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Mort de Doudou N’Diaye rose : Le Sabar orphelin de son talentueux génie
Publié le samedi 29 aout 2015  |  Le Reporter




Le tambour ne va plus résonner. Pas en tout cas de la même manière que sous les doigts de fée de Mamadou N’Diaye, plus connu comme Doudou N’Diaye Coumba Rose. Le percussionniste sénégalais est mort le mercredi 19 août 2015 des suites d'un malaise dans la capitale sénégalaise. Il avait vu jour le 28 juillet 1930 à Dakar. Issu d'une famille de griots, il a consacré sa vie et sa passion au tambour.

«Doudou Ndiaye Rose était grand mais humble et très accessible» ! La confession est de Baaba Maal, star de la musique sénégalaise. C’est un baobab du Sénégal et de l’Afrique qui s’est ainsi couché. La preuve de cette notoriété acquise à jamais, est que le président Macky Sall a écourté ses vacances à l’annonce du décès de Doudou N’Diaye Coumba Rose. Ce qui se comprend aisément, car, comme témoignait sur les réseaux sociaux l’ancien Directeur général de l’Apej, Modibo Kadjoké, «Doudou N’Diaye Rose était une autre bibliothèque africaine... Une perte immense pour l'Afrique et le monde». On comprend alors que ce soit un monde fou qui ait assisté à la levée du corps de l’artiste le jeudi 20 août 2015, à la mosquée Abass Sall, aux HLM 1 de Dakar.

Selon de nombreux témoignages, «la mosquée était pleine à craquer. Dès le matin, la famille, les parents, les amis, les fans, la presse nationale et internationale, tous ont pris d’assaut les lieux et alentours, pour assister à cette cérémonie funéraire et accompagner le virtuose des tambours, à sa dernière demeure». La foule était tellement immense que les forces de sécurité ont eu du mal à cadrer la cérémonie. «Ici, c’est la tristesse et la consternation qui se lisent sur les visages. Si d’aucuns ont essayé de retenir leurs larmes, d’autres, par contre, n’ont pas pu le faire à cause de la grande tristesse», raconte un confrère sénégalais.

Les obsèques ont enregistré la présence du Premier ministre, Mohammad Dionne, représentant le président Macky Sall. Il était accompagné du président de l’Assemblée nationale, des ministres, des députés, d’élus locaux, d'autorités religieuses et coutumières, des notables... À l’issue de la prière mortuaire, Doudou Ndiaye Rose a été accompagné en sa dernière demeure par un cortège en file indienne au cimetière musulman de Yoff. Ainsi, s’en est allé celui qui était surnommé le «mathématicien des rythmes» ou encore le «Maître du sabar», voire «Grand tambour major du Sénégal». Il a été terrassé par la grande faucheuse quelques semaines après avoir soufflé sur ses 85 ans bougies.

Une notoriété à la hauteur d’un talent immense
La réputation de ce talent n’a jamais été surfaite, car, seul, il pouvait diriger une centaine de batteurs ou de percussionnistes. Il faisait aussi figure de pionnier africain des groupes féminins avec notamment «Les Rosettes», une formation composée de femmes de sa famille et fondée en 1981. Issu d’une famille de griots wolof, le grand-père de Doudou était percussionniste. Une voie que son père n’a pas voulu suivre, préférant exercer comme comptable.

C’est ainsi que Doudou se voit, à son corps défendant, interdit de jouer du tambour à l’enfance. «Même si j’ai appris le métier de plombier que j’ai exercé jusqu’à l’indépendance, je n’ai jamais cessé de jouer du tam-tam, me renseignant sans arrêt sur la signification de tous les rythmes», racontait Doudou dans un ouvrage biographique écrit par Tafsir Ndické Dieye en 2005 et intitulé «Doudou N’Diaye Rose, le grand tambour major du Sénégal». Il ajoutait : «à l’époque, à Dakar, il y avait chaque jour des cérémonies de mariage, de baptême… Sur le chemin de l’école, j’entendais le tam-tam... C’était fini pour moi : je suivais les sons portés par le vent, je courais, je cherchais jusqu’à trouver la maison où il y avait la fête. En grandissant, la famille a fini par me laisser tranquille».

Son instrument de prédilection est le sabar traditionnel, un tambour sur pied avec une membrane en peau de chèvre, ainsi que ses nombreuses variantes qu’il double fréquemment pour en renforcer la puissance.

