Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aBamako.com NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Stabilisation du Mali : De nouvelles menaces et des incertitudes planent
Publié le jeudi 25 juin 2015  |  Le Prétoire




La mise en place d’un comité de suivi de l’accord de paix dont la signatures a été parachevée par la CMA, une vidéo publiée sur un site internet mauritanien, la visite éclair d’un officiel français au Mali, l’appel au secours du président malien à la Minusma, des dissensions au sein des mouvements armés. Tous les signes extérieurs de nouvelles menaces sont là.

Aqmi a publié, il y a quelques heures, une vidéo dans laquelle on voit deux otages qu’ils détiennent depuis fin novembre 2011. Il s’agit d’un Sud-Africain, Stephen Malcom Mc Gown, et d’un Suédois, Johan Gustafson, enlevés à Tombouctou depuis maintenant plus de trois ans. La projection de cette vidéo sur un site internet mauritanien intervient quelques heures à peine après la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation par les derniers récalcitrants de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), le samedi 20 juin, à Bamako. Accord dont le comité de suivi a été mis en place le même jour pour assurer la mise en œuvre de son contenu. A cet effet, dès le début de cette semaine, le président de la République a officiellement sollicité l’aide de l’Organisation des nations unies à laquelle il demande de renforcer et de remanier le mandat de la Mission multidimensionnelle des nations unies pour la stabilisation du Mali, déployée dans ce pays depuis 2013.

Collaboration Barkhane-Minusma

En voyage éclair au Mali, en début de semaine, le ministre français de la défense, Jean Yves Le Drian, a sollicité une collaboration beaucoup très étroite entre la force française Barkhane, qui a remplacé la force Serval en étendant ses activités de lutte antiterroriste à une grande partie du Sahel (Mali, Niger, Mauritanie, Burkina Faso, Tchad), et les troupes onusiennes déployées pour la stabilisation du Mali.

Le même jour, à Kidal, un comité de crise est né pour contester l’Accord et affirmer sa volonté de s’opposer à sa mise en œuvre. Ce comité de crise est composé en grande partie par la jeunesse de cette région et pourrait bientôt être rejoint par les éléments armés des groupes rebelles touaregs et arabes.

Non loin de là, dans les régions de Gao et de Tombouctou, ce sont les éléments des mouvements républicains d’autodéfense qui sont en train de se poser des questions sur ce que leurs chefs ont reçu en contrepartie de la signature de l’Accord. Des mallettes n’auraient-elles pas été distribuées aux chefs nomades comme sédentaires ? Certains de ces chefs n’auraient-ils pas « oublié » de partager avec les autres ? A ces deux questions, on est tenté de répondre par l’affirmative lorsqu’on se penche quelque peu sur les dissensions voire scissions au sein de certains groupes de la Coordination et de la Plateforme. La dernière et sans doute la plus spectaculaire est sans aucun doute la brouille entre le président de la Coalition des peuples de l’Azawad et son plus fidèle lieutenant. Le second a pris la liberté, le 15 mai dernier, de signer au nom de la CPA l’accord pour la paix et la réconciliation alors que la CMA, à laquelle elle appartient, n’avait pas encore donné son aval. Avant d’exclure de la CPA son président-fondateur, lequel avait eu la même réaction quelques jours plus tôt.

Désapprobation de Mnla-France

Une autre réprobation, et pas des moindres, est venue de l’Occident. De la part d’un cadre du Mnla dont il est l’un des principaux porte-paroles et animateur pour la branche européenne. Moussa Ag Assarid, dans un communiqué rendu public, a réprouvé la signature de l’Accord au motif que leurs principales revendications n’ont pas été prises en compte. Et que dire de l’absence du président de la CMA et du Mnla à la cérémonie de signature de l’Accord, le 20 juin ?

Ces différents faits, mis bout à bout, ont le mérite de révéler les chemins tortueux sur lesquels les autorités maliennes et la communauté internationale se sont embarquées.

Si la France et le Mali ont compris, en effet, que la signature de cet accord ne garantit en rien la paix dans un pays qui reste exposé aux menaces croissantes des jihadistes, et qu’il est plus que nécessaire de conjuguer les efforts de tous les intervenants, ces deux pays ne tarderont pas à comprendre que la stratégie de l’achat de signature et l’adhésion monnayée au processus de paix sont des bombes prêtes à l’emploi, parce que leurs dirigeants n’ont pas tiré toutes les leçons des précédentes crises.

Dans les années 90, les principaux responsables des mouvements rebelles ont reçu de véritables magots, causant la frustration des combattants sur le terrain, qui n’ont eu pour seule consolation que d’être casés dans les rangs des forces armées et paramilitaires. Mais ces éléments auront eu plus de chance que ceux du Mouvement populaire Ganda Koy, car si les premiers responsables du MPGK ont eu emploi, honneurs et privilèges, la troupe s’est vue octroyer quelques sommes dérisoires pour aller faire du commerce. Comme si devenir commerçant s’improvisait.

Des centaines de milliards détournés

Longtemps après, c’est le partage de l’argent qui avait été à la base de l’émiettement du Mouvement populaire Ganda Koy, de la création de nouveaux mouvements d’autodéfense, de leur regroupement en Coordination des mouvements et forces patriotiques de résistance puis de l’éclatement de cette dernière en plusieurs Cmpfr.

De 2002 à 2012, le président Touré a cru bien faire en arrosant de largesses les leaders communautaires et en laissant développer leurs trafics en tous genres. Il croyait contenir les risques de rébellion tout en sachant que les centaines de milliards de F Cfa injectés pour le développement des régions du nord prenaient des voies impénétrables. En 2006 et 2012, personne n’a été surpris quand de jeunes touareg ont pris des armes contre le pouvoir central sous le prétexte que leurs régions n’étaient pas développés. Si ATT a pu calmer les ardeurs des rebelles de 2006 en rétribuant largement leurs parents, c’est à IBK qu’est revenue la charge de calmer ceux de 2012. Apparemment, il s’en est bien tiré, en signant un accord avec ces mêmes responsables, qu’ils soient Songhay, Touareg ou Arabes.

Mais les autorités nationales et la communauté internationale, même si elles ont raison de dire que l’extrémisme violent, la criminalité transnationale organisée et le banditisme continueront de menacer gravement les efforts de stabilisation en cours, elles ne devraient pas oublier les nouvelles menaces qui naitront de la manière dont la signature par toutes les parties a été obtenue.

Cheick TANDINA
Commentaires