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SOS pour Mme Sangaré Maïmouna Bamba : La veuve du Préfet de Bourem assassiné par les terroristes du Nord Mali raconte son drame
Publié le vendredi 14 decembre 2012  |  Le Zenith Bale




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Maimouna Bamba, membre de la grande famille Bamba de Medina Coura, est l’épouse de Mohamed Sangaré, le Préfet de Bourem froidement abattu par balles, le 1er avril dernier à Gossi, par les terroristes du Nord Mali alors qu’il fuyait, avec les membres de sa famille, la ville de Gao tombée entre les mains de divers groupes d’occupation. Au cours de la fusillade, Maimouna Bamba fut grièvement blessée à la jambe droite et à la hanche et elle perdit un de ses fils jumeaux, Alassane Sangaré, mortellement touché à la tête. Il n’avait que 14 ans. De longs mois après son drame, Mme Sangaré se sent aujourd’hui abandonnée de tous, surtout par le commandement, le corps d’origine de son mari, et les autorités de la transition.

Il est 21heures ce dimanche 1er avril 2012. Nous sommes à l’entrée de Gossi, localité située à quelques centaines de km de Gao, naguère le quartier général de l’armée malienne où s’était réfugié Mohamed Sangaré avec sa famille après la prise de Bourem dont il était le Préfet. Par une coalition de jihadistes, de narcotrafiquants et d’indépendantistes avec pour dénomination commun le crime organisé.

Le véhicule de fonction, une Toyota double cabine, du Préfet de Bourem Mohamed Sangaré, avec à bord, naturellement, le Préfet lui-même, sa femme et ses trois enfants en plus du chauffeur, s’immobilise à l’approche de ce qui ressemble à un check point. » J’espère bien que c’est l’armée. De toutes façons garde ton calme » confie M. Sangaré à sa femme Maimouna Bamba avec une certaine appréhension à la vue d’un 4X4 surmonté d’une automitrailleuse accompagné d’un petit véhicule » Ne t’en fais pas, je suis très calme » est la réponse de Mme Sangaré. Les maîtres des lieux, une dizaine d’hommes armés jusqu’aux dents, font descendre les occupants de la Toyota du Préfet Mohamed Sangaré qui remet sans résistance la clé de son véhicule à ses agresseurs à leur demande. Certains d’entre eux sont noirs.

Le Préfet et les membres de sa famille, sortis du véhicule, seront soigneusement alignés par les hommes en armes sur le bas-côté de la route, loin de la Toyota. L’on ne tardera pas à comprendre les motivations de ce manège. Mystère de la chambre jaune : le chauffeur, un Sonrhaï de Gao, parvient à s’éclipser. Entre temps, un des hommes en arme, un jeune noir l’air éméché pour ne pas dire ivre, à en juger en tout cas, par sa langue pâteuse, dans un bambara teinté d’un fort accent sonrhaï, émet l’ordre de remettre sa clé au » Vieux « . Cette épithète affectueuse désignant le Préfet de Bourem, cela en présence d’un autre jeune noir dont le fusil touche pratiquement le sol. Il n’a pas encore 18 ans estime Maimouna Bamba.

Sur ces entrefaites, un autre homme en arme débite une tirade en tamasheq et c’est là que tout bascule. La BJ des assaillants surmontée d’une automitrailleuse auparavant stationnée en retrait dans la pénombre, entre en action. En s’ébranlant lentement vers ses victimes l’engin de la mort se met à tousser à plusieurs reprises. Fauchés par les balles, apparemment des 12,7mm, Mohamed Sangaré et les membres de sa famille s’écroulent dans un nuage de poussière. Tout s’est passé comme si en arrosant leurs victimes de balles, les maîtres des lieux ont voulu anéantir la famille de Mohamed on ne sait pour quelle obscure raison. Seul Bourama Sangaré dit Boua, le frère aîné des jumeaux, sortit indemne de la fusillade.

Toujours est- il que Mme Sangaré Maimouna Bamba soupçonne fortement le chef de peloton de la gendarmerie de Bourem, un Touareg bon teint qui avait déserté des rangs de l’armée peu avant la prise de cette localité par les bandes armées qui occupent actuellement le nord de notre pays. Mme Sangaré croit, dur comme fer, avoir formellement reconnu le timbre de la voix de celui qui a donné, en tamasheq, l’ordre de les exécuter.

La raison ? Il n’aurait jamais digéré le fait d’être remplacé par un subalterne après sa désertion. C’est ce que croit Mme Sangaré. En somme, une vendetta personnelle. Dans tous les cas, leur forfait perpétré, les bandits armés ont quitté précipitamment les lieux redoutant certainement la présence proche de l’armée malienne.

