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L’accord pour la paix : Les « Feuilles mortes » du Nord
Publié le samedi 5 septembre 2015  |  Les Echos
Cérémonie
© aBamako.com par A S
Cérémonie de signature de l`accord de paix par la CMA
La CMA a signé l`accord de paix et réconciliation le 20 Juin 2015 à Bamako




Même s’il ne l’admet pas volontiers, le président de la République semble perdu dans le jeu politique entourant la crise du septentrion. Avant de brandir son arme diplomatique, Ibrahim Boubacar Kéita ferait mieux de prendre d’abord des décisions courageuses au niveau interne.

Le président de la République veut s’affirmer sur le terrain diplomatique. Ibrahim Boubacar Kéita vient de séjourner en Algérie et au Niger. Ces visites ne sont pas fortuites. Elles interviennent à un moment où l’accord pour la paix et la réconciliation devient de plus en plus les feuilles mortes malgré une signature tambour battant.

IBK veut jouer la carte de la diplomatie pour aider à la concrétisation des engagements pris par les protagonistes de la crise politico-sécuritaire du Nord-Mali. Y-parviendra-t-il ? Pour l’heure, il est difficile de parier sur les retombées du périple diplomatique du chef de l’Etat. Mais, il y a des constats qui se dégagent. Et non des moindres.

Même s’il ne l’admet pas volontiers, IBK semble perdu dans le jeu politique entourant cette crise du septentrion. Des intérêts divergents aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays se retrouvent dans un problème dont les causes n’ont rien à voir avec ce qui se passe aujourd’hui sur le terrain.

Le président de la République cherche désespérément une assise diplomatique certaine. Visiblement pris au dépourvu par la tactique diplomatique des rebelles, le tout avec la bénédiction de certains partenaires « hypocrites », IBK avait voulu rapidement rectifier le tir bien avant la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation.

C’est dans cette tentative que le président s’était mélangé les pinceaux, en faisant le tour de différentes capitales régionales, sans succès apparent. IBK veut renouer avec le même procédé, allant jusqu’à confirmer la thèse de ses détracteurs selon qui il passe plus de temps à l’étranger qu’au Mali, avec le résultat que l’on connaît. Le boss n’était pas à sa première visite officielle en Algérie et au Niger.

Bien que ces deux pays aient une forte colonie malienne et qu’ils peuvent jouer un rôle prépondérant dans la traque des jihadistes, leur contribution à la résolution de la crise malienne reste limitée.



Dilemme

IBK doit d’abord s’assumer chez lui au Mali avant de tendre la main à qui que ce soit. Si le locataire de Koulouba montre le chemin en prenant des décisions salutaires sur le Nord, les représentations diplomatiques maliennes le suivraient dans cette voie. Celles-ci pourraient relayer ses messages aux pays amis du Mali et lui aurait pleinement le temps de se concentrer sur l’évolution de la situation dans le septentrion.

Les habitants de la zone stratégique d’Anefis attendent un signal fort du chef de l’Etat. Pour l’heure, l’incertitude règne dans cette ville du Nord et personne ne sait de quoi demain sera fait. Entre une Mission de l’ONU (Minusma), globalement contestée, une Plateforme, déterminée, et des rebelles habituellement digressifs, IBK doit se montrer clairvoyant et tonitruant.

Avant de s’envoler pour l’Algérie et le Niger, le président de la République avait ordonné à la milice progouvernementale Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia) de quitter Anefis, sans garantie, sans aucune forme de procès.

Ce que celle-ci refuse en exigeant en premier lieu la protection des populations et le retour de l’armée malienne dans la localité. Une réaction justifiée par la ruse et les provocations récurrentes de la Coordination des mouvements armés (CMA). Les troupes de cette dernière union pillent, torturent et tuent de paisibles citoyens, sans que personne ne bronche.

Au contraire, la CMA, qui a baissé pavillon devant le Gatia à Anefis, se pose en victime et crie à la violation de l’accord pour la paix. Peut-on parler d’accord de paix quand il y a une volonté manifeste des séparatistes de ne pas désarmer et de ne pas rompre avec les jihadistes et les cercles mafieux de la drogue ?

Cette question est d’autant plus pertinente qu’elle est embarrassante pour la médiation internationale plutôt encline à faire pression sur les autorités maliennes qu’à faire entendre raison aux sécessionnistes.

Les messages d’indignation ne manquent pas au Mali face à la situation au Nord, particulièrement à Anefis. La classe politique se distingue spécialement par des dénonciations assez courageuses. Le week-end dernier, lors du 1er congrès ordinaire du Parti socialiste (PS/Yelen Kura), plusieurs leaders politiques ont appelé au sens de responsabilité des autorités.

Ils ne comprennent pas qu’un Etat puisse se plier au diktat de simples individus aidés par des forces étrangères. Dans un communiqué, le Cnas/Faso-Hère de l’ancien premier ministre Soumana Sacko s’est indigné de l’« extrême frilosité du président de la République et de son gouvernement ainsi que leurs atermoiements manifestes face à leur responsabilité constitutionnelle d’assurer la sécurité des personnes et des biens sur toute l’étendue du territoire national de même que la souveraineté et l’intégrité territoriale de la République du Mali ».

Ce parti de l’opposition invite le gouvernement à ne pas accepter « le chantage odieux orchestré par les parrains internationaux du MNLA contre les forces patriotiques fortement déterminées à neutraliser tous groupes armés hostiles à l’unité et à la concorde nationales ainsi qu’au caractère républicain, démocratique, laïc et unitaire de l’Etat malien, consacré par toutes les Constitutions du Mali depuis le 22 septembre 1960″.

Ogopémo Ouologuem
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Les Echos N° 3864 du 3/5/2012

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