«Tu seras un grand batteur», lui avait prédit Joséphine Baker qui l’avait remarqué lors d’un séjour au Sénégal en 1959. Une rencontre à laquelle Doudou a fait allusion dans un portrait publié par le quotidien français, Le Monde, en 2005. C’est surtout en avril 1960, avec les fêtes de l’indépendance du Sénégal, que la carrière de Doudou N’Diaye Rose commence véritablement. À la requête du président Léopold Sédar Senghor de donner à cette fête symbolique une coloration africaine, Doudou compose le rythme des majorettes qui défilent au son d’un orchestre sabar d’une centaine d’instrumentistes.

Une conquête aisée du showbiz
Senghor, dont il partage les idéaux de la Négritude, lui envoie après «une lettre de seize pages» pour le féliciter. Nommé Professeur de rythmes à l’Institut national des arts de Dakar et Tambour major du Ballet national du Sénégal, Doudou N'Diaye Rose est découvert en Europe, notamment en France, au milieu des années 80. Il était alors à la tête d’un groupe d’une cinquantaine de batteurs. À cette période, il a vécu des expériences atypiques avec de nombreux musiciens comme Peter Gabriel, Dizzy Gillespie ou encore Jacques Higelin. Mieux, le «Prince» du rythme a fait la première partie des Rolling Stones, accompagné de Maurice Béjart, France Gall lors de concerts et participé à la bande originale de la «Dernière Tentation du Christ» de Martin Scorsese. Produit par Eric Serra en 1992 et enregistré au Sénégal, Djabote est sans doute son album le plus emblématique.

Une œuvre qui a été unanimement accueillie par les critiques comme «une monstruosité rythmique pleine d’allant et de puissance, un diamant mat à la scansion brillante». Pas surprenant pour ceux qui connaissent l’artiste. «Tout ce que j’entreprends, c’est dans le seul but de faire connaître mon pays», expliquait Doudou, lui qui a composé la rythmique de l'hymne national du Sénégal et qui avait été élevé au rang de «Trésor humain vivant» par l'Unesco.

Reconnaissance unanime des artistes et des politiques
C’est donc fort naturellement que la mort de Mamadou N’Diaye alias Doudou N’Diaye Rose a ébranlé le Sénégal, au point d’amener le président Macky Sall à écourter ses vacances pour regagner précipitamment son pays. Ainsi, c’est avec une peine non dissimulée que Youssou Ndour a apporté son témoignage sur celui qu’il a toujours considéré comme son père. Selon «You», «Doudou Ndiaye Rose est celui qui a ouvert toutes les portes et qui a permis à la culture sénégalaise de s’ouvrir au monde». Le leader du Super Etoile de Dakar n’a pas manqué de rappeler que lorsque «Doudou Ndiaye Rose voyageait, aucun autre artiste n’en avait les moyens encore moins la possibilité. Mais Doudou Ndiaye s’est toujours montré disponible envers ses fils et petits-fils du monde culturel».

«C’est une grande perte pour le Sénégal, le monde entier, la musique et au-delà. Depuis les indépendances, Doudou Ndiaye Rose a joué son rôle et il l’a rempli. Il était grand mais humble et très simple, accessible à tout le monde. Et nous avons beaucoup retenu de lui», a témoigné Baaba Maal lors de la levée du corps de Doudou Ndiaye Coumba Rose le 20 août 2015. «Lorsqu’un membre de la communauté disparaît, homme ou femme, apparaît tout de suite toute la trajectoire de sa vie, c’est-à dire le film de la ligne de son existence. Cette existence se fonde sur la foi, les vertus et la morale. Elle se fonde aussi sur le travail et sur le ou les résultats obtenus par celui qui vient de perdre la vie...», a aussi déclaré Moustapha Niass, président de l’Assemblée nationale du Sénégal. «Un grand Monsieur est parti, qui a servi son pays, la culture sénégalaise, les valeurs de notre pays que nous portons tous», a ajouté leader de l’Alliance des forces du progrès (AFP).

Une immense perte. Un baobab s’est couché sans que la «Grande bibliothèque» ne brûle car, humble et ouvert, Doudou N’Diaye Rose a largement partagé son savoir et son expérience avec des héritiers à travers le Sénégal, l’Afrique voire le monde pour perpétuer et sans cesse rénover son œuvre gigantesque ! C’est cela aussi un génie ! Repose en paix, dans la grâce éternelle du Tout-Puissant, Mathématicien des rythmes, Maître du sabar et Grand tambour major du Sénégal !
Moussa BOLLY
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