Au cours de la fusillade, Alassane Sangaré, un des fils jumeaux de Mohamed, tombe pour ne plus se relever. Mortellement touché à la tête. Il n’avait que 14 ans. Victime de la bêtise humaine. Son frère jumeau, Fousseyni Sangaré, a eu plus de chance même s’il a été grièvement blessé de trois balles à la cuisse, au dos et à la hanche. Sa mère Maimouna, elle, a reçu le même nombre de balles à la jambe droite et au flanc gauche. Quant à Mohamed Sangaré lui-même, il a aussi été grièvement blessé, il n’est pas mort sur le champ mais il succombera plus tard des suites de ses blessures.

Le ciel venait de s’écrouler sur la tête de Mme Sangaré.

Nonobstant le drame qui venait de la frapper Maimouna Bamba gardera sa lucidité. En dépit de ses blessures profondes et malgré le sang qui coulait à flot de ses veines, le premier réflexe de Mme Sangaré fut d’aller chercher du secours pour évacuer les membres de sa famille sur un centre de santé. Elle se souvint que la veille, avant d’arriver à Gossi, elle avait aperçu à une quinzaine de km des éléments de l’armée malienne. Aussi, en dépit de ses graves blessures, Maimouna Bamba marcha seule dans la nuit, de 21 heures jusqu’à 5 heures du matin. Elle était en train de vivre la nuit la plus longue et, sans doute, la plus éprouvante de son existence. Arrivé à l’endroit où elle avait remarqué la présence des éléments de l’armée, soit environ à une quinzaine de km du lieu du drame qu’elle a vécu, elle se mit à la recherche du chef de l’unité en question qu’elle finit par retrouver.

Ensemble et sous la protection d’un BRDM 5 et d’un pick up muni d’une mitrailleuse lourde, ils se mirent en route pour Mopti où ils arrivèrent aux environs de 18 heures. C’est là que Maimouna reçut les premiers soins en compagnie de l’un de fils ses jumeaux en la personne de Fousseyni Sangaré. Les corps de son mari Mohamed Sangaré, qui décéda des suites de ses blessures et de son fils Alassane, mort sur le champ, seront enterrés à Gossi par des bonnes volonté. Après avoir passé deux jours à Mopti, Mme Sangaré et ses enfants, à savoir Fousseyni et Bourama Sangaré dit Boua, le frère aîné des jumeaux qui sortit indemne de la fusillade, rallièrent Bamako où ils ont poursuivi leurs soins.

Le hic, c’est que Mme Sangaré, après son drame, se sent aujourd’hui abandonnée par tous, surtout des autorités compétentes. En effet, le seul geste qu’elle dit avoir reçu de ces autorités fut la visite à son domicile à Tiébani (quartier périphérique de Bamako) effectuée par une délégation comprenant le Gouverneur de Gao venue présenter les condoléances à la famille.

A l’occasion, la délégation a offert 200.000 FCFA (deux cent mille francs) à la veuve Sangaré. Après cette visite, ce fut le black out total de la part des autorités. Tant du côté du commandement, le corps d’origine de Mohamed Sangaré, que du côté des responsables politico-administratifs de la transition.

Pour la petite histoire, Mme Sangaré était obligée de débourser 50.000 FCFA (cinquante mille francs CFA) tous les cinq jours et cela pendant trois mois pour faire face aux frais nécessités par les soins. Faites le calcul ! Des frais payés principalement par l’époux de l’une des filles de Mme Sangaré et subsidiairement par des bonnes volontés venues présenter leurs condoléances à la famille. Pour ne rien arranger à ce sombre tableau, après avril et mai le paiement des salaires de Mohamed a été définitivement arrêté. Alors que Mme Sangaré Maimouna Bamba attend encore le paiement du capital de décès de son mari. Une situation d’autant plus difficile à tenir qu’à la charge de Mme Sangaré se trouvent cinq enfants orphelins de père dont le miraculé Bourama Sangaré qui a fêté ses 15 ans le 28 octobre dernier et qui fréquente actuellement l’école fondamentale de Tiébani. Et que les assassins de son mari et de son fils Alassane, après leur crime, ont emporté tous les biens de leur victimes, à savoir le véhicule et tout ce qu’il contenait : meubles, habits, téléphones portables, argent et autres effets de valeur » Y’a-t-il plus victime de la crise du nord que moi qui ai perdu son mari et son fils et tous ses biens ? Un mari assassiné de façon tragique dans l’exercice de sa fonction ? Après vingt ans de bons et loyaux services pour sa partie quel cruel sort pour cet administrateur chevronné qui s’en faisait toujours pour les autres même au plus fort de la crise ? » se demande t-elle au bord des larmes.

Mme Sangaré n’exclut plus d’intenter un procès en bonne et due forme contre l’Etat malien.

Son souhait le plus ardent à l’heure actuelle : aller à Gossi, dès que la situation le permettrait, se recueillir sur les tombes de son mari et de son fils Mohamed et Alassane Sangaré

Yaya SIDIBE

Journaliste indépendant

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