De nouveau donné pour mort : Belmoctar trahi par ses propres lieutenants

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Publié le mardi 16 juin 2015 | L’Indépendant

© Autre presse par DR
Le chef islmaiste Mokhtar Belmokhtar

Celui qui semait la terreur au nord du Mali durant l'occupation narco-terroriste, Moctar Belmoctar, aurait été tué dans un raid meurtrier mené par des forces spéciales US dans la nuit du samedi 13 au dimanche 14 juin.

Le jihadiste Belmokhtar
Moctar Belmoctar alias Khaled Abou El Abass
Il a été localisé à Ajdabiya, à environ 160 km à l’Ouest de Benghazi, chef-lieu de l’Est Libyen. Il y tenait une réunion avec d’autres chefs de groupes extrémistes, dont des membres d’Ansar Asharia, une organisation classée terroriste par l’ONU. Il convient de rappeler que ce n’est pas la première fois que Belmoctar est donné pour mort, chose qui justifie sans doute cette prudence de l’administration américaine à communiquer sur son sort.

Selon un communiqué du gouvernement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, six Libyens ont été tués au cours de ces frappes de l’armée américaine. En plus d’eux, il y avait également le leader du mouvement des » Signataires par le sang » proche d’AQMI, l’Algérien Mokhtar Bel Mokhtar dit le Borgne. Par ailleurs, un Yéménite et un Tunisien ont aussi trouvé la mort au cours de ce raid. Lequel a donné lieu à de nouvelles tensions, car des terroristes d’Ansar Asharia ont tenté de prendre le contrôle de l’hôpital de la ville – aux mains de milices locales – où certains de leurs éléments blessés ont été transportés. Une situation qui a entrainé la mort d’un élément du côté d’Ansar Asharia et sept du côté des milices tribales. L’armée américaine, tout en confirmant l’opération, n’a donné aucun bilan de ce raid meurtrier. Le gouvernement de Tobrouk a salué l’opération tout en indiquant qu’elle s’est déroulée de concert avec lui. Selon certains observateurs, ce raid de l’armée américaine est différent de celui ayant conduit à l’arrestation à Tripoli, en 2013, de Abou Anas Al-Libi, qui décèdera quelques mois plus tard. On se souvient également de l’arrestation musclée lors d’un raid des forces spéciales américaines, en juin 2014, à Benghazi, du terroriste Ahmed Abu Khattala.

Pour certains, la prudence de l’administration américaine à confirmer l’information s’explique par le fait qu’une annonce similaire avait déjà été faite lors du déclenchement de l’Opération Serval par l’armée française. Avant que le borgne ne réapparaisse.

Rappelons que c’est au début des années 90 que le Borgne s’est révélé au grand jour en combattant aux côtés des Talibans en Afghanistan où il a perdu son œil droit. Cependant, c’est au début des années 2000 qu’il s’est imposé comme l’un des plus célèbres leaders d’AQMI en dirigeant la Katiba des Moulathamine (les Enturbannés). Il a acquis sa réputation de « Mister Marlboro » en raison des contrebandes de cigarettes auxquelles il se livrait dans la bande sahélo-saharienne. Il aurait commandité l’assassinat de quatre Français en Mauritanie en décembre 2007 et la prise en otages de deux Canadiens en 2008, trois Espagnols et deux Italiens en 2009. Au début de la rébellion au nord du Mali en mars 2012, Belmokhtar a séjourné pendant trois semaines en Libye pour acheter des armes. Entre avril et juin 2012, il est vu à au moins deux reprises à Gao et Tombouctou, aux côtés d’Iyad Ag Ghaly, chef touareg des islamistes d’Ansar Dine. A la fin de 2012, il créa sa propre unité combattante, les » Signataires par le sang « , pour s’affranchir de la tutelle d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) avec laquelle il était entré en dissidence en octobre 2012.

En janvier 2013, il avait commandité la prise d’otages meurtrière du complexe gazier d’In Amenas, dans le sud-est de l’Algérie où au moins 37 Occidentaux et 29 assaillants ont péri. En mai 2013, il revendique également des attaques contre l’armée nigérienne à Agadez et le site français d’uranium d’Areva à Arlit qui font au total une vingtaine de morts. La fusion de son mouvement au MUJAO en août 2013 pour créer le groupe terroriste Al-Mourabitoune lui permettra de lancer d’autres attaques au nord du Mali, notamment contre des civils et des casques bleus onusiens.

Recherché par plusieurs pays, sa tête a été mise à prix pour cinq millions de dollars par les Etats-Unis en juin 2013. Mais, en raison de l’étau qui continuait à se resserrer autour des terroristes, il avait trouvé refuge dans le sud-libyen d’où il menait des attaques. Son mouvement a connu de nombreuses dissensions en raison de la proximité de certains de ses lieutenants à l’Etat Islamique (EI) qui étend de jour en jour ses tentacules dans le Sahel dans le but d’universaliser le Jihad et le porter en Afrique. Raison pour laquelle il n’est pas exclu que sa localisation par les Américains soit le fruit d’une trahison issue d’une discorde.

Reste à attendre que cette annonce soit confirmée afin que le Sahel soit débarrassé de l’un de ses plus dangereux criminels.

Massiré Diop