut que «le paraphe de l’accord par tous les membres de la médiation et d’autres partenaires du Mali, ainsi que le soutien unanime dont il bénéficie au plan international, constituent, en eux-mêmes, un engagement juridico-politique de la communauté internationale en faveur d’une mise en œuvre intégrale des engagements convenus ». Par conséquent, elle « s’emploiera à faire en sorte que ces engagements soient effectifs».

Ce communiqué de la Médiation a été saisi comme un trophée par le président de la République et la délégation gouvernementale des pourparlers inclusifs d’Alger pour faire la promotion de la signature du 15 mai prochain.

Le président de la République du Mali, a saisi l’aubaine de la 17ème Conférence des chefs d’Etats du Cilss pour faire passer son message sur l’Accord d’Alger. « Personne n’a dit que cet accord est un bon accord. Nous avons toujours des points d’amendements. Mais lorsqu’on comprend le sens profond du terme négocier, l’on comprendra qu’il y a des compromis. Pas de compromission ! ». Ensuite, IBK tend la main « aux compatriotes égarés » afin qu’ils s’engagent dans la dynamique d’une paix définitive, avant de les inviter à la table de la signature finale de l’Accord.

Quant au ministre des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop et son collègue en charge de la reconstruction des régions du nord, Hamadoun Konaté, ils ont aussitôt organisé une conférence de presse dès leur retour d’Alger. C’était le 20 avril dernier.

Selon le premier, chef de la délégation malienne, l’Accord sera signé le 15 mai prochain à Bamako en présence de la médiation et de la communauté internationale, avec ou sans la Coordination des mouvements de l’Azawad. Et que tous ceux qui seront contre l’application dudit accord s’exposeront à des sanctions.

«La position du gouvernement est claire : l’étape des discussions est terminée. Mais, nous avons constaté avec beaucoup de déception que nos frères n’ont pas jugés opportun, à ce stade, malgré la situation critique que le pays vit, de se joindre à ce document que l’ensemble de la communauté internationale juge comme étant un compromis, certes, imparfait, mais équilibré ; qui est la seule voie qui nous conduira vers une paix définitive », se tape-t-il la poitrine. Avant d’ajouter : « L’unité du pays est la chose la plus importante. Nous avons besoin de cette paix. Le gouvernement prend et prendra toutes les mesures pour assurer la sécurité des personnes et des biens ».



Un accord sans la CMA

Quant au ministre Konaté, il s’est aventuré dans les réponses à moult interrogations des journalistes. A savoir : Peut-on parler d’accord en signant le document d’Alger sans la CMA ? Est-ce le Mali ne s’embrasera pas à nouveau si l’accord n’est pas signé par la CMA ? Quel sort à l’application de l’accord dans un tel cas de figure?

Pour Hamadoun Konaté, il n’y a pas lieu de s’alarmer si une partie, minoritaire, n’a pas paraphé l’accord. Il rappelle que la Médiation a décidé que le processus ne sera pas pris en otage. « Ceux qui ne signeront pas cet accord seront considérés comme des ennemis de la paix et seront traités comme tels. Rien n’empêchera l’application de l’accord. Ce n’est pas à nous de nous poser la question, c’est à la Cma de se demander qu’est-ce qui va se passer si nous, nous n’adhérons pas à ce document. La signature de cet accord permettra de mettre fin à cette permissivité », entonne le ministre en charge de la solidarité.

Pourtant, telle n’est pas la conviction de la majorité de l’opinion nationale et internationale et des observateurs avertis. Pour eux, la non adhésion du Mnla, du Hcua et du Maa à l’Accord entraînerait deux graves conséquences.

Primo, elle risque de déclencher un autre cycle de violences ou accentuerait les actes terroristes en cours, non seulement au nord du Mali, mais aussi à travers le pays. C’est inévitable.

Secundo, la mise en application des dispositifs de l’accord va buter sur des obstacles quasiment infranchissables. Parce que tout simplement, ces sont ces groupes armés réfractaires qui contrôlent le nord du pays, particulièrement la région de Kidal, principal objet de la rébellion.

Exemple concret : au plan institutionnel, il est dit que le président de l’assemblée régionale est élu au suffrage universel direct. Il est également le chef de l’exécutif et de l’administration de la région. Quel Malien peut se présenter à Kidal, une région entièrement contrôlée et partagée entre le Mnla, le Hcua et le Maa.

Mieux, au vu de l’Accord, tout l’arsenal institutionnel et la réorganisation territoriale ne peut se faire sans la CMA.

Il en est de même des aspects sur le financement, les moyens, les questions de défense et de sécurité, ainsi que le développement socioéconomique et culturelle, sans oublier les questions humanitaires.

Sékou Tamboura